Intervention de François Brottes

Réunion du 25 juillet 2013 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes, président :

Je ne demande pas à ceux qui ne vivent pas dans ces territoires d'en partager les problèmes au quotidien. Je suis d'ailleurs moi-même ignorant de nombreuses réalités locales que je ne puis comprendre : j'ai par exemple du mal à vivre à Paris. Et si j'aime voir le bord de mer, je n'en comprends pas les contraintes. Mais il est des gens qui vivent aujourd'hui avec la neige ! Et s'ils subissent de plus en plus de contraintes, c'est parce qu'ils sont de moins en moins nombreux et, par conséquent, que les services et les écoles ferment, que les médecins s'en vont et que les épiceries disparaissent. Si l'on ne maintient pas dans nos villages de montagne un minimum de liens intergénérationnels, de densité et d'activité humaines, il n'y aura plus rien demain. Si l'objectif que l'on partage est de faire en sorte que ces villages se ferment définitivement, il n'y a qu'à laisser faire ! Mais ce n'est pas là ce que vous avez affirmé.

Aujourd'hui, les hameaux ne sont pas desservis par les corbeaux : on y a installé des autorités organisatrices des transports qui assurent le ramassage de leurs habitants. Les choses sont donc organisées. Et je ne dis nullement qu'il faille isoler les habitants encore davantage qu'ils le sont déjà. Nous poursuivons au contraire un objectif de reconquête de la vie humaine sans re-bétonner le territoire. Il s'agit ainsi de s'approprier des espaces dépourvus de la moindre valeur sylvicole ou agricole – et ce avec parcimonie et à bon escient, quitte à ce que seule la ministre puisse en décider. Car enfin, la situation est complètement bloquée ! Il ne s'agit pas d'ouvrir une boîte de Pandore et je suis même prêt à revoir la rédaction de mon amendement. Mais que l'on puisse au moins se poser la question sans avoir le sentiment que l'on a écrit un gros mot ou que l'on vise à changer complètement la donne des paysages.

Ayant analysé sur cet aspect la chaîne de Belledonne avec l'ensemble des acteurs concernés, nous n'y avons repéré que trois espaces de ce type. Car il ne s'agit pas de reconquérir avec l'urbanisation tous les terrains repris par la forêt à l'agriculture. Encore une fois : priorité à l'agriculture !

Mon argumentation vaut d'ailleurs aussi pour le pastoralisme : lorsque l'on souhaite aujourd'hui le reconquérir et remonter les bêtes en alpage, on se voit opposer l'argument selon lequel la forêt constitue désormais un espace boisé classé. Il n'est donc plus possible de conquérir des espaces de pâturage, pas plus qu'il n'existe de possibilités de conquête pour la vie humaine installée dans quelques maisons isolées dans un hameau.

Afin de vous rassurer, je vais retirer mon amendement, non pas parce que c'est le code rural et de la pêche maritime qu'il vise à modifier, mais parce que je souhaite que nous partagions cette préoccupation et que nous y travaillions sérieusement dans le cadre du présent projet de loi, peut-être d'ici à sa deuxième lecture. Car c'est bien d'urbanisation qu'il s'agit et nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation de sanctuarisation où plus rien n'est possible, ni pastoralisme ni « renouvellement urbain » – non pas au sens habituel où on l'entend, d'urbanisation des grandes villes, mais dans le sens de la construction de maisons ou de la reconquête de ruines. Et je ne suis pas en train de dire qu'il nous faudrait loger des millions d'habitants dans les montagnes, car le maintien de la vie dans un village ne se joue en réalité parfois qu'à quelques unités près.

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