Nous avons pris conscience, à Moscou, de l'importance de la corruption qui sévit en Russie et du manque de confiance de sa population envers la soutenabilité de son modèle économique et financier. Nombre de Russes craignent donc que de nouveau soubresauts économiques et politiques ne reviennent perturber leur pays, comme dans les années quatre-vingt-dix. Les Russes qui ont un peu d'argent – classe moyenne comprise – investissent à l'étranger, ce qui pose un gros problème de fuite des capitaux. L'État est très peu interventionniste : son déficit budgétaire est très faible mais il ne possède pas les structures économiques nécessaires pour opérer une relance susceptible de favoriser l'économie réelle.
Je ne reviendrai pas sur tous les sujets de contentieux entre l'Union européenne et la Russie, comme la guerre civile en Syrie.
La crise chypriote du printemps 2013 a coûté cher à nombre d'épargnants russes mais les autorités n'ont guère protégé leurs ressortissants titulaires de comptes bancaires à Chypre, afin de donner un signal vis-à-vis de ceux qui pratiquent l'évasion fiscale – même si cela semble contradictoire avec des pratiques manifestement courantes au sommet de l'État. Au-dessus de 100 000 euros, les déposants paieront plein pot – et cela devrait d'ailleurs devenir la règle en Europe.
La Russie entretient certes des relations développées avec l'Europe mais le Président Poutine a remis au goût du jour le concept d'« eurasiatisme », en essayant de fédérer d'anciennes républiques soviétiques. Ce projet est agité comme une sorte de menace : si l'Union européenne ne travaille pas plus étroitement avec la Russie, celle-ci se tournera vers l'Asie. Son rapport à l'Union européenne est donc ambigu : la volonté de coopérer se double d'une menace implicite.
Outre l'affaire des Pussy Riot, un certain nombre de problèmes se posent aussi en matière de libertés publiques et de droits de l'Homme.
Par ailleurs, pour une entreprise européenne, investir en Russie n'est sans risque car l'environnement juridique est relativement incertain. Une entreprise française a ainsi racheté des équipements à un groupe russe qui, en réalité, n'en était pas propriétaire…
Dans le cadre de leur présidence du G20, les Russes n'ont manifestement pas la volonté politique d'imposer des thématiques ou des orientations afin d'apposer leur marque. Ils mènent cependant un bon travail d'animation sur les sujets en discussion, en recherchant le compromis. Ce sont donc surtout les autres grands pays qui nourrissent les débats sur les deux sujets qui seront au coeur du G20 cette année : la croissance et la lutte contre l'évasion fiscale.
Le Président Poutine, qui s'intéresse beaucoup aux images, compte faire du sommet une opération politique ; ce rendez-vous sera sans doute extrêmement bien organisé.