Intervention de Michel Liebgott

Réunion du 10 juillet 2013 à 11h00
Commission d'enquête chargée d'investiguer sur la situation de la sidérurgie et de la métallurgie françaises et européennes dans la crise économique et financière et sur les conditions de leur sauvegarde et de leur développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Liebgott :

Cette commission d'enquête nous a effectivement donné l'occasion de rencontrer quasiment toutes les personnes connaissant bien le sujet : nous pouvons donc presque prétendre à l'exhaustivité.

Je retiendrai en particulier ces propos d'Arnaud Montebourg, qui résument assez bien la situation actuelle : « Les Européens ont organisé eux-mêmes la destruction de leur propre industrie métallurgique, interdisant à leurs champions d'atteindre la taille critique qui les protégerait des prises de contrôle ».

L'évolution de la sidérurgie entre 1974 et 1995, marquée par la perte de 110 000 emplois, résultait d'une rationalisation en partie inévitable. La crise de 2008 s'y est ajoutée, entraînant à nouveau des surcapacités de production, notamment dans les pays de l'Est européen. Mais il est clair que nous avons atteint un plancher : il n'est pas question de réduire encore le nombre d'emplois, sauf à détruire définitivement notre industrie sidérurgique et métallurgique.

Il est donc nécessaire d'adopter une stratégie nationale, mais aussi européenne – d'où l'intérêt d'avoir rencontré M. Antonio Tajani, le Commissaire européen en charge de l'industrie. Je ne reviens pas sur les mesures concrètes proposées dans le rapport, qu'il s'agisse de l'évolution du cadre réglementaire en matière de stimulation de la demande d'acier, des conditions équitables d'accès aux marchés internationaux, ou des dispositions relatives à l'énergie, l'innovation ou la qualification. Elles concernent tant l'Union européenne que le gouvernement français.

À la différence de ce qui se passe en Allemagne ou en Italie, un problème de gouvernance se pose en France. Les syndicats n'y pèsent pas autant, l'État, pourtant centralisé, ne pèse pas autant que l'État fédéral allemand, ni les régions par rapport aux Länder. Incontestablement, le modèle économique actuel ne nous permet pas de maîtriser la situation. Il faudra donc inventer de nouvelles formes d'interventionnisme public pour éviter la disparition pure et simple de cette industrie.

Nous devons également être vigilants quant à l'application des mesures proposées. En particulier, il convient de suivre attentivement, et au quotidien, la mise en oeuvre de l'accord entre le Gouvernement et le groupe ArcelorMittal, dont on sait qu'il n'a pas pour habitude de respecter ses engagements. Dans l'hypothèse où l'accord ne serait pas respecté, nous ne devons rien nous interdire.

Personne ne nie que les sites de Dunkerque et de Fos-sur-Mer soient des piliers de la sidérurgie française. Ils représentent l'amont de la filière, si bien que l'on ne peut concevoir cette industrie sans eux. À cet égard, la Lorraine, comme la Bourgogne ou Rhône-Alpes, fait partie d'un ensemble. En tout état de cause, nous sommes à l'étiage : une des conclusions de nos travaux, c'est que notre modèle n'a pas bien résisté, en comparaison avec d'autres pays, qui produisent autant qu'autrefois.

Les préconisations du rapport devraient nous permettre d'acquérir une certaine distance par rapport à des événements qui, trop souvent, nous empêchent de nous projeter à long terme. Rien n'est gagné. L'Europe doit se montrer offensive : ainsi, en matière de protection de nos produits, par exemple, l'Union européenne n'a pas été très efficace, contrairement aux États-Unis. N'oublions pas, par ailleurs, que la Chine va nécessairement frapper à nos portes.

Les atouts, nous les avons : ce sont les hommes, les process, les centres de recherches, les clients. Il n'y a donc pas de raison que nous ne trouvions pas les solutions. Une partie d'entre elles sont d'ailleurs dans le rapport.

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