Intervention de Philippe Vigier

Séance en hémicycle du 12 juin 2013 à 15h00
Conditions de privatisation de la société nationale corse méditerranée — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vigier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette proposition de résolution du groupe RRDP propose la création d’une commission d’enquête afin de connaître les conditions dans lesquelles la privatisation de la SNCM a eu lieu.

Comme l’ont rappelé les précédents orateurs, la SNCM est un opérateur indispensable qui joue un rôle majeur de transport vers la Corse, la Sardaigne, l’Algérie et la Tunisie. Cette société est en grande difficulté, puisqu’elle est à deux doigts de mettre la clé sous la porte.

L’objet de cette commission d’enquête est de comprendre comment nous en sommes arrivés là.

À sa création, la SNCM était une entreprise publique détenue à 75 % par la Compagnie générale maritime et à 25 % par la SNCF. En 2005, sa privatisation a été engagée sur la base d’une procédure de vente de gré à gré. En 2006, la Commission européenne avait validé cette vente, et l’État s’est donc retrouvé propriétaire à hauteur de 25 % de la SNCM.

Mais la SNCM a connu des difficultés majeures, et elle a enregistré un déficit de 12 millions d’euros en 2012. Pire, des décisions graves viennent d’être prises au niveau de l’Union européenne. Tout d’abord, par un jugement du 11 septembre 2012, le Tribunal de première instance a annulé la décision prise en 2008 par la Commission européenne approuvant la recapitalisation et la privatisation de la SNCM. Cela signifie qu’il pourrait être exigé que 230 millions de concours publics soient remboursés.

De plus, la région Corse avait apporté un financement de 230 millions d’euros au titre des services complémentaires. La Commission a requalifié ce financement en aide d’État. Ce sont donc 450 millions d’euros qui doivent être remboursés, alors que le chiffre d’affaires de la compagnie n’est que de 300 millions d’euros. Près de 1 700 emplois sont en jeu, c’est donc un véritable drame social et économique pour le principal employeur de cette région.

À nos yeux, cette commission d’enquête sera chargée de faire la lumière sur les conditions de cette privatisation. Dans la mesure où la stratégie de prise de participation de l’État et de privatisation s’est soldée par un échec, je crois qu’il faut rendre des comptes au contribuable français. Il me paraît donc indispensable d’éclairer la représentation nationale sur les incertitudes qui entourent la privatisation de la SNCM.

La première question à laquelle il faudra répondre, et je souhaite que nous puissions avoir les éléments nécessaires, est de savoir dans quelles conditions s’est passée cette vente de gré à gré. Comment se fait-il que la représentation nationale n’ait pas été consultée à ce moment ?

Nous devrons également nous interroger sur le rôle des acteurs de cette privatisation. Ainsi, le fonds d’investissement Butler capital partners, après être entré au capital à hauteur de 38 % pour un montant de 13 millions d’euros, a revendu ses parts quelques années plus tard, en 2008, pour un montant de 73 millions d’euros. Cela représente une plus-value de 60 millions d’euros en trois ans.

Il faudra tenir compte des enseignements sur les dysfonctionnements éventuels de cette privatisation pour qu’à l’avenir, l’État intervienne à bon escient. Nous répétons souvent que nous avons besoin d’un État stratège, qui protège l’emploi, et pas d’un État mauvais gestionnaire et qui fragilise l’emploi.

Dans cette situation difficile, sachant que nous ne pouvons pas laisser 1 700 personnes risquer de perdre leur emploi et que nous avons besoin de cet opérateur, nous sommes favorables à la création de cette commission d’enquête sur les conditions de privatisation de la SNCM afin que toute la clarté puisse être faite sur cette affaire.

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