Intervention de Françoise Descamps-Crosnier

Séance en hémicycle du 8 octobre 2012 à 21h30
Programmation et gouvernance des finances publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Descamps-Crosnier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après les débats de la journée, il me paraissait important de revenir à l'essentiel.

Il nous est proposé, aujourd'hui, de débattre puis de voter une loi organique, c'est-à-dire une loi portant organisation de la République quant à son fonctionnement.

Les lois organiques nous astreignent à des méthodes, des règles de fonctionnement. La loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, aurait-elle, depuis son adoption en 2001, amené plus de rigueur ou un trop-plein de laxisme budgétaire ? Cela aura peut-être échappé à la représentation nationale.

Le Parlement sera donc appelé à se prononcer sur le fond des politiques budgétaires proposées par le Gouvernement et ne sera nullement empêché ; les prochaines lois de finances en seront la parfaite démonstration. Replaçons donc le débat au bon niveau.

L'esprit de ce projet de loi organique s'inscrit, il est vrai, parmi les engagements pris par François Hollande, Président de la République, devant les Français quant à la bonne maîtrise des comptes publics, et cela avec l'aide du Parlement. Ce projet de loi organique s'inscrit donc dans une logique de redressement des comptes publics, exigence portée par la majorité depuis le premier jour de son arrivée aux responsabilités. Il tend à instaurer un certain nombre de garde-fous qui nous ont manqué ces dernières années et qui sont aujourd'hui indispensables. Les lois de programmation des finances publiques inscrivent la France dans la visibilité et la lisibilité budgétaires. La création du Haut Conseil des finances publiques, dont la composition devrait permettre une meilleure prise en compte de la représentation nationale, seule à même de s'élever au-dessus des seuls éléments comptables, renforce la nécessaire sincérité des projets budgétaires de court et moyen termes. L'instauration d'un mécanisme de correction sous l'égide du Haut Conseil, enfin, permet une prise en compte du principe de réalité : nous sommes dans une économie par définition mouvante et il faut pouvoir s'adapter.

Ces mesures doivent nous permettre de stopper enfin la spirale de la dette dont le montant avoisine – faut-il le redire ? – 90 % de notre PIB et d'envisager enfin le redressement indispensable.

Ce texte n'édicte cependant en aucune manière la façon dont nos finances publiques doivent être redressées. Il s'agit là du rôle des lois de programmation des finances publiques, des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale, dont l'examen est en cours. C'est ainsi sur la règle du jeu d'une politique globale qu'il nous appartient, chers collègues, de nous prononcer.

Parmi les éléments de cette politique globale, rappelons le volet « croissance » du traité européen, fort de 120 milliards d'euros, obtenu par le Président de la République lors du Conseil européen des 28 et 29 juin derniers. Bien sûr, comme les mesures contenues dans le pacte pour la croissance et l'emploi, ce volet ne figure pas dans le texte de ce projet de loi. Il vient néanmoins compléter cette nécessaire discipline budgétaire dans le sens de la croissance, horizon indispensable pour donner à notre pays et à l'Europe, ainsi qu'à leurs acteurs économiques, des TPE aux grands groupes, une perspective de dynamisme à moyen terme.

Car ne nous y trompons pas, c'est bien cela que les chefs d'entreprise, et les Français de manière générale, attendent : un horizon, une direction fixée pour les années à venir. Nombre de nos concitoyens se demandent de quoi demain sera fait. Ils s'inquiètent de savoir s'ils ne seront pas, demain, parmi les nouveaux pauvres. Ils s'inquiètent de savoir si leurs enfants vivront mieux ou moins bien qu'eux-mêmes ont vécu.

L'idée que notre dette publique grève notre avenir et celui de nos enfants, qu'elle constitue l'une des menaces pesant sur la souveraineté nationale, est désormais intégrée dans notre pays. Comme le montrent à l'envi les exemples récents de plusieurs pays européens, passée une certaine mesure, la dette publique et son corollaire annuel, le déficit, mettent les nations dans une situation où elles sont conduites à faire passer les dépenses liées aux intérêts de la dette avant toute autre priorité, fût-elle stratégique. Ce faisant, certains pays passent sous la coupe des marchés financiers, qui, certes, ne conduisent pas la politique des nations, mais peuvent la déterminer en lieu et place des gouvernements nationaux. On imagine très bien que leurs priorités seront le remboursement des emprunts et non l'avenir du pays et de ses citoyens !

Depuis des semaines, nous entendons des voix s'élever contre le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire, dont le présent projet de loi organique est la transposition en droit français. Ces voix, nous les avons encore entendues aujourd'hui dans cet hémicycle. Elles s'indignent des risques de mise sous tutelle de la France par les instances communautaires. Au nom de l'indépendance nationale, de la souveraineté de notre pays, nous entendons des appels au rejet de la réorientation de la politique européenne de la France engagée par le Président de la République, dont le mouvement va au-delà de ces textes.

C'est précisément au nom de la défense de notre indépendance et de notre souveraineté qu'il faut voter ce projet de loi organique. En engageant notre pays de manière transparente et coordonnée avec nos partenaires européens sur la voie du redressement des comptes publics, ce texte nous inscrit dans un cycle vertueux nous dégageant de la main des marchés financiers. Il est important de comprendre que cette politique de redressement des comptes est notre choix, qu'il ne saurait être question d'une décision imposée par nos partenaires européens puisque c'est la France, c'est nous-mêmes qui l'avons adoptée. Nous l'assumons au nom des intérêts supérieurs du pays. La France se fixe elle-même sa propre règle du jeu.

Chers collègues, donnons-nous cette cohérence indispensable à la politique des grands pays, renforçons la légitimité du Président de la République pour aller porter, ces prochains mois, la réorientation des politiques européennes. Cet appui est essentiel, notamment dans la perspective, les 22 et 23 novembre prochains, de l'examen par le Conseil européen du budget pluriannuel de l'Union européenne pour la période 2014-2020. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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