Intervention de Bérengère Poletti

Réunion du 4 juillet 2013 à 10h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérengère Poletti :

Au nom du groupe UMP, je remercie à mon tour la rapporteure de la clarté et de la précision de son exposé. Ce projet de loi soulève une question difficile : comment concilier, dans l'intérêt de l'enfant, les droits des personnes se prévalant d'une relation antérieure avec lui et la nécessité de clarifier le plus vite possible sa situation ? Dans la vie d'un enfant orphelin ou dont les parents ne sont pas en mesure d'exercer leurs responsabilités, ce moment est décisif : soit le lien avec sa vie d'avant est préservé, soit il est coupé pour lui permettre de se reconstruire hors du champ de sa famille naturelle, grâce à la possibilité qui lui est alors offerte de bénéficier d'une adoption plénière.

L'article L. 224-8 du code de l'action sociale et des familles, issu de la loi du 6 juin 1984, ne permettait pas d'assurer effectivement le droit, pour les personnes qui y sont habilitées, de contester la reconnaissance d'un enfant comme pupille de l'État. Cet article a donc été annulé par le Conseil constitutionnel à la suite d'une QPC et la décision prendra effet le 1er janvier 2014. Il est donc important, et même urgent, de parer au risque d'un vide juridique qui serait délétère pour les enfants susceptibles d'être admis en qualité de pupille de l'État, tout en laissant aux conseils généraux le temps de prendre ces modifications en considération.

Sur la forme, tout d'abord, même s'il n'est pas toujours simple d'avoir à légiférer en urgence, et même si, en attendant que nous le fassions, les conseils généraux sont dans une situation délicate, l'on ne peut que saluer une fois de plus la procédure de la QPC instaurée par la réforme constitutionnelle de 2008. Dans le cas présent, la décision du Conseil constitutionnel met en évidence le manque de précision dont souffre la rédaction d'un article du code de l'action sociale et des familles et les conséquences concrètes et définitives dont il est porteur, puisqu'un enfant reconnu pupille de l'État devient de fait adoptable.

Quant au fond, il est impératif que la possibilité offerte par le législateur de 1984, et que nous approuvons toujours, à toute personne justifiant d'un lien avec l'enfant de contester sa reconnaissance comme pupille de l'État puisse être utilisée dans les meilleures conditions, de manière effective et mieux définie. L'intervention unique du juge judiciaire, grande innovation de la loi de 1984, mettait fin au dualisme entre deux contestations possibles, devant chacun des deux ordres de juridiction, administratif et judiciaire. Or, bien plus que la contestation de la décision administrative de la puissance publique, c'est la décision du juge judiciaire, seul habilité à se prononcer sur la garde de l'enfant, qui importe dans l'intérêt de ce dernier. Nous nous contentons donc de parachever le processus de la loi de 1984.

Madame la rapporteure, vous estimez page 11 de votre prérapport que l'obligation d'avoir manifesté un intérêt pour l'enfant auprès des services de l'aide sociale à l'enfance constitue un moyen terme, alors que l'obligation d'avoir « manifesté l'intérêt de prendre en charge » eût été excessive. Pouvez-vous en préciser les raisons ? Vous ajoutez page 14 que « le présent article reprend […], sans les modifier, les dispositions existantes qui prévoient que "dans le cas où il rejette le recours, le tribunal peut autoriser le demandeur, dans l'intérêt de l'enfant, à exercer un droit de visite dans les conditions qu'il détermine" ». La possibilité de recours ayant été étendue, cette disposition peut-elle bloquer l'adoption plénière de l'enfant ? On sait en effet que des enfants pris en charge par l'aide sociale à l'enfance ne sont pas adoptables au seul motif qu'ils reçoivent de temps en temps un signe de vie.

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