Intervention de Petras Auštrevičius

Réunion du 10 juillet 2013 à 15h45
Commission des affaires européennes

Petras Auštrevičius, vice-président du Seimas et vice-président de la commission des affaires européennes :

C'est pour moi un grand plaisir de m'adresser à votre Commission et je vous remercie de l'attention que vous nous portez. Elle sera utile à la Lituanie pour l'aider à exercer la présidence tournante de l'Union européenne à un moment crucial, avec l'espoir que cette présidence soit celle qui verra se tourner la page de la crise. Nous savons qu'une lourde charge pèse sur nos épaules, d'autant que la présidence grecque, qui suivra, sera handicapée par la tenue des élections européennes, mais nous sommes prêts à assumer nos responsabilités. Ma collègue Loreta Graužinienė, qui appartient à la majorité parlementaire alors que j'appartiens à l'opposition, vous le confirmera : tous les responsables politiques lituaniens sont d'accord sur la nécessité d'oeuvrer ensemble à la résolution des problèmes auxquels l'Europe doit faire face.

Pour relancer la croissance et favoriser l'ouverture de l'Union, il nous faut recréer la confiance en l'Europe ; c'est notre objectif prioritaire. Nous voulons aussi renforcer le partenariat oriental, la sécurité énergétique, la protection des frontières extérieures de l'Union – y compris la lutte contre la contrebande –, et promouvoir les échanges ainsi que la création de macro-régions européennes conçues comme des structures de coopération au service du continent tout entier.

Nous saluons le compromis trouvé sur le budget européen et la participation constructive des parlements nationaux à cet accord. Mais, ainsi que vous l'avez rappelé, Madame la présidente, il nous faudra, pour mettre en oeuvre le budget 2014-2020, négocier 75 actes juridiques, dont 56 devront être adoptés avant 2014. Nous allons par ailleurs entamer le quatrième semestre européen pour la coordination des politiques économiques, et la gouvernance économique sera également au coeur de nos travaux.

La politique d'élargissement de l'Union doit être fondée sur le respect de trois règles d'or : la conditionnalité, l'évaluation individuelle des États candidats à l'adhésion et la capacité de l'Union à intégrer de nouveaux membres. Le renforcement de la coopération régionale s'impose, car elle permettra le développement de macro-stratégies. Nous sommes très honorés de participer à la Stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique voulue par le Parlement européen.

En matière d'affaires étrangères, nous entendons renforcer le partenariat oriental, en liaison avec la Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et avec le Service européen pour l'action extérieure. Nous espérons pouvoir faire part de résultats tangibles lors du Sommet de Vilnius. J'appelle votre attention sur l'aspect positif de ce partenariat, qui est subordonné à l'application de réformes dans les États concernés. Aussi bien l'Ukraine devra-t-elle, pour parvenir à un accord d'association avec l'Union européenne, faire son devoir – notamment instaurer une justice impartiale en réformant le Parquet et revoir la loi électorale. L' » affaire Timochenko », qui doit trouver une solution, illustre les dysfonctionnements actuels dans ce pays, qui seront corrigés quand la justice et l'humanisme prévaudront.

S'agissant de l'aide au développement, nous espérons qu'un accord sera trouvé sur la révision des objectifs du Millénaire pour la période postérieure à 2015 et sur les ressources destinées au Fonds européen de développement.

Je sais que la France porte une attention particulière à la politique de sécurité et de défense commune. Des décisions importantes seront prises en décembre prochain, qui se traduiront peut-être par une révision de cette politique. Le dernier texte législatif adopté à ce sujet est vieux d'une décennie ; les États membres de l'Union européenne étaient alors beaucoup moins nombreux et les défis à affronter différents de ce qu'ils sont maintenant. Dans le contexte actuel, certains engagements en faveur de la défense et de l'industrie seraient fort utiles à l'Union européenne.

Nous sommes favorables à des accords de libre-échange avec nos partenaires importants et nous pensons possible de trouver un compromis qui respecte les positions exprimées par certains États membres. Ces accords renforceraient à la fois notre espace de sécurité, l'emploi et la croissance économique ; ils seraient donc bénéfiques pour tous.

Nous devrons aussi poursuivre les travaux visant à renforcer la gouvernance de l'Union économique et monétaire en nous concentrant sur l'application de la directive « établissant un cadre pour le redressement et la résolution des défaillances d'établissements de crédit et d'entreprises d'investissement », sur la directive relative à la garantie des dépôts et sur l'instauration d'un mécanisme de résolution unique ; il n'y a pas de temps à perdre. Il faudra aussi mettre en oeuvre le Two-Pack.

Comme l'article 13 du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance en donne la possibilité, la présidence lituanienne s'apprête à organiser la première Conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière de l'Union européenne. Cette conférence se réunira à un moment charnière, quelques jours après que la Commission aura donné son avis sur les projets de budget des États membres.

Pour combattre la fraude et l'évasion fiscales qui grèvent les recettes budgétaires des États membres, la présidence lituanienne attachera une importance particulière à la lutte contre la contrebande de cigarettes et de tabac.

Pour ce qui est de la justice et des affaires intérieures, nous nous concentrerons sur la mise en oeuvre du programme de Stockholm. Nous accorderons une importance particulière à la cyber-sécurité, sujet d'une extrême importance. La protection des données en Europe peut être améliorée. Nous pouvons trouver les moyens de les transmettre par l'Internet de manière sûre.

Nous nous attacherons à renforcer la protection des frontières extérieures de l'Union en proposant des solutions efficaces d'enregistrement des entrées et sorties de voyageurs.

Pour ce qui concerne les politiques EPSCO – emploi, politique sociale, santé et consommateurs –, le terrible taux de chômage au sein de la jeunesse européenne nous incitera à attacher une importance particulière au programme « garantie pour la jeunesse » et à l'alliance européenne pour l'apprentissage, démontrant ainsi la forte dimension sociale de notre présidence.

Le débat se poursuivra également sur les systèmes de santé viables.

En matière de compétitivité, il nous faudra parachever l'Acte pour le marché unique I avant d'en venir à l'Acte pour le marché unique II. Il nous faut consolider les droits de propriété intellectuelle, renforcer le volet électronique de la passation des marchés publics et assurer le financement du programme Horizon 2020.

Pour ce qui est des transports et de l'énergie, la présidence lituanienne devra trouver un accord avec le Parlement européen sur les véhicules habilités à circuler sur le territoire de l'Union. Nous travaillerons aussi à la réalisation de transports intermodaux et à l'application du projet « Ciel unique européen II plus ».

Nous nous engagerons tout spécialement en faveur du renforcement de la sécurité énergétique, nécessaire à tous les membres de l'Union. Le marché intérieur de l'énergie doit être achevé d'ici à 2014 ; c'est dire l'importance de la Conférence énergétique qui se tiendra à Vilnius en novembre, et qui tracera les orientations souhaitables. En cette matière, l'Union européenne doit s'astreindre à parler d'une seule voix pour réduire l'emprise des grands monopoles.

La présidence lituanienne est prête à préparer l'inévitable transition, en 2014, de la PAC et de la politique commune de la pêche. Nous approuvons les accords trouvés à ce sujet, qui permettront une meilleure utilisation des ressources disponibles.

La directive sur l'évaluation des incidences sur l'environnement a une importance majeure pour l'économie. Aussi suivrons-nous attentivement les débats à ce sujet, tout comme ceux de la 19e Conférence sur le changement climatique, à Varsovie.

Chacun sait l'importance du partage des bonnes pratiques en matière d'éducation. La conférence sur la jeunesse que nous avons prévu d'organiser en octobre à Kaunas y contribuera. On y traitera en particulier de l'avenir du programme Erasmus.

La présidence lituanienne a déjà engagé ses travaux, vous le savez et nous avons eu grand plaisir à vous accueillir à Vilnius à l'occasion de la » petite » COSAC, Madame la présidente. Nous préparons maintenant la Le COSAC, qui aura lieu à Vilnius en octobre ; les personnalités politiques invitées traiteront des élections européennes de 2014.

La conférence interparlementaire sur « la politique étrangère et de sécurité commune et la politique de sécurité et de défense commune » aura lieu en septembre, et la conférence budgétaire interparlementaire en octobre. J'espère que la dimension interparlementaire affirmée de notre présidence contribuera à renforcer le rôle des parlements nationaux. La Lituanie s'est dotée d'un système de contrôle parlementaire calqué sur le modèle finlandais ; nous sommes encore loin de la perfection, mais nous pouvons déjà partager nos bonnes pratiques.

J'en viens aux questions que vous m'avez posées. La présidence lituanienne sera, bien sûr, attentive à l'évolution de la PAC et singulièrement aux mesures transitoires prévues pour s'appliquer en 2014.

Pour ce qui concerne l'énergie, nous comptons sur la contribution de tous les États membres. Sans volet « énergie », le marché unique européen demeure inachevé. L'accès à l'énergie est une des libertés européennes ; dans un monde globalisé, ne pas réaliser la communauté européenne de l'énergie serait s'exposer à de graves déboires. Depuis l'an 2000, le prix de l'énergie a augmenté de 30 % au sein de l'Union européenne, contre 3 % seulement aux États-Unis et 5 % au Japon. Nous devons parler d'une seule voix pour pouvoir négocier avec nos fournisseurs.

L'Union européenne ne peut méconnaître les intérêts et les besoins des citoyens. Nous ne devons abaisser la barre ni au sein de l'Union ni dans nos discussions avec les pays voisins. Cependant, je rentre d'un voyage en Ukraine. On y discute des droits des minorités, mais la pression européenne en faveur de la reconnaissance des droits des minorités sexuelles est perçue comme une pression en faveur de la légalisation du mariage pour tous et suscite l'incompréhension. Le débat sur les questions de ce type doit avoir lieu dans chaque pays selon un calendrier national. Dans certains États, la question était en discussion depuis des décennies ; le débat doit, partout, venir à son terme sans précipitation.

La Biélorussie s'est isolée en s'éloignant comme elle l'a fait du modèle démocratique européen. Cependant, l'opposition continue d'entretenir des liens avec la Lituanie et exprime un fort soutien au partenariat oriental – lequel ne doit pas se renforcer au détriment du partenariat méditerranéen. La Lituanie est engagée dans le débat sur la libéralisation de l'octroi des visas aux ressortissants de certains pays et aux accords de réadmission des personnes en séjour irrégulier. L'Union européenne ne peut se permettre une fracture territoriale ; la France jouera un rôle particulier dans le partenariat méditerranéen, et la Lituanie dans le partenariat oriental.

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