Si j'ai rappelé ce long processus législatif, près d'une dizaine d'années, ce n'est pas pour jouer les vieux soldats qui rappellent leurs faits d'armes, mais pour souligner que le combat pour la laïcité, fondement de la tolérance, est un combat permanent. Combat pacifique, mais déterminé et ferme pour qu'un principe qui est le fondement et le gage de la paix civile soit respecté.
Les religions existent, et il ne saurait être question d'en limiter le culte. Mais la vie en société, le respect de l'autre qui ne partage pas vos croyances nécessite une certaine retenue, une tolérance réciproque.
Une récente affaire au sein d'une entreprise associative, la crèche associative Baby Loup, nous amène aujourd'hui à compléter le code du travail. On connaît le cas : une éducatrice de jeunes enfants a été licenciée au motif qu'elle contrevenait au règlement intérieur en portant le voile islamique. La Cour de cassation, dans son arrêt du 19 mars 2013, a relevé que l'article 1er de la Constitution : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale », qui instaure le principe de laïcité, n'est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public. La Cour a en conséquence cassé l'arrêt d'appel.
Éric Ciotti nous propose de compléter les articles L. 1121-1 et L. 1321-3 du code du travail afin de donner aux chefs d'entreprise la possibilité d'introduire dans le règlement intérieur l'encadrement de l'expression d'une appartenance religieuse sur les lieux de travail. Ces restrictions doivent être justifiées par la neutralité requise dans le cadre des relations avec le public ou par le bon fonctionnement de l'entreprise, et proportionnées au but recherché. Ces dispositions seraient au préalable soumises à l'avis du comité d'entreprise ou aux délégués du personnel. Cette proposition de loi va dans le bon sens, et je l'approuve au nom de notre groupe et à titre personnel.
Néanmoins, il va falloir examiner la pratique de ces dispositions qui renvoient au règlement intérieur. Dans certaines entreprises, il n'est pas sûr que ce processus se fasse sans opposition forte, voire des menaces, tant il est vrai que certains intégrismes religieux peuvent être virulents, voire violents.
Il n'est pas impossible que le législateur soit amené à être encore plus ferme en interdisant tout signe religieux ostentatoire au sein des entreprises privées pour préserver l'harmonie sociale. Cette interdiction ne s'appliquerait bien évidemment pas aux entreprises à vocation confessionnelle.
Je salue donc ici l'avancée pour la paix sociale que constitue la proposition d'Éric Ciotti. Le rôle de la loi est majeur dans la défense de la laïcité. La loi garantit à la fois la liberté de conscience et l'ordre public pour tous, garant de la paix civile. Voilà pourquoi vous voterez cette proposition de loi.