Je me félicite à mon tour du déroulement de la mission d'information sur cette question difficile de la santé mentale, qui relève à la fois des libertés individuelles, de la protection des personnes et de la sécurité publique.
L'encadrement légal des soins psychiatriques concerne dans notre pays 70 000 personnes. L'hospitalisation sous contrainte ne concerne qu'une minorité de nos concitoyens face aux 3 millions de personnes suivies en psychiatrie et aux 600 000 qui sont hospitalisées, dont 85 % de leur plein gré. Tout au long des travaux de la mission d'information, nous avons mis l'humain au centre de nos préoccupations.
Certaines dispositions de la proposition de loi vont dans le bon sens : la tenue de l'audience à l'intérieur de l'hôpital, la réduction de 15 à 10 jours du délai dans lequel le juge doit statuer et l'accompagnement du patient par un avocat, mais ces deux dernières étaient déjà prévues dans la loi de 2011.
Je souhaite centrer mon intervention sur l'une des principales mesures du texte qui concerne les personnes hospitalisées sous contrainte et qui sont considérées comme étant particulièrement dangereuses pour la société, mais également pour elles-mêmes – 4 000 personnes par an se suicident en France. J'insiste sur ce point car je ne voudrais pas que mon intervention soit comprise comme un exercice purement sécuritaire.
Je veux aborder le cas des malades reconnus pénalement irresponsables qui sont déjà passés à l'acte et ont été admis dans une unité pour malades difficiles en soins sans consentement sur décision d'un représentant de l'État. Le Conseil constitutionnel, suite à une question prioritaire de constitutionnalité, a censuré deux articles du code de la santé publique portant sur les conditions d'admission et de sortie de ces personnes et a demandé au Gouvernement de préparer, dans un délai de 18 mois, une nouvelle rédaction de la loi. Nous en avions largement le temps, mais nous avons examiné un nombre impressionnant de textes d'un intérêt moindre et nous nous retrouvons en plein été à traiter d'un sujet très complexe dont nous allons débattre le dernier jour de la session extraordinaire. Je le regrette car il s'agit d'un texte important qui a trait aux libertés publiques.
Le texte que nous examinons aujourd'hui n'est pas totalement conforme, me semble-t-il, à l'esprit du rapport d'étape qui nous a été présenté il y a quelques semaines, en particulier sur la question des unités pour malades difficiles. Le Conseil constitutionnel n'a jamais empêché le législateur de prévoir pour certaines catégories de patients des mesures dérogatoires plus strictes dès lors qu'il s'agit de protéger la société des personnes qui pourraient représenter un danger, il lui a simplement demandé de prévoir des garanties suffisantes pour les malades. L'article L. 3222-3 du code de la santé publique manquait de précision, ce qui a amené la mission d'information à proposer d'introduire dans cet article de nouveaux critères et des procédures d'admission pour les malades en UMD. Or c'est précisément le contraire qui nous est proposé aujourd'hui avec la suppression de cet article.
L'encadrement qui nous est proposé prévoit des conditions spécifiques pour les malades ayant commis des actes pour lesquels les peines encourues sont d'au moins cinq ans d'emprisonnement s'agissant des atteintes à la personne et de dix ans d'emprisonnement s'agissant des atteintes aux biens. Il s'agit donc de malades très dangereux. Quant aux malades qui seront condamnés à deux ou trois ans d'emprisonnement, ils pourront sortir beaucoup plus facilement, ce qui pose un problème de sécurité.
Ce changement de régime ne nous paraît pas cohérent et ses conséquences n'ont pas été envisagées. Je le regrette car le groupe UMP était plutôt favorable aux préconisations de ce texte.