Intervention de Denys Robiliard

Réunion du 11 juillet 2012 à 10h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenys Robiliard, rapporteur :

Les premiers chiffres disponibles pour 2011 montrent que les dépenses d'AME ont augmenté de près de 5 % alors que les dépenses de soins de ville diminuent et que les soins hospitaliers – qui sont les plus coûteux pour l'assurance maladie – augmentent de 7,2 %.

L'article 29 du projet de loi procède par conséquent à l'abrogation de ces dispositions restrictives et prévoit la disparition du Fonds national de l'AME à compter du 31 décembre prochain.

Troisième et dernière mesure abrogée, la TVA dite sociale. Je rappelle que M. Jean-Louis Borloo avait envisagé de la mettre en oeuvre dès 2007. La même année, le gouvernement de M. François Fillon avait eu la sagesse d'y renoncer. Il était donc pour le moins singulier de la remettre à l'ordre du jour en pleine campagne électorale, tout en reportant ses effets au 1er octobre !

La TVA dite sociale était tout d'abord contestable en ce que ses bénéfices escomptés pour l'économie étaient inexistants. La baisse des charges sur les entreprises eût été sans commune mesure avec le différentiel de coûts avec nos concurrents des pays émergents. Le principal résultat, compte tenu du fait que les produits français ne sont généralement pas substituables aux produits importés, eût été une atteinte à la consommation et donc à la croissance du fait des surcoûts engendrés.

Cela se vérifie du reste dans tous les pays où ont été opérées des hausses significatives de la TVA. La hausse de TVA de 3 points opérée en Allemagne en 2007 a ainsi entraîné une hausse des prix de 1,6 point. Et l'on pourrait aussi se pencher sur les mesures récentes décidées par M. David Cameron au Royaume-Uni. Il me semble aussi que M. Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était ministre de l'économie et des finances, partageait cette analyse.

Indépendamment de son inefficacité économique, la TVA dite sociale est injuste car elle pèse de façon prioritaire sur les ménages les plus modestes. Je renvoie sur ce point à l'excellente analyse publiée en mai de l'an dernier par le Conseil des prélèvements obligatoires.

Là encore, la suppression du dispositif se fera sans dogmatisme. Les aménagements techniques de l'affectation de la fraction de TVA déjà précédemment dévolue aux régimes sociaux sont conservés. Surtout, la majoration de deux points du taux du prélèvement social sur les revenus du capital, qui gageait une partie de la suppression des cotisations patronales, est conservée. Sur le produit de cette majoration, 400 millions d'euros permettront de financer dès 2012, puis de manière pérenne, l'augmentation de 25 % de l'allocation de rentrée scolaire (ARS), soit un autre engagement que le Gouvernement n'aura pas tardé à tenir. L'essentiel bénéficiera cependant à la branche vieillesse, à hauteur de 2,6 milliards d'euros à compter de 2013.

Tournons-nous à présent vers les mesures qui engagent l'avenir pour amorcer le redressement de nos finances sociales, dans le prolongement du débat d'orientation budgétaire qui s'est tenu hier en séance publique et dans l'esprit de la conférence sociale du début de la semaine.

Trois nouvelles mesures de recettes pérennes traduisent la volonté du Gouvernement de résorber certaines des niches qui mitent le financement de notre protection sociale.

Première mesure, l'assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus immobiliers de source française perçus par les non-résidents. Il s'agit de mettre fin à la discordance entre l'imposition fiscale et l'imposition sociale de ces revenus, discordance constitutive d'une niche sociale. En année pleine, cela procurera 250 millions d'euros de recettes nouvelles.

Deuxième mesure, l'accroissement des contributions sur les stock-options et les attributions gratuites d'actions. Pour l'ensemble de ces avantages, indépendamment de leur montant, un taux de 30 % est proposé pour la contribution patronale et un taux de 10 % pour la contribution salariale. Cela se traduira par un apport de 300 millions d'euros en année pleine.

Troisième mesure, l'augmentation du taux du forfait social qui s'applique aux accessoires de rémunération assujettis à la CSG mais pas aux cotisations sociales. Il est proposé de porter ce taux de 8 % à 20 %, conformément à une recommandation ancienne de la Cour des comptes qui estimait à juste raison que ces sommes doivent contribuer équitablement au financement de la solidarité.

Quant aux contributions des employeurs au financement des prestations de prévoyance, leur taux demeurera fixé à 8 %, analogue à celui qui existe de longue date pour la taxe spécifique qui préexistait à l'instauration du forfait social.

Le produit de cette majoration s'élèvera à 2,3 milliards d'euros dès 2013, répartis pour moitié entre la branche vieillesse et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Au total, les nouvelles mesures proposées dans le collectif permettent d'envisager en année pleine un surcroît de recettes de 5 milliards d'euros. Et cela ne sera pas de trop si l'on considère les déficits accumulés au cours des dix dernières années, lesquels dépassent 170 milliards d'euros. Comme la Cour des comptes l'a indiqué à plusieurs reprises, le déficit structurel de la sécurité sociale peut être évalué à 0,6 % du PIB.

Le rapport présenté la semaine dernière à la Commission des comptes de la sécurité sociale démontre en outre que les résultats de 2012 seront encore moins bons que prévu, du fait de la surestimation du niveau de la croissance économique. Dès lors, l'apport, via ce collectif, d'un surcroît de recettes de 1,5 milliard d'euros dès 2012 est évidemment bienvenu car il permettra de compenser les conséquences sur les recettes sociales du différentiel entre la croissance prévue et la croissance réalisée.

Pour les exercices suivants, les perspectives tracées dans le récent rapport de la Cour des comptes en vue du débat d'orientation sur les finances publiques sont alarmantes pour l'ensemble des branches. En l'absence de mesures fortes, la branche maladie ne reviendrait pas à l'équilibre avant 2024, la branche famille accumulerait des déficits supérieurs à 2 milliards d'euros au moins jusqu'en 2020, et, surtout, la branche vieillesse serait très loin de voir se réaliser les prévisions trop optimistes associées à la réforme des retraites de 2010. C'est pourquoi plus des quatre cinquièmes des recettes nouvelles de ce collectif seront affectés à la branche vieillesse et au FSV, le reste étant partagé entre les branches famille et maladie.

Les mesures nécessaires au redressement du déficit chronique de nos mécanismes sociaux seront présentées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Compte tenu de ces différents éléments, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des six articles de ce projet de loi dont nous sommes saisis.

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