À l'occasion de l'examen du projet de loi portant réforme des modes de scrutin locaux, le Gouvernement avait souhaité corriger les déséquilibres démographiques portant atteinte au principe constitutionnel d'égalité du suffrage pour l'élection des conseillers de Paris. Cette adaptation démographique, le Gouvernement l'avait faite en respectant à la lettre les principes posés par la loi relative à l'organisation administrative de Paris, Lyon et Marseille, dite « PLM », notamment en maintenant un minimum de trois conseillers de Paris par arrondissement. Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel, saisi par le groupe UMP, dans sa décision du 16 mai dernier.
Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette décision. En annulant le tableau de répartition des conseillers de Paris par arrondissement établi en 1982, le juge constitutionnel conforte le bien-fondé d'une modification de la répartition du nombre de ces conseillers par arrondissement, afin de prendre en compte les évolutions démographiques. En se prononçant contre le maintien de la règle d'une représentation minimale de trois conseillers par arrondissement, le juge constitutionnel a renforcé sa jurisprudence, de plus en plus stricte s'agissant du respect du principe d'égalité du suffrage. Les longs débats que nous avons eus sur les critères du prochain redécoupage cantonal montrent combien il serait vain d'ignorer ou de contourner une telle contrainte, devenue incontournable.
Le Conseil constitutionnel nous invite donc, s'agissant de Paris, à aller plus loin encore dans le respect des équilibres démographiques : tel est le sens de la proposition de loi déposée par notre président Jean-Jacques Urvoas. Elle vise à combler dans les meilleurs délais un vide juridique, puisqu'il n'existe plus, en droit, de tableau de répartition du nombre des conseillers de Paris par arrondissement ; pour ce faire, elle respecte pleinement, bien entendu, la nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel. Compte tenu de la proximité des futures élections municipales, qui se tiendront en mars prochain, nous souhaitons également modifier le moins possible un édifice électoral connu de tous les Parisiens, et dont le fonctionnement a fait ses preuves depuis plus de trente ans dans les trois principales villes de notre pays. C'est la raison pour laquelle nous ne proposons ni révolution du mode de scrutin, ni évolution du nombre total de membres du Conseil de Paris, ni modification de la sectorisation par arrondissement.
Ainsi, l'article 1er dispose que seuls six sièges sur cent soixante-trois feront l'objet d'une nouvelle répartition. Le 1er arrondissement perdra deux sièges, les 2e et 4e en perdront chacun un, de même que les 8e et 17e. Les 10e, 15e, 18e, 19e et 20e arrondissements se verront attribuer ces sièges. Les modifications sont cohérentes avec les évolutions démographiques opposées qu'ont connues ces arrondissements : le 4e a par exemple perdu 17 % de sa population, quand les 19e et 20e ont vu la leur croître de 14 %.
Le changement proposé est donc de portée limitée. Néanmoins, au regard de la jurisprudence constitutionnelle, il constitue un indispensable progrès. En effet, le nombre d'habitants par conseiller se situe, pour trois arrondissements, très loin des limites admises. De l'avis du Conseil constitutionnel, je le rappelle, ces limites ne doivent pas excéder 20 % de la moyenne constatée à Paris. La répartition proposée par le président Urvoas permet de réduire considérablement ces écarts, comme en témoignent les graphiques annexés à mon projet de rapport. Au regard du nombre d'habitants par élu et par arrondissement, l'ancienne répartition engendre des écarts à la moyenne allant de moins 15 % à plus 58 % ; la répartition proposée, elle, ramène ces écarts de moins 4,47 % à plus 25,7 %.
Chaque élu parisien représentera désormais un nombre d'habitants très proche, de sorte que les voix de tous les Parisiens auront, dès les prochaines élections municipales, à peu près le même poids, conformément au principe d'égalité devant le suffrage. Par la réattribution de six sièges seulement, nous nous rapprochons donc considérablement de l'idéal démocratique.
Il n'aura échappé à personne que le 1er arrondissement se trouve, dans cette répartition, légèrement sous-représenté puisque son unique élu représentera 17 308 électeurs, pour une moyenne de 13 766 habitants par élu dans l'ensemble de la capitale. Mais le principe d'égalité du suffrage se heurte ici aux mathématiques : si l'on attribuait un conseiller de Paris supplémentaire pour le 1er arrondissement, l'écart à la moyenne serait, non plus de plus 25 %, mais de moins 37 %. Cela supposerait en outre de retrancher un siège au 15e arrondissement, le dernier à avoir bénéficié de l'attribution d'un siège à la plus forte moyenne. Une telle solution n'est donc pas envisageable.
En conservant le nombre actuel de conseillers de Paris et la sectorisation par arrondissement, à laquelle les Parisiens sont très attachés, la répartition envisagée par le président Urvoas est la seule solution possible, et celle qui se rapproche le plus de nos obligations constitutionnelles. Pour nous en rapprocher davantage encore, il faudrait porter le nombre de conseillers de Paris à 207 au minimum ; or la proposition de loi ne créera qu'une dizaine de sièges de conseillers d'arrondissement.
L'autre solution eût été de regrouper certains arrondissements, ce qui aurait eu pour conséquence de les faire disparaître administrativement, faute de conseil d'arrondissement et de maire. La solution proposée est donc fondée sur le bon sens, la simplicité et l'équité.
La Commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.
Article 1er (Annexe tableau n° 2 au code électoral) : Modification du tableau des secteurs pour l'élection des membres du conseil de Paris
La Commission examine l'amendement CL 1 de M. Bernard Debré.