Intervention de Sandrine Doucet

Réunion du 26 juin 2013 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Doucet, rapporteure :

Pour que les jeunes des filières technologiques et professionnelles – BTS, IUT… –, partent dans le cadre du programme Erasmus, des personnels devront être spécifiquement formés à l'accompagnement qui devra leur être apporté. Prenons exemple sur des institutions pionnières qui ont mis en place des dispositifs ayant fait leurs preuves. Ainsi, pour les Compagnons du devoir, la mobilité est une tradition séculaire. Les jeunes compagnons, qui partent pour un an, sont soigneusement préparés à ce départ, puis de nouveau très encadrés à leur retour. Les maisons familiales rurales, qui accueillent elles aussi des publics en difficulté, ont de même été pionnières en ce domaine. L'investissement du personnel y est primordial.

Si nous préconisons l'extension du programme aux étudiants des filières technologiques et professionnelles, c'est aussi que les moyens sont là. Des crédits sont en effet prévus pour soutenir toutes les politiques d'amélioration et de convergence des systèmes éducatifs.

En ce qui concerne les prêts, il y a deux écoles en Europe. Certains pays y seraient plutôt défavorables au motif qu'il ne faut pas favoriser l'endettement des étudiants – n'oublions pas que l'Europe connaît actuellement la crise économique et que les familles, qui n'ont jamais autant dépensé pour l'éducation de leurs enfants, peuvent se retrouver dans des situations très difficiles. La position de la France est que le mécanisme de garantie des prêts doit demeurer expérimental et son enveloppe être limitée à 2 % du budget global du programme. Ce n'est pas l'Union européenne qui prêtera directement aux étudiants : un appel sera lancé auprès de banques afin qu'elles accordent des prêts, dont les taux auront été négociés au plus bas et dont la garantie sera assurée par l'Union. Les jeunes seront donc bien responsabilisés vis-à-vis des banques prêteuses. Certains pays défendaient l'idée que l'enveloppe prévue pour ce mécanisme de garantie puisse atteindre 4,6 % du budget global du programme. La Commission défend aujourd'hui une position médiane, à 3 % ou 3,5 %.

Lorsqu'on parle dans ce contexte d'étudiants boursiers, il s'agit des étudiants bénéficiant d'une bourse Erasmus, pas de ceux qui touchent une bourse de l'État. Jusqu'à présent, les bourses Erasmus étaient allouées à des étudiants en BTS ou en troisième année de licence. Les étudiants en master n'y étaient pas éligibles. Le prêt sera demain une solution pour qu'ils puissent eux aussi bénéficier de cette mobilité.

Les critères socio-économiques sont pris en compte de façon très hétérogène au niveau européen mais aussi au niveau national en France. Toutes les régions ne soutiennent pas de la même façon les étudiants partant dans le cadre d'Erasmus, ce qui est source d'inégalités. En général, les classes moyennes sont toujours éligibles aux aides forfaitaires accordées par les collectivités, et elles le resteront. Ce que nous voudrions, c'est que l'aide ne soit plus accordée, comme le plus souvent, forfaitairement, mais modulée en fonction de critères socio-économiques pour les plus défavorisés. Pour les étudiants en BTS, la mobilité est de deux mois, et la bourse ne s'élève qu'à 360 euros par mois. C'est souvent très insuffisant et des jeunes renoncent à partir. Une aide plus modulée serait une solution.

S'agissant de la mobilité en général, nous nous sommes aperçus au fil de nos auditions que la crise économique n'était pas neutre dans les motivations des jeunes à partir dans le cadre du programme Erasmus. Être allé étudier dans un autre pays européen est désormais considéré davantage comme un atout supplémentaire sur un CV que comme une opportunité de découverte d'un autre système éducatif et de partage d'une autre culture. Mais nous avons également remarqué que de jeunes Espagnols, ne pouvant plus passer les concours de l'enseignement public dans leur pays parce que les postes offerts ont été gelés, partent ainsi momentanément à l'étranger. Ainsi en a-t-on vu devenir dans le cadre du programme Comenius, assistants dans une maison familiale et rurale en attendant de rentrer passer un concours en Espagne.

En sus de la crise économique, la crise démographique aussi aura une incidence sur les mobilités. L'Europe vieillit. Elle compte de moins en moins de jeunes, et la crise accentue les inégalités de formation. L'Allemagne, qui connaît un creux démographique, cherche actuellement à attirer des apprenants, notamment des apprentis, dans ses centres de formation. Et on observe une certaine porosité entre des dispositifs comme Erasmus et d'autres qui relèvent du Fonds social européen, concernant notamment l'aide à l'emploi. Le problème plus général de la mobilité des cerveaux et des jeunes travailleurs au sein de l'Union européenne dépasse le cadre d'Erasmus.

Un mot de la dénomination « Erasmus pour tous ». J'ai bien pris note de vos remarques, madame Genevard. Le débat n'est pas clos car la dénomination est encore en discussion. Nous tenions beaucoup à ce que le nom Erasmus demeure, et ce sera le cas. C'est « pour tous » qui est en débat.

Enfin, soyez tous rassurés, le financement des politiques de coordination entre États membres permettra de faire davantage de publicité autour d'Erasmus.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion