Intervention de Jean-Frédéric Poisson

Séance en hémicycle du 10 juillet 2013 à 15h00
Attributions du garde des sceaux et du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique. — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Frédéric Poisson :

Madame la garde des sceaux, je ferai trois remarques, l'une d'ordre général, les deux autres plus étroitement liées à cet article.

Premièrement, il est vrai que la notion même d'indépendance de la justice est difficile à penser. Il faut assurer le contrôle de l'autorité judiciaire par le pouvoir politique, car ce dernier doit assurer la cohérence de la politique pénale sur l'ensemble du territoire, par souci d'égalité de traitement des citoyens. L'indépendance de la justice ne peut donc, par définition, être absolue : elle est régulée, contenue. Certes, cette limitation concerne les décisions et la mise en oeuvre de moyens : elle ne va pas au-delà. Dès lors, bien évidemment, se pose la question de l'intervention du pouvoir exécutif et du pouvoir politique en général dans le fonctionnement des institutions judiciaires.

Je peux, madame la garde des sceaux, comprendre les motifs qui justifient le texte que vous nous proposez. Simplement, il comporte quand même une part d'affichage extrêmement importante ! En effet, vous avez l'intention de rendre totalement impossible quelque intervention que ce soit dans le cours des affaires judiciaires, du moment qu'elle est de nature politique. Mais cela, personne ne peut le garantir ! Par surcroît, chacun peut voir que le passage d'un régime dans lequel toutes les instructions sont publiques à un régime dans lequel il est possible de n'en pas publier un certain nombre affaiblit le principe des droits de la défense.

Je veux bien reconnaître votre bonne foi, et prendre acte de ce que vous avez dit devant le Parlement. Je n'ai pas de raison de remettre en cause vos propos quand vous dites qu'aucune des circulaires que vous avez signées n'a été couverte par le secret, que toutes ont été publiées. C'est très bien : je comprends que vous en tiriez argument pour justifier vos intentions. Mais nous ne sommes pas en train d'évaluer la politique que vous avez menée depuis un an, nous sommes en train d'établir des principes généraux de fonctionnement de l'institution judiciaire.

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