Intervention de Nicolas Fournier

Réunion du 23 mai 2013 à 10h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Nicolas Fournier, ingénieur en chef de l'armement, attaché d'armement près l'ambassade de France à Londres :

S'agissant des « drones », en anglais unmanned aerial systems, les Anglais soulignent, à l'intention de leur opinion publique, que ces matériels, même s'ils n'ont pas d'équipage, sont bien contrôlés par des humains. Il est donc important de ne pas parler d'autonomie de décision ou de décision prise par ordinateur.

Dans le cadre de Lancaster House, nous coopérons à trois catégories de drones aériens.

Premièrement, les drones tactiques qui sont mis en oeuvre par les armées de terre. Héritiers des systèmes d'observation de l'artillerie, ils ont vocation à fournir des informations tactiques avec des senseurs optiques ou des radars à imagerie. Il s'agit aujourd'hui de choisir le matériel qui succédera au système français de drone tactique intérimaire (SDTI) français. Un des candidats les plus solides arrive au bon moment : le Watchkeeper qui va être mis en service dans l'armée de terre britannique. Il vole relativement bas, mais il exige des pistes au décollage et à l'atterrissage, alors que notre système utilise des catapultes et des parachutes.

Après les études préliminaires, nous avons signé avec les Britanniques un accord portant sur une expérimentation par la France, qui est en cours à Istres. Nous étudions, pour le plus grand bénéfice des deux partenaires, les finitions à apporter même si la France n'a pas encore pris sa décision.

Deuxièmement, les drones MALE. Il s'agit d'un matériel plus gros, qui vole plus haut et beaucoup plus longtemps. Nous nous servons aujourd'hui du système Harfang qui avait été choisi dès le début comme une solution intérimaire. Depuis une quinzaine d'années, un dilemme nous somme de choisir entre un achat sur étagère et un développement spécifique. Sur les étagères, on trouve du matériel israélien et du matériel américain. La première feuille de route de mise en oeuvre des traités de Lancaster House incitait fortement à développer une solution conjointe, dont la première phase intérimaire consistait à prendre une plate-forme israélienne et la seconde à se lancer dans le développement d'une solution franco-britannique. Elle a été mise en suspens l'été dernier. Depuis, nous envisageons plutôt d'acheter à court terme le drone américain Reaper. C'est une inflexion par rapport aux directives données en matière de coopération franco-britannique. Mais elle n'est pas compromise pour autant dans la mesure où les Britanniques ont, pour des raisons tenant à l'urgence opérationnelle, fait le même choix en 2007. Comme ils envisagent eux-mêmes de le pérenniser après la fermeture du théâtre afghan, ils sont très intéressés par une coopération franco-britannique, élargie – pourquoi pas ? – à d'autres pays européens, qui ressemblerait à un club d'utilisateurs de ce matériel acheté sur étagère aux États-Unis.

Par ailleurs, ils sont aussi intéressés par les évolutions à la marge au Reaper, qui, tel quel, ne peut pas obtenir un certificat de navigabilité dans l'espace aérien européen. Or elles pourraient coûter fort cher et il faut prendre des précautions. On l'a vu encore récemment, l'Allemagne a dû renoncer à obtenir ce certificat pour des drones HALE, volant à haute altitude, achetés sur étagère aux Américains.

Le dernier type de drone est fondamentalement différent puisqu'il s'agit des drones de combat, une solution potentielle pour la prochaine génération d'avions de combat. Le drone embarque de nombreux systèmes d'armes – missiles ou frappe de précision. Nous n'en sommes qu'à la phase de R & T, mais elle est structurante pour l'industrie aéronautique, tant pour les bureaux d'études de Dassault Aviation, le motoriste Safran et l'électronicien Thales que pour leurs pendants britanniques BAe Systems, Rolls Royce, et Selex qui fabriquent le Typhoon, le rival du Rafale. L'enjeu est de construire si possible en commun leur successeur, pour éviter un nouvel affrontement direct, notamment à l'exportation. L'idée serait de lancer à partir de l'année prochaine un projet de démonstrateur, pour succéder à celui mené autour du drone français nEUROn et du drone britannique Taranis.

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