Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du 2 juillet 2013 à 15h00
Adaptation au droit de l'union européenne dans le domaine du développement durable — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

…tu savais ce qui allait nous arriver, pourquoi donc n'as-tu rien fait ? Mais, mon enfant, à cette époque, nous souhaitions soutenir le pouvoir d'achat ».

Cette interrogation n'est pas l'apanage de l'opposition, madame la ministre, puisque votre propre majorité, rose et verte, a voulu vous mettre au pied du mur en votant, le 4 juin dernier, une proposition de résolution vous imposant d'inscrire dans le budget pour 2014 des mesures de fiscalité écologique. Quand on entrevoit ce que pourrait être le prochain budget du ministère de l'écologie, on ne peut que vous encourager, mes chers collègues de la majorité, à voter un grand nombre d'autres résolutions.

Depuis un an, il n'y a pas eu d'autres textes législatifs, sauf la proposition de loi de François Brottes, qui devait répondre à l'engagement n° 42 du Président, en mettant en place une tarification progressive de l'énergie, dont je n'aurais pas la cruauté de rappeler ici la funeste trajectoire.

Le développement durable et les questions environnementales ne sont pas de simples variables d'ajustement. Je ne vous en ferai pas ici grief, madame la ministre, mais force est de constater que l'environnement n'est évidemment pas traité à égalité, loin de là, avec les questions économiques et sociales, en dépit de belles déclarations. On en vient à rêver d'un traitement équivalent à celui de la culture dans nos politiques publiques. C'est dire !

Non seulement il n'y a pas de colonne vertébrale, mais nous n'avons même pas d'os environnemental à ronger, et le présent projet de loi aura bien du mal à dissiper l'impatience qui gagne de semaine en semaine associations, citoyens, responsables des grandes organisations environnementales, journalistes – qui nous font remarquer qu'il ne se passe plus rien sur ces questions au Parlement – et députés de la commission du développement durable, dont un certain nombre sont présents, qui sont tenaces, je le reconnais, mais qui sont tous excédés par cette absence de politique.

« Complexe », « fourni », « technique », « incohérent » : les qualificatifs n'ont jamais manqué pour caractériser ce texte, que nous avons commencé à examiner en urgence le 15 mai dernier. « Adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable » : voilà un intitulé qui pouvait difficilement être plus vaste, imprécis et inégal pour un projet de loi qui traite de sujets dont les enjeux sont aussi primordiaux et structurants pour notre avenir.

En dépit des nombreuses améliorations intervenues au Sénat comme à l'Assemblée, ce projet de loi manque de sens et d'ambition. Sans parler de la quasi incapacité du Parlement, faute de temps et de moyens, de travailler sérieusement – malgré les efforts réels et louables de notre rapporteur et du président de la commission, que je tiens à souligner – sur un texte de loi aussi complexe, celui-ci a au moins le mérite d'être relativement consensuel, à l'image de nos travaux en commission mixte paritaire.

Seule la question des biocarburants, abordée à l'article 27 A, a nécessité quelques discussions et mises au point entre les deux chambres du Parlement, certains préférant à ce terme celui d'agrocarburants. Au final, la CMP a tenu à maintenir la suppression de l'article concerné et à conserver la terminologie actuelle. Il est vrai que cette substitution risquait d'impliquer une instabilité juridique pour certains de ces carburants, par exemple ceux qui sont produits à partir de lignite de bois. Nous ne relancerons pas le débat ici, la question a été tranchée.

Concernant le métier de vétérinaire et les règles de déontologie qui s'y appliquent, les assemblées ont grandement enrichi le texte. Elles ont apporté les précisions nécessaires à une bonne compréhension de la compétence des professionnels vétérinaires. Les mesures prévues garantiront le respect des règles professionnelles et l'indépendance attachée à cette profession.

J'en viens maintenant à l'article 12 de ce projet de loi, et tout particulièrement à la directive « Eurovignette ». Dès le départ, l'UDI avait souhaité un plus grand volontarisme sur le sujet. Si nous n'avons pas réellement été entendus, le Gouvernement s'est tout de même vu dans la nécessité de corriger ses erreurs, et d'assurer une transposition complète de la directive du 25 septembre 2011.

Ainsi, pour les nouveaux contrats de concession, la modulation des péages en fonction de la classe d'émission Euro du véhicule de transport de marchandises sera désormais obligatoire. De plus, lorsque la cohérence des systèmes de péage sera gravement compromise ou que les effets techniques ou environnementaux seront contre-productifs, des dérogations seront possibles.

Le champ du social n'a pas été oublié. Sur ce point, nos travaux ont conduit à établir un cadre professionnel et social favorable aux gens de mer, ce dont nous nous félicitons ; ces derniers seront mieux considérés et mieux protégés.

Dans le domaine de l'énergie, et notamment de l'activité de transport du gaz, je me félicite de l'adoption d'un de mes amendements, ouvrant explicitement la possibilité pour les entreprises de transport de gaz d'exercer des activités en dehors de l'espace communautaire.

Permettez-moi à présent d'insister sur l'article 30 bis A, qui me paraît primordial et qui n'a pas été discuté en CMP. Cet article vise à préserver la filière de la cogénération à haut rendement, en ouvrant une période transitoire pour les contrats d'obligation d'achat arrivant à échéance pour toutes les installations de plus de 12 mégawatts, afin de permettre à celles-ci d'assurer des investissements utiles dans l'attente de l'entrée en vigueur de la rémunération du marché de capacité de la loi NOME, à partir de l'hiver 2016-2017. Nous sommes satisfaits de cette mesure qui bénéficie à l'environnement mais aussi et surtout aux locataires modestes des parcs HLM situés dans les grandes villes.

J'attire néanmoins votre attention sur le financement de ce dispositif, car la modération du coût pour l'usager dépendra des mesures réglementaires très importantes qui seront prises par le Gouvernement. Le coût de cette disposition est estimé à 70 millions d'euros par an, jusqu'en 2016 inclus : 50 millions pour les industriels et 20 millions pour les réseaux de chaleur. Il est financé par la contribution au service public de l'électricité, et est donc sans incidence pour le budget de l'État. C'est à cette condition seulement que les consommateurs ne verront pas le prix de l'énergie augmenter et que les réseaux de chaleur pourront continuer à se développer. C'est bien là l'esprit de la loi ; je pense que personne sur ces bancs, ni dans la majorité ni dans l'opposition, ne me contredira. Je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous souteniez sur ce point.

Enfin, les ratifications d'ordonnance à l'origine de ce projet de loi sont assurément indispensables. Vous connaissez notre attachement aux questions européennes et au strict respect de l'application de la législation communautaire en droit interne. Au-delà de la transposition technique proprement dite, qui demeure, à chaque fois, un véritable casse-tête juridique, rappelons l'engagement de la France à l'égard des pays membres de fixer comme horizon le chiffre de 1 % de directives non transposées. Notre crédibilité est en jeu.

En conclusion, malgré les réserves qui sont les nôtres depuis le mois de mai, les députés du groupe UDI voteront en faveur de ce projet de loi de transposition…

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