Intervention de Henri Plagnol

Séance en hémicycle du 3 octobre 2012 à 15h00
Ratification du traité sur la stabilité la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Plagnol :

…le groupe UDI votera unanimement la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire. Pour nous, c'est un oui du coeur car nous sommes fiers d'être le porte-drapeau de ceux pour qui l'Europe est le choix du coeur avant d'être celui de la raison.

Monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, je me réjouis de votre conversion à ce traité. Certes, il s'agit d'une demi-conversion, avec beaucoup de postures, de palinodies, de regrets, de surenchères et de prétentions sur lesquelles le président de notre groupe, Jean-Louis Borloo, a tout dit hier, de façon admirable et drôle. Je n'y reviendrai donc pas. Il reste que vous allez honorer la parole de la France – enfin ! –, et nous vous soutiendrons.

J'ai bien compris que vous vous adressiez plutôt aux membres réticents de votre majorité, et j'avoue avoir été attristé par le symbole très regrettable de l'abstention à titre personnel de la présidente de la commission des affaires européennes. Une telle position est choquante, surtout à propos d'un texte qui vise notamment à encourager le contrôle parlementaire.

Nous votons pour la ratification de ce traité, parce que c'est un bon traité. Je voudrais faire litière des regrets de ceux qui craignent qu'il porte atteinte à la souveraineté nationale. Ce débat est totalement dépassé. Quelle souveraineté illusoire, en effet, que celle d'une nation qui prétendrait répondre seule à la crise de la zone euro !

Que signifie refuser un traité qui ne fait qu'inscrire, enfin, l'Union économique, pilier manquant tragiquement à l'Union monétaire depuis la création de l'euro ?

Surtout, cessons de faire croire à nos concitoyens que, par nature, les institutions européennes seraient illégitimes. Ce procès n'a que trop duré. Les instances européennes sont doublement légitimes. Elles le sont parce qu'elles procèdent du choix de chefs d'État et de gouvernement eux-mêmes élus, et parce qu'elles sont investies par la majorité du Parlement européen.

Les instances européennes sont donc parfaitement démocratiques et nous, à l'UDI, nous n'avons pas peur de dire qu'il faut aller vers un partage de la souveraineté, notamment dans le domaine économique, et que sinon, la zone euro éclatera tôt ou tard.

Par ailleurs, c'est un bon traité pour la France, et les Français le savent bien. Vous avez du reste rappelé, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, que, massivement, les Français veulent son adoption. Au moment où l'on demande aux peuples des sacrifices, il est tout de même extraordinaire et très encourageant de constater que tous les peuples de la zone euro, y compris ceux qui font le plus de sacrifices, veulent y rester. Ils ne veulent surtout pas la quitter, parce qu'ils savent bien que ce serait pour eux le début d'une catastrophe.

En réalité, l'indépendance d'une nation, vous l'avez dit, monsieur le ministre, est d'abord commandée par la capacité à réduire sa dette et ses déficits. Ce traité ne fera qu'inscrire des principes de bonne gestion – règle d'or, contrôle mutuel –, des principes de responsabilité. Il ne peut y avoir d'Union économique s'il y a d'un côté les payeurs – les contribuables allemands, français et de l'Europe du Nord – et de l'autre, les emprunteurs, qui n'auraient jamais à rendre des comptes. Cela n'a pas de sens et ne peut marcher longtemps.

Je rappelle que, si l'on parle souvent de l'Allemagne, la France a déjà donné comme garantie pour plus de 150 milliards d'euros d'emprunt. Pour les contribuables et les épargnants français, il est donc important d'aller vers davantage de contrôle mutuel.

L'essentiel, maintenant, c'est que la France cesse d'être silencieuse sur l'avenir de l'Europe, qu'elle cesse d'être à l'arrière-garde, le dernier pays à ratifier ce traité. Il faut aller plus loin, et pour cela il y a deux conditions.

La première, c'est que la France ne s'isole pas par des choix économiques et sociaux uniques en Europe. On ne peut pas prétendre, comme vous l'avez fait, souhaiter davantage de convergence fiscale et sociale si la France est le seul pays à augmenter massivement ses prélèvements obligatoires et à différer plus longtemps les réformes de compétitivité que lancent courageusement l'Espagne, l'Italie, le Portugal, l'Irlande et l'ensemble de la zone euro.

Le Premier ministre et le Président de la République ont récemment dit qu'ils allaient, avec les partenaires sociaux, esquisser des réformes pour redonner à la France sa compétitivité. Souhaitons que ces réformes aillent dans le sens de l'Europe et ne renforcent pas la désastreuse exception française qui veut que nous soyons le pays dont les prélèvements obligatoires détiennent le triste record en Europe. Cela ne peut plus continuer.

La seconde condition, c'est que la France saisisse la main tendue par l'Allemagne et dise, enfin, au-delà du concept fumeux d'intégration solidaire que vous avez évoqué, monsieur le ministre, ce qu'elle propose comme vision pour une Europe plus fédérale. Jusqu'à présent, le silence de la France déconcerte nos partenaires, qu'ils soient au sud ou au nord.

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