Plusieurs questions portent sur le financement. L'écoulement de la majorité des crédits sera lent, puisqu'il faudra faire des appels à projets, puis les contractualiser, avant de verser les sommes. Notre plan n'est pas un plan de relance. Même si l'investissement a un effet réel sur l'économie, notre but n'est pas de dépenser le plus vite possible les fonds dont nous disposons. À cet égard, mon prédécesseur et moi-même, tout comme MM. Michel Rocard et Alain Juppé, sommes sur la même ligne. Il s'agit de financer des projets collaboratifs, qui associent plusieurs partenaires, ce qui prend nécessairement plus de temps que de distribuer des subventions au premier venu. Notre démarche est avant tout sélective.
Les financements grandiront à partir de 2016. Le PIA II prendra le relais du PIA I, qui représente 4 milliards d'euros par an pour 2013, 2014 et 2015, et maintiendra le même type de volume en 2016 et 2017. Quand ses financements diminueront à leur tour, se posera la question de savoir s'il faut un PIA III. Les deux premiers PIA se fixent un objectif de dix ans, qui est glissant, ce qui signifie qu'un nouveau programme peut être défini dans quatre ou cinq ans.
Sur le plan macroéconomique, monsieur Woerth, emprunter à un taux très bas pour financer de l'investissement et emprunter pour combler un déficit budgétaire ne relève pas de la même démarche. Vous aurez d'ailleurs remarqué que les économistes n'ont pas pipé : si les investissements que nous faisons de la sorte s'avèrent rentables, cette rentabilité aura une bonne chance d'être supérieure aux taux d'intérêt actuels.
Cela pose la question de l'évaluation des projets que nous finançons. Les procédures d'évaluation que nous avons définies donneront leurs premiers résultats en 2014. Il va sans dire que je vous les exposerai puisque, comme il est normal, nous travaillons sous le regard vigilant de la représentation nationale ; beaucoup d'argent public est en jeu, et il doit produire les effets escomptés.
Il est compliqué de dresser un bilan chiffré de notre action à ce jour. Je pourrais bien sûr vous donner le nombre de brevets déjà déposés par les sociétés d'accélération du transfert de technologies, mais ce ne serait qu'une évaluation très partielle du mouvement engagé. Je constate que des choses se font qui n'existaient pas et que des gens travaillent ensemble qui s'ignoraient. Je réponds ainsi à la question de Mme Valérie Pécresse : les relations entre la recherche et l'entreprise se modifient progressivement à mesure que la mentalité des chercheurs évolue et que les entreprises perçoivent l'intérêt qu'elles trouvent à travailler avec le monde académique. C'est un acquis substantiel. Lorsque je visite un laboratoire qui travaille sous la double tutelle du CNRS et de Safran, ou bien l'IRT BioAster, spécialisé en infectiologie, où se côtoient Sanofi, l'Institut Mérieux et l'INSERM, je constate que nous progressons. Nous suscitons le changement en créant des synergies précédemment inexistantes entre recherche et industrie. Je souhaite que nous enclenchions une articulation du même type entre formation initiale et formation continue.
La stabilité fiscale, monsieur le président, ne relève pas de moi mais du Parlement. J'avais indiqué que cinq dispositifs fiscaux devraient ne pas être modifiés. Cela a été repris dans le pacte, et j'observerai avec intérêt le test grandeur nature que sera la loi de finances pour 2014.
À la fin de l'année, plus de 1 milliard d'euros auront été alloués au titre du CICE. La BPI reçoit 120 dossiers chaque jour. On peut juger ce nombre insuffisant, en ce que le dispositif ne changera pas la donne du financement des entreprises en France. Cela étant, il s'agit d'un préfinancement, et il supporte un taux d'intérêt ; ne demandent donc à en bénéficier que les entreprises qui ont besoin de trésorerie, les autres n'y ayant pas intérêt. Aussi, le fait que les dossiers nous arrivent en nombre supérieur à celui qui était escompté est un indicateur des difficultés de trésorerie des entreprises. Je rappelle que l'enveloppe du CICE sera de 14 milliards d'euros en 2014 et de 20 milliards les deux années suivantes – une tout autre échelle.
Je suis incapable, monsieur le rapporteur général, de répondre à votre question relative à l'intégration du CICE dans la réserve spéciale de participation. Je me renseignerai.
Il se peut que la montée en puissance des crédits à l'export alloués par la BPI ait été plus lente que nous ne l'aurions souhaité. C'était une responsabilité nouvelle pour la banque ; il a fallu transférer en son sein le personnel spécialisé d'Ubifrance et créer les structures adéquates.
Il ne nous revient pas, en effet, de procéder aux évaluations. Aussi bien les IDEX sont-elles évaluées par le comité qui les a choisies. Ce comité, présidé par le président de l'École polytechnique fédérale de Lausanne et qui compte une très forte proportion de personnalités étrangères, est absolument indépendant du commissariat général. J'ai par ailleurs demandé l'évaluation du commissariat général lui-même ; l'audit est en cours et j'espère que des préconisations nous permettront d'améliorer notre fonctionnement.
La nature des structures de rapprochement des universités n'a pas d'impact sur les IDEX.
Le CICE est-il correctement ciblé ? Ce n'est pas le dispositif que j'avais proposé, vous le savez. Le Gouvernement a choisi une mesure visant à la fois la compétitivité et l'emploi ; il fallait donc viser les entreprises de main-d'oeuvre, si bien que le CICE est destiné à toutes les entreprises de France, en fonction de leur masse salariale. J'ai cru comprendre à ce sujet que La Poste se verra reprendre ce qu'elle a acquis par le biais du CICE…
Je ne crois pas du tout à un impact des contrats d'avenir ou de génération sur l'apprentissage ; les financements ne sont pas les mêmes. Il serait bon en revanche de s'interroger sur les destinataires de la taxe d'apprentissage. Je parle d'expérience, puisque EADS répartissait la sienne entre Supélec, l'École Centrale, HEC et d'autres écoles du même type. Même si, comme c'est le cas, ces écoles font de l'apprentissage, ce n'est pas exactement l'objectif initialement prévu pour cette taxe. Autrement dit, notre enseignement supérieur est financé pour partie par la taxe d'apprentissage, et ce sont autant de ressources diverties du financement de l'apprentissage lui-même.
Nous nous attacherons, monsieur Mandon, à vous donner une vision globale de notre action. C'est au Parlement qu'il revient de débattre de la stratégie d'innovation du pays et nous sommes prêts à contribuer à cette discussion. Sur ces questions, un consensus politique doit se dégager pour permettre des politiques durables et persévérantes ; il suppose un débat national.
Il y aura une double évaluation : de notre fait, et indépendante.
Vous indiquez, madame Rabin, que la moitié des entreprises disent ne pas connaître le CICE. Mais comment le faire connaître davantage ? Jamais un dispositif n'a été si largement expliqué par les chambres de commerce et les chambres de métiers, et les préfets de région ont multiplié les réunions d'information. Je sais la difficulté que l'on éprouve à faire « percoler » une mesure, mais je ne peux laisser dire que le CICE n'aurait pas fait l'objet de la communication adéquate. Assez faible au début, elle est devenue massive.
La BPI est assez largement déconcentrée et décentralisée, mais elle est soumise à des règles prudentielles qui lui interdisent d'engager des fonds sans avoir l'espoir raisonnable de les récupérer. Il faut conserver une certaine cohérence nationale.
Je pense, comme vous, que les régions se mobilisent en faveur de l'apprentissage et que ces questions se règlent beaucoup mieux à ce niveau qu'au niveau national.
L'engagement des 18 milliards d'euros encore disponibles se fera selon des règles inchangées, monsieur Woerth. Le deuxième programme d'investissements prendra le relais du premier. J'ai compris qu'une partie du produit de la vente des participations de l'État serait affectée à son financement ; pour le reste, l'État ajustera sa capacité d'emprunt à la période et à la réaction possible des marchés.
Il est effectivement très difficile de mesurer le retour sur investissement induit par le regroupement des universités. Nous devons suivre très attentivement les opérations dans lesquelles nous avons investi, et savoir interrompre les projets qui ne se déroulent pas comme prévu. Dans le domaine de l'innovation, on connaît des échecs, et il peut se produire aussi que les bénéficiaires de financements ne respectent pas leurs engagements. Notre capacité à nous retirer dans ces cas sera l'un des indicateurs de la pertinence de notre action.
Le débat sur la baisse des charges salariales est ancien. À cet égard, on note, entre 2000 et 2012, une divergence de 10 % à 12 % entre la France et l'Allemagne. Ce résultat est dû pour un tiers au transfert de charges sur la fiscalité, et pour deux tiers à la modération salariale dans les entreprises. Autant dire que deux tiers du chemin ont été faits par celles-ci, ce qui prouve que le transfert de charges n'est pas une solution miracle. Vous ne l'avez d'ailleurs pas présenté comme tel, monsieur Woerth. Vous avez souligné au contraire que toutes les mesures devaient intervenir en même temps.
Monsieur Castaner, la désintermédiation sera un problème majeur dans les années à venir, puisque les banques se retireront du financement des entreprises, qu'elles assurent, dans notre pays, à plus de 70 %. On devra donc trouver des ressources alternatives pour le haut comme pour le bas de bilan. La BPI ne parviendra pas seule à régler le problème. Il faudra imaginer des solutions pour orienter l'épargne à long terme vers les entreprises. Certaines propositions du rapport Berger-Lefebvre vont dans ce sens. Les nouvelles dispositions qui encadrent les compagnies d'assurance permettront à celles-ci de revenir vers ce secteur qu'elles ont déserté.
Certaines CCI jouent un rôle actif pour organiser le mentoring des patrons de PME, qui me semble essentiel. À mon sens, il est beaucoup plus difficile de diriger une PME qu'un grand groupe. Dans le premier cas, on est seul, au lieu d'être entouré, et le risque intervient à l'échéance du jour ou de la semaine, et non de l'année.
Monsieur Vigier, je relie le choc de confiance au choc de simplification. La complexité est si élevée dans notre pays que la simplification comme la stabilisation ne relèvent plus du domaine technique. Elles appartiennent désormais au domaine politique. Cela dit, je ne sous-estime pas la difficulté de supprimer les règlements, car chacun d'eux est justifié. Ainsi, monsieur Tardy, je rejoins votre avis sur l'interdiction faite aux mineurs de travailler sur des machines dangereuses, d'autant que les représentants de l'Union professionnelle artisanale m'ont confirmé que les réglementations de sécurité dissuadent les entreprises de prendre des apprentis, mais celui qui prendrait la responsabilité de faire remonter des mineurs sur des échelles serait incriminé au premier accident.
Nous veillons à ce que le PIA n'évolue pas vers le financement des dépenses de fonctionnement, mais nous n'avons pas reçu d'alerte significative sur le sujet. En revanche, il faut lutter contre la débudgétisation, car les ministères, qui sont dans une situation difficile, se tournent nécessairement vers les acteurs qui ont de l'argent. En outre, il n'est jamais simple de savoir ce qui relève ou non du budget. Nous cantonner à notre spécificité est notre meilleure protection.
Sur le numérique, la somme de 600 millions d'euros n'est pas négligeable, d'autant qu'en cumulé, on atteint 4,2 milliards, dont 2 pour le haut débit. Évitons de considérer les deux PIA indépendamment l'un de l'autre.
Nous travaillons sur la notion d'éco-conditionnalité, dont nous cherchons à savoir si elle inclut la consommation d'énergie, la consommation de dioxyde de carbone, les nuisances sonores ou la sécurité sanitaire. Entre ces critères qui peuvent tous être retenus, il faut trouver le juste équilibre.
Dans le PIA II, le montant considérable de 2,3 milliards d'euros est dédié à la transition énergétique, après l'effort de près de 5 milliards consenti dans le PIA I. Nous investissons massivement dans les énergies renouvelables, en finançant toute l'innovation, notamment les éoliennes offshore, les hydroliennes et la biomasse. Nous poursuivrons cet effort, à condition de trouver de bons projets.
M. Carré connaît fort bien les investissements d'avenir, puisqu'il siège au comité de surveillance depuis plus longtemps que moi. C'est à juste titre qu'il a évoqué le risque de débudgétisation, et souligné la continuité des décisions, même si le Gouvernement peut en infléchir certaines. Nous travaillons toujours sur l'innovation et les actions transformantes, grâce à des appels à projets sélectionnés par des jurys indépendants.
Madame Dessus, je sortirais de mes attributions si je vous répondais sur le système bancaire, mais je suis conscient du problème que poseront à moyen terme la désintermédiation et le retrait des banques, du fait des règles prudentielles imposées par Bâle III.
Monsieur Lamour, dans le PIA II, nous espérons améliorer le ratio d'un euro levé pour un euro investi. C'est déjà le cas pour le PIA I, puisque nous nous redéployons davantage vers l'aval, et que nous allons vers le capital investissement, c'est-à-dire le capital-risque ou le capital développement.
Je ne gère ni la somme de 5 milliards d'euros consacrée au transport ni celle de 1,5 milliard dédiée au Grand Paris, pas plus que je ne m'occupe du compteur Linky, qui sera pris en charge par EDF. En revanche, nous avons financé quelques projets emblématiques destinés à partager avec le consommateur une information orientée a priori vers le fournisseur d'électricité. Nous avons tenté des expériences dans ce domaine, mais il faut encore y apporter des progrès technologiques.
Monsieur Fauré, nous n'avons pas traité le problème des normes industrielles, qui est central. Lors du cent vingt-cinquième anniversaire de Daimler-Benz, qui a été mon actionnaire, trois personnes étaient sur la scène : M. Dieter Zetsche, le patron de l'entreprise, Mme Benz, arrière-petite-fille de son fondateur, ainsi que le patron des normes et des brevets. En France, inviterait-on son homologue aux cent ans d'Alstom ? C'est parce que le sujet paraît décisif en Allemagne, que, dans certains cas, comme celui des prises de recharge des véhicules électriques, nous avons dû adopter les normes allemandes, alors même que nous produisons plus d'automobiles électriques que nos voisins.