Puis, le texte sur la modernisation de l'action publique territoriale. Ce n'est pas parce que le bateau gouvernemental sombre que le travail parlementaire doit en pâtir. Aussi, j'essaierai de m'en tenir au temps qui m'est imparti.
Qui d'entre nous, au quotidien en relation avec ses concitoyens, n'a pas été saisi d'un problème de consommation ? L'évolution des nouvelles technologies et les moyens de communication numérique rendent également indispensables une nouvelle législation. Vous l'avez d'ailleurs pris en compte dans votre projet.
Qui d'entre nous ne ressent pas la nécessité de faire évoluer notre code de la consommation, vieux de vingt ans, face à des pratiques qui n'ont cessé d'évoluer, face à une nouvelle législation européenne ?
Ce constat avait déjà été fait par le précédent gouvernement. Notre nouveau collègue, Frédéric Lefebvre avait initié un processus de toilettage du code de la consommation, processus qui n'a pas été jusqu'à son terme en raison, comme vous le savez, d'un changement de majorité.
Ce travail doit être avant tout inspiré par une meilleure protection des consommateurs mais, également, par la prise en compte de l'ensemble des acteurs économiques.
Voilà peut-être enfin un sujet qui pourrait nous rassembler pour le bienfait de nos concitoyens. Après tout, au-delà de nos différences politiques, nous sommes tous des consommateurs. Mais votre projet, s'il présente quelques avancées, comporte aussi des imperfections patentes, des divisions manifestes, des réductions de droit.
Mon souhait n'est pas de polémiquer à tout prix. Je suis seulement guidé par la recherche d'une juste égalité entre les consommateurs et d'une meilleure justice sociale entre les entreprises, et animé par la volonté de réconcilier consommateurs d'un côté et sociétés commerciales de l'autre. Pour illustrer mon propos, je citerai quelques exemples.
Le premier porte sur les ventes « hors établissement » appelé plus communément le démarchage à domicile. Désormais, à l'inverse de ce qui était admis, le professionnel prestataire de service pourra commencer à s'exécuter avant l'écoulement du délai de réflexion. Une telle exécution empêchera dans les faits le consommateur de revenir sur sa décision. De même, le professionnel se hâtera de s'exécuter avant la fin du délai de réflexion rendant ainsi impossible le droit à rétractation du consommateur. Désormais également, un paiement immédiat pourra aussi être autorisé dans le cas de ventes au domicile du professionnel ou du consommateur lors de réunions organisées.
Au passage, vous contribuez ainsi au développement des sociétés organisatrices de ventes privées. Elles auront moins de contraintes, à la fois vis-à-vis de leurs employés occasionnels, mais aussi à l'égard de la législation jusqu'alors protectrice des consommateurs.
À la précarisation sociale, vous ajoutez une diminution des droits des consommateurs. De même, les foires et les salons seront désormais exclus des ventes « hors établissement » alors que, jusqu'à présent, la jurisprudence permettait de leur étendre la loi sur le démarchage à domicile.
Le second exemple concerne la mesure à mon sens la plus symbolique de votre projet et porte sur les actions de groupe.
Dans un contexte économique difficile, alors que votre Gouvernement n'a cessé depuis un an d'assaillir les entreprises de charges et contraintes nouvelles, je crains que l'action de groupe n'apparaisse comme un risque supplémentaire pour les entreprises, comme la goutte d'eau qui fait déborder le vase !
Pour ma part, je veux retenir une proposition régulièrement évoquée depuis plus de trente ans. Remise au goût du jour par le Président Jacques Chirac dans son discours de voeux en 2005, cette idée est revenue depuis régulièrement dans les rapports Chatel ou Novelli.
Il existe en effet un problème d'équilibre entre, d'un côté, des professionnels indélicats et, de l'autre, des consommateurs qui n'osent pas, souvent pour des raisons de coûts et de complexité de procédure, demander réparation de leur préjudice.
Notre rôle est d'assurer une meilleure protection des consommateurs face à des entreprises qui abuseraient d'eux et ne respecteraient pas leurs droits. Après tout, l'entreprise elle-même devrait s'en trouver renforcée en crédibilité et en force de vente. Car ce ne sont pas les entreprises respectueuses du consommateur qui sont visées. Ce sont celles qui fraudent et qui réalisent des profits au mépris des règles protectrices des consommateurs. Ce sont celles également qui exercent une concurrence déloyale vis-à-vis des autres professionnels. Cette action, si elle est bien encadrée, ne sera pas nuisible aux professionnels, bien au contraire.
Cependant, si nous pouvons admettre ce principe de l'action de groupe, principe, je le rappelle, imposé par la réglementation européenne, les mesures préconisées dans votre projet, monsieur le ministre, ne peuvent qu'interpeller.
Pourquoi limiter cette action aux préjudices matériels ? Hier, vous avez annoncé son extension aux problèmes de santé. Aujourd'hui, aux problèmes d'environnement. C'est bien la preuve que le débat parlementaire fait évoluer le texte et ne doit pas être négligé.
Pourquoi créer ainsi une rente, car c'est bien cela qu'il s'agit, aux associations de consommateurs nationales et, in fine, vous le verrez monsieur le ministre, à une seule association !
Pourquoi créer des compétences de tribunaux alors que nous savons tous ici que les moyens ne leur seront pas donnés ?
Que deviendront les actions individuelles dès lors qu'une action de groupe sera lancée ?
Qu'en est-il, enfin, des garanties données aux entreprises quant à la publicité d'une telle action alors que nous savons que certaines associations diffusent largement leurs actions judiciaires avant même qu'un juge ne se prononce ?
Je crains que votre projet ne divise et n'apporte que des interrogations sans pour autant améliorer le droit des consommateurs et la quiétude des entreprises.