…enseignée et transmise. Oui, nous avons collectivement failli, souvent par laxisme – et je crains, monsieur le ministre que ce ne soit encore votre cas aujourd'hui – mais aussi par une naïveté coupable, car le règne de l'individualisme, le droit absolu de tout faire au nom de son droit nous a conduits à refuser de voir la montée du « poison du communautarisme », selon l'expression très juste de Jean-Louis Debré.
Face à ce danger, il fallait réagir. C'est l'honneur de notre Parlement de l'avoir compris. Il a cependant fallu agir avec opiniâtreté, car l'aveuglement qui perdure encore sur certains bancs était total, notamment au sein de l'éducation nationale, tour d'ivoire qui s'est toujours crue immunisée des tendances de la société.
Le 23 mai 2003, j'ai organisé le colloque « La laïcité au coeur de la République. » Il a fait l'objet d'une publication dont je vous recommande la lecture. Jean-Louis Debré y écrivait que la « laïcité n'est ni faiblesse, ni démission, c'est une laïcité exigeante comme on l'a peut-être trop facilement oublié. Cette laïcité repose, en effet, sur une double exigence : celle de la liberté de l'individu de croire ou ne pas croire, de penser comme il l'entend et donc de s'exprimer librement ; celle ensuite de la soumission de l'individu aux lois de la République. (…) Ce n'est pas la divinité quelle qu'elle soit qui est source de légitimité, c'est la Loi (…) L'oublier, c'est prendre le risque de voir réapparaître, tôt ou tard, les querelles religieuses et les guerres de religion qui ont trop souvent divisé et ensanglanté notre pays. »
Mais cette approche de raison a dû se frayer son chemin avec ténacité face à la naïveté que j'ai déjà dénoncée. J'ai participé aux travaux de la mission d'information présidée par Jean-Louis Debré, alors président de l'Assemblée nationale, dont le rapport « La Laïcité à l'école : un principe républicain à réaffirmer » a été rendu le 4 décembre 2003. Nous avions tous pris conscience de la dégradation de la situation et de la montée inexorable du communautarisme destructeur. Quelques jours plus tard, le 11 décembre 2003, la commission Stasi remettait son rapport au président Jacques Chirac. Il allait dans le même sens.
C'est à la suite de ces travaux toujours d'actualité, et que je vous invite à relire, monsieur le ministre, que notre Parlement a voté la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics. Son article 1er précise : « le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. »
Il ne s'agit bien évidemment pas de bannir la petite croix, la main de Fatima ou l'étoile de David portées autour du cou…