Intervention de Christophe Sirugue

Réunion du 2 octobre 2012 à 16h15
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue :

C'est à croire qu'il existe peu de dossiers importants dont il faudrait s'occuper aujourd'hui : le premier texte que l'UMP souhaite inscrire à l'ordre du jour qui lui est réservé est une proposition de loi relative à l'AME, moins de deux mois après qu'un débat s'est tenu sur ce sujet à l'Assemblée nationale. Cela tourne à l'obsession.

Toutes ces questions ont pourtant déjà fait l'objet d'un rapport conjoint de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection générale des finances dont la qualité est reconnue par tous, ainsi que d'un rapport que j'ai réalisé avec Claude Goasguen et dont les conclusions n'ont pas fait l'objet de critiques, même de la part de l'ancienne majorité. Ces travaux montrent que l'accroissement des dépenses liées à l'AME, s'il est réel, ne s'explique ni par une explosion du nombre d'ayants droit ni par la fraude. Si le nombre de bénéficiaires a augmenté en 2009, c'est parce que les mesures prises alors par le gouvernement ont eu pour conséquence d'accroître le nombre de déboutés du droit d'asile et donc de personnes en situation irrégulière. L'autre raison est que les hôpitaux ont recherché plus activement les droits à une couverture maladie des patients hospitalisés, en particulier des bénéficiaires de l'AME. Or ils facturent leurs soins sur la base d'un tarif spécifique, beaucoup plus élevé que la tarification à l'activité. C'est sur ces points qu'il aurait fallu travailler.

Non seulement les mesures contenues dans cette proposition de loi sont accusatoires et stigmatisantes, mais elles sont inutiles.

Vous souhaitez à nouveau faire de la caisse primaire d'assurance maladie le seul dépositaire de la demande d'AME. Mais c'est justement à la demande des caisses elles-mêmes que nous avons décidé d'autoriser les centres communaux d'action sociale et les associations à participer au montage administratif des dossiers : leur expérience du public concerné représente en effet un atout.

Quant à l'agrément préalable, lorsqu'il était en vigueur, ce dispositif s'était avéré extrêmement compliqué et coûteux à mettre en place, alors que son efficacité est douteuse.

J'en viens à la franchise médicale. Pourquoi proposer que chacun cotise de la même façon alors même que vous avez appelé à ne pas faire de confusion entre étrangers irréguliers et bénéficiaires de la CMU ? Avec une telle mesure, l'UMP promeut un système universel de protection de santé, mais à géométrie variable.

Quelles que soient les raisons de l'augmentation des coûts de l'AME, aucun des trois articles de cette proposition de loi ne saurait y remédier. Mais nous avons bien compris qu'entraînés dans une surenchère populiste, votre objectif était surtout de tenir un discours agréable à l'oreille de certaines personnes peu au fait des réalités.

Mais cette proposition n'est pas seulement inutile, elle est aussi dangereuse. Plus nombreuses, en effet, seront les dispositions destinées à limiter le recours à l'AME, plus la santé des personnes les plus fragiles sera atteinte, plus tard elles se présenteront à l'hôpital et plus cher coûteront les soins. En effet, une pathologie qui n'a pas été identifiée à temps a des conséquences beaucoup plus graves et nécessite des soins plus onéreux. L'effet sera donc l'inverse de celui recherché. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas soutenir ce texte.

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