Je vous remercie de nous donner l'occasion de nous faire entendre en ces murs. Je rappelle à mon tour que la révolution a commencé pacifiquement et que les manifestants désarmés ont dû affronter les balles du régime, qui a ensuite envoyé l'armée humilier et tuer des civils en tous lieux. Se sont alors créées de petites unités combattantes munies d'armes légères, qui accompagnaient les manifestants pour les protéger et ne tiraient que si la manifestation était prise sous le feu de l'armée et des forces de sécurité. Puis, malheureusement, le régime refusant toute solution politique et pensant étouffer le mouvement par la violence, la révolution a dû se militariser.
Le nouveau commandement de l'Armée syrienne libre – ASL – a été installé le 6 décembre 2012. Elle a à sa tête un Haut Conseil militaire de 30 membres, soit six membres pour chacun des cinq fronts : le front Sud, celui de Homs, celui de Hamâh et de la côte, le front Nord et le front Est. Le chef d'état-major dirige dix directions spécialisées. Chacun des fronts est commandé par un officier ayant fait défection de l'armée régulière, assisté d'un civil. Des cinq commandements dépendent quatorze conseils militaires ; chacun est également dirigé par un officier défectionnaire assisté d'un civil et c'est à leurs ordres qu'obéissent les combattants.
Le manque de moyens contraint l'ASL à un fonctionnement décentralisé, le rôle dévolu à l'état-major étant de coordonner et d'aider les forces combattantes à partir des salles d'opérations militaires réparties dans toutes les régions et reliées à la salle d'opération principale. Nous distribuons le peu d'armes et de munitions dont nous disposons selon un plan d'action stratégique, mais la très grande faiblesse de nos moyens financiers, la pénurie d'équipements de communication et notre approvisionnement lacunaire en armes et en munitions entravent notre action.
Notre premier objectif est de défendre la population civile, et ce qui reste de notre pays détruit à 60 %. Notre deuxième objectif est de renverser le dictateur de Damas pour établir un régime démocratique et libre, un État civil garantissant l'égalité et la liberté de tous les Syriens, qu'ils soient chrétiens, sunnites, chiites, alaouites ou druzes. Nous oeuvrons aussi à la reconstruction du pays avec l'aide de nos frères.
L'ASL considère la Coalition nationale syrienne comme l'instance politique légitime sous l'égide de laquelle elle opère. Après la chute du régime de Bachar al-Assad, l'armée aura pour mission de défendre le pays ; elle n'aura pas le droit d'intervenir dans le champ politique, une tâche qui, comme dans tout pays civilisé, reviendra aux civils. Il n'est pas question d'une autre dictature avec la prise de contrôle du pouvoir par les militaires.
Je vous ai dit les difficultés que rencontre l'ASL : la faiblesse de nos moyens militaires – nous ne disposons que de quelques armes de moyenne portée et de quelques armes lourdes prises aux forces du régime –, l'absence de système de télécommunication, le manque d'approvisionnement en médicaments et autres matériels.
C'est ainsi que nous combattons pour faire face au régime criminel auquel, récemment, se sont alliées des forces criminelles avec, à leur tête, le Hezbollah qui envoie des combattants partout en Syrie. La Syrie est aujourd'hui un pays occupé, sous hégémonie iranienne. C'est Ali Khameini qui décide ce qui s'y passe et son bras armé, le Hezbollah, mène toutes les opérations militaires terrestres, soutenu par la chasse du régime, des missiles SCUD, des missiles, des canons, des chars… Autant dire que nous avons accueilli très favorablement l'inscription de la branche armée du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes de l'Union européenne. Il faut toutefois savoir que ce parti extrémiste religieux terroriste représente dans sa totalité un danger pour toute la région. Une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies visait d'ailleurs au désarmement du Hezbollah au Liban, en vertu du chapitre VII de la Charte. Parce que les armes du Hezbollah sont maintenant utilisées pour massacrer le peuple syrien, nous demandons l'application de cette résolution et l'aide de nos amis, et en premier lieu de la France. Nous demandons votre soutien militaire et diplomatique pour mettre fin à un régime criminel qui massacre le peuple et détruit le pays, employant pour cela, outre des missiles SCUD, des armes chimiques. Il y a deux jours encore, une attaque à l'arme chimique a été documentée ; elle faisait suite à une attaque du même type, lancée il y a une semaine, et pour la sixième fois, dans le quartier al-Khaldihya de Homs, encerclée.
La Syrie s'est révoltée pour promouvoir la démocratie, la liberté, la justice et un État civil. Nous refusons l'extrémisme sous toutes ses formes et j'affirme qu'en dépit de tout ce qui a pu être dit sur les groupes terroristes à l'oeuvre en Syrie, ils ne représentent pas plus de 3 % à 5 % des combattants. Le Front Al-Nusra lui-même est scindé en trois groupes. L'un est une fabrication du régime, dont il prend les ordres, nous en avons la preuve ; l'autre, dit « l'État islamique en Irak et au Levant », extrêmement dangereux, mène des opérations terroristes contre la population civile sur la côte, autour de Idlib et à l'Est du pays ; le troisième est porteur d'une idéologie que nous récusons.
Tarder à aider le peuple syrien, c'est faire monter des périls d'une extrême gravité pour toute la région. Le premier danger, c'est la poursuite des massacres, alors que nous déplorons déjà plus de 150 000 martyrs et que plus de 7 millions de Syriens sont déplacés ou réfugiés dans les pays voisins. Le deuxième danger qui se profile très nettement, c'est la montée de l'extrémisme chiite dans la région. Le troisième, c'est le Hezbollah iranien. J'espère que cette aide viendra sans retard, pour aider le peuple syrien à obtenir sa liberté et à travailler avec ses alliés à l'édification d'une société syrienne démocratique.