L’autre erreur est matérielle. Le démantèlement forcé des intercommunalités existantes constitue un chantier dont on doit faire l’économie. On croit gagner du temps ; on va en perdre. Dix-huit intercommunalités, des dizaines de milliers de personnels à transférer, 4 à 5 milliards de fiscalité locale intercommunale transférables à la métropole, des mécanismes de relations financières qui ne sont pas prévus…
Le coefficient d’intégration fiscale, qui mesure la masse financière transférée des communes vers les intercommunalités, s’échelonne en petite couronne de 6 à 42 % : 6, ce n’est pas beaucoup, mais au-delà de 40, c’est beaucoup. Qu’adviendra-t-il de ces compétences communautaires, différentes d’une intercommunalité à une autre, et ne relevant pas d’un intérêt métropolitain qui reste à définir ? Que deviendront les transferts existants ? Il y aura des transferts complexes à organiser entre la métropole, les conseils territoriaux, mais aussi les communes, avec des retours. Il va falloir du temps.
En outre, des questions complémentaires se posent, qui n’ont pas été abordées. Les communes dites « isolées », c’est-à-dire celles qui ne sont pas dans un espace intercommunal et qui ont gardé toutes leurs compétences, que devront-elles faire pour les territoires limitrophes, surtout s’il faut atteindre le seuil des trois cent mille habitants pour les conseils territoriaux ?
Quelles seront les conséquences fiscales, pour les entreprises et les habitants ? Les EPCI ont effectué la convergence des taux de fiscalité des entreprises. Cette convergence n’est pas la même d’un endroit à un autre. Comment le tout va-t-il converger au sein de la métropole que vous nous proposez ? Quid de la DGF, madame la ministre ? Selon les mécanismes retenus, nous sommes entre 400 millions et un total allant de 80 à 85 millions. Quel dispositif retenez-vous, et est-ce bien sur l’enveloppe normée que la somme sera prélevée ? Autrement dit, quels seront les mécanismes de compensation pour dégager cette masse financière au profit de la métropole ?
Madame la ministre, tout cela va prendre du temps et, à l’arrivée, je crois que nous allons en perdre. Ce n’est pas ce « machin » qui apportera les réponses aux enjeux essentiels, urgents, comme l’emploi et le logement, et qui, pour nos concitoyens, n’ont que trop attendu d’être traités.
Une page blanche est sortie du Sénat. Vous avez voulu, et je vous en donne acte, faire en sorte qu’une page soit écrite à l’Assemblée pour la métropole de Paris ; eh bien, elle est mal écrite. Je considère qu’il faudra la reprendre dans le cadre de la navette, pour aboutir à une belle page aux fondements politiques plus larges, sans lesquels la mise en oeuvre de la métropole du Grand Paris sera des plus risquées, des plus hasardeuses et des plus difficiles.
C’est seulement ainsi que nous pourrons réussir ce projet. Évitons un « chamboule-tout » insuffisamment réfléchi,…