Intervention de Patrick Devedjian

Réunion du 1er juillet 2013 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Devedjian :

Ce débat est surréaliste. Tout d'abord, comme l'a rappelé M. Gaymard, il n'a été précédé d'aucune concertation alors que, pour l'acte II de la décentralisation, le Gouvernement avait organisé les assises des libertés locales qui ont duré plusieurs mois sur tout le territoire, y compris dans les départements d'outre-mer, ce qui nous a certainement évité bon nombre des ennuis que vous rencontrez aujourd'hui.

En deuxième lieu, ce projet n'a donné lieu à aucune étude d'impact, non seulement en matière budgétaire, mais également en matière constitutionnelle, alors précisément qu'il soulève de nombreux problèmes à cet égard.

En troisième lieu, un seul amendement a été déposé à ce jour par le Gouvernement sur ce texte et vous nous avez annoncé, madame la ministre, que nous serions saisis des autres amendements mercredi matin, ce qui ne nous laissera guère le temps d'y réfléchir. Il est quelque peu léger de traiter ainsi l'Assemblée nationale.

Au demeurant, nous devinons déjà quelles dispositions vous nous soumettrez, car vous n'avez pas répondu à la question de savoir si vous seriez favorable à un amendement visant à constituer la métropole par la fusion de Paris – département et commune – et des trois départements de la petite couronne. Si un tel projet devait se réaliser, il serait amusant que le maire de Paris, qui a refusé en 2004 la fusion du département et de la commune de Paris, considérant que cet acte – qui n'avait pourtant rien de révolutionnaire – serait une agression, soit favorable aujourd'hui à la suppression de quatre départements, dont le sien.

En réalité, ce texte n'est pas une loi de décentralisation, comme vous l'avez d'ailleurs reconnu vous-même et comme l'exprime de manière très significative son changement de titre. De votre propre aveu, les transferts de l'État sont très peu nombreux : il ne s'agit pas ici de décentralisation, mais de délégation. Or une délégation peut être reprise –je le sais d'autant mieux que mon département s'est vu reprendre la délégation de l'aide à la pierre dont il bénéficiait précédemment.

Quant à la conférence territoriale de l'action publique, vous vous arrangez pour que l'État la domine.

D'autre part, vous avez déclaré tout à l'heure qu'il n'y avait qu'une seule action publique – comme si les collectivités territoriales ne pouvaient pas avoir, dans le champ de leurs compétences, des politiques différentes de celle du Gouvernement. Singulière décentralisation !

Il s'agit en réalité de retirer aux communes certaines compétences essentielles, ce qui revient pour elles à une recentralisation au profit des régions ou d'une instance encore informelle. Elles y perdront notamment la compétence urbanistique que leur avait donnée la gauche et qui a eu un effet exceptionnel. La notion de PLU intercommunal, évoquée tout à l'heure, amène à s'interroger sur la réalité de la décentralisation et de la libre administration des communes garantie par la Constitution.

Enfin, ce texte est examiné dans un climat d'improvisation absolue. En votant, voilà quelques semaines, le nouveau scrutin départemental, saviez-vous que vous vous apprêteriez à supprimer trois ou quatre départements quelques semaines plus tard ? Si c'était le cas, la loi que nous avons votée aurait sans doute été différente.

Nous avons le sentiment que la gauche sait qu'elle va perdre les élections municipales à Paris et tente de se rattraper en organisant une métropole sur mesure !

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