La séance est ouverte à 9 heures 45.
Présidence de M. Dominique Raimbourg, vice-président.
La Commission examine la suite du projet de loi organique interdisant le cumul des fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur (n° 885) et le projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen (n° 886) (M. Christophe Borgel, rapporteur).
Article 2 (art. L.O. 151 du code électoral) : Modalités de mise en oeuvre de l'incompatibilité entre mandat parlementaire et fonctions exécutives locales
La Commission est saisie de l'amendement CL 178 de M. Christophe Borgel, rapporteur.
Cet amendement vise à aligner les modalités de résolution de l'incompatibilité, déjà existante, entre mandat parlementaire et mandats locaux sur les modalités applicables aujourd'hui au cumul entre mandats locaux. En effet, lorsqu'un élu local est touché par l'interdiction d'exercer plus de deux mandats locaux, il doit démissionner d'un des mandats qu'il détenait antérieurement.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CL 24 du rapporteur.
Il s'agit d'un toilettage du code électoral.
La Commission adopte l'amendement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l'amendement CL 31 de M. Marc Dolez.
Puis elle est saisie des amendements identiques CL 155 de Mme Laurence Dumont et CL 177 du rapporteur.
Mon amendement vise à ce qu'un élu local exerce le dernier mandat pour lequel il s'est présenté et démissionne du mandat antérieur le plaçant dans une situation de cumul.
Avis favorable. Je retire mon amendement identique CL 177 au profit de celui de Mme Dumont.
L'amendement CL 177 est retiré.
La Commission adopte l'amendement CL 155.
Elle examine ensuite l'amendement CL 180 du rapporteur.
L'objet de cet amendement est de régler le cas – certes exceptionnel – où les deux élections se dérouleraient le même jour et où, par exemple, un député serait en même temps élu à la tête d'un exécutif local.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CL 23 du rapporteur.
Cet amendement tend à régler le cas, assurément marginal, où le député ayant remporté le même jour deux élections n'aurait pas démissionné de l'un des deux mandats dans le délai prévu de trente jours.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 2 modifié.
Article 2 bis (nouveau) (art. L.O. 136-3 du code électoral) : Clarification du droit applicable en cas d'élection à l'issue de manoeuvres frauduleuses.
La Commission est saisie de l'amendement CL 25 du rapporteur, portant article additionnel après l'article 2.
L'article L.O. 136-3 du code électoral mentionne à tort l'hypothèse de la démission d'office du mandat de parlementaire prononcée par le Conseil constitutionnel en cas de manoeuvre frauduleuse lors de l'élection. La démission d'office ne peut en effet intervenir en l'absence de recours contre l'élection. En cas de contestation de l'élection, la fraude est tout simplement sanctionnée par l'annulation du scrutin. L'amendement propose donc de corriger ce point.
La Commission adopte l'amendement.
Après l'article 2 bis.
Puis elle est saisie de l'amendement CL 156 de Mme Laurence Dumont.
Cet amendement tend à limiter la perception par un élu des indemnités de ses différents mandats pendant le délai de recours contre sa dernière élection.
Cet amendement, qui tend à éviter des recours s'apparentant à des manoeuvres, ne pose pas de problème sur le fond, mais sa rédaction devrait être revue. Je propose donc, madame Dumont, de le retirer pour le déposer à nouveau avant l'examen du texte en séance publique.
Je retire l'amendement.
L'amendement est CL 156 est retiré.
Article 3 (art. L.O. 176, L.O. 178, L.O. 319 et L.O. 322 du code électoral) : Extension du recours au suppléant en cas d'incompatibilités avec le mandat parlementaire
La Commission est saisie de deux amendements identiques, CL 112 de Mme Laurence Dumont et CL 150 de M. Roger-Gérard Schwartzenberg, tendant à supprimer l'article 3.
L'amendement CL 112 est retiré.
L'amendement CL 150 a pour objet de supprimer l'article 3, lequel modifie très profondément les règles de remplacement des parlementaires en prévoyant notamment qu'en cas de démission pour incompatibilité, ces derniers seront remplacés par leur suppléant, ce que ne prévoit pas l'article 25 de la Constitution. Un tel remplacement est contraire à la respiration démocratique, qui suppose notamment que des élections partielles puissent avoir lieu. Il y a là une certaine tromperie, car les électeurs n'ont pas été informés de ces dispositions lors de la dernière élection. Nous proposons donc que, pour le cas où cette loi, que nous condamnons, serait adoptée, les députés en situation d'incompatibilité démissionnent de leur mandat et que des élections partielles soient organisées.
Avis défavorable. Je présenterai tout à l'heure un amendement tendant à limiter aux nouvelles incompatibilités prévues par le projet de loi organique le remplacement d'un titulaire par son suppléant. Je suis cependant en désaccord avec l'idée de renoncer totalement à un tel remplacement.
Quant à la « tromperie » dont parle M. Tourret, je rappelle que l'entrée en vigueur du dispositif est prévue pour 2017, soit aux prochaines élections : les électeurs seront alors informés que le suppléant est susceptible de remplacer le titulaire si ce dernier est frappé par les incompatibilités prévues par le projet de loi.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CL 26 du rapporteur.
Cet amendement est la conséquence de l'amendement CL 25 précédemment adopté.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie des amendements CL 179 du rapporteur et CL 20 de M. Lionel Tardy, pouvant faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement CL 179 tend à limiter aux incompatibilités prévues par la loi organique le remplacement du député par son suppléant – en excluant donc, par exemple, les démissions pour convenance personnelle.
L'article 3 opère un véritable renversement de la règle de remplacement des élus par leur suppléant : jusqu'ici, l'élection partielle était la règle en cas d'interruption du mandat d'un élu, sauf cas précis où le suppléant était appelé à le remplacer. On passe progressivement à un mécanisme inverse, où le remplacement par le suppléant est de droit, sauf exceptions précisées dans la loi. Or, dans une élection au scrutin uninominal, les électeurs votent pour un candidat et seraient souvent bien en peine de donner le nom de son suppléant. Cette évolution, qui peut avoir des avantages en évitant des élections partielles, peut poser des problèmes d'acceptation par la population, qui reste très attachée au fait que, sauf cas de décès, le mandat soit exercé par la personne qu'elle a élue.
Avec le nouveau système mis en place par cette loi, le candidat élu démissionnera dès le lendemain de l'élection pour laisser la place à un suppléant qui n'aurait jamais été élu s'il avait été lui-même candidat. Les électeurs auront le sentiment légitime d'avoir été dupés. Les démissions pour convenance personnelle, motivées par d'autres raisons que par la mise en conformité avec la loi sur le cumul des mandats, doivent continuer à donner lieu à une élection partielle. Tel est le sens de mes amendements CL 20 et CL 22.
Le dispositif est le même pour les élections à la proportionnelle, où la démission du titulaire fait remonter d'une place le candidat suivant sur la liste. La règle morale est donc affirmée lorsque le scrutin est majoritaire, mais pas lorsqu'il est proportionnel !
Je partage l'avis de M. Tardy, mais l'amendement CL 20 ne couvre pas l'ensemble des cas d'incompatibilité. Je propose donc d'en rester à celui que je propose, qui restreint le remplacement par le suppléant aux seuls cas d'incompatibilités prévus par le projet de loi. Monsieur Devedjian, les amendements proposés me semblent un bon point d'équilibre.
Je retire l'amendement CL 20.
L'amendement CL 20 est retiré.
La Commission adopte l'amendement CL 179.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel CL 15 du rapporteur.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette alors l'amendement CL 22 de M. Lionel Tardy.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL 16 du rapporteur.
La Commission adopte l'article 3 modifié.
Article 3 bis (nouveau) (art. L. 2122-18, L. 3221-3, L. 4231-3 et L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales) : Interdiction des délégations de fonctions aux élus locaux exerçant un mandat parlementaire
La Commission est saisie de l'amendement CL 6 du rapporteur, portant article additionnel après l'article 3.
Afin d'empêcher que des délégations confiées à des parlementaires membres de l'organe délibérant d'une collectivité territoriale ne permettent de contourner les incompatibilités, cet amendement tend à limiter ces délégations au seul cas du maire agissant au nom de l'État, par exemple pour la célébration des mariages.
La Commission adopte l'amendement.
Article 3 ter (nouveau) : Applicabilité outre-mer de la loi organique.
Elle examine ensuite l'amendement CL 27 du rapporteur.
Cet amendement tend à préciser que la loi organique sera applicable sur l'ensemble du territoire de la République.
La Commission adopte l'amendement.
Après l'article 3 ter :
Puis elle examine l'amendement CL 148 de M. Hugues Fourage.
Nous avons longuement débattu de ce sujet hier et nous y reviendrons sans doute. Un amendement a du reste déjà été adopté sur cette question.
Je retire l'amendement.
L'amendement CL 148 est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CL 37 de M. Sergio Coronado et CL 146 de M. Hugues Fourage, l'amendement CL 162 de M. Jean-Luc Laurent et l'amendement CL 71 de M. René Dosière.
Nous convenons tous que le cumul ne s'explique pas par l'appât du gain et il n'est donc pas acceptable d'encourager le cumul des mandats en permettant le cumul des rémunérations. L'amendement CL 37 vise à mettre fin à cette dernière possibilité.
Les mandats de conseiller régional et de conseiller général sont en pratique les seuls qu'un parlementaire puisse cumuler en ayant droit à des indemnités cumulables avec l'indemnité parlementaire. Si nous interdisons ce cumul, le cumul des indemnités disparaît de fait. Si nous le permettons, je ne suis pas favorable à l'introduction d'une règle particulière.
Par ailleurs, le législateur a déjà plafonné le montant global des indemnités que peut percevoir un parlementaire à une fois et demie l'indemnité parlementaire. La question de savoir si ce plafond est trop élevé peut certes être débattue, mais elle ne devrait pas l'être au détour d'un amendement qui donne en outre le sentiment désagréable que la rémunération serait la clé du cumul des mandats.
L'article 1er du projet de loi organique, qui réduit considérablement les cumuls possibles en empêchant tout cumul avec des fonctions exécutives locales, traite en grande partie le problème des indemnités. Si ces amendements devaient être maintenus, j'émettrais donc un avis défavorable.
L'amendement CL 71 rend l'indemnité parlementaire exclusive de toute autre rémunération au titre de fonctions et mandats locaux. Il se justifie par des motifs d'égalité entre les parlementaires qui ne pourront plus exercer des fonctions exécutives locales, perdant de ce fait les indemnités afférentes, et les parlementaires qui pourront exercer des mandats locaux indemnisés, comme les conseillers régionaux et départementaux.
Je propose de remplacer la mallette remise aux députés en début de mandat par une robe de bure, un tas de cendres et un fouet leur permettant de se flageller pour se faire pardonner d'avoir été élus. Tout cela n'est pas sérieux !
Les Français ne savent pas que les rémunérations sont déjà écrêtées et pensent que nous cumulons les mandats pour cumuler les indemnités. Le sondage BVA auquel nous avons fait procéder révèle ainsi que 66 % de nos compatriotes pensent que le cumul des indemnités n'est pas limité. Il nous faut donc expliquer aux Français comment nous travaillons et leur faire savoir que les indemnités sont limitées. Ce travail de pédagogie est la priorité.
Ce débat introduit dans l'opinion publique un climat épouvantable autour de la situation des élus, et particulièrement des députés, lesquels concentrent inexplicablement tous les soupçons.
Si les indemnités étaient excessives et anormales, ce débat serait parfaitement légitime, compte tenu notamment de la situation de notre pays et des difficultés que connaissent nos concitoyens. Or, le cumul des rémunérations est strictement encadré à un niveau confortable, mais raisonnable au regard des responsabilités et de la charge de travail des députés. Ouvrir ce débat ne restaurera pas dans l'opinion publique l'image dégradée dont nous souffrons.
Le sondage auquel nous avons fait procéder délivre à cet égard des enseignements très intéressants. Les personnes sondées estiment par exemple que les élus, maires compris, ne devraient exercer aucune autre activité que leur mandat : par méconnaissance, l'opinion publique considère ainsi que le maire d'une commune de 300 habitants devrait limiter ses revenus aux quelques centaines d'euros de son indemnité. À ce jeu, on n'en fera jamais assez. Je vous invite donc à la prudence : alors que vous pensez restaurer le lien de confiance avec vos administrés, ce débat contribue à le dégrader.
L'amendement CL 162 tend à mettre fin au cumul des activités en faisant en sorte qu'un parlementaire exerçant plusieurs mandats ou fonctions ne touche que son indemnité parlementaire.
En cohérence avec cette position, l'amendement CL 163 tend à aligner avec le plafonnement actuel, soit une fois et demie le montant de l'indemnité parlementaire, le cumul de cette indemnité avec les revenus d'activités salariées privées.
La loi de 1992 a strictement encadré, au moyen de l'écrêtement, le cumul des indemnités. La semaine dernière, le débat sur le texte relatif à la transparence a introduit un dispositif imposant l'application de cette disposition.
J'adhère résolument à la position du rapporteur car, outre le fait que l'opinion – voire les médias – pourrait croire que nous ne prenons de telles mesures que parce que le cumul était jusqu'à présent débridé, l'amendement proposé est surprenant si l'on se souvient que nous n'avons guère été suivis sur la question du cumul des fonctions et des métiers. Concrètement, en effet, cela signifie qu'un député pourrait continuer à être avocat, chirurgien, vétérinaire, profession libérale, riche ou retraité, mais qu'il devrait être chevalier blanc s'il détient un mandat local. Je m'élève contre cette démagogie anti-suffrage universel.
Je salue la cohérence de M. Vaillant, qui avait déclaré qu'il aurait aimé voter les amendements proposés par le groupe écologiste, lors de l'examen des textes sur la transparence de la vie publique, pour limiter le cumul des rémunérations. Le refus du cumul des indemnités n'est pas une alternative ; c'est une question de principe. Il ne s'agit pas d'affirmer que les élus sont motivés par l'appât du gain, mais il faut donner un signal fort dans ce domaine.
Je suis défavorable à ces amendements.
Monsieur Valax, je vous suggère d'autant plus vivement de retirer votre amendement qu'il comporte une date d'entrée en vigueur incompatible avec celle retenue par le projet de loi organique.
Monsieur Laurent, je ne saisis pas la cohérence de vos propositions : vous souhaitez que les députés et sénateurs qui détiennent un autre mandat s'en tiennent à leur seule indemnité parlementaire, alors que vous avez déposé un amendement qui leur permettra de percevoir un revenu complémentaire – certes limité à la moitié de l'indemnité parlementaire – s'ils exercent une activité professionnelle. Pourquoi cette différence ? Si nous décidons de ne pas rendre les mandats incompatibles, il me semble plus simple que les élus concernés puissent bénéficier des indemnités correspondantes, dans les limites prévues par la loi.
Mon amendement CL 163 tient compte des débats qui se sont déroulés la semaine dernière dans l'hémicycle sur les textes relatifs à la transparence de la vie publique.
La Commission rejette les amendements identiques CL 37 et CL 146.
Elle rejette ensuite successivement les amendements CL 162 et CL 71.
Article 4 : Entrée en vigueur de la loi organique
La Commission examine les amendements identiques de suppression CL 50 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 57 de M. Guillaume Larrivé, CL 61 de M. Yannick Moreau, CL 75 de M. Daniel Fasquelle, CL 88 de M. Philippe Houillon, CL 105 M. Bernard Gérard et CL 144 M. Jean-Pierre Decool.
Si l'on souhaite que les parlementaires se consacrent entièrement à leur seul mandat, et si l'on considère qu'ils ne peuvent ni ne doivent en exercer un autre, il serait cohérent de leur interdire tout exercice professionnel parallèle !
Une telle réforme aurait dû être précédée d'une modification du statut de l'élu. Vous vous contentez de toucher à la partie immergée de l'iceberg ; ce n'est pas logique du tout ! Votre texte signe la disparition des députés de terrain. Au lieu de défendre les citoyens, les députés seront désormais au seul service des partis. Il s'agit d'un véritable bouleversement de la fonction du parlementaire : vous inversez les priorités et vous détruisez notre mission sacrée qui consiste à servir nos concitoyens.
Vous voulez créer des députés en apesanteur, hors sol, coupés de leur ancrage territorial. Résultats : ils seront issus d'accords entre les partis, et ce seront des apparatchiks, à l'image de M. Coronado !
On ne peut pas traiter du non-cumul des mandats sans tenir compte du contexte administratif et du statut global de l'élu. Tant que cette dernière question n'a pas été réglée, tant que le système français hypercentralisé n'a pas été réformé, il est absurde de fixer une date pour l'interdiction du cumul.
Monsieur le rapporteur, je réitère mes questions sur l'éventualité d'une diminution du nombre de députés et sur l'introduction d'une dose de proportionnelle.
Votre réforme déstabilisera les partis classiques de gouvernement ; elle transformera la nature de l'élection, et celle du rapport entre les députés et leurs concitoyens. Vous rompez le lien entre députés et territoires et, pis encore, celui entre députés et électeurs. Vous faites disparaître les députés de terrain, et la proximité qui caractérisait leur fonction. Vous avez certainement un plan global : nous vous demandons de nous le révéler. Quel nouveau régime voulez-vous mettre en place ?
Vous vous êtes inspirés des travaux de la commission Jospin qui préconise pourtant de commencer par réformer le statut de l'élu avant d'interdire le cumul des mandats. Vous avez mis la charrue avant les boeufs puisqu'aucun texte ne nous a été soumis sur le statut de l'élu ; c'est extrêmement dangereux ! De plus, vous avez toutes les chances d'obtenir un résultat inverse de celui que vous cherchez en matière de diversité et de représentativité : les travers que constituent la forte présence des fonctionnaires et celle des apparatchiks seront aggravés par votre réforme.
Je relève aussi un manque de réflexion globale sur le fonctionnement de nos institutions. La question des rapports entre les pouvoirs exécutif et législatif reste sans réponse. Quant à l'acte III de la décentralisation, il aurait fallu qu'il ait lieu avant de mettre en place le non-cumul des mandats.
J'appelle nos collègues à une certaine cohérence. Ceux qui exercent une activité professionnelle veulent mettre fin au cumul des mandats, mais ils ne sont pas d'accord quand on veut les empêcher de continuer à exercer leur métier ! Soit il faut interdire tout type de cumul, soit on accepte, comme je le souhaite, qu'un député ait une autre activité qui peut-être soit un mandat soit une activité professionnelle. Il n'est pas plus logique d'accepter le cumul du mandat de député avec celui de conseiller général ou régional, et de le refuser avec celui de maire d'une petite ou d'une moyenne commune.
Je note enfin que nous n'abordons le cumul des mandats que pour les parlementaires, pour lesquels il est déjà très encadré, mais que nous ne traitons pas de cette question et de celle des indemnités pour les élus locaux. Nous prenons décidément le sujet par le petit bout de la lorgnette. Tout devrait être mis à plat, et nous devrions prendre le temps d'une réflexion d'ensemble.
L'amendement CL 88 est de cohérence avec mon amendement visant à supprimer l'article 1er, qui n'a malheureusement pas été adopté hier soir.
Avis défavorable. Nos collègues de l'opposition qui s'opposent à ce projet de loi organique ont-ils conscience que la suppression de l'article 4 aurait pour seule conséquence de faire entrer ce texte en vigueur plus rapidement ?
Répéter tout au long du débat qu'il existe un « plan caché » ne rendra pas ce plan plus réel ! La majorité n'a pas la volonté de passer d'un scrutin par circonscription à un scrutin proportionnel. Il n'existe pas de promesse du président de la République en ce sens. Certes, un engagement a été pris pour l'introduction d'une dose de proportionnelle, mais la très grande majorité des parlementaires resteront élus lors de votes par circonscription.
De la même façon, répéter que la fin du cumul créera des « députés hors sol » ne suffit pas à en faire une vérité. Ce projet de loi organique interdit le cumul entre un mandat parlementaire et un mandat exécutif local ; il n'interdit pas aux députés ou aux sénateurs qui le souhaitent d'exercer un mandat local simple !
Vous nous présentez une série de réformes dans des textes successifs dont nous nous demandons s'ils relèvent d'un ordonnancement savant ou d'une accumulation improvisée.
Les députés hors sol feront joli comme une tomate hors sol, mais ils auront aussi peu de saveur ! (Sourires.) Cela desservira la démocratie !
Allez jusqu'au bout de votre logique : dites-nous de façon globale ce que vous préparez ! Vous nous vendez une réforme à la découpe. C'est très festif : vous proposez aux Français de jouer au puzzle ; vous leur donnez des éléments petit bout par petit bout, et c'est à eux de les assembler. Mais quelle allure cela aura-t-il au bout du compte ?
Je crains que la date de 2017 ne résulte que d'un nouveau compromis au sein de la majorité. Comme cela a été le cas sur la transparence, vous restez au milieu du gué. Vous préférez garder les pieds dans l'eau pendant que les Français sont au régime sec ! Votez donc les amendements de suppression – et l'amendement CL 38 de M. Sergio Coronado !
L'un de nos collègues a eu l'amabilité et la courtoisie de me traiter d'« apparatchik » : sur quoi fonde-t-il les différences qu'il établit entre des députés pourtant tous issus de l'élection ? Il est regrettable qu'au sein de notre Commission l'on puisse contester la légitimité des uns ou des autres. Le respect devrait être de mise entre nous ; je ne me suis jamais laissé aller à ce genre d'invectives.
Les écologistes ont déjà insisté sur le fait que le Gouvernement nous présente une série de textes sans cohérence, mais cet argument ne peut toutefois servir à s'opposer à toute avancée. De fait, monsieur Geoffroy, vous invitez surtout le Gouvernement à ne rien changer ! Pour notre part, nous ne nous arrêtons pas aux griefs légitimes que nous avons adressés à l'exécutif : nous déposons des amendements et nous voulons que les choses progressent, même si c'est petit à petit. Il est difficile de se réformer soi-même, disait Daniel Vaillant, il y a quelques jours ; alors autant encourager l'audace, même modeste, dont le Gouvernement a su faire preuve !
M. le rapporteur n'est pas naïf au point de ne pas avoir compris le sens des amendements de suppression.
Monsieur Coronado, sur la forme, je partage certaines de vos remarques. Il reste que le Gouvernement propose, tranche par tranche, des réformes sans cohérence qui sont illisibles pour le Parlement et pour les Français. Celles-ci constituent cependant, comme le disait hier M. Bernard Roman, « une nouvelle organisation de la République » – il parlait même d'une « conception nouvelle ». Un changement de Constitution se profile-t-il, ou ne modifions-nous qu'à la marge des modalités de gestion ? Pour ma part, je crois qu'une profonde modification institutionnelle s'opère sans avoir été annoncée. Pourtant, à ma connaissance, aucun engagement précis n'avait été pris en ce sens par le candidat élu à la présidence de la République. Par ailleurs, des arbitrages internes, dont nous ne maîtrisons pas les détails, ont lieu dans votre camp entre ceux qui sont partisans d'une VIe République et ceux qui y sont opposés. En tout état de cause, cette évolution réclame que nous dispositions tous d'un schéma d'ensemble qui nous permette d'y voir clair et de comprendre les enjeux des textes débattus.
L'entrée en vigueur immédiate du projet de loi organique provoquerait des changements immédiats pour les élus, je ne le conteste pas, mais, après tout, c'est bien l'objectif du texte. Si le peuple attend cette réforme avec une impatience sans pareil, si elle constitue l'ultime clé pour résoudre tous les problèmes institutionnels, si elle est d'une furieuse modernité comme vous le prétendez, il faut évidemment l'appliquer le plus rapidement possible. Si vous n'en décidez pas ainsi, c'est que cette réforme n'est pas vraiment ce que vous dites. Je ne comprends décidément pas que vous ne souhaitiez pas son application immédiate !
Pour combattre une réforme, certains se battent frontalement pied à pied, d'autres, s'inspirant de Lampedusa, s'ingénient à ce que tout change pour que rien ne change. On peut soit demander encore quelques secondes au bourreau soit se précipiter sous la guillotine !
Pour notre part, nous sommes favorables à la suppression de l'article 4, nous souhaitons que le nombre de mandats parlementaires successifs soit limité à trois – ce sera la « loi Le Roux » –, nous sommes partisans de l'âge limite de soixante-cinq ans et de l'application des règles de non-cumul aux suppléants. Nous voulons même aller plus loin et voir s'appliquer le principe d'égalité entre les parlementaires. Pourquoi les vice-présidents, les présidents ou les présidents de Commission toucheraient-ils des indemnités supérieures à celles des autres parlementaires alors qu'il n'est pas démontré qu'ils travaillent plus qu'eux ? Nous sommes partisans d'une égalité totale.
Dans leur programme, les candidats socialistes aux élections législatives s'engageaient à ce que les nouvelles règles de non-cumul s'appliquent au prochain renouvellement des mandats locaux, c'est-à-dire dès les élections municipales de mars 2014 et les élections régionales et départementales de 2015.
J'ai déposé un amendement CL 83 en ce sens qui répond à un engagement moral et à une réelle attente citoyenne. Le risque constitutionnel que nous avons déjà évoqué ne me paraît pas plus périlleux que le risque politique d'une application tardive.
Vous mettez décidément la charrue avant les boeufs. Notre Commission vient d'adopter un rapport d'information sur le statut de l'élu : un texte sur le sujet pourrait donc être inscrit à l'ordre du jour. Le projet de loi organique est un coup de communication qui vous permet d'affirmer que vous êtes contre le cumul !
Vous refusez d'appliquer cette réforme dès 2014 parce que certains élus de votre propre majorité ne respectent pas les engagements pris par le président de la République. Vous avez sans doute également peur de perdre votre majorité, vos effectifs s'effritant déjà au fil des législatives partielles.
Je n'ai toujours pas obtenu de réponse à ma question relative aux députés européens auxquels la réforme pourrait parfaitement s'appliquer dès 2014.
La Commission rejette les amendements de suppression.
Puis elle examine l'amendement CL 38 de M. Sergio Coronado.
Le parlementaire devrait être obligé de choisir entre ses différents mandats au terme du premier mandat échu, soit 2014 pour les mandats municipaux et 2015 pour les mandats régionaux et départementaux. La rédaction de cet amendement reprend celle de la loi relative aux incompatibilités entre mandats électoraux et fonctions électives datant de 2000.
Défavorable. La loi organique de 2000 fixait une entrée en vigueur à l'échéance du mandat parlementaire et non, comme l'affirme M. Molac, à l'échéance des autres mandats. La date d'entrée en vigueur fixée par le projet de loi organique est donc parfaitement cohérente.
Nous considérons à tort que la date des prochaines élections législatives est fixe. Je rappelle que l'inversion du calendrier est conjoncturelle. Il n'est écrit nulle part que les élections législatives se dérouleront toujours en juin, cinq ou six semaines après les élections présidentielles. Imaginons que le mandat de notre assemblée n'aille pas à son terme : la rédaction de l'article 4 repousserait l'application du projet de loi organique cinq ans après l'entrée en fonction de la nouvelle Assemblée !
Nous nous retrouverions dans une situation ubuesque !
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CL 83 de M. Jacques Valax.
M. Valax a déjà soutenu cet amendement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
La Commission examine l'amendement CL 78 de M. Daniel Fasquelle.
Cet amendement vise à permettre aux députés élus maires lors des élections municipales de 2014 de conserver leur mandat jusqu'à son terme, en 2020 : il y va du respect, non seulement des candidats, mais aussi des électeurs.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 4 sans modification.
La Commission adopte l'ensemble du projet de loi organique modifié.
La Commission en vient à l'examen, sur le rapport de M. Christophe Borgel, des articles du projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen (n° 886).
Article 1er (art. 6-3 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen) : Incompatibilité entre mandat parlementaire européen et fonctions exécutives locales
La Commission est saisie de deux amendements identiques, CL 5 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL 19 de M. Jean-Pierre Decool, tendant à la suppression de l'article.
Le groupe UMP a sur ce texte la même position de principe que sur le projet de loi organique.
Il y a quelques mois, le groupe SRC s'est opposé à une proposition de loi de députés radicaux qui tendait à instaurer une circonscription électorale unique pour les députés européens, au motif que ces derniers devaient conserver un enracinement local. Je m'étonne qu'il ne développe pas les mêmes arguments aujourd'hui. L'ancrage territorial des députés européens est assuré par la partition des circonscriptions comme par l'exercice concomitant d'un mandat exécutif local. Voilà pourquoi je souhaite la suppression de l'article 1er.
L'article 1er creuserait encore la fracture entre nos concitoyens et les députés européens que la nature de leurs fonctions peut déjà tenir éloignés des réalités du terrain.
Nous avons déjà eu ce débat : avis défavorable.
La Commission rejette ces amendements.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL 4 de M. Sergio Coronado.
Elle examine ensuite l'amendement CL 23 du rapporteur.
Cet amendement vise à tirer les conséquences de lois existantes s'agissant du seuil applicable aux conseilleurs municipaux et de la mention des futures assemblées de Guyane et de Martinique ; il substitue par ailleurs à la dénomination de « conseiller général » celle de « conseiller départemental ».
La Commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement CL 11 de Mme Catherine Coutelle tombe.
La Commission est saisie de l'amendement CL 25 du rapporteur.
L'amendement assure la cohérence du texte avec le projet de loi organique.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CL 29 du rapporteur.
Il s'agit, là encore, d'assurer la cohérence avec le projet de loi organique.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CL 9 de M. Jean-Frédéric Poisson.
Nous proposons qu'un député européen exerçant les fonctions de président ou de vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale ne puisse exercer aucune fonction exécutive dans la commune au titre de laquelle il siège dans cet établissement : l'argument est le même que pour les parlementaires nationaux.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte les amendements CL 27, CL 24 et CL 28 du rapporteur, tendant à assurer la cohérence avec le projet de loi organique.
Elle examine ensuite l'amendement CL 21 de Mme Laurence Dumont.
Cet amendement est de cohérence avec certaines dispositions du projet de loi organique concernant les parlementaires nationaux.
Ces dispositions n'ayant pas été adoptées, je vous invite à retirer votre amendement pour le réécrire d'ici à l'examen en séance.
Après l'article 1er
La Commission est saisie d'un amendement, CL 3 de M. Sergio Coronado, portant article additionnel après l'article 1er.
Cet amendement vise à abaisser le seuil d'écrêtement des élus à l'indemnité parlementaire : il n'est pas acceptable d'encourager le cumul des mandats locaux en permettant le cumul des rémunérations, dès lors que l'indemnité parlementaire est censée rémunérer correctement les élus.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Article 1er bis (nouveau) (art. 24 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen) : Coordination.
Puis elle adopte l'amendement de coordination CL 1 du rapporteur.
Article 2 (art. L. 46-2 du code électoral) : Abrogation de conséquence
La Commission examine deux amendements identiques, CL 6 de M. Jean Frédéric Poisson et CL 20 de M. Jean-Pierre Decool, tendant à la suppression de l'article.
Cet amendement est de cohérence avec l'amendement de suppression de l'article 1er.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces amendements.
Puis elle adopte l'article 2 sans modification.
Article 2 bis : Applicabilité outre-mer de la loi
La Commission est saisie d'un amendement CL 26 du rapporteur, portant article additionnel après l'article 2.
Il s'agit d'assurer une cohérence avec le projet de loi organique.
La Commission adopte l'amendement.
Article 3 : Entrée en vigueur de la loi
La Commission examine deux amendements identiques, CL 7 de M. Jean Frédéric Poisson et CL 18 de M. Jean-Pierre Decool, tendant à la suppression de l'article.
J'aimerais que le rapporteur réponde à ma question sur la date d'entrée en vigueur de la future loi.
J'ai déjà répondu à cette question lors de la discussion générale. Un dispositif unique a été retenu pour l'ensemble des parlementaires, qu'ils soient députés, sénateurs ou élus au Parlement européen : la loi s'appliquera à partir du premier renouvellement suivant le 31 mars 2017.
Avis défavorable aux amendements de suppression.
La Commission rejette ces amendements.
Puis elle examine l'amendement CL 2 de M. Sergio Coronado.
Nous souhaitons que l'interdiction de cumul des mandats s'applique, non à partir du premier renouvellement suivant le 31 mars 2017, soit en 2019 pour les députés européens, mais dès les élections qui suivront la promulgation de la loi.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 3 sans modification.
Elle adopte ensuite l'ensemble du projet de loi modifié.
La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à onze heures.
La Commission examine la proposition de loi de M. Jean-Jacques Urvoas relative à l'élection des conseillers de Paris (n° 1145) (M. Pascal Popelin, rapporteur).
À l'occasion de l'examen du projet de loi portant réforme des modes de scrutin locaux, le Gouvernement avait souhaité corriger les déséquilibres démographiques portant atteinte au principe constitutionnel d'égalité du suffrage pour l'élection des conseillers de Paris. Cette adaptation démographique, le Gouvernement l'avait faite en respectant à la lettre les principes posés par la loi relative à l'organisation administrative de Paris, Lyon et Marseille, dite « PLM », notamment en maintenant un minimum de trois conseillers de Paris par arrondissement. Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel, saisi par le groupe UMP, dans sa décision du 16 mai dernier.
Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette décision. En annulant le tableau de répartition des conseillers de Paris par arrondissement établi en 1982, le juge constitutionnel conforte le bien-fondé d'une modification de la répartition du nombre de ces conseillers par arrondissement, afin de prendre en compte les évolutions démographiques. En se prononçant contre le maintien de la règle d'une représentation minimale de trois conseillers par arrondissement, le juge constitutionnel a renforcé sa jurisprudence, de plus en plus stricte s'agissant du respect du principe d'égalité du suffrage. Les longs débats que nous avons eus sur les critères du prochain redécoupage cantonal montrent combien il serait vain d'ignorer ou de contourner une telle contrainte, devenue incontournable.
Le Conseil constitutionnel nous invite donc, s'agissant de Paris, à aller plus loin encore dans le respect des équilibres démographiques : tel est le sens de la proposition de loi déposée par notre président Jean-Jacques Urvoas. Elle vise à combler dans les meilleurs délais un vide juridique, puisqu'il n'existe plus, en droit, de tableau de répartition du nombre des conseillers de Paris par arrondissement ; pour ce faire, elle respecte pleinement, bien entendu, la nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel. Compte tenu de la proximité des futures élections municipales, qui se tiendront en mars prochain, nous souhaitons également modifier le moins possible un édifice électoral connu de tous les Parisiens, et dont le fonctionnement a fait ses preuves depuis plus de trente ans dans les trois principales villes de notre pays. C'est la raison pour laquelle nous ne proposons ni révolution du mode de scrutin, ni évolution du nombre total de membres du Conseil de Paris, ni modification de la sectorisation par arrondissement.
Ainsi, l'article 1er dispose que seuls six sièges sur cent soixante-trois feront l'objet d'une nouvelle répartition. Le 1er arrondissement perdra deux sièges, les 2e et 4e en perdront chacun un, de même que les 8e et 17e. Les 10e, 15e, 18e, 19e et 20e arrondissements se verront attribuer ces sièges. Les modifications sont cohérentes avec les évolutions démographiques opposées qu'ont connues ces arrondissements : le 4e a par exemple perdu 17 % de sa population, quand les 19e et 20e ont vu la leur croître de 14 %.
Le changement proposé est donc de portée limitée. Néanmoins, au regard de la jurisprudence constitutionnelle, il constitue un indispensable progrès. En effet, le nombre d'habitants par conseiller se situe, pour trois arrondissements, très loin des limites admises. De l'avis du Conseil constitutionnel, je le rappelle, ces limites ne doivent pas excéder 20 % de la moyenne constatée à Paris. La répartition proposée par le président Urvoas permet de réduire considérablement ces écarts, comme en témoignent les graphiques annexés à mon projet de rapport. Au regard du nombre d'habitants par élu et par arrondissement, l'ancienne répartition engendre des écarts à la moyenne allant de moins 15 % à plus 58 % ; la répartition proposée, elle, ramène ces écarts de moins 4,47 % à plus 25,7 %.
Chaque élu parisien représentera désormais un nombre d'habitants très proche, de sorte que les voix de tous les Parisiens auront, dès les prochaines élections municipales, à peu près le même poids, conformément au principe d'égalité devant le suffrage. Par la réattribution de six sièges seulement, nous nous rapprochons donc considérablement de l'idéal démocratique.
Il n'aura échappé à personne que le 1er arrondissement se trouve, dans cette répartition, légèrement sous-représenté puisque son unique élu représentera 17 308 électeurs, pour une moyenne de 13 766 habitants par élu dans l'ensemble de la capitale. Mais le principe d'égalité du suffrage se heurte ici aux mathématiques : si l'on attribuait un conseiller de Paris supplémentaire pour le 1er arrondissement, l'écart à la moyenne serait, non plus de plus 25 %, mais de moins 37 %. Cela supposerait en outre de retrancher un siège au 15e arrondissement, le dernier à avoir bénéficié de l'attribution d'un siège à la plus forte moyenne. Une telle solution n'est donc pas envisageable.
En conservant le nombre actuel de conseillers de Paris et la sectorisation par arrondissement, à laquelle les Parisiens sont très attachés, la répartition envisagée par le président Urvoas est la seule solution possible, et celle qui se rapproche le plus de nos obligations constitutionnelles. Pour nous en rapprocher davantage encore, il faudrait porter le nombre de conseillers de Paris à 207 au minimum ; or la proposition de loi ne créera qu'une dizaine de sièges de conseillers d'arrondissement.
L'autre solution eût été de regrouper certains arrondissements, ce qui aurait eu pour conséquence de les faire disparaître administrativement, faute de conseil d'arrondissement et de maire. La solution proposée est donc fondée sur le bon sens, la simplicité et l'équité.
La Commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.
Article 1er (Annexe tableau n° 2 au code électoral) : Modification du tableau des secteurs pour l'élection des membres du conseil de Paris
La Commission examine l'amendement CL 1 de M. Bernard Debré.
Le Gouvernement échoue dans tous les domaines, sauf dans le tripatouillage électoral. En la matière, c'est la première fois qu'il est pris la main dans le pot de confiture par le Conseil constitutionnel qui a jugé que « le rapport du nombre des conseillers de Paris à la population de l'arrondissement », tel que le prévoyait l'article 30 du projet de loi relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modifiant le calendrier électoral, « s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ». De fait, il s'agissait de diminuer le nombre de conseillers des arrondissements tenus par la droite pour augmenter celui des arrondissements tenus par la gauche.
Plutôt que de présenter son propre texte, le Gouvernement a utilisé la facilité qui consiste à passer par une proposition de loi du président de la commission des Lois. En tout état de cause, la majorité ne s'attendait sans doute pas à devoir réactualiser l'actuel tableau des conseillers de Paris.
Bien sûr, depuis 1982, Paris a connu des évolutions démographiques, et politiques. Les électeurs, par exemple, ne perçoivent plus les mairies d'arrondissement de la même façon qu'au moment de leur création. Reste que l'on se demande pourquoi les évolutions démographiques n'ont été prises en compte qu'une seule fois à Marseille, en 1987, et jamais à Lyon. Nous sommes logiquement amenés à penser que cette proposition de loi n'est motivée que par votre crainte de perdre la mairie de Paris, d'autant que vous n'avez sans doute pas choisi la meilleure candidate pour conduire vos listes…
La commission indépendante prévue par l'article 25 de la Constitution aurait pu être consultée, bien qu'elle soit d'abord compétente pour l'élection des députés et des sénateurs : nous y aurions gagné en objectivité. Surtout, la nouvelle répartition conduira, si l'on se réfère à la situation politique actuelle, à l'attribution automatique de trois à cinq sièges supplémentaires pour la gauche, petit matelas opportun au vu de résultats qui s'annoncent serrés. La manoeuvre est au demeurant la même que pour les élections sénatoriales et le futur redécoupage des circonscriptions des députés.
La nouvelle répartition est de surcroît promise à l'obsolescence. S'il est regrettable qu'aucune modification ne soit intervenue entre 1982 et 2013, il n'est pas moins regrettable que celle qui nous est proposée ne tienne aucun compte de projets d'urbanisme en cours comme celui de la zone d'aménagement concerté (ZAC) des Batignolles, où sont attendus 12 000 nouveaux habitants – soit presque l'équivalent d'un siège de conseiller – alors même que la population du 17e arrondissement est stable depuis trente ans, ou celui du site de l'ancien hôpital Laennec dans le 7e arrondissement.
La proposition de loi, enfin, aurait pu clarifier l'élection du maire de Paris. L'article L. 261 du code électoral dispose que « la commune forme une circonscription électorale unique » : seuls les membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille sont, par dérogation, élus par secteur. On pourrait dire, en caricaturant un peu, que le maire de Paris actuel n'a été élu que par 3 % des Parisiens, c'est-à-dire par 35 861 électeurs du 18e arrondissement. Dans cet arrondissement comme dans d'autres, pourtant, beaucoup d'électeurs auraient pourtant aimé voter directement pour Bertrand Delanoë, comme ils voudront voter pour Nathalie Kosciusko-Morizet. Le système actuel modifie le sens du résultat final – mais c'est évidemment ce que vous souhaitez. Quoi qu'il en soit, un système électoral identique à celui des autres communes françaises serait plus clair et plus logique. Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables à la proposition de loi.
Dans les années 80, des raisons électoralistes ont conduit à instaurer à Paris le même mode de scrutin qu'à Lyon et à Marseille. Ce fut une erreur, car ces trois villes ont des traditions politiques très différentes. Alors que des élus siégeaient déjà à Lyon et à Marseille autour de l'an 1000, Paris n'a jamais connu de tradition démocratique ; les pouvoirs du préfet de police, aujourd'hui encore, en témoignent. Ce déficit démocratique, que n'ont jamais comblé les maires élus dans les conditions que l'on vient de rappeler, tient aux pouvoirs du préfet de police – pourtant bien en peine d'assurer le maintien de l'ordre – et au poids d'une administration pléthorique, si on la compare par exemple à celle de Marseille. Issue de la tradition préfectorale, cette administration ne compte pas moins de 52 000 agents, face auxquels les élus, en dépit de leur bonne volonté, ne font guère le poids.
Nous suggérons en somme, par cet amendement, d'appliquer à Paris le système électoral démocratique de presque toutes les communes de France, tout en préservant le découpage par arrondissements. Le pouvoir des élus face à la mainmise administrative s'en trouverait renforcé. On ne peut se réclamer de la démocratie de proximité tout en défendant un système qui l'étouffe. L'amendement tire les conséquences de la lenteur des progrès démocratiques à Paris, en dépit des promesses et, sans doute, de la bonne volonté initiale de l'actuel maire de Paris. Il est temps d'opérer, au-delà de nos clivages partisans, un saut qualitatif en ce domaine, en permettant aux Parisiens de choisir directement leur tête de liste.
Très ancien, le système électoral parisien se caractérise par son extrême complexité. Au moment de la réélection de Bertrand Delanoë, les Parisiens interrogés affirmaient voter pour lui ; pourtant, on n'élit pas le maire de Paris en votant dans un arrondissement, et cette ambiguïté antidémocratique demeurera aux prochaines élections municipales. Non seulement les électeurs ne savent pas pour qui ils votent, mais ils se trompent également en pensant que les maires d'arrondissement détiennent tous les pouvoirs. On leurre donc les électeurs en les empêchant de voter pour la candidate à la mairie de Paris, et en leur faisant élire des maires d'arrondissement sans réel pouvoir.
Notre amendement reprend une proposition de loi que j'avais déposée en août 2007 ; à cette époque, en l'absence de raison constitutionnelle de modifier le mode de scrutin à Paris, elle n'a pas été retenue. Avec la loi du 17 avril 2013, le Parti socialiste a souhaité changer le nombre de conseillers de Paris, mais cette tentative grossière – on retirait des conseillers de Paris dans trois arrondissements de droite pour les transférer vers trois arrondissements de gauche – a heureusement été censurée par le Conseil constitutionnel. Les dispositions antérieures ayant elles aussi été déclarées contraires à la Constitution, Paris se retrouve face à un vide législatif.
Après avoir envisagé de fusionner les 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements – ce qui aurait bouleversé la ville –, vous avez finalement opté pour une mesure qui ne tient pas compte des futures évolutions démographiques des différents arrondissements. Comme l'a souligné Philippe Goujon, le 17e arrondissement comptera, dans les semaines et les mois à venir, au moins 12 000 électeurs supplémentaires ; et les autres arrondissements connaîtront également des modifications. En lieu et place d'une loi pérenne, capable de durer vingt ou trente ans, vous ne proposez donc qu'une mesure conjoncturelle qui favorise à nouveau la gauche. Nous avons peut-être agi de même lorsque nous étions au pouvoir, et vous l'aviez alors dénoncé avec force ; permettez-moi donc de dénoncer à mon tour votre attitude qui tranche avec les principes de morale et de transparence dont vous vous réclamez.
En 2008, Bertrand Delanoë a été élu par 35 861 électeurs du 18e arrondissement ; seuls 3 % de Parisiens ont donc directement voté pour une liste sur laquelle figurait son nom. Plus choquant encore : Bertrand Delanoë a remporté sa première élection tout en étant minoritaire en voix. Peut-on dès lors encore parler de démocratie ?
Il ne faudrait pas, dites-vous, changer les règles à un an de l'élection ; c'est pourtant ce que vous faites. Nous voulons, affirmez-vous, modifier la répartition des conseillers de Paris ; mais c'est le Conseil constitutionnel qui vous y oblige. En revanche, contrairement à ce que j'ai entendu dire, nous ne voulons pas supprimer les mairies d'arrondissement.
Les mesures que nous proposons cherchent à rendre la législation plus claire et plus démocratique : Paris doit devenir une commune, afin que le maire de Paris et son équipe de 163 conseillers – représentant peu ou prou les arrondissements – soient élus au suffrage direct. Les Parisiens pourront alors enfin voter pour leur maire, choisissant entre Nathalie Kosciusko-Morizet et Anne Hidalgo. Prétendre que ce mode de scrutin ne serait pas démocratique, c'est douter du caractère démocratique du suffrage universel. Une autre élection permettra d'élire les maires d'arrondissement et leurs équipes, dont les membres pourront d'ailleurs également appartenir à l'équipe du maire de Paris.
Votre proposition de loi contient une coquille révélatrice. L'exposé des motifs de l'article 2 évoque en effet « deux conseillers d'arrondissement » alors qu'il s'agit en fait de deux conseillers de Paris. Cela montre bien le caractère confus et antidémocratique du dispositif.
Notre amendement n'a aucun caractère partisan. Il pourrait en effet se révéler favorable à Nathalie Kosciusko-Morizet comme à Anne Hidalgo, puisque personne ne peut aujourd'hui prévoir le résultat d'un vote direct des Parisiens et des Parisiennes. Il représente simplement une avancée démocratique dont on peine à comprendre en quoi elle vous gêne.
Je souscris aux arguments développés par mes collègues, ainsi qu'à l'amendement proposé par Bernard Debré. Ce débat n'aurait pas dû avoir lieu, car il n'est jamais opportun de modifier les modes de scrutin à un an de l'élection. Le tripatouillage du tableau des conseillers de Paris auquel s'est livrée la majorité socialiste – qui n'a pas tardé à être annulé – nous a pourtant obligés à réagir.
Dans ce contexte, la seule solution consiste à adopter des dispositions inattaquables ; or une modification du tableau des conseillers de Paris, quelle qu'elle soit – les échanges viennent de le montrer –, peut prêter le flanc aux critiques. Il faut donc abandonner ce tableau pour choisir un mode de scrutin au principe indiscutable, qui permette d'éviter ces mauvais débats.
Le mode de scrutin actuellement en vigueur est fondé sur la méfiance à l'égard du peuple de Paris. Pendant longtemps, le pouvoir central a refusé à la capitale le droit de disposer d'un maire ; pis, en dépit de l'insurrection et de l'attitude remarquable du peuple de Paris, cette institution n'a pas été rétablie à la Libération. Dans les années 70, on a enfin permis à l'ensemble des Parisiens d'élire un maire de Paris, mais le pouvoir central, avec la loi PLM, a très vite confisqué cette légitimité naturelle dont jouissent tous les autres maires de France.
Aujourd'hui, ces dispositions n'ont plus de sens, sauf à avoir peur du suffrage universel – que certains sont, il est vrai, allés jusqu'à qualifier de ringard. Pour notre part, nous voyons dans le suffrage universel un gage de transparence, de clarté et de modernité. Alors que nous sommes obligés de discuter d'une loi électorale à moins d'un an d'une élection, nous le tenons pour seul choix possible.
Revenons à la proposition de loi. Même si l'on peut le regretter, la loi PLM précise que, contrairement aux autres communes, le nombre de conseillers de Paris par arrondissement doit être adapté à l'évolution démographique par une loi. Jamais entreprise depuis, cette adaptation n'est pas pour autant illégitime. Le Conseil constitutionnel l'a d'ailleurs confirmé en censurant non seulement la disposition prévue par la loi actuelle, mais également celle de 1982, qui n'avait pas permis la prise en compte des évolutions démographiques. Le Conseil constitutionnel aurait pu censurer le tableau actuel des conseillers de Paris à l'occasion de n'importe quelle question prioritaire de constitutionnalité (QPC) ; il apparaît donc raisonnable de légiférer pour s'adapter à sa décision.
La proposition de loi initiale n'avantageait personne en particulier, car nul ne connaît par avance le résultat d'un vote. Dans le 20e arrondissement – qui ne compte aujourd'hui aucun élu de l'opposition –, le conseiller supplémentaire aurait pu être l'un des vôtres. La nouvelle proposition de loi de Jean-Jacques Urvoas, rapportée par Pascal Popelin, propose un bon équilibre : elle respecte la demande du Conseil constitutionnel sans bouleverser le mode de scrutin – contrairement à l'amendement de Bernard Debré. Équitable, le dispositif proposé réalise tout ce qui pouvait être fait sans augmenter le nombre de conseillers de Paris. Renonçant à une telle augmentation – que vous rejetteriez d'ailleurs au nom de l'économie budgétaire –, nous proposons de garder les 163 conseillers de Paris, tout en procédant à quelques changements à la marge dont personne ne peut dire qui ils avantageront.
Le nouveau tableau permettra en revanche de respecter l'évolution démographique. Pourquoi des arrondissements qui perdent des habitants garderaient-ils le même nombre de conseillers de Paris et d'arrondissement ? Pourquoi ceux dont la démographie progresse – comme le 18e qui, depuis ma victoire face à Jean-Louis Debré en 1995, a gagné 20 000 habitants – ne le verraient-ils pas augmenter ? Cette évolution – désormais prise en compte dans la nouvelle proposition de loi – m'apparaît à la fois raisonnable et inattaquable.
À l'inverse, monsieur Debré, votre proposition d'opération chirurgicale est loin de présenter ce caractère. Pas un maire de France n'est élu au suffrage universel direct. De surcroît, le maire de Paris occupe également la fonction de président du conseil général. On ne peut pas devenir conseiller de Paris si l'on n'est pas élu conseiller d'arrondissement, et cette relation entre les arrondissements et le conseil de Paris me semble bénéfique. La loi PLM a d'ailleurs permis de progressivement révéler l'identité d'arrondissements – tout comme à Lyon et à Marseille. En 1995, six arrondissements sont passés à gauche et le maire de Paris de l'époque, M. Tiberi, a éprouvé quelques difficultés à s'adapter à cette nouvelle cohabitation. Aujourd'hui, le maire de Paris est élu par l'assemblée qu'il préside, et ce mode d'élection me paraît pleinement satisfaisant. Le fait d'être élus au suffrage indirect ne rend pas les présidents du Sénat ou de l'Assemblée nationale moins légitimes que s'ils avaient été directement désignés par les électeurs. Créer une césure entre l'arrondissement et l'échelon parisien constituerait une grave erreur.
Enfin, quel qu'il soit, un maire de Paris élu au suffrage universel direct présenterait un caractère dangereux. Je n'adhère pas à votre vision bonapartiste de la société et de la République.
Nous le dirons aux Parisiens ! L'élection du maire de Paris au suffrage universel vous fait peur !
Les Parisiens restent attachés au vote dans l'arrondissement et à la représentation au conseil de Paris ; ils n'accepteront pas de vider les arrondissements de leur substance, comme vous proposez de le faire. L'équilibre entre les arrondissements et l'échelon parisien leur convient parfaitement, et il ne faudrait pas le détruire. Cette proposition de loi permet de conserver les arrondissements intacts, tout en assurant la diversité au sein de chacun d'entre eux. Voilà pourquoi je voterai sans réserve pour la proposition de loi et contre l'amendement ubuesque de l'opposition.
Contrairement à ce que l'ambiguïté de vos propos a pu laisser entendre, chers collègues de l'opposition, le Conseil constitutionnel n'a jamais exigé la suppression du vote par arrondissement. Il a en revanche rejeté le nombre minimal de trois conseillers de Paris par arrondissement, qu'il avait pourtant validé en 1982. Vous voilà pris à votre propre piège, puisque le Conseil constitutionnel demande désormais que l'on aille au bout de la réforme en adaptant le nombre de conseillers de Paris par arrondissement en fonction de l'évolution démographique.
Et vous profitez de l'occasion pour déposer un amendement qui avait déjà fait l'objet d'une proposition de loi en 2007, à la veille du scrutin municipal de 2008. Est-ce la proximité des scrutins qui vous fait agir ? Pourquoi n'avoir pas davantage défendu cette mesure depuis 2007 alors que vous disposiez de la majorité au Parlement ? Vous nous accusez aujourd'hui de « tripatouillage » électoral, tandis que nous voulons simplement tenir compte de l'évolution du nombre d'habitants par arrondissement.
Enfin, vous avez raison, monsieur Goujon, d'affirmer qu'avec la ZAC Cardinet-Batignolles, le 17e arrondissement accueillera entre 10 000 et 12 000 nouveaux habitants – ce phénomène concerne aussi 18e et 19e arrondissements où des terrains importants sont en cours d'aménagement. Mais lorsque j'avais fait valoir un tel argument en 2010 à propos du redécoupage électoral des circonscriptions parisiennes, dont trois ont été supprimées pour aboutir aux dix-huit circonscriptions actuelles, vous l'aviez alors écarté et il a fallu que le Conseil d'État s'en mêle ! C'est l'ironie de l'histoire ! C'est la deuxième fois que vous marchez sur le rateau : sinon, Mme de Panafieu serait aujourd'hui assise à vos côtés.
Enfin, je n'ai absolument jamais entendu dire que le maire de Paris – l'actuel ou ses prédécesseurs – ait été élu par effraction. Les Parisiens ont toujours eu le sentiment, en votant dans leur arrondissement, de participer à une élection démocratique.
Vos arguments d'aujourd'hui me paraissent donc superficiels. Vous vous plaignez de notre prétendue volonté de changer le mode de scrutin à un an des élections – alors que nous nous contentons d'un rééquilibrage entre arrondissements – mais vous ressortez, bien tardivement, une vieille proposition de loi pour proposer l'élection du maire au suffrage direct ! Cela n'a aucun sens.
J'ai déposé cette proposition de loi en août 2007, mais l'occasion de l'inscrire à l'ordre du jour ne s'est pas présentée : aujourd'hui, grâce à la décision du Conseil constitutionnel, il y en a une !
Quand les Français votent aux élections municipales, ils votent pour un maire et son équipe ; ils savent pour qui ils votent. À Paris, ce n'est pas le cas : on votera non pas pour Mme Hidalgo ou pour Mme Kosciusko-Morizet, mais pour des conseillers d'arrondissement.
Ce que nous vous proposons est une avancée démocratique, et j'aime les avancées démocratiques : j'ai été élevé dans le respect de la République.
Je donne un avis défavorable à cet amendement CL 1. Le système des éléments de langage fonctionne à plein : quand on parle de transparence, vous pilonnez l'argument Cahuzac ; quand on parle d'élections, vous ne parlez plus que de tripatouillage ! En l'occurrence, respecter le principe constitutionnel d'égalité du suffrage, ce serait du tripatouillage !
Monsieur Goujon, vous avez parlé de « fiasco constitutionnel » : c'est l'hôpital qui se moque de la charité… Faut-il vous rappeler que, sous la précédente législature, le tableau des conseillers territoriaux a été censuré à deux reprises ?
L'amendement CL 1 n'en est vraiment pas un : c'est un contre-projet, d'ailleurs parfaitement respectable comme tel. Mais il vise à « changer radicalement » – ce sont les termes de l'exposé sommaire – les règles du jeu, à un an des élections, ce qui n'est pas la tradition républicaine.
Vous proférez au passage des contrevérités manifestes : les Parisiens choisiraient directement leur maire, dites-vous. Mais, dans toutes les villes de France, on élit des conseillers municipaux, qui à leur tour élisent un maire, et juridiquement, ce n'est pas forcément la tête de liste. Il arrive que le maire élu ne soit pas la tête de liste. Allez-vous nous faire croire que les Parisiens n'auront pas compris qui sont les candidates, ou les candidats, à la mairie ? C'est une élection qui est médiatisée ! Ce sont là des propos de circonstance : vous essayez de faire croire aux citoyens quelque chose qui ne correspond pas à la réalité.
Vous dites pis que pendre du scrutin actuel, mais, pour que votre démarche soit cohérente, votre proposition de loi devrait concerner aussi Lyon et Marseille.
En outre, vous proposez deux votes, l'un pour les conseillers de Paris, l'autre pour les conseillers d'arrondissement. Mais par cette déconnexion, vous affaiblissez la démocratie de proximité !
Enfin, si vous tenez tant à ce système, pourquoi ne pas avoir inscrit cette proposition de loi à l'ordre du jour en 2007 ? Vous n'étiez pas obligés d'attendre une décision du Conseil constitutionnel !
Monsieur le rapporteur, vous n'êtes visiblement pas familier du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille : les situations ne sont pas comparables.
Pourquoi ne pas voter directement pour le maire de Paris ? Ce serait plus clair ; cela permettrait en outre aux électeurs qui le désireraient de voter pour M. Vaillant comme maire d'arrondissement, et pour Mme Kosciusko-Morizet comme maire de Paris !
Notre proposition vise simplement à faire de la commune de Paris une circonscription unique. Nous n'avons jamais dit qu'il s'agissait d'élire directement le maire ! Sur le plan démocratique, les conseillers de Paris auraient ainsi plus de pouvoir.
Vous supprimez le seuil minimal de trois conseillers de Paris par arrondissement, pour des raisons démographiques et pour tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel, mais, pour les conseillers d'arrondissement, vous maintenez un seuil minimal. Je ne mets pas en cause cette évolution, mais c'est une incohérence supplémentaire.
La Commission rejette l'amendement CL 1.
Puis elle adopte l'article 1er sans modification.
Article 2 (Art. L. 2511-25 du code général des collectivités territoriales) : Élection du maire d'arrondissement et de ses adjoints
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement de coordination CL 2 de M. Bernard Debré.
Puis elle adopte l'article 2 sans modification.
Article 3 : Entrée en vigueur de la loi à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux
La Commission adopte l'article 3 sans modification.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi sans modification.
La séance est levée à douze heures cinq.