Nous accueillons avec plaisir M. Thierry Repentin, qui s'exprime pour la première fois en tant que ministre délégué aux affaires européennes devant nos deux commissions conjointes.
Monsieur le ministre, vous allez nous rendre compte du dernier Conseil européen des chefs d'État et de gouvernement, consacré à l'énergie et à la fiscalité. Même s'il n'a duré que quatre heures, il a en effet donné lieu à des décisions substantielles, surtout en ce qui concerne l'énergie – quoique la presse ait davantage parlé de la fiscalité, sans doute parce que la discussion sur l'énergie a débouché sur des conclusions moins concrètes et moins nouvelles que celle sur la fiscalité.
Le débat public s'était jusqu'ici concentré sur l'exploitation des sources d'énergie non conventionnelles, en particulier le gaz de schiste. Le débat plus large qui s'est ouvert au Conseil européen a permis de fixer des orientations dans quatre directions : l'achèvement du marché intérieur d'ici 2014 et le développement d'interconnexions d'ici 2015, ce qui implique d'achever la transposition du troisième « paquet énergie », la poursuite des investissements, la diversification des approvisionnements et les mesures d'efficacité énergétique, qui passent par l'analyse des conséquences du niveau élevé des prix de l'énergie en Europe.
Le Président de la République a par ailleurs suscité une discussion sur les conséquences de l'exploitation du gaz de schiste par les États-Unis, qui bouleverse les prix de l'énergie dans le monde et crée une situation géopolitique inédite, qui doit nous conduire à une réflexion de fond.
Le Conseil doit rendre compte d'ici la fin de l'année des progrès qui auront été accomplis dans le cadre de ces orientations, et examiner l'évolution de la politique extérieure de l'Union européenne en matière d'énergie. Vous savez que nous plaidons depuis longtemps pour une communauté européenne de l'énergie, voire – à terme – une communauté euro-méditerranéenne de l'énergie. Cette première étape vous paraît-elle significative à cet égard ?
Des avancées concrètes ont également été obtenues en matière de fiscalité. Elles sont au nombre de quatre. La première concerne l'adoption de la directive épargne révisée, qui prévoit des échanges d'information sur les revenus de l'épargne. Le Luxembourg et l'Autriche, qui étaient depuis l'origine opposés à cette directive et ont bénéficié de dérogations, ne semblent plus lier son adoption aux délais de négociation avec les pays tiers. En ce qui concerne l'échange automatique d'informations de type Foreign account tax compliance act (FATCA) pour lutter contre l'évasion fiscale, la Commission va proposer dès juin d'élargir le champ des revenus couverts. C'est la deuxième avancée. L'échange automatique est cité comme un standard international à promouvoir ; la loi bancaire actuellement en discussion intègre d'ailleurs ces évolutions par anticipation.
La troisième avancée consiste en un « paquet » de mesures de lutte contre la fraude à la TVA, attendu d'ici la fin du semestre. Enfin, le principe de la publication d'informations pays par pays par les grandes sociétés a été retenu – c'est la quatrième avancée. Comment cette discussion s'est-elle déroulée ? Il est important pour nous d'en savoir davantage sur les positions des uns et des autres.
Nous vous entendrons également avec intérêt sur le prochain Conseil européen, qui aura lieu les 27 et 28 juin et sera de nouveau consacré à l'approfondissement de l'union économique et monétaire. La France et l'Allemagne le préparent déjà activement : elles ont publié le 30 mai une contribution commune pour le renforcement de la compétitivité et de la croissance en Europe, sur laquelle elles travaillaient depuis plusieurs mois. Cette initiative bienvenue porte sur un ensemble de progrès à accomplir, dans un délai de deux ans, dans un champ très vaste qui va du renforcement de l'union monétaire, avec la proposition du Président de la République d'instituer un président permanent de la zone euro, à des progrès en matière économique, fiscale et sociale. Tout ce que vous pourrez nous dire à ce sujet alimentera utilement notre réflexion.
Enfin, nous aimerions savoir où en sont les discussions sur la taxe sur les transactions financières (TTF), initiative française, d'autant que la taxe qui a été instaurée en France est une taxe « peau de chagrin », qui exclut les produits dérivés. J'espère que nous pourrons progresser, à la fois au niveau national et au niveau européen, de manière à obtenir une parfaite concordance entre ce qui existera à ces deux niveaux.
Mes questions sont nombreuses, mais je ne doute pas que vous saurez nous restituer la quintessence du travail déjà accompli et de celui qui nous attend dans les prochaines semaines.