Les débats sereins que nous avons menés en commission des lois ont montré que le sujet est sensible, complexe et mérite d'être étudié avec un certain recul. Je déplore que cet état d'esprit ne soit pas parvenu jusque dans l'hémicycle, l'UMP préférant instrumentaliser ce texte à des fins politiciennes.
En commission des lois, nous avons déjà développé nos réticences face à un texte de circonstance qui répond précisément à une jurisprudence spécifique, à la suite d'une affaire qui du reste n'est pas terminée : elle doit venir devant la chambre sociale de la cour d'appel de Paris. À cette affaire très, trop médiatisée, cette proposition de loi n'apporte pas de réponse globale satisfaisante. Mes collègues exposeront les raisons politiques qui nous font douter de l'opportunité d'un tel texte.
En complément à ce qui a déjà été débattu en commission, permettez-moi de revenir en détail sur les aspects juridiques de ce texte. L'interdiction que vous posez est-elle juridiquement possible compte tenu de l'ensemble des règles constitutionnelles et européennes auxquelles nous sommes soumis ?
Nous attendons l'arrêt qui doit être rendu en septembre par la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l'homme au sujet de l'interdiction de la burqa dans l'espace public.
La première difficulté qui se pose consiste à définir ce qu'est exactement un signe religieux : soutane, col romain, voile, burqa, calotte, chapeau, turban, barbe… Les limites sont ténues, incertaines entre le religieux, le spectaculaire et parfois le pittoresque.
Une interdiction de port de signes religieux se heurte à des problèmes évidents de qualification des signes et ensuite de qualification des pratiques religieuses.
Une interdiction totale et générale des signes religieux dans le cadre de l'entreprise de droit privé est juridiquement impossible.