La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (nos 198, 244).
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Chantal Guittet.
Monsieur le président, monsieur le ministre délégué chargé du budget, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes ici, depuis cet après-midi, pour débattre de la loi organique visant à inscrire dans le droit français le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire.
J'ai déjà exprimé ici ma position sur le traité : une adhésion, non pas au traité stricto sensu, mais au traité accompagné de toutes les dispositions du pacte de croissance, qui permettent une réorientation de l'Europe vers plus de croissance et de solidarité, ce qui est très différent de ce que nous proposait la droite.
Cette loi organique prévoit de nouvelles procédures budgétaires pour respecter les engagements européens de la France. Ce projet n'instaure pas un dispositif contraignant car il n'énonce pas de règle d'or, mais il apporte les moyens d'une gouvernance plus efficiente, tout en respectant les prérogatives du Parlement.
Beaucoup de points ont été évoqués par les orateurs qui m'ont précédée. Je reviendrai seulement sur les dispositions qui me semblent importantes, celles qui visent à conforter le rôle du Parlement.
L'Europe souffre d'un déficit démocratique. Les nombreux « sommets de la dernière chance » ont, au motif de plus d'efficacité, donné au Conseil européen le monopole des réponses à la crise et ont accru le sentiment qu'éprouvent de nombreux Français d'être dépossédés de la possibilité de choisir les orientations européennes.
Il est légitime et nécessaire de renforcer le contrôle parlementaire, qui est un contrôle démocratique. Cela passe évidemment par un meilleur contrôle du processus budgétaire par les parlementaires.
M. le ministre Pierre Moscovici a parlé de boîte à outils, M. le président de la commission spéciale d'un équilibre subtil. Quelle que soit la formule que l'on emploie pour la décrire, le Parlement devra s'emparer de la loi organique pour avoir une meilleure visibilité sur la trajectoire des comptes des administrations publiques.
Le Haut Conseil des finances publiques pourra être auditionné et apporter une aide précieuse à la décision, mais la disposition du traité qui contribue le plus au renforcement du pouvoir du Parlement est l'institution d'une conférence interparlementaire, à l'article 13.
Il serait intéressant – ce serait un réel pas en avant vers plus d'ancrage démocratique – que le Parlement débatte chaque année des orientations proposées dans le programme de stabilité et le programme national de réforme présentés par le Gouvernement avant qu'ils ne soient remis à la Commission européenne.
Cette conférence est l'objet de la résolution adoptée par nos collègues des commissions européenne et des affaires étrangères. Elle se concrétisera, je l'espère, très rapidement. Les Européens sont, je crois, prêts à faire preuve de solidarité et de discipline pour autant que les décisions soient prises dans la transparence et discutées de manière démocratique par les Parlements.
Après le traité de Maastricht, la France était le seul pays à promettre l'Europe sociale. Avec François Hollande, de nombreux pays souhaitent avancer sur la démocratie, l'harmonisation sociale et fiscale. Cela ouvre de réelles perspectives de changement.
Alors oui, je voterai la loi organique et je soutiens la politique européenne de votre gouvernement, monsieur le ministre. J'espère que, rapidement, nous nous engagerons dans la réduction des inégalités, dans la lutte contre la précarité et dans la recherche d'un compromis ambitieux avec nos partenaires sur l'Europe sociale de demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici donc, avec ce projet de loi organique, au coeur du dispositif de mise en oeuvre de nos engagements européens.
À cette heure tardive, nous avons pu entendre d'ardents discours en sa faveur et de non moins ardents – quoique moins nombreux – discours en sa défaveur. Si beaucoup d'entre eux portaient sur le contexte plutôt que sur le texte, je tenterai l'exercice de m'en tenir à celui-ci, je tenterai d'évaluer l'équilibre des traits négatifs et des traits positifs avec le moins de préjugés possibles, mais certainement avec des préjugés tout de même.
Tout d'abord, je prends acte de ce que le texte s'insère clairement dans la hiérarchie des normes : au-dessus, le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance ; au-dessous, la loi de programmation, qu'il appartiendrait donc au législateur de modifier le cas échéant, ce dont, à mon sens, il y a plutôt lieu de se réjouir.
Nous ne sommes pas, en effet, de ceux qui se désolent de ce que la règle d'or ne soit pas inscrite dans la Constitution. Nous saluons au contraire la volonté du Président de la République de ne pas inscrire dans le marbre une règle sur laquelle nul ne sait aujourd'hui s'il n'y aura pas lieu de revenir demain, du moins en certains de ses éléments. C'est donc un acquis.
Il est donc regrettable que la souplesse qui seule peut être de mise en de telles matières débouche sur des règles rigides, tenant la main du législateur à toutes les étapes de la procédure sans guère laisser de porte ouverte à l'intelligence du moment.
Avec ce dispositif, nous passons en quelque sorte de l'ère de la photographie, qui était celle du pacte de stabilité, lequel se bornait à constater un déficit à l'instant t, à l'ère du cinéma, puisque c'est l'évolution même de nos finances publiques qui fera désormais l'objet de la vigilante attention de nombreuses fées, tant nationales qu'européennes, qui auront leur mot à dire à des stades différents.
Ce changement de méthode, qui est le produit d'aléas successifs dans les relations des États membres, pouvait conduire en principe à un dispositif moins mécanique, moins rigide et moins attentatoire au libre choix du législateur que ne l'est le six-pack avec lequel, soit dit en passant, se posera inévitablement un jour un problème de compatibilité. Il faut en effet prendre acte que nous sommes devant un projet de loi que les ministres ont qualifié de procédural.
Cette assertion intéressante mérite toutefois un tempérament. Certes, la loi organique indique selon quels critères et quel tempo les obligations issues du traité seront mises en oeuvre. Cependant, la règle d'or fixée par le traité est bien la référence autour de laquelle s'organise l'ensemble du texte. Sans elle, d'ailleurs, il n'eût pas été nécessaire du tout d'avoir recours à une loi organique, porte de sortie obligeamment ouverte par le Conseil constitutionnel. Mais si cette porte de sortie est ouverte, c'est donc bien qu'il existe une autre exigence qui surplombe les règles de procédure nouvelles, car on n'invente pas une procédure sans motif. Cette exigence, qui est, quant à elle, une exigence de fond, est celle qui a été formulée dans la règle d'or. Bien sûr, la règle d'or n'est en somme pas plus visible que ne l'est pour les passagers du paquebot la boussole du commandant de bord ou le compas qui permet de définir la trajectoire, mais boussole et compas sont bien omniprésents dans ce texte. Ce sont eux qui déterminent le cap, c'est-à-dire l'objectif à moyen terme, la navigation – la trajectoire des finances publiques –, ainsi que la rectification des écarts lorsque le navire dévie de sa route, par le mécanisme de correction.
On peut, enfin, regretter que les éléments de souplesse que permettait la méthode intergouvernementale retenue par le traité n'aient pas été suffisamment exploités. Deux soupapes existaient en effet dans le traité, qui eussent pu donner lieu au moins à une déclaration assortissant ce même traité, mais je n'ignore pas que c'eût été rouvrir la négociation.
Tout d'abord, la définition des éléments du solde structurel aurait pu laisser en dehors du calcul du déficit un certain nombre de dépenses d'investissement contraintes, telles le budget militaire, qui est sans commune mesure d'un pays à l'autre et qui obère naturellement plus gravement nos finances.
La seconde soupape était dans la définition des « circonstances exceptionnelles » permettant de s'affranchir des rigueurs de la règle d'or. Elles sont définies de manière très restrictives et eussent mérité d'être définies de manière plus large.
Aucune de ces voies n'a même été explorée. Nous aboutissons donc à un dispositif qui souffre de graves défauts dont le principal sera peut-être les difficultés de sa mise en oeuvre, tant il est vrai, pour détourner Bergson, qu'un excès de mécanique compromet les défis du vivant. Lorsqu'il faudra expliquer à des citoyens désabusés, maltraités par l'austérité et surtout, surtout, privés de l'horizon de la prospérité qui a toujours été le moteur de notre société, que la rigidité des règles l'emporte sur les besoins de cette même société, la tâche sera difficile.
Monsieur le ministre, en raison de l'étroite solidarité entre tous les éléments du dispositif – traité, loi organique, loi de programmation –, les députés du MRC ne pourront se prononcer en faveur de cette loi organique, pas plus qu'ils ne l'ont fait pour le traité. Nous ne souhaitons pas, ce faisant, méconnaître les difficultés que doit affronter le Gouvernement, mais cette loi est finalement une occasion manquée de mener des politiques en phase avec le réel. Cela se verra bien un jour.
Peut-être, ce jour-là, notre gouvernement ne trouvera-t-il pas si dommageable qu'une partie de sa majorité l'ait mis en garde et ait en quelque sorte, par là, préservé l'avenir, ce qui, par des voies différentes, est notre préoccupation à tous.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après les débats de la journée, il me paraissait important de revenir à l'essentiel.
Il nous est proposé, aujourd'hui, de débattre puis de voter une loi organique, c'est-à-dire une loi portant organisation de la République quant à son fonctionnement.
Les lois organiques nous astreignent à des méthodes, des règles de fonctionnement. La loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, aurait-elle, depuis son adoption en 2001, amené plus de rigueur ou un trop-plein de laxisme budgétaire ? Cela aura peut-être échappé à la représentation nationale.
Le Parlement sera donc appelé à se prononcer sur le fond des politiques budgétaires proposées par le Gouvernement et ne sera nullement empêché ; les prochaines lois de finances en seront la parfaite démonstration. Replaçons donc le débat au bon niveau.
L'esprit de ce projet de loi organique s'inscrit, il est vrai, parmi les engagements pris par François Hollande, Président de la République, devant les Français quant à la bonne maîtrise des comptes publics, et cela avec l'aide du Parlement. Ce projet de loi organique s'inscrit donc dans une logique de redressement des comptes publics, exigence portée par la majorité depuis le premier jour de son arrivée aux responsabilités. Il tend à instaurer un certain nombre de garde-fous qui nous ont manqué ces dernières années et qui sont aujourd'hui indispensables. Les lois de programmation des finances publiques inscrivent la France dans la visibilité et la lisibilité budgétaires. La création du Haut Conseil des finances publiques, dont la composition devrait permettre une meilleure prise en compte de la représentation nationale, seule à même de s'élever au-dessus des seuls éléments comptables, renforce la nécessaire sincérité des projets budgétaires de court et moyen termes. L'instauration d'un mécanisme de correction sous l'égide du Haut Conseil, enfin, permet une prise en compte du principe de réalité : nous sommes dans une économie par définition mouvante et il faut pouvoir s'adapter.
Ces mesures doivent nous permettre de stopper enfin la spirale de la dette dont le montant avoisine – faut-il le redire ? – 90 % de notre PIB et d'envisager enfin le redressement indispensable.
Ce texte n'édicte cependant en aucune manière la façon dont nos finances publiques doivent être redressées. Il s'agit là du rôle des lois de programmation des finances publiques, des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale, dont l'examen est en cours. C'est ainsi sur la règle du jeu d'une politique globale qu'il nous appartient, chers collègues, de nous prononcer.
Parmi les éléments de cette politique globale, rappelons le volet « croissance » du traité européen, fort de 120 milliards d'euros, obtenu par le Président de la République lors du Conseil européen des 28 et 29 juin derniers. Bien sûr, comme les mesures contenues dans le pacte pour la croissance et l'emploi, ce volet ne figure pas dans le texte de ce projet de loi. Il vient néanmoins compléter cette nécessaire discipline budgétaire dans le sens de la croissance, horizon indispensable pour donner à notre pays et à l'Europe, ainsi qu'à leurs acteurs économiques, des TPE aux grands groupes, une perspective de dynamisme à moyen terme.
Car ne nous y trompons pas, c'est bien cela que les chefs d'entreprise, et les Français de manière générale, attendent : un horizon, une direction fixée pour les années à venir. Nombre de nos concitoyens se demandent de quoi demain sera fait. Ils s'inquiètent de savoir s'ils ne seront pas, demain, parmi les nouveaux pauvres. Ils s'inquiètent de savoir si leurs enfants vivront mieux ou moins bien qu'eux-mêmes ont vécu.
L'idée que notre dette publique grève notre avenir et celui de nos enfants, qu'elle constitue l'une des menaces pesant sur la souveraineté nationale, est désormais intégrée dans notre pays. Comme le montrent à l'envi les exemples récents de plusieurs pays européens, passée une certaine mesure, la dette publique et son corollaire annuel, le déficit, mettent les nations dans une situation où elles sont conduites à faire passer les dépenses liées aux intérêts de la dette avant toute autre priorité, fût-elle stratégique. Ce faisant, certains pays passent sous la coupe des marchés financiers, qui, certes, ne conduisent pas la politique des nations, mais peuvent la déterminer en lieu et place des gouvernements nationaux. On imagine très bien que leurs priorités seront le remboursement des emprunts et non l'avenir du pays et de ses citoyens !
Depuis des semaines, nous entendons des voix s'élever contre le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire, dont le présent projet de loi organique est la transposition en droit français. Ces voix, nous les avons encore entendues aujourd'hui dans cet hémicycle. Elles s'indignent des risques de mise sous tutelle de la France par les instances communautaires. Au nom de l'indépendance nationale, de la souveraineté de notre pays, nous entendons des appels au rejet de la réorientation de la politique européenne de la France engagée par le Président de la République, dont le mouvement va au-delà de ces textes.
C'est précisément au nom de la défense de notre indépendance et de notre souveraineté qu'il faut voter ce projet de loi organique. En engageant notre pays de manière transparente et coordonnée avec nos partenaires européens sur la voie du redressement des comptes publics, ce texte nous inscrit dans un cycle vertueux nous dégageant de la main des marchés financiers. Il est important de comprendre que cette politique de redressement des comptes est notre choix, qu'il ne saurait être question d'une décision imposée par nos partenaires européens puisque c'est la France, c'est nous-mêmes qui l'avons adoptée. Nous l'assumons au nom des intérêts supérieurs du pays. La France se fixe elle-même sa propre règle du jeu.
Chers collègues, donnons-nous cette cohérence indispensable à la politique des grands pays, renforçons la légitimité du Président de la République pour aller porter, ces prochains mois, la réorientation des politiques européennes. Cet appui est essentiel, notamment dans la perspective, les 22 et 23 novembre prochains, de l'examen par le Conseil européen du budget pluriannuel de l'Union européenne pour la période 2014-2020. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Luc Bleunven, dernier orateur inscrit dans la discussion générale.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous aurons donc demain à voter le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union européenne.
Le débat sur ce traité doit aller au-delà des clivages traditionnels en France, car, d'une part, il a été – ou il sera – signé par l'ensemble des gouvernements européens, et, d'autre part, il s'inscrit dans la continuité de l'histoire de la construction européenne depuis plus de cinquante ans.
Voter ce traité reste pour chacun de nous un choix, mais c'est à mon sens une nécessité. Je voterai pour ce traité, car j'ai la conviction que cette étape supplémentaire dans la construction européenne nous permettra de lutter contre l'influence des marchés sur le devenir de nos sociétés. En effet, à cause du déficit croissant accumulé ces dernières années, nous avons perdu chaque jour un peu de notre capacité à agir et de notre souveraineté. Dans ce contexte, la signature du traité et la loi organique qui en découle est essentielle pour un plus grand contrôle de nos finances publiques.
L'Europe est notre projet politique et social, et l'horizon de notre stabilité. Nous en avons besoin pour dépasser la crise économique et financière, liée à la mondialisation et à ses excès. La mondialisation est une réalité que nous ne maîtrisons pas ; l'Europe, par contre, est une construction à notre portée. Une monnaie commune sans une gouvernance européenne forte n'a pas de sens. Nous devons aller vers une convergence des politiques des pays membres. C'est le sens du cycle européen que nous avons déjà entamé.
Il nous faut doter l'Europe des outils propres à permettre les réformes structurelles nécessaires dans les pays en difficulté, qui subissent aujourd'hui des plans d'austérité sans espoir de redémarrage rapide de l'activité. En ce qui concerne notre pays, le présent projet de loi organique transpose ces outils dans le droit français, et ce en trois étapes.
Tout d'abord, la formalisation du contenu des lois de programmation des finances publiques permettra de garantir dans la durée la définition d'une trajectoire pour atteindre un assainissement des finances publiques. Deuxièmement, un Haut Conseil des finances publiques sera créé. Enfin, ce Haut Conseil sera chargé de l'organisation d'un mécanisme de correction en cas de non application des règles budgétaires. Ces trois mesures forment un ensemble cohérent qui nous permettra de retrouver une crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens quant au respect de nos engagements.
L'assainissement des finances publiques est rendu nécessaire par le dérapage dont sont largement responsables les gouvernements précédents. Maîtriser nos comptes publics, c'est d'abord un enjeu de souveraineté nationale : nous ne devons pas dépendre des marchés financiers.
Le Haut Conseil des finances publiques s'inscrit dans la nécessité d'une évaluation indépendante et permanente des processus budgétaires. Son intervention en amont et en aval de la procédure budgétaire garantit sa capacité à déceler tout écart de nos finances par rapport à la trajectoire fixée. Le processus de nomination de ses membres est un gage de sérieux et d'indépendance du Haut Conseil vis-à-vis de l'exécutif et du législateur.
Le mécanisme de correction offre à nos partenaires un gage décisif de notre volonté de consolider une union économique et monétaire qui a été largement ébranlée. Les avancées obtenues par le Président de la République, comme le pacte de croissance, la taxe sur les transactions financières ou encore l'union bancaire, permettront à l'Europe de reprendre sa marche en avant.
Ce texte ne nous contraint à aucun effort supplémentaire en matière de redressement de nos finances publiques. Il est dans la continuité des choix annoncés durant la campagne présidentielle par François Hollande.
Ce cycle européen sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer doit être l'occasion de sortir de cette crise par le haut. Cette nouvelle gouvernance des finances publiques en Europe, ainsi que le nouvel acte de décentralisation qui sera engagé par le Gouvernement au début de l'année 2013, vont tous les deux dans le sens de la modernisation de l'action publique. Cette action publique sera plus démocratique et plus proche des citoyens.
Je tiens à attirer votre attention sur le fait que le renforcement des capacités de décision des collectivités territoriales – régions, départements, communautés, communes – doit être perçu comme l'autre versant d'une même recherche d'efficacité dans l'action publique, qui est l'un des engagements de François Hollande. En effet, l'Union européenne est une organisation chargée de la stabilité financière. De manière complémentaire, à l'échelon local, les collectivités territoriales, qui seront renforcées par la décentralisation, agiront au plus près des citoyens pour l'emploi et le développement de l'économie. Ces deux évolutions vont dans le sens d'une application plus poussée du principe de subsidiarité, qui est essentiel pour une bonne répartition des compétences. C'est l'occasion de rappeler l'engagement de François Hollande du transfert de compétences aux régions quant à la gestion des fonds structurels européens.
Je conclurai en rappelant que le traité et la loi organique qui l'accompagne devront participer à la restauration de la confiance par la crédibilité de l'action européenne. Celle-ci sera vérifiée si les décisions prises permettent de relancer l'activité économique et de créer des emplois. Les Européens croiront en l'Europe si leur travail n'est pas vain, et si leurs efforts ne sont pas anéantis par la disparition des richesses dans une spéculation que nous serions incapables de prévenir collectivement, faute de cohérence dans nos décisions. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.
Qu'il me soit permis – c'est la tradition, et je m'y plie bien volontiers – de remercier les parlementaires de la majorité qui, par leurs interventions, avec des arguments divers et variés, ont tous décidé de soutenir le Gouvernement dans la défense de ce projet de loi organique.
Merci à Christophe Cavard pour son vote et son soutien. Merci, bien sûr, à Pierre-Alain Muet, qui a salué la subtilité du texte, et a surtout fait remarquer qu'introduire cette règle dans la Constitution condamnerait le Gouvernement – quel qu'il soit, au demeurant – à une rigueur en matière de finances publiques lors même que les comptes seraient redressés et que la situation économique permettrait de soulager nos concitoyens. Bref, il a mis en évidence que le choix fait par le Gouvernement est bien celui qui convient, à la fois pour redresser nos finances publiques et pour que ce pays soit géré sans que, de façon systématique, les dirigeants n'en appellent à des décisions punitives.
Merci à Jean-Marc Germain, qui a mis en avant les principes du Gouvernement, à savoir préserver la croissance et être très sérieux en matière de finances publiques.
Merci à Seybah Dagoma d'avoir précisément décrit le rôle du Haut Conseil des finances publiques, et d'avoir souligné l'équilibre de ce texte, entre le respect de la souveraineté de notre pays, le respect de la souveraineté du Parlement, et le respect des engagements internationaux de la France, la coexistence entre ces différentes exigences ne faisant que manifester notre volonté de poursuivre l'intégration européenne et de contribuer autant que faire se peut à la bonne marche des politiques menées au sein de la zone euro.
Merci à Christophe Caresche pour le soutien très fort qu'il a bien voulu manifester. Oui, ce projet de loi organique a bien pour finalité première de retrouver une souveraineté nationale qui fut, sinon par inadvertance, en tout cas par erreur, abandonnée au profit des marchés et des agences de notation.
Merci à Marietta Karamanli pour son soutien. L'amendement qu'elle souhaite déposer rencontrera, je pense, un accueil favorable de la part du Gouvernement. Je tenais à le souligner d'emblée.
Merci à Thierry Mandon pour avoir rappelé que ce projet de loi organique respecte les prérogatives du Parlement et améliore son information. J'en ai déjà dit un mot. Ce faisant, il me semble que c'est la démocratie tout entière qui y gagne.
Merci à Valérie Rabault pour les propos qu'elle a tenus. Ce projet de loi organique laisse objectivement la main au Parlement, qui reste souverain. Le Gouvernement propose, le Parlement dispose. Il était tout à fait normal qu'une députée le rappelle avec cette force.
Merci à Philip Cordery pour avoir souligné qu'il ne faut pas confondre austérité et sérieux budgétaire, et pour avoir salué, à juste titre, le courage des différentes lois de finance que le Parlement aura à examiner, tant il est vrai que nous désendetter est maintenant une urgence qui ne peut en aucune manière être retardée.
Merci, bien sûr, à Dominique Lefebvre, qui estime que cette loi organique sera un grand texte. Je partage son point de vue. Ce sera un grand texte parce qu'il permet de concilier la souveraineté nationale, à laquelle nous sommes tous attachés, autant que la souveraineté du Parlement, que nous devons tous respecter. Je crois que ces mots-là devaient être prononcés. Merci pour avoir indiqué que l'équilibre structurel des finances publiques est un devoir à l'égard des générations futures. Beaucoup d'entre vous l'ont rappelé. Je cite le député Lefebvre mais en vérité je pourrais tous vous citer, parlementaires de la majorité qui avez compris que le stock de dette dont les autorités françaises ont hérité était un véritable impôt à la naissance.
Le président de la commission des finances a estimé que tous, peu ou prou, ont contribué à la constitution de ce stock. Cette affirmation est évidemment incontestable. Maintenant, si l'on entre dans le détail, convenons que doubler ce stock de dette en dix ans fut de la responsabilité de certains et peut-être pas des autres. Chacun sait bien que cette vérité est incontestable.
Nous assumerons ce stock de dette, parce que tel est le devoir qui nous incombe. Parce que nous l'assumons, nous allons demander un effort au pays, un effort à tous : un effort d'économies, un effort fiscal, un effort pour abolir ce véritable impôt à la naissance.
Merci à Chantal Guittet pour son adhésion au traité, qui n'a effectivement pas été modifié dans ses termes, mais radicalement transformé par le contexte dans lequel il va être adopté. Oui, il fallait rappeler que les moyens donnés à la Banque européenne d'investissement vont changer la donne en Europe – il faut en tout cas le souhaiter. Oui, il fallait rappeler que la Banque centrale européenne, par le programme d'opérations monétaires sur titres qu'elle a adopté, va changer la donne en Europe. Oui, il fallait rappeler le rôle que la BCE s'apprête à jouer à l'égard des différentes institutions bancaires et financières en Europe. Toutes ces choses-là n'existaient pas avant le mois de juin. Elles permettent, je le crois, au Parlement d'adopter ce traité sans arrière-pensée et avec la conscience tranquille, notamment au regard des engagements électoraux qui ont été pris par les uns et les autres.
Merci à Marie-Françoise Bechtel, dont je sais la volonté d'amender le texte de façon à ne pas injurier l'avenir – c'est bien comme cela qu'il faut, me semble-t-il, comprendre votre volonté, madame la députée. Mais voyons bien qu'il est difficile de défendre un texte qui ne fait que régler des procédures tout en voulant y introduire des éléments qui ne sont pas des éléments procéduraux, mais peut-être déjà des éléments de politique économique.
Je crois qu'il faut être attentif à la cohérence de ce texte et de la volonté du Gouvernement. Ce projet de loi n'est qu'organique, car nous souhaitons ne modifier que les procédures et, en aucune manière, contraindre les uns ou les autres. Car, oui, messieurs les députés de l'opposition, nous estimons que, sans la volonté politique, aucun texte ne peut, en réalité, contraindre tel ou tel gouvernement. M. Jean-Luc Warsmann, précédent président de la commission des lois, voit certainement à quoi je fais référence. Une loi organique, en elle-même, ne garantit rien si la volonté politique faiblit. Nous avons constaté, lors de la précédente mandature, que tel avait été le cas, car l'ancienne majorité, faute d'assumer ses déficits sociaux – près de 160 milliards d'euros de stock de dette sociale entre 2002 et 2011 –, a préféré repousser l'extinction de la CADES plutôt que d'avoir le courage d'augmenter les impôts afin d'amortir cette dette qui s'était constituée sous son empire.
Merci à Mme Descamps-Crosnier pour son soutien, que je devine résolu et enthousiaste, à ce texte.
Merci également à Jean-Luc Bleuven, dont les propos augurent d'un soutien tout à fait bienvenu à l'occasion de l'examen de ce projet de loi organique.
Je veux naturellement répondre à l'opposition. Il me paraît difficile de reprocher tout et son contraire. Ainsi donc, il faudrait une modification de la Constitution, tant il est vrai qu'il serait opportun, légitime, souhaitable et urgent de se méfier et des dirigeants de ce pays et du Parlement que le peuple peut choisir. Au nom de quoi, d'ailleurs, le Conseil constitutionnel serait-il une garantie plus forte qu'une majorité parlementaire ou que des engagements pris devant nos concitoyens ? Quelle curieuse expérience tirez-vous donc de l'exercice majoritaire pendant dix ans pour vous méfier à ce point d'une majorité et d'un gouvernement quels qu'ils soient, et pour confier le soin d'assumer le rétablissement de nos finances publiques à des personnalités, au demeurant remarquables, dont l'intégrité n'est pas en cause, mais dont la légitimité me paraît douteuse en matière de politique publique, tant il est vrai que cette légitimité ne peut provenir que du suffrage universel, car celui-ci doit être renouvelé, le cas échéant, conquis ou reconquis, quand les membres du Conseil constitutionnel n'ont finalement de comptes à rendre à personne, si ce n'est à leur conscience ? Nous n'avons pas la même philosophie. Nous assumons tranquillement cette divergence. Nous estimons que le Parlement, constitué de l'Assemblée nationale et du Sénat, est une institution pouvant être au moins aussi rigoureuse que le Conseil constitutionnel. Il est, en tout cas, composé de femmes et d'hommes qui, eux, ont des comptes à rendre, quand d'autres n'en ont aucun.
Je m'étonnerai toujours de constater que des parlementaires, dont je ne conteste en rien le sentiment démocratique, veulent finalement se réfugier à l'ombre d'une institution qui n'a de comptes à rendre à personne, si ce n'est à ses propres membres. J'ai une autre conception, je ne vous le cache pas, de la responsabilité politique. Mais nous aurons ce débat pleinement, non seulement ici, mais également devant nos concitoyens.
Je ferai une remarque à M. Geoffroy dont je regrette l'absence.
Plusieurs députés du groupe UMP. Nous lui transmettrons !
Je vous en remercie vivement par avance. J'ai simplement trouvé curieux qu'il reproche à ce texte de loi de ne se référer à rien au moment de sa présentation devant le Parlement. Il se trouve que la loi n'a pas à être visée par je ne sais quoi au moment d'être présentée au Parlement. La loi, c'est la loi. J'ai donc trouvé cette remarque particulièrement curieuse de sa part, d'autant que son intervention, même si je n'en approuve ni le fond ni les conséquences qu'il en tire, était par ailleurs parfaitement cohérente et tout à fait respectable.
Mesdames, messieurs les députés, je vous remercie d'avoir bien voulu participer à cette discussion générale. Le débat va maintenant se poursuivre dans le détail avec l'examen des différents amendements. Nous aurons peut-être l'occasion d'éclairer les divergences des uns et des autres.
Je m'aperçois d'ailleurs, à cet égard, que j'ai omis de remercier également Paul Giacobbi, qui conteste, d'après ce que j'ai compris, la création du Haut Conseil des finances publiques. Il me semble qu'il était difficile d'éviter et la réforme de la Constitution et la création d'un Haut Conseil rigoureusement indépendant. Ce choix me semble être le bon.
Enfin, j'ai déjà en partie répondu à Gilles Carrez en rappelant ce qu'avait été l'attitude de certains de ses collègues de la précédente majorité. Je pense à Yves Bur et à Jean-Luc Warsmann. Je n'ai plus le souvenir de la nature du vote de Gilles Carrez lors de la réforme de la loi organique repoussant à plus tard l'apurement des comptes sociaux, mais j'ai du mal à imaginer, après l'avoir entendu tout à l'heure, qu'il ait pu voter différemment de son collègue Jean-Luc Warsmann. Il me plaît, en tout cas, d'imaginer qu'il a agi de la sorte, à l'époque, selon sa conscience. Je n'envisage pas qu'il ait pu faire autrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 23 .
Mes chers collègues, nous sommes nombreux à nous être interrogés sur la question suivante : pourquoi l'article 1er ne vise-t-il que l'article 3 du traité et pas l'article 4 ? Je rappelle, pour ceux qui ne sont pas initiés, qu'aux termes de l'article 3, le déficit structurel ne doit pas dépasser 0,5 % du PIB ou 1 %, si l'on est sorti du déficit excessif. L'article 4 précise que, si la dette publique d'un État membre est supérieure à 60 %, le rapport entre la dette publique et le PIB devra être réduit en vingt ans à compter de l'année de fin du déficit excessif. Je vous rappelle que la dette publique de la France atteindra, en fin d'année, 91 % de son PIB.
Tous les arguments ont été utilisés pour m'expliquer qu'il ne fallait pas inscrire dans la loi organique l'article 4 en plus de l'article 3. Ces arguments ne tiennent pas. En effet, l'article 3 renvoie, pour partie, à l'article 4. Je vous rappelle que le taux maximum est de 1 % lorsque l'on passe sous les 60 % d'endettement public. Affirmer que les articles 3 et 4 ne sont pas liés est donc inexact. Mme Bechtel a inventé – et l'on constate « son lourd passé », au bon sens du terme, bien entendu, ma chère collègue – que la procédure concernant l'article 3 n'était pas la même que celle relative à l'article 4, puisque celui-ci renvoie à un article du traité sur l'Union européenne. Mais elle n'est pas allée au bout de son raisonnement. Il s'agit, en effet, de comparer la procédure prévue dans le traité – article 126, de mémoire – avec ce qui est prévu dans le traité de bonne gouvernance qui, je vous le rappelle, n'est pas un traité européen, puisqu'il n'a été signé et ne sera ratifié que par vingt-cinq États sur vingt-sept – la République tchèque et le Royaume-Uni ne l'ont pas signé. Si elle avait comparé les deux, Mme Bechtel aurait constaté que la procédure est exactement la même. Nous avons été nombreux, dans l'opposition, à souligner que l'article 4 était tout aussi important que l'article 3.
La parole est à M. Christian Eckert, rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 23 .
M. de Courson a déjà répondu à la question dans la défense de son amendement.
Il a en effet rappelé que, aux termes du TSCG, le respect du critère de la dette est apprécié dans le cadre de la procédure prévue à l'article 126 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, donc dans le cadre du pacte de stabilité.
Nous sommes, aujourd'hui, animés par la volonté de transposer l'article 3 du TSCG, lequel doit effectivement faire l'objet d'une procédure nationale. Il est donc clair qu'il n'y a pas à inscrire le respect de l'article 4 dans la loi organique. Nous avons eu longuement ce débat en commission. Si toutefois vous aviez encore des doutes, mon cher collègue, je vous renverrais à la loi de programmation, que nous avons commencé à examiner en commission. Le respect du critère de solde structurel entraîne, de toute façon, ipso facto, le respect du critère de la dette. Reportez-vous au tableau. Il est clair que la baisse de la dette est de plus de 1,5 point en moyenne dès lors que le critère du déficit structurel est respecté. La commission a donc émis un avis défavorable à votre amendement.
Le Gouvernement a émis un avis défavorable, monsieur de Courson. Nous avons déjà eu ce débat en commission, nous l'avons désormais dans l'hémicycle. Il existe deux procédures : une procédure de dette et une procédure de solde structurel. La dette est communautaire, le solde structurel est national. Nous transposons en droit national ce qui relève de la procédure nationale. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Je tiens absolument à contester l'argument de notre rapporteur. Il est totalement faux d'affirmer que l'article 4 est moins restrictif que l'article 3.
Si, puisque vous dites qu'il suffit de se reporter à la loi de programmation des finances publiques pour constater qu'en respectant l'article 3, on respecte l'article 4 ! Vous oubliez de rappeler que vous n'y parviendrez qu'avec une hypothèse dont tout le monde sait qu'elle ne tient pas, à savoir une croissance qui atteindrait brutalement 2 % par an à partir de 2014 ! Vous avez fait quelques études dans le domaine scientifique, monsieur le rapporteur. Si la croissance est de 0 % sur une longue durée, quel est, techniquement, le taux des déficits publics permettant de faire baisser la dette de 90 % à 60 % ? C'est extrêmement simple : il faut atteindre 1,5 % d'excédent, et non de déficit, du solde structurel. Prenons l'hypothèse d'une croissance potentielle de 1,1 % retenue par l'Union européenne – quand vous prenez, pour votre part, des hypothèses très au-dessus, qui ne sont absolument pas fondées sur un raisonnement économique : quel est le taux du déficit public permettant de respecter l'article 4 ? Faites le calcul sur un coin de table, il est aisé ! Avec une croissance potentielle de 1,1 %, il est de l'ordre de 0,5 % d'excédent, donc un point de plus que le 0,5 % de déficit. Donc, ce que vous affirmez, monsieur le rapporteur, est fonction de l'hypothèse de la croissance potentielle française. Plus la croissance est faible, plus il faut se situer au-dessus d'un déficit de 0,5 %, donc atteindre un déficit de 0 %, voire un excédent de 0,5 %.
Monsieur le ministre, ce que vous dites est tout à fait inexact. La procédure prévue à l'article 4, qui renvoie au traité, est une procédure européenne. On a inséré l'article 4 dans le traité en pensant à la situation de l'Italie : un budget en excédent primaire, mais avec un endettement public énorme, de 120 %. Donc, l'article 4 peut-être, parfois, plus dur que l'article 3.
Je vous affirme que l'article 4 est, dans le cas français comme dans le cas italien, plus contraignant que l'article 3. C'est pourquoi il doit figurer dans la loi organique.
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement n° 35 .
Cet amendement tend à supprimer, à la fin de la seconde phrase de l'alinéa 2, les mots : « , déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires. » En effet, si, comme le propose cet article du projet de loi organique, la définition du solde structurel des comptes des administrations publiques devait s'entendre comme excluant « les mesures ponctuelles et temporaires », on peut raisonnablement penser que la tentation sera forte de qualifier certaines mesures coûteuses de « ponctuelles et temporaires ». D'autant plus que la qualification d'une mesure ponctuelle et temporaire reste incertaine.
Cet amendement propose, donc, de supprimer ce mode de calcul, car il permettrait d'alléger trop aisément le montant du solde structurel permettant de répondre à l'exigence posée par l'article 3 du traité de discipline budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La commission a donné un avis défavorable à cet amendement, puisqu'il modifie la définition du solde structurel. Or le législateur a scrupuleusement respecté les termes du traité.
Sur le fond, mon cher collègue, cet amendement est en partie satisfait, dans la mesure où nous avons demandé à ce que, dans le rapport annexé, le Gouvernement précise le détail du calcul du solde structurel, ce qui implique que soit spécifié le traitement des mesures ponctuelles et temporaires.
Notre collègue n'est pas sérieux, monsieur le rapporteur ! C'est de la provocation !
Cet amendement est, par conséquent, en grande partie satisfait par ce qui est inscrit dans le projet de loi. De plus, nous n'avons fait que reprendre les termes du traité.
Avis défavorable. Il n'y a absolument aucune volonté de ne pas être transparent. Les documents seront à la disposition des parlementaires qui souhaiteront les consulter.
Cette définition du solde structurel, ou en tout cas du déficit structurel – c'est peut-être moins le cas de celle de croissance potentielle –, fait certainement consensus en Europe. Je nous vois donc mal nous différencier en la matière.
J'ajoute que, pour l'opposition, c'est un concept intéressant car c'est celui qui, en neutralisant les effets de la crise ou des mesures temporaires, permet de parfaitement mesurer la réalité des politiques publiques. C'est ainsi, et vous le savez évidemment, que le déficit structurel s'est aggravé entre le début et la fin de la dernière mandature, ce qui démontre bien ce que fut, hélas, l'inanité des politiques menées.
(L'amendement n° 35 n'est pas adopté.)
Cet amendement repose sur un principe simple : l'Europe doit nous donner les moyens d'investir pour remplir les objectifs qu'elle nous a elle-même fixés, notamment en matière de transition énergétique, de développement des énergies renouvelables, d'économies d'énergie, de lutte contre le chômage. Les investissements réalisés pour atteindre ces objectifs stratégiques européens doivent donc être exclus du calcul du solde structurel.
C'est déjà possible dans le cadre européen existant puisque, comme le rappelait la note d'impact du projet de loi, l'article 2 bis du règlement n° 14661997 autorise la prise en compte de besoins en investissements publics dans le calcul de l'objectif à moyen terme.
En conséquence, notre demande est simple : mettre en cohérence l'ensemble des objectifs européens et faire en sorte que l'objectif de réduction des déficits n'empêche pas d'atteindre les autres objectifs européens en matière d'emploi et d'environnement. Car l'Europe, pour nous, ce n'est pas seulement l'Europe de la contrainte budgétaire, c'est aussi, et cela doit être plus encore, l'Europe du progrès social et de la transition écologique. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)
Défavorable, pour deux raisons, chère collègue.
La première, c'est que, encore une fois, votre amendement modifie la définition du solde structurel prévue par le TSCG. Le législateur étant tenu de respecter les délais, il ne peut être accepté.
Sur le fond, on comprend parfaitement les objectifs que vous développez et on pourrait les partager. Toutefois, votre amendement a indirectement pour conséquence de donner, si j'ose dire, des consignes au législateur. Telle ne peut pas être la portée d'une loi organique, qui ne peut contraindre le législateur sur le fond, même si elle doit l'encadrer sur la forme.
Si vous aviez encore des doutes, vous pourriez retirer votre amendement dans la mesure où le ministre a laissé entendre qu'il accueillerait favorablement votre amendement n° 5 à l'article 5 tendant à demander au Gouvernement d'expliciter dans les annexes de quelle façon il respecte les engagements européens pris par la France. Votre souhait sera donc en assez grande partie satisfait.
Défavorable. Je ne reprends pas l'argumentation du rapporteur, que je fais mienne. Les indications qui viennent de vous être données devraient vous inciter, madame Sas, à retirer votre amendement. Je crois que vous aurez satisfaction un peu plus tard dans le débat.
Je suis totalement hostile à cet amendement, puisqu'il consiste à vider l'article 3 du traité de tout contenu. Si l'on commence à introduire des dérogations, pourquoi prévoir seulement les objectifs de lutte contre la pauvreté ? On peut penser aux handicapés, au vieillissement, aux problèmes de santé, j'en passe et des meilleurs.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les rédacteurs du traité ont renoncé à la règle d'or – qui, je le rappelle, est l'équilibre de la section de fonctionnement –, au profit d'un déficit global, pour éviter tout débat sur le partage entre investissement et fonctionnement. Il y a aussi ceux qui veulent exclure du calcul du solde les dépenses militaires. Pourquoi ne le proposez-vous pas, chère collègue ? Parce que les Verts sont antimilitaristes ? Où va-t-on ? Il faut absolument repousser cet amendement.
Monsieur de Courson, l'objectif est de sortir du calcul du solde structurel les investissements stratégiques européens. Je pense donc que vous n'avez pas bien compris la portée de l'amendement.
Monsieur le rapporteur, nous ne retirons pas cet amendement, qui vise à modifier le solde structurel. Je suis très heureuse que vous preniez en compte notre demande à l'article 5 sur le rapport qui vise à éclairer le Parlement, mais c'est d'une autre nature. Par le présent amendement, nous souhaitons préciser le calcul du solde structurel puisque tout le monde se demande comment exactement il est calculé. Nous voulons en sortir les investissements, comme c'est possible dans le cadre de la réglementation européenne.
(L'amendement n° 4 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement n° 36 .
Nous proposons que le Haut Conseil des finances publiques institué à l'article 8 vérifie que le montant du solde structurel permettant de répondre à l'exigence posée par l'article 3 du traité de discipline budgétaire n'a pas été minoré indûment par le recours à la catégorie de « mesures ponctuelles et temporaires ».
Cet amendement est satisfait dans la mesure où l'article 10 du projet de loi prévoit que le Haut Conseil se prononcera plus particulièrement au regard de l'article liminaire du projet de loi de finances pour l'année. Il sera donc forcément amené à examiner les mesures ponctuelles et temporaires puisque la prévision de solde structurel en dépendra nécessairement. Cet amendement est donc sans objet.
(L'amendement n° 36 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 8 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur.
C'est un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 8 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 1er, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 9 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur.
Amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 9 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement n° 37 .
Comme l'indique la Cour des comptes dans son rapport 2012 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, la branche accidents du travail et maladies professionnelles affiche un solde négatif particulièrement élevé au regard de sa taille financière. En l'occurrence : 2,2 milliards d'euros au 31 décembre 2011.
Cette situation est d'autant plus inquiétante que cette branche du régime général ne peut pas bénéficier du mécanisme de reprise de dette par la CADES. De fait, ce déficit de 2,2 milliards d'euros est actuellement financé par l'ACOSS et son financement se révèle problématique car on ne peut alourdir davantage le coût du travail.
Aussi, afin de disposer d'une vue d'ensemble la plus exacte possible de la dette publique, il convient de prendre en compte l'existence de cette dette particulière dans les lois de programmation des finances publiques.
Défavorable. L'alinéa 7 de l'article laisse la possibilité de prévoir un objectif de dette portant sur tout ou partie des administrations publiques. Or cela en fait partie, et il n'y a pas de souci sur ce point.
Vous avez évoqué le chiffre de 2,2 milliards d'euros. Même si vous avez le mérite d'avoir le souci du détail, au regard des 1 800 milliards d'euros de dette que vous nous avez laissés, je pense que cette question ne justifiait pas la présentation d'un amendement redondant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Défavorable. S'il s'agit d'informer le Parlement, il l'est. Si vous souhaitez que je m'engage à ce que cela figure dans les annexes, c'est tout à fait possible, mais ce sera, pour le coup, redondant. Car vous aurez cette information en lisant des documents que le Parlement peut très facilement se procurer. Ce type de dispositions n'a évidemment pas à figurer dans une loi organique. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Il est tout de même intéressant de savoir si le déficit dissimulé dans les comptes de l'ACOSS et financé à court terme fait bien partie de la dette publique au sens de l'article 4 du traité.
Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, qu'au sens de l'article 4 du traité, ce déficit, comme l'ensemble des déficits restés en trésorerie dans les comptes de l'ACOSS, fait bien partie de la dette publique pour la partie administration publique de sécurité sociale ? Si vous nous répondez oui, alors, effectivement, l'amendement est inutile.
Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. Puisque nous sommes là pour rédiger la loi, autant le faire le plus précisément possible, d'autant que les promesses s'envolent et que les écrits restent.
En l'occurrence, il s'agit d'une dette aisément dissimulable au regard notamment d'impératifs de type certification des comptes et l'alinéa qui suit est beaucoup moins précis.
Par conséquent, et pour inclure cette volonté de viser la dette, il serait préférable d'être précis, d'autant que, sur le fond, vous n'avez finalement pas d'objection. Ce ne sont que des objections de forme ou de redondance.
(L'amendement n° 37 n'est pas adopté.)
(L'article 2, amendé, est adopté.)
L'article 3 du traité dont nous avons déjà longuement parlé fait obligation aux États membres d'assurer le respect des règles d'équilibre des finances publiques prévues par le traité, en prenant « des dispositions contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles, ou dont le plein respect et la stricte observance tout au long des processus budgétaires nationaux sont garantis de quelque autre façon ».
Or il nous semble que la loi organique que nous examinons ne garantit nullement le plein respect et la stricte observance des règles d'équilibre prévues par le traité par les lois subséquentes, c'est-à-dire les lois de programmation, les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale.
Cela doit être clair, et nous devons renforcer l'obligation pour les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale de respecter les orientations des lois de programmation.
La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre l'amendement n° 53 .
Avec mon collègue et ami Charles de la Verpillière, nous avons essayé de poser, à travers ces deux amendements, une question très simple : quel est le régime juridique des lois de programmation pluriannuelle des finances publiques au regard des actes budgétaires, mais aussi au regard du traité ?
Pour certains, les lois de programmation pluriannuelle des finances publiques sont des lois de programmation classiques. Je vous rappelle que c'est dans l'antépénultième alinéa de l'article 34 de la Constitution que sont évoquées les lois de programmation, mais que l'avant-dernier alinéa isole les lois de programmation pluriannuelle des finances publiques en rappelant qu'elles ont pour objet d'indiquer comment on revient à l'équilibre des comptes.
La question est donc de savoir si la loi de programmation doit être respectée par les actes budgétaires, c'est-à-dire lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale. Dans la décision du Conseil constitutionnel du 9 août dernier, rien n'est dit sur ce point.
Plusieurs députés du groupe SRC. Si !
Non, rien n'est dit sur cette question de la hiérarchie. L'alinéa 27 de l'avis donné au Gouvernement par le Conseil constitutionnel ne dit rien, ni dans un sens ni dans l'autre.
De toute façon, le Conseil constitutionnel devra obligatoirement se prononcer sur le texte puisque c'est une loi organique. Mais il serait intéressant que le Gouvernement, qui ira s'expliquer devant lui, explique quelle est son idée.
Soit vous répondez, monsieur le ministre, qu'il n'y a aucune hiérarchie. Dans ce cas, à quoi cela sert-il de voter des lois de programmation et à quoi a-t-il servi de modifier l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution sous l'ancienne majorité ? À rien ! C'est un simple débat et ce n'est pas la peine de voter des lois.
Soit vous nous expliquez que vous êtes un garçon sérieux et que, pour vous, les actes budgétaires doivent respecter la loi de programmation mais, à ce moment-là, plaidez au Conseil constitutionnel en ce sens pour qu'il y ait une réserve d'interprétation.
Ces amendements identiques sont donc très importants pour la suite. Un dernier problème se pose, monsieur le ministre, et que personne n'évoque : c'est celui de la conformité entre la Constitution, le traité organique et les lois de programmation. Une loi de programmation qui montrerait qu'on s'écarte d'un retour à l'équilibre ne peut-elle pas être annulée par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle ne respecte pas l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution ?
Voilà les deux questions sur lesquelles il serait intéressant que vous vous prononciez, monsieur le ministre.
C'est un débat important, dont il ne faut pas sous-estimer la portée. Mais notre analyse, rappelée en commission, est très claire sur ce point. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 9 août dernier, a ouvert deux voies. Celle de la réforme constitutionnelle, qui a été écartée, et celle qui exclut toute contrainte de fond sur le législateur financier. Une loi organique ne peut contraindre le législateur financier. Votre idée de créer une hiérarchie des normes entre la loi de programmation et la loi de finances ne tient donc pas. Nous l'estimons contraire aux principes qui régissent l'adoption d'une loi organique.
J'imagine que cet argument, qui ne vous a pas convaincu en commission, ne vous convainc pas davantage maintenant. En voici donc un deuxième : mieux vaut respecter une procédure plutôt qu'enfreindre les règles. Lors de l'adoption de votre loi relative à la CADES, en 2010, vous-même avez clairement enfreint une loi organique. Tel n'est pas notre souhait.
Enfin, pour compléter mon premier point, il n'est pas question que le Parlement se lie les mains une fois pour toutes et renonce à sa souveraineté en matière budgétaire. C'est le principe de la loi organique que nous vous proposons ce soir. Votre amendement ne peut donc recevoir un avis favorable.
Le Gouvernement est défavorable. Relisez la décision du Conseil constitutionnel, monsieur de Courson. Vous l'invoquez souvent, par anticipation ou a posteriori. Vous y trouverez deux branches. L'une appelait la modification de la Constitution et permettait une hiérarchie entre loi de programmation pluriannuelle, d'une part, et lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale, d'autre part. Le Gouvernement n'a pas fait ce choix, la Constitution n'est pas modifiée. Dès lors, il n'existe pas de hiérarchie de normes entre une loi de programmation pluriannuelle et une loi de finances ou une loi de financement de la sécurité sociale.
Vous souhaitez, après avoir échoué à modifier la Constitution, revenir à cette vieille idée, que je qualifie de « vieille » parce qu'elle date de la mandature précédente, dont j'ai pu comprendre certains principes à un certain moment et qui commandait aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale d'être subordonnées aux lois de programmation pluriannuelle. Ce n'est pas le choix de ce gouvernement. Puisque cela a été délibérément exclu, ne faites pas semblant de découvrir les termes du débat ! Avis évidemment défavorable.
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.
Je voudrais lire à notre collègue de Courson ce que dit le Conseil constitutionnel dans le commentaire de la décision. Chacun sait que les cahiers du Conseil sont reconnus comme au moins aussi importants que la décision, puisqu'ils sont rédigés par le Conseil et donnent son sentiment. Voici ce qu'il dit au sujet de la hiérarchie des normes : « En droit français, l'introduction de telles dispositions, même si elle se faisait seulement au niveau organique, exigerait au préalable une révision constitutionnelle pour offrir cette faculté au législateur organique. » (« Bravo ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Cette proposition est évidemment dépourvue de toute portée ! Notre Constitution est parfaitement claire. Il y a la Constitution, il y a la loi ordinaire, et entre les deux il y a la loi organique. Il n'y a pas de place pour une autre norme de valeur intermédiaire. Par conséquent, la proposition de ces amendements est sans aucune portée, ou alors, comme l'a bien vu le ministre, c'est une sorte de révision constitutionnelle déguisée, les auteurs poursuivant un objectif qui est pour eux un fil directeur dans ce débat. Il est absolument impossible d'adopter une telle proposition.
Je suis très étonné des réponses du rapporteur. Il nous dit que les lois organiques ne s'appliquent pas aux actes budgétaires. Mais enfin, mon cher collègue, cela fait des dizaines d'années que le Conseil constitutionnel annule à tour de bras des dispositions desdits actes budgétaires parce qu'ils ne respectent pas telle ou telle disposition de la loi organique relative aux lois de finances ou de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale ! Votre argumentaire sur ce point m'étonne donc beaucoup. Car ce n'est pas la question que j'ai posée. J'ai posé une question sur le statut des lois de programmation.
Quant à vous, monsieur le ministre, je suis heureux de vous avoir fait dire en creux que les lois de programmation ne servent à rien.
La « volonté politique », cela s'exprime dans un discours, pas dans une loi !
Cette loi est une loi dégénérescente, qui n'a aucun caractère normatif ! Une nouvelle fois, nous légiférons pour rien ! Voilà ce qu'a dit M. le ministre ! C'est formidable ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) ! C'est bien le problème des lois de programmation des finances publiques. Mais attendons la décision.
Dernier petit mot, gentil, à l'attention de M. le président de la commission spéciale : méfiez-vous des cahiers, ils n'engagent pas le Conseil constitutionnel. Attendez prudemment la décision.
Je ne comprends pas la réponse du ministre consistant à dire que nous ne voulons pas nous lier les mains. Les Français qui regardent leurs représentants dans l'hémicycle ne comprendront pas. D'un côté, on fait ratifier un traité pour se lier les mains, et de l'autre, on fait voter une loi organique pour ne pas se lier les mains.
Oui ou non, veut-on appliquer la réduction des déficits ? Dans ce cas, pourquoi voter une loi de programmation dont on vient d'expliquer qu'en réalité elle n'aura pas d'impact légal sur les lois de finances ? Et elle n'aura pas d'impact légal parce qu'on n'a pas voulu faire de réforme constitutionnelle ? Moi, j'ai l'impression que cette loi organique est comme le traité de Versailles : elle est trop dure dans ce qu'elle a de mou et elle est trop molle dans ce qu'elle a de dur ! (Rires).
Il faut quand même lire le projet ! Vous ne pouvez pas dire que la loi de programmation n'a aucune portée, puisque c'est dans cette loi de programmation que va être définie la trajectoire budgétaire ! Et c'est en particulier sur cette base que va se prononcer le Haut Conseil des finances publiques ! Essayez au moins de lire ce qui vous est proposé et vous comprendrez qu'il ne s'agit pas d'éléments disparates et dissociés, mais qu'au contraire ils forment un tout cohérent. Le Haut Conseil s'exprimera à partir de la loi de programmation. D'ailleurs, la volonté du législateur, sur ce point, sera respectée.
Cet amendement et ce débat auront eu le mérite de confirmer, comme nous le craignions, que le Gouvernement, en réalité, ne voudra pas faire prévaloir les orientations qu'il aura lui-même fait voter dans les lois de programmation et qu'il n'entend pas se lier les mains. On nous parle en effet de la souveraineté du Parlement, mais en réalité c'est bien de la volonté de l'exécutif qu'il est question ici.
Je voudrais en outre faire remarquer à nos collègues et à M. le ministre que cette discussion sur la constitutionnalité de l'amendement est vaine. Ce qui compte en effet, ce n'est pas le commentaire de l'amendement mais bien le texte lui-même. Or il y est bien dit que les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale devront respecter les « orientations » des lois de programmation, c'est-à-dire la trajectoire budgétaire dont on a parlé tout à l'heure. Ce n'est donc pas un rapport de conformité, il n'y a pas de hiérarchie. Il s'agit de faire en sorte que les lois de finances annuelles qui suivent la loi de programmation respectent des orientations. C'est ce rapport-là qui est recherché et qui n'est pas atteint par le texte que vous nous proposez.
Nous abordons là un article qui, après une lecture non attentive, peut paraître anodin. Il ne l'est pas ! En effet, si nous votons l'article 4 en l'état, nous allons avoir deux problèmes. L'un avec les administrations de sécurité sociale, l'autre avec les administrations territoriales.
Commençons par les administrations de sécurité sociale. Le concept sur lequel reposent les traités est celui de comptabilité nationale harmonisée. Or les administrations de sécurité sociale se subdivisent en deux parties, les systèmes de base et les systèmes complémentaires. En droit français, les régimes complémentaires sont gérés par les partenaires sociaux. Voter le texte en l'état revient donc à s'engager dans la nationalisation des régimes complémentaires de sécurité sociale. Nous, au groupe UDI, nous avons toujours été farouchement opposés à cela. Nous voulons même élargir la démocratie sociale afin que les partenaires sociaux gèrent davantage de branches que les deux qu'ils gèrent actuellement, le régime chômage et les régimes complémentaires de retraite.
Je rappelle la deuxième phrase du premier alinéa de cet article 4 : « Ces règles peuvent en particulier avoir pour objet d'encadrer les dépenses, les recettes et le solde ou le recours à l'endettement de tout ou partie des administrations publiques ». On est donc en train de tuer la démocratie sociale.
J'en viens au deuxième problème, plus compliqué, celui des administrations territoriales. Aujourd'hui en effet, l'État tient la quasi-totalité de leurs recettes, puisqu'il n'y a pas de fiscalité locale, contrairement à ce que croient la plupart de nos collègues. En droit constitutionnel français, les collectivités territoriales ne peuvent lever l'impôt que par une délégation annuelle encadrée du Parlement. C'est chaque année l'objet de l'article 1er de la loi de finances.
Je n'ai pas fini, monsieur le président. Actuellement, via les transferts, l'État tient 95 % de leurs recettes. L'innovation du texte concerne les dépenses. Si nous le votons, les lois pluriannuelles pourront fixer des normes opposables en matière de dépenses. J'attire votre attention, mes chers collègues, sur la compatibilité d'un tel dispositif avec le principe de libre administration des collectivités territoriales, qui est un principe constitutionnel. Avec l'article 4, on n'est pas dans la Constitution, on est dans une loi organique.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l'amendement n° 2 tendant à la suppression de l'article 4.
Cet amendement de suppression vise à empêcher que soit porté un coup terrible à l'autonomie des collectivités locales. Si cet article était adopté, cela voudrait dire que, dans les années à venir, un simple amendement à une loi de programmation des finances publiques pourrait interdire à des catégories entières de collectivités locales le recours à l'emprunt, ou bien rendre obligatoire pour des catégories entières de collectivités locales des dispositions d'encadrement des dépenses, des recettes ou de leur solde.
Très concrètement, si cet article était voté, cela voudrait dire que, demain, un simple amendement pourrait, par exemple, prévoir que toutes les communes dont le niveau d'endettement ou l'annuité est supérieur à la moyenne du niveau d'endettement de leur strate n'auraient désormais plus accès à l'emprunt. Ce type d'amendement, si vous votez cet article de la loi organique, serait à mon sens conforme à la Constitution, car le Conseil constitutionnel a toujours admis que le principe de libre administration des collectivités locales n'interdit pas au législateur de poser des règles qui l'encadrent. Il n'a ainsi jamais remis en cause ce qu'on appelle dans le langage courant le principe de la règle d'or.
Voilà ce que vous autorisez. Je pense que ce serait un coup terrible à l'autonomie des collectivités locales, qui sont dans notre pays suffisamment encadrées par la règle d'or. Je ne voudrais pas que demain, dans une commune en plein développement, qui a dû s'endetter pour financer le développement de ses infrastructures, on ne puisse plus construire une nouvelle école dont le besoin se ferait sentir parce que cette commune, ayant un niveau d'endettement supérieur à sa strate, n'aurait plus recours à l'emprunt.
Je ne voudrais pas que, dans une communauté d'agglomération qui doit faire face à des investissements importants, une entreprise demande une extension d'une zone d'activité et se voie répondre : « Nous ne pouvons pas le faire parce que le législateur l'a interdit. »
Enfin, mes chers collègues, j'appelle votre attention sur le fait que ce type de disposition brimerait tout le monde rural. En effet, par définition, dans les collectivités rurales de faible surface financière, quand on fait un investissement d'un montant élevé, on explose évidemment tous les ratios de la strate.
Avec des dispositions de cette nature, vous permettez que de simples amendements puissent fermer les vannes du financement. Vous n'autorisez pas seulement un éventuel ciblage des collectivités locales mal gérées ; vous permettez que soient visées celles qui entreprennent et qui investissent. Mes chers collègues, je vous le demande solennellement, ne portez pas ce coup à l'autonomie des collectivités locales de notre pays !
Il s'agit d'un vrai débat, qu'il nous faut aborder tout à fait sereinement. Le problème, c'est que M. Warsmann, qui connaît parfaitement la situation, a fait les questions et les réponses. Cher collègue, vous avez je ne sais quels fantasmes sur d'éventuelles règles budgétaires ou d'endettement…
Veuillez m'excuser : je retire ce mot s'il a pu vous vexer. Vous avez en tout cas des craintes,…
Des craintes fantasmées !
…ou des prémonitions selon lesquelles nous pourrions instaurer telles ou telles règles relatives à l'endettement ou au déficit des collectivités locales.
Vous connaissez pourtant parfaitement le sujet et vous savez que selon l'article 72 de la Constitution, les collectivités locales s'administrent librement « dans les conditions prévues par la loi ». De quelle loi s'agit-il ? Du code général des collectivités territoriales, bien entendu, dont vous avez évoqué à juste titre l'article L. 1612-4 qui énonce la « règle d'or » relative aux budgets locaux. Mais, mon cher collègue, vous n'êtes pas sans savoir que toute loi de finances peut prévoir les conditions dans lesquelles les collectivités locales s'administrent librement. Cette prérogative appartient donc au législateur qui peut l'exercer dans le cadre des lois de finances annuelles. Dès lors, pourquoi ne pourrait-il pas le faire dans le cadre d'une loi de programmation pluriannuelle ? Je ne vois pas ce qui s'y oppose sur le fond.
J'aurais pu invoquer à l'appui de mon avis défavorable des raisons budgétaires en vous citant les masses financières en jeu, mais il me semble qu'un simple argument suffit : pourquoi une loi pluriannuelle ne pourrait-elle pas prévoir des dispositions que peuvent comporter les lois d'une façon générale, et les lois de finances annuelles en particulier ?
Le Gouvernement est défavorable.
Monsieur Warsmann, tout à l'heure, l'opposition nous reprochait de ne pas en faire assez,…
Si ce n'était pas vous, c'étaient vos amis. Maintenant, vous nous reprochez d'en faire trop. Il y a, à tout le moins, une différence d'appréciation sur la portée de ce texte au sein des rangs de l'opposition – ce qui est bien normal, surtout dans la période qu'elle traverse actuellement. Mais quand même !
La décision du Conseil constitutionnel est très claire : dès lors que le Gouvernement privilégie une solution qui n'est pas celle de la révision constitutionnelle, la loi organique doit concerner l'ensemble des administrations publiques. Vous souhaitez vous affranchir de la décision du Conseil constitutionnel. Je m'en étonne car vous êtes un ancien président de la commission des lois et vous avez présidé à l'élaboration et au vote de lois organiques, et même suscité la réforme de certaines d'entre elles.
Je vois bien l'intérêt politique qu'il peut y avoir à s'adresser à des députés de la majorité, qui peuvent exercer des responsabilités locales,…
…en tentant de leur faire craindre ce que rien ni personne ne permet d'envisager. Je vois bien l'habilité politique qui est la vôtre, mais je veux simplement dire aux députés de la majorité que l'article 4 ne fait que se conformer à la décision du Conseil constitutionnel. Elle s'impose, que cela plaise ou pas.
Cela dit, le rapporteur vient de vous le démontrer : toute loi de finances peut modifier le cadre dans lequel les administrations, quelles qu'elles soient, sont gérées ou administrées, puisque le principe de libre administration des collectivités locales ne s'exerce que dans le cadre de la loi de la République.
Aujourd'hui, rien dans les projets de loi dont vous avez connaissance – de la loi de programmation pluriannuelle à la loi de finances –, ne permet de fonder en quoi que ce soit une quelconque crainte. Je suggère d'en revenir à un débat un peu plus serein et d'en rester à ce que le Conseil constitutionnel demande. Dès lors que c'est la voie de la loi organique qui a été choisie, toutes les administrations publiques doivent être concernées.
Mesdames et messieurs les députés de la majorité, constatons objectivement ce qu'il en est des dispositions contenues dans le projet de loi de finances initial et dans le projet de loi de financement pluriannuel. Et convenons que si M. Warsmann a du talent, il lui en manque malgré tout pour vous convaincre que le Gouvernement s'apprêterait à faire un mauvais sort aux collectivités locales.
Ces interventions viennent éclaircir les choses. Si l'article 4 est voté, ce sera bien la première fois qu'en droit français une loi organique précisera qu'un simple amendement peut interdire à des catégories de collectivités locales le recours à l'emprunt.
Pour la première fois, vous introduiriez en droit français le principe selon lequel une loi ordinaire pourrait bloquer l'évolution des dépenses – « encadrer les dépenses », comme il est dit dans le projet de loi organique – par catégorie de collectivités locales.
Tout cela n'a jamais existé auparavant. Si vous adoptez ces dispositions, ce gouvernement demain, ou un autre dans cinq ans ou dans dix ans, pourra se fonder sur elles. Ce serait une première.
J'ajoute que je suis très surpris d'un des arguments utilisés par le rapporteur et le ministre pour convaincre l'Assemblée. Selon eux, l'article 4 ne sert à rien puisqu'une loi de finances tout simple peut déjà comporter les règles en question. Mes chers collègues, beaucoup d'entre vous ne manquent pas d'esprit critique : pouvez-vous croire qu'un gouvernement puisse nous demander de voter un article qui ne sert à rien ? Si cet article n'ajoute rien au droit existant, quelle est son utilité ?
Si une simple loi de finances – nous en votons au moins une par an, sans compter les lois de finances rectificatives – permettait de mettre en place les règles prévues à l'article 4, à quoi servirait de voter dans une loi organique un article permettant aux lois de programmation de le faire ?
Cela n'aurait vraiment pas de sens ! Il ne s'agit pas de crainte, mais de droit.
Nous sommes au Parlement, chacun est libre de son vote, mais je prends date. Si demain, en application de cette loi organique, on interdit le recours à l'emprunt pour une catégorie de collectivités, ou que l'on encadre les dépenses, ce sont bien celles et ceux d'entre nous qui auront levé la main pour voter cet article qui en porteront la responsabilité.
Dans le droit fil des propos de M. Jean-Luc Warsmann, je suis étonnée de l'antinomie qui existe entre les articles 2 et 4 du projet de loi organique. Le premier énonce une liste de dispositions susceptibles de figurer dans les lois de programmation des finances publiques. Le second ouvre la possibilité d'inscrire dans ces lois d'autres dispositions comme les « règles relatives à la gestion des finances publiques ne relevant pas du domaine exclusif des lois de finances ».
D'autre part, monsieur le ministre, l'article 4 n'a pas été écrit sans que le Gouvernement ait une idée derrière la tête. Cet article 4 a une finalité. À qui précisément pensez-vous, ou à quoi pensez-vous, quand vous défendez cette rédaction de l'article 4 ?
Aux administrations publiques ! C'est écrit dans le texte.
Je suis très étonné par les propos tenus tant par le rapporteur que par le ministre. Il est totalement inexact de prétendre qu'en l'état actuel du droit il est possible de tenir les recettes et les dépenses des collectivités.
Actuellement, chaque année, nous déléguons aux collectivités locales le droit de lever l'impôt. Ce droit pourrait être supprimé et les collectivités vivraient de dotations, ce qui permettrait évidemment de les tenir. Cela existe dans d'autres pays. Du côté des recettes, ce que vous dites est donc exact.
Par contre, du côté des dépenses, c'est faux. Pouvez-vous citer le dispositif qui permet d'encadrer les dépenses des collectivités territoriales dans le respect du principe de libre administration ? Qu'est-ce qu'il en resterait si vous fixiez les dépenses à 100 % et les recettes à 100 % ? Il n'y aurait plus de libre administration. En, l'occurrence, c'est le Conseil constitutionnel, et non pas vous, qui appréciera si cet article 4 respecte le principe de libre administration des collectivités territoriales.
Monsieur le rapporteur, je ne fais que reprendre votre argumentaire et celui du ministre. Il ne tient pas.
J'ajoute que si vous vouliez mettre votre projet en oeuvre, vous auriez tout de même un petit problème technique. Êtes-vous capable de définir des règles s'appliquant à 60 000 collectivités locales extrêmement diverses ?
Donc, écoutez-nous ! Nous sommes partisans de cette loi organique. Pour ma part, je présenterai un amendement beaucoup plus modéré que l'amendement de M. Warsmann.
Je ne souhaite pas que l'article 4 soit supprimé ; je propose en revanche de l'aménager. Dans le cas contraire, vous prenez un vrai risque constitutionnel.
(L'amendement n° 2 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 10 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 10 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 11 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur.
Il est rédactionnel.
(L'amendement n° 11 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 12 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur.
Rédactionnel.
(L'amendement n° 12 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 24 .
Il s'agit d'une proposition modérée, destinée à sauver la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 4.
Aujourd'hui, tous les moyens peuvent être mis en oeuvre concernant l'État et les organismes divers d'administration centrale. Je viendrai plus tard à la question des organismes de sécurité sociale, sur lesquels vous exercer aussi le pouvoir à l'exception des régimes complémentaires de retraite. Les collectivités territoriales sont aussi concernées.
Je propose, à la seconde phrase de l'alinéa 1 de l'article 4, de substituer au mot : « publiques », les mots : « centrales, sociales et locales, pour leurs seules recettes et dans le respect du principe de libre administration ».
En effet, puisque vous tenez les recettes et que la règle d'or s'applique, pour les collectivités territoriales, il y aura une régulation. Mais il appartiendra aux assemblées locales de décider d'en faire plus ou moins sur telle ou telle dépense.
Monsieur le ministre, pourquoi voulez-vous appliquer cette règle aux collectivités territoriales ? Avez-vous derrière la tête des idées d'encadrement de la dépense ? Si votre réponse est positive, expliquez-moi comment vous réussirez à mettre en place des dispositifs s'appliquant à des situations aussi diverses et nombreuses qu'il existe de collectivités territoriales.
Mon amendement vous protège, du point de vue de la constitutionnalité.
Défavorable.
M. de Courson souhaite que la norme applicable aux collectivités territoriales ne concerne que leurs recettes. Je m'étonne de ce manque de cohérence, puisqu'il répète sans cesse que les efforts de redressement doivent se faire d'abord sur la dépense.
Par ailleurs, les règles applicables aux collectivités ne peuvent être mises en oeuvre que collectivité par collectivité. Il ne peut y avoir de responsabilité collective de l'ensemble des collectivités territoriales pour l'application d'une règle.
En conséquence, l'amendement de M. de Courson n'a pas de sens.
Pour anticiper sur le débat que nous aurons concernant les caisses de retraite complémentaires, je précise que sont concernées toutes les « administrations publiques », ni plus ni moins, et ce dans le cadre de la loi et des principes constitutionnels. Il n'y a aucune arrière-pensée derrière cela ; il n'y a aucune crainte à avoir, ni aucun fantasme à nourrir.
Défavorable. Monsieur de Courson, il ne s'agit que d'une déclinaison du traité.
La loi organique décline la notion d'administration publique qui figure dans le traité. Peut-être certains jugent-ils cette déclinaison excessive, mais je m'étonne de cette appréciation de la part de ceux-là mêmes qui s'apprêtent à voter le TSCG. Je vois mal la cohérence de leur position.
Monsieur le ministre, mon amendement est parfaitement cohérent. Dès lors que la règle d'or s'applique collectivité territoriale par collectivité territoriale et que vous tenez les recettes de ces collectivités, foutez-leur la paix sur les dépenses ! Puisque, avec le traité, vous vous engagez, non pas sur un montant de dépenses publiques par rapport au PIB, mais sur un solde, il n'y a pas de problème. Mon amendement est, je le répète, parfaitement cohérent.
(L'amendement n° 24 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l'amendement n° 1 .
Cet amendement s'inscrit dans la même logique que l'amendement n° 2 : il s'agit, là encore, d'empêcher une fantastique atteinte à la libre administration des collectivités locales.
Monsieur le rapporteur, vous avez dit quelque chose qui n'est pas exact. Vous avez indiqué que les mesures qui peuvent être prises pour limiter les dépenses d'une collectivité locale sont des mesures qui s'appliquent collectivité par collectivité ; il n'existe pas de sanction collective, avez-vous dit. Or, le texte permet très exactement l'inverse, puisqu'il dispose que « ces règles peuvent en particulier avoir pour objet d'encadrer les dépenses, les recettes et le solde ou le recours à l'endettement de tout ou partie des administrations publiques ».
Ce qu'autorise cet article, ce n'est pas de dire que le conseil municipal de telle commune a engagé des dépenses telles que cette commune se trouve dans une situation qui nécessite l'intervention de la chambre régionale des comptes, c'est de préciser, dans une disposition législative, que toutes les collectivités locales – qui peuvent être au nombre, par exemple, de 4 000 ou 5 000 – répondant aux conditions définies par la disposition ne peuvent plus recourir à l'endettement.
C'est donc bien un principe de punition collective dont vous voulez autoriser l'instauration dans les lois de programmation des finances publiques. Voilà pourquoi je tente à nouveau – mon amendement précédent ne vous ayant, hélas ! pas séduit, monsieur le rapporteur – d'éviter aux collectivités locales un aussi funeste traitement.
Monsieur Warsmann, l'amendement n° 1 , qui est un amendement de repli, s'inscrit, dites-vous, dans la logique de votre amendement précédent. La commission s'inscrit, quant à elle, dans la logique de l'avis émis sur votre amendement précédent. Nous avons débattu de ce point en commission et lors de l'examen de l'amendement n° 2 . L'Assemblée est donc éclairée. Avis défavorable.
Défavorable. Encore une fois, monsieur Warsmann, exclure, comme vous le souhaiteriez, les collectivités locales serait contraire au traité et je persiste à voir une véritable contradiction entre votre volonté d'adopter ce traité et votre rejet de cette disposition du projet de loi organique.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 25 .
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, l'article 4 pose également un vrai problème pour celles des administrations de sécurité sociale qui relèvent de la compétence des partenaires sociaux, mais qui, en comptabilité nationale, sont intégrées dans les administrations de sécurité sociale. Pourriez-vous nous expliquer quelle sera la portée de la deuxième phrase de l'alinéa 1 de l'article 4, notamment pour les régimes complémentaires de retraite ? Vous allez les étatiser ! Car, actuellement, monsieur le ministre, à la différence des recettes et des dépenses des régimes de base obligatoires, ce n'est pas vous qui fixez, avec votre collègue des affaires sociales, le taux de cotisation et les prestations de ces régimes complémentaires. Pourriez-vous nous expliquer la manière dont cette disposition est susceptible de s'appliquer aux régimes complémentaires de retraite ?
La commission et son rapporteur sont constants. « Toutes administrations publiques », précise le traité. Il s'agit là d'une administration publique, elle doit donc, comme les autres, être visée dans l'article 4 de la loi organique. Vous avez évoqué les collectivités territoriales, vous mentionnez maintenant les régimes de retraite complémentaires ; vous pourriez passer en revue l'ensemble des administrations publiques, cela n'y changerait rien : « toutes administrations publiques », ni plus ni moins. Avis défavorable.
Même avis que la commission.
Monsieur de Courson, non seulement la transposition du traité sera soumise à un contrôle du Conseil constitutionnel, mais elle fera l'objet d'un rapport de la Commission européenne. Or, il est clair que la Commission n'accepterait jamais que l'on exclue les collectivités locales ou les régimes complémentaires obligatoires, car ce serait manifestement contraire au traité. Nous ne faisons ici que transposer fidèlement le traité. Au reste, je suis un peu étonné par vos amendements, car j'avais cru comprendre que vous vous érigiez en défenseurs de l'esprit de ce traité. Or, celui-ci englobe l'ensemble des administrations publiques ; c'est clair et net.
Mais le traité ne dit rien des dépenses et des recettes : il parle du solde !
Si vous appliquez la règle d'or aux régimes complémentaires, vous vous conformez au traité. Mais celui-ci n'a jamais prévu que l'on retire aux partenaires sociaux la gestion des régimes complémentaires et que l'on confie à l'État le soin de fixer le montant des prestations et le niveau des cotisations afin de parvenir à l'équilibre. Il vous suffit de faire pour ces régimes ce qui a été fait pour les collectivités territoriales : l'application de la règle d'or, point.
Ce que vous dites, monsieur Caresche, n'est pas exact. S'agissant des collectivités territoriales, vous me diriez, si votre argumentaire était plus subtil, que la règle d'or ne s'applique qu'aux dépenses de fonctionnement et non aux dépenses d'investissement. Eh bien, il suffirait, pour les collectivités territoriales, de limiter d'éventuelles interventions aux investissements et, pour les régimes complémentaires de retraite, de faire voter une loi pour imposer le strict équilibre.
(L'amendement n° 25 n'est pas adopté.)
(L'article 4, amendé, est adopté.)
Monsieur le président, j'interviendrai plutôt lorsque nous aborderons l'examen du 8°, introduit par le rapporteur. Je me suis en effet ralliée à son amendement et je souhaiterais dire pour quelles raisons, car il risque d'être sous-amendé.
Nous en venons aux amendements à l'article 5.
Je suis saisi d'un amendement n° 13 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Rédactionnel.
(L'amendement n° 13 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 14 de M. Christian Eckert.
La parole est à M. le rapporteur.
Rédactionnel.
(L'amendement n° 14 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Cet amendement vise à élargir le champ du rapport prévu à l'article 5 à l'ensemble des objectifs stratégiques européens, afin que le Parlement soit le mieux éclairé possible.
Les objectifs budgétaires doivent en effet être mis en regard des objectifs environnementaux et sociaux européens, parmi lesquels deux me paraissent fondamentaux : porter le taux d'emploi de la population active de 69 % à 75 % en 2020 et porter l'effort de recherche et développement public et privé à 3 % du PIB en 2020.
Comme plusieurs de nos amendements, celui-ci vise à inscrire l'objectif de réduction des déficits, que nous partageons, dans un objectif politique plus large : la lutte contre le chômage et la transition vers un nouveau modèle de développement.
La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir le sous-amendement n° 56 .
Il s'agit moins de faire des hypothèses que d'avoir une photographie des éléments que ma collègue vient d'évoquer.
La commission avait émis, dans un premier temps, un avis défavorable à l'amendement n° 5 , mais elle avait estimé qu'il pourrait être acceptable si sa rédaction était modifiée. Tel est l'objet du sous-amendement n° 56 , auquel la commission pourrait donner un avis favorable. Elle s'en remet donc à la sagesse de l'Assemblée, si l'amendement n° 5 est ainsi sous-amendé.
Avant qu'il soit sous-amendé, cet amendement pouvait difficilement être accepté par le Gouvernement, dans la mesure où il pouvait être interprété comme une prescription à l'égard du Parlement ou du Gouvernement. Or, nous avons toujours indiqué que ce projet de loi organique avait pour objet de réviser des procédures et surtout pas de prescrire des politiques, quel que soit l'attachement que les uns et les autres peuvent avoir pour tel aspect des politiques publiques.
Si cet amendement est ainsi sous-amendé, je suggérerai à l'Assemblée de l'adopter, car il ne s'agit plus de prescrire, mais de constater les politiques publiques que la France a décidé d'entreprendre au regard des objectifs européens. Ce constat n'est pas gênant ; après tout, il peut concourir à la bonne information du Parlement. Par conséquent, dès lors qu'est écarté tout risque de prescription – et j'insiste bien sur ce point –, il me semble que l'amendement proposé par Mme Sas pourrait être adopté par l'Assemblée.
(Le sous-amendement n° 56 est adopté.)
(L'amendement n° 5 , sous-amendé, est adopté.)
(L'article 5, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 55 , portant article additionnel après l'article 5.
La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour le soutenir.
Cet amendement dépasse les clivages politiques puisqu'il a pour objet de parfaire l'information du Parlement en proposant d'annexer au projet de loi de programmation des finances publiques un rapport étudiant la typologie des détenteurs de la dette publique française ainsi que son évolution depuis le vote de la dernière loi de programmation.
Contrairement aux pays anglo-saxons, il existe peu d'éléments disponibles en France sur les détenteurs de la dette, notamment s'agissant des investisseurs non-résidents, qui représentent pourtant plus des deux tiers de nos créanciers. La typologie des détenteurs de notre dette publique, notamment de la dette de l'État, est pourtant une information importante pour le pilotage des politiques économiques et l'appréciation de l'indépendance nationale. Elle permet, par exemple, de mesurer le poids de l'épargne domestique par rapport aux investisseurs étrangers, la part des fonds souverains dans le financement de nos politiques, le rôle des banques centrales, ou encore notre dépendance par rapport à telle ou telle zone géographique. Il serait donc opportun que le Parlement obtienne une information régulière sur cette question.
Notre collègue propose de traiter un sujet qui n'a pas sa place dans ce projet de loi organique et qui relève, sur le fondement de l'article 34 de la LOLF, d'un projet de loi de finances. Ainsi, une telle disposition serait sanctionnée comme un cavalier.
Sur le fond, chaque mois, l'Agence France Trésor publie un bulletin faisant le point sur les informations que notre collègue souhaite voir transmises au Parlement, en particulier sur la part de la dette détenue par les non-résidents. L'audition du directeur de l'Agence France Trésor par notre commission des finances a d'ailleurs permis d'avoir une indication sur la répartition de la dette : un tiers est détenu par des investisseurs français, un tiers par des investisseurs européens et un tiers par des investisseurs hors de la zone euro.
L'amendement n° 55 nous paraît donc en quelque sorte satisfait. En tout cas, il ne trouve pas sa place dans un projet de loi organique. Avis défavorable.
Le Gouvernement est, bien entendu, défavorable à cet amendement, pour des raisons de forme – sur lesquelles je ne reviens pas, le rapporteur les ayant parfaitement exposées – et pour des raisons de fond. Si porter à la connaissance du Parlement et de nos concitoyens ces informations serait d'une très grande utilité, force est de constater que, dans ce domaine, les possibilités de l'État – et on peut le regretter – sont limitées. Un tiers de la dette est détenu par des résidents, un tiers par des ressortissants de la zone euro et un tiers par des investisseurs situés hors de la zone euro. Il serait donc délicat, outre que cette disposition n'aurait pas sa place dans le projet de loi organique, d'accéder à votre demande.
Néanmoins, je comprends votre préoccupation, madame la députée. Il est vrai qu'un stock de dette de 900 milliards d'euros en 2002, c'est-à-dire constitué depuis toujours, si j'ose dire,…
…qui double en dix ans, cela interpelle. Incontestablement, ces dix dernières années, du fait d'un endettement tout à fait excessif, notre pays a concédé un abandon de souveraineté à des entités dont on peut évidemment regretter qu'elles hors du contrôle, ou en tout cas des moyens, de l'État.
Je comprends parfaitement votre préoccupation et je partage votre inquiétude quant à la considérable aggravation de la dette ces dix dernières années, une aggravation en partie expliquée par la crise, mais en partie également par les politiques menées : de 2002 à 2007, l'endettement a progressé de 300 milliards d'euros alors qu'il n'y avait pas la crise – rien, en tout cas, qui soit de nature à justifier une telle progression.
Je le répète, je partage votre préoccupation, c'est pourquoi le Gouvernement mène une politique vigoureuse afin de stabiliser puis réduire l'endettement de la France. Si nous divergeons probablement sur les moyens de parvenir à ce désendettement, madame la députée, nous poursuivons la même finalité : retrouver notre pleine indépendance nationale en matière économique et financière.
La demande formulée par notre collègue relève d'une annexe à la loi de finances. Sur le fond, nous avons auditionné le directeur général de l'Agence France Trésor, qui nous a expliqué que la répartition par tiers de la dette à laquelle vous venez de faire référence, monsieur le ministre, n'est qu'une apparence trompeuse. Il peut en effet y avoir des résidents français ayant placé leur argent à l'étranger avant de le replacer en France – et vice versa. Le fait que la dette soit souscrite en France ne donne, en réalité, aucune indication quant au fait qu'elle soit détenue par des Français ou des étrangers, et la détermination du détenteur final sera toujours compliquée. En tout état de cause, il serait bon de pouvoir faire le point sur cette question – mais dans les lois de finances et pas dans la loi organique.
(L'amendement n° 55 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement n° 21 .
J'ai écouté avec attention, tout à l'heure, la réponse anticipée de M. le ministre à notre amendement n° 21 . Il s'agit de réaliser un progrès en permettant au Parlement, en particulier à notre assemblée, de pouvoir débattre et échanger dans le cadre de la nouvelle articulation entre les décisions budgétaires nationales et les orientations communautaires. Aussi, nous renforçons l'article 7 bis en ouvrant la possibilité d'organiser « des débats à l'Assemblée nationale et au Sénat sur toutes décisions du Conseil de l'Union européenne adressées à la France dans le cadre des procédures concernant les déficits excessifs sur le fondement de l'article 126 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ».
Cette disposition importante confirme notre volonté d'assurer la souveraineté du Parlement national, ce qui répond par ailleurs à la demande des instances de l'Union européenne.
Notre collègue propose de compléter l'article 7 bis en prévoyant la possibilité d'organiser des débats à l'Assemblée nationale et au Sénat dans le cadre des procédures concernant les déficits excessifs, alors que l'article 7 bis prévoyait uniquement la possibilité d'organiser des débats lorsque le droit de l'Union européenne instituait des procédures de coordination des politiques économiques et budgétaires.
Au titre de l'article 88, la commission a émis un avis défavorable. Certes, abondance de biens ne nuit pas, mais j'attire tout de même l'attention de notre assemblée sur le lien de plus en plus ténu avec la loi organique : il y a là une certaine fragilité, aussi bien de l'amendement n° 21 que de l'article 7 bis lui-même. En résumé, mon avis est un peu réservé – peut-être celui du Gouvernement sera-t-il un peu plus tranché ?
L'avis du Gouvernement est effectivement un peu plus enthousiaste que celui du rapporteur… J'estime pour ma part que l'amendement n° 21 est un très bon amendement, et je remercie Mme Karamanli et Mme Guigou de l'avoir déposé. Le Gouvernement est très favorable à ce que l'on agisse dans le sens d'une plus grande transparence, afin que les débats européens et nationaux trouvent une meilleure articulation, notamment dans cette enceinte.
Je veux, moi aussi, remercier le Gouvernement d'avoir émis un avis favorable à cet amendement extrêmement important. La loi organique qui nous est soumise étant une loi de procédure, je ne vois pas en quoi il serait incongru de prévoir une procédure permettant à notre parlement d'exercer un contrôle légitime sur le dialogue que le Gouvernement a avec la Commission européenne.
De même que dans l'ensemble résultant du six-pack et bientôt du two-pack, le Parlement européen exerce son contrôle sur ce que propose la Commission européenne en matière de procédure budgétaire, il est très important que notre parlement soit, lui aussi, impliqué dans l'ensemble du processus dit du « semestre européen ». Il existe plusieurs moments clés lors desquels la Commission va faire des propositions particulièrement importantes : en novembre, en avril et en juin. Notre parlement doit alors avoir la possibilité de débattre des propositions transmises par la Commission, de l'exercice de surveillance de la Commission sur le budget, ainsi que des réponses que lui fait le Gouvernement. Merci, monsieur le ministre, d'avoir accepté d'introduire dans cette loi une procédure permettant à notre parlement d'exercer toute sa vigilance.
J'entends bien les arguments exposés, qui me paraissent tout à fait justes. Cependant, je tenais à préciser que je regrette l'emploi du verbe « pouvoir ». Pour moi, si l'on veut vraiment que le Parlement fasse son travail, il faut dire que des débats « doivent » être organisés à l'Assemblée nationale et au Sénat… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ah, l'erreur de débutant ! On voit que vous êtes un jeune député ! (Sourires.)
…à partir du moment où les procédures de déficit excessif ont un impact sur les finances de l'État. Aller au bout de la logique de l'amendement proposé conduit à en faire une obligation au lieu d'une simple possibilité.
La disposition serait censurée !
(L'amendement n° 21 est adopté.)
(L'article 7 bis, amendé, est adopté.)
L'amendement n° 6 vise à élargir la composition du Haut Conseil des finances publiques à deux membres supplémentaires nommés par le président du Conseil économique, social et environnemental, afin que des représentants désignés par le monde syndical, les entreprises, les collectivités territoriales et les associations de protection de l'environnement puissent apporter leur éclairage sur la situation des finances publiques. Les écologistes se réjouissent que cette préoccupation ait été largement partagée au sein de la commission spéciale et soit d'ailleurs reprise, au moins partiellement, par l'amendement n° 33 présenté par notre rapporteur.
Avec votre permission, monsieur le président, je présenterai conjointement les trois propositions visant à compléter la composition du Haut Conseil, conformément au consensus qui s'était dégagé lors de nos travaux en commission.
La première proposition consiste à élargir la composition du Haut Conseil à deux membres supplémentaires : d'une part, le directeur de l'INSEE, d'autre part, un membre nommé par le président du Conseil économique, social et environnemental. Le président Carrez avait proposé une alternative introduisant le directeur de l'INSEE au détriment, si l'on peut dire, d'un membre de la Cour des comptes, mais je crois qu'il s'est rallié à notre proposition, ce que je lui laisserai le soin d'expliquer dans quelques instants.
Effectivement, et je pense que nous aurons l'occasion d'évoquer l'alinéa qui pouvait poser problème au regard de l'article 40.
La deuxième proposition consistait à dire que tout membre du Haut Conseil ne pouvait être titulaire d'un mandat électif. Un débat s'est engagé pour déterminer s'il s'agissait d'un mandat national, ou de tout mandat électif. Sur ce point, conformément au consensus qui s'est dégagé, je vous proposerai dans un instant un amendement n° 32 excluant qu'un membre du Haut Conseil soit titulaire d'un mandat électif quelconque – on ne peut donc pas être conseiller municipal, maire ou adjoint au maire, conseiller général, et siéger au Haut Conseil.
La troisième disposition souhaitée par les membres de la commission spéciale consistait à ce que le Haut Conseil soit renouvelable par moitié, ce que je proposerai par l'amendement n° 34 rectifié . Le dispositif est un peu complexe dans la mesure où, abstraction faite du président, les conseillers sont en nombre impair. C'est pourquoi je propose de renvoyer les modalités pratiques de ce dispositif à un décret – d'ailleurs prévu à un autre endroit du texte.
En résumé, je propose à notre assemblée de ne pas retenir l'amendement n° 6 de Mme Sas, qui a d'ailleurs reçu un avis défavorable de la commission, mais plutôt l'amendement n° 33 que je viens de présenter, ce qui aurait semble-t-il pour effet de faire tomber l'amendement n° 42 de M. Carrez. Nous examinerons ensuite les deux autres amendements, nos 32 et 34 rectifié .
Pour des raisons techniques – des sous-amendements ont disparu du fait qu'ils se rapportaient à un amendement ayant été retiré –, la commission spéciale n'a pu intégrer ses propositions au texte avant la séance publique, mais je pense avoir répondu, avec les trois amendements que je viens de présenter – complétés par un quatrième amendement que notre collègue Christophe Caresche s'apprête à présenter – aux demandes qui avaient été formulées.
Monsieur le ministre, je veux insister sur un point : même si le Haut Conseil doit être un organisme indépendant, comme le dit l'article 8, il ne doit pas se priver de l'expertise de l'ensemble des services du ministère de l'économie et de finances. À mes yeux, ce point est essentiel, car la compétence du Haut Conseil comprend toutes les questions consistant à passer d'une prévision macro-économique – une prévision de croissance –, à l'évaluation des recettes qui en découlent. Ce sujet nécessite, me semble-t-il, un haut degré d'expertise technique qu'il est possible de trouver au sein même du ministère.
Je propose par conséquent de nommer également, pour siéger au Haut Conseil, le directeur général de l'Institut national de la statistique et des études économiques. Nous avons hésité, la nomination du directeur général du Trésor paraissant également intéressante, mais la proposition que nous avons retenue me paraît parfaitement justifiée. L'INSEE a toujours été considérée comme une administration jouissant d'une certaine indépendance et ses compétences sont tout à fait respectées. Certes, il s'agit d'une direction de votre ministère, monsieur le ministre, mais son expertise fait autorité.
Quant à la proposition de notre rapporteur de faire également appel à un représentant du Conseil économique, social et environnemental désigné par son président, j'y souscris pleinement.
Je pense donc que l'amendement que nous propose le rapporteur, qui tend à adjoindre deux représentants supplémentaires, permettra au Haut Conseil de mieux fonctionner car il disposera d'une expérience supplémentaire. De plus, l'accès aux informations détenues par l'ensemble des services du ministère sera plus simple. Cette proposition m'agrée tout à fait, même s'il y a ensuite la question des incompatibilités et de la durée du mandat. Il faut, en particulier, prévoir dès le début qu'il sera renouvelé tous les trente mois.
J'approuve donc totalement, pour ma part, la proposition de notre rapporteur et je retire mon amendement. J'insiste tout de même sur un point : ce n'est pas parce qu'il y aura le directeur général de l'INSEE que ce Haut Conseil perdra en indépendance.
Très bien !
(L'amendement n° 42 est retiré.)
Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements restant en discussion ?
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 6 , puisqu'il est favorable à celui présenté par M. Eckert. Je remercie par ailleurs le président de la commission des finances d'avoir retiré le sien.
En ce qui concerne l'amendement no 6 , je trouve que son exposé sommaire est plus précis que la formulation proposée dans son texte. L'idée était d'élargir la composition du Haut Conseil des finances publiques aux représentants des collectivités territoriales, des entreprises ou encore des organisations syndicales de salariés. Or, dans le texte de l'amendement, le seul critère pour les membres nommés est leur compétence « dans le domaine des prévisions macroéconomiques et des finances publiques ». Il n'est donc pas fait référence au fait qu'ils pourraient représenter les collectivités territoriales et les entreprises.
En d'autres termes, ce n'est pas parce que le président du Conseil économique, social et environnemental nomme des représentants qu'ils représentent forcément les collectivités territoriales ou les entreprises. De ce point de vue, le texte proposé est un peu plus approximatif que l'exposé des motifs.
Par ailleurs, l'idée de nommer le directeur général de l'INSEE est excellente, puisque le but de ce Haut Conseil, si j'ai bien compris, est d'apporter une plus-value par rapport au travail que fait aujourd'hui la Cour des comptes. Or on sait bien que le problème de la Cour des comptes est qu'il s'agit d'un corps de contrôle qui n'a pas toujours accès aux données confidentielles du ministère des finances. On peut donc espérer qu'avec la participation du directeur général de l'INSEE, on en saura un peu plus sur la sorte de boîte noire que représentent les hypothèses macroéconomiques et les calculs des recettes fiscales.
Nous avons déjà eu un très long débat sur toutes ces questions. Selon moi, les amendements nos 33 , 32 et 34 rectifié du rapporteur permettent de parvenir à un compromis.
J'étais de ceux qui hésitaient sur la présence du directeur général de l'INSEE. Certes, en droit européen, l'Institut est un organisme indépendant, quand bien même il s'agit d'un service du ministère. Mais, mes chers collègues, le directeur général de l'INSEE est nommé en conseil des ministres.
Imaginez que ce malheureux directeur ait transmis au Gouvernement des prévisions de croissance et de hausse des prix qui ne correspondent pas à celles qui sont finalement retenues. Que dira-t-il après au Haut Conseil ? Expliquera-t-il comment il voyait les choses et ce qu'il avait conseillé au Gouvernement ? Que dira alors le ministre apprenant cela ? Il devra rappeler au directeur général la réserve que lui impose son statut de haut fonctionnaire.
Voilà pourquoi j'étais hésitant quant à la présence au Haut Conseil du directeur général de l'INSEE. Voyez-vous, on n'a pas toujours des ministres libéraux (Sourires), au sens d'ouverts d'esprit et acceptant que les hauts fonctionnaires ne soient pas là uniquement pour conforter ce qu'ils disent, aussi absurde que cela soit !
Sous cette réserve, le groupe UDI se ralliera à cette proposition. Mais il faut bien préciser, et c'est l'objet de nos débats, que le ministre n'a pas à engueuler son directeur général, voire à le faire révoquer, parce qu'il n'est pas dans la ligne ou parce qu'il aura manifesté, au Haut Conseil, son désaccord avec l'hypothèse retenue par le Gouvernement. (Sourires.)
Je vois que vous prenez la chose en plaisantant, mes chers collègues, mais c'est là un vrai problème, non pas de droite ou de gauche, mais d'articulation avec le ministre. Celui-ci, jusqu'à preuve du contraire, est le patron de ses directeurs, lesquels doivent donc penser, au moins publiquement, comme lui. Ils ne peuvent pas faire de déclaration publique contraire, sinon on les vire, ce qui est normal.
Ne vous inquiétez pas, l'articulation se fera très bien !
Après avoir entendu le rapporteur, je souhaite retirer mon amendement. Je remercie M. Eckert d'avoir repris notre idée d'élargir au Conseil économique, social et environnemental la représentation au sein du Haut Conseil des finances publiques.
(L'amendement n° 6 est retiré.)
Je remercie à mon tour le rapporteur pour l'amendement de synthèse qu'il propose, qui rejoint beaucoup des préoccupations que nous avons exprimées au sein de la commission.
Nous avions en particulier déposé, au nom du groupe socialiste, deux amendements. L'un visait à faire siéger au sein du Haut Conseil le directeur général de l'INSEE ; l'autre tendait à ce qu'il y ait un représentant du Conseil économique, social et environnemental. Nous avions rencontré quelques difficultés avec l'article 40. L'amendement no 33 , tel qu'il est rédigé, a résolu le problème.
Il est parfaitement cohérent que le directeur général de l'INSEE, siège au Haut Conseil. En effet, c'est son institut qui notifie le déficit des administrations publiques. L'INSEE est reconnu par la Commission européenne comme un institut indépendant, de même que tous les autres instituts statistiques européens. Certes, il y a une spécificité française, dans la mesure où, pour des raisons historiques, l'INSEE est rattaché au ministère des finances.
Mon collègue M. Mariton et moi-même nous étions d'ailleurs interrogés ici même, il y a cinq ans, à l'occasion d'un rapport que nous avions consacré à l'INSEE : devait-on faire comme tous les instituts européens, c'est-à-dire garantir l'indépendance de l'institut à l'égard du ministère des finances ?
Il nous était apparu que ce n'était pas nécessaire, dès lors que toutes les règles étaient respectées. Je rappelle que l'INSEE ne peut publier aucun chiffre sans respecter la déontologie qui s'applique à tous les instituts de statistiques. Il ne fait pas de prévisions contradictoires par rapport à la loi de finances, parce qu'il n'a pas le droit de faire des prévisions à un an. Il se contente de prévisions fondées sur des enquêtes conjoncturelles. Par conséquent, il n'y a jamais de conflit entre ce que peut dire le directeur général de l'INSEE, qui doit rester dans la statistique et la prévision à très court terme, et les analyses de la direction du trésor ou de toute autre direction du ministère des finances.
Je crois donc que c'est le bon sens que d'avoir fait entrer l'INSEE dans ce Haut Conseil. On a besoin, dans cet organe, d'une véritable expertise, non seulement sur la nature des déficits et sur la façon dont évoluent les recettes avec la conjoncture, mais aussi sur la croissance potentielle. Or, à ma connaissance, le seul institut qui, depuis près d'une trentaine d'années – au début, il était même le seul à le faire – calcule la croissance potentielle, c'est l'INSEE. Certes, aujourd'hui, il y a beaucoup d'autres évaluations, mais il me paraît assez naturel de faire entrer l'INSEE dans ce Haut Conseil. Je me réjouis également que l'on y fasse entrer le Conseil économique, social et environnemental, qui a vocation à s'exprimer sur les lois de programmation des finances publiques, sur la conjoncture et même sur certains aspects des lois de finances.
M. Muet a été plus rapide que moi : je voulais rassurer M. de Courson en lui disant que l'INSEE ne fait jamais de prévisions à un horizon de dix-huit mois ; il s'arrête à six mois. Cet équilibre permet, depuis des années, que l'INSEE n'entre pas en contradiction avec les ministres des finances.
(L'amendement n° 33 est adopté.)
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 30 .
Cet amendement porte sur la question de savoir qui doit désigner les quatre représentants de la Cour des comptes qui, outre le Premier président, siègent dans ce Haut Conseil.
Le texte que nous propose le Gouvernement consiste à dire qu'ils sont nommés par le Premier président. Cela veut donc dire que, dans le Haut Conseil, cinq personnes sur onze sont en quelque manière dépendantes du Premier président.
Je suis peut-être l'un des derniers démocrates de cette assemblée (Mouvements divers), mais j'ai toujours bien aimé les élections. Dans beaucoup d'institutions indépendantes, ce sont les différents corps qui votent pour élire des représentants, ce qui leur assure davantage d'indépendance. Voilà pourquoi j'ai déposé ce petit amendement qui consiste à demander à ce que les quatre représentants de la Cour des comptes soient élus par leurs pairs.
La commission n'a pas retenu l'amendement de notre collègue. Indépendamment du fait que cela pourrait être perçu comme une marque de défiance à l'égard du Premier président…
Diriez-vous la même chose si le Premier président n'était pas celui que nous connaissons actuellement ?
…cette procédure accréditerait l'idée selon laquelle le Haut Conseil ne serait qu'un simple satellite de la Cour, puisque les magistrats qui y siégeraient apparaîtraient comme des représentants de l'ensemble des magistrats. Cela n'apparaît pas souhaitable ; la commission a donc repoussé votre amendement.
Défavorable, pour les raisons qui viennent d'être indiquées par le rapporteur. Je n'ai pas du tout la même analyse que M. de Courson sur la façon dont le président de ce Haut Conseil doit émerger.
J'en profite d'ailleurs pour indiquer que, tout à l'heure, je souhaitais préciser que les membres de ce Haut Conseil ne seraient évidemment pas rémunérés, car il ne s'agit pas d'emplois publics. En revanche, ils seront défrayés, ce qui me paraît tout à fait normal.
(L'amendement n° 30 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l'amendement n° 54 .
Cet amendement traite lui aussi de l'indépendance des membres du Haut Conseil des finances publiques. Il vise à soumettre le choix des personnalités retenues par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat et par les présidents de la commission des finances des deux chambres un avis conforme de leurs assemblées respectives, exprimé à une majorité des trois cinquièmes. Cette majorité qualifiée est à même de garantir des candidatures non partisanes.
Alors que le président de l'Assemblée nationale vient d'annoncer qu'il renoncerait à nommer lui-même les membres du Conseil supérieur de la magistrature pour en confier le choix à l'ensemble des députés siégeant à la commission des lois, il ne serait pas logique de maintenir un droit de nomination discrétionnaire pour les membres du Haut Conseil des finances publiques.
Je note par ailleurs que, dans son allocution liminaire, M. le ministre de l'économie s'est dit ouvert aux propositions de l'Assemblée s'agissant de la nomination des membres du Haut Comité. Il me semble donc que la proposition que je fais ici est de nature à créer un consensus et qu'elle va dans le sens de la juste revalorisation des pouvoirs du Parlement, voulue par tous.
Madame, la commission n'a pas retenu votre amendement, qui obligerait les quatre autorités parlementaires désignant les membres du Haut Conseil à recueillir un avis conforme de chaque chambre à la majorité des trois cinquièmes.
Cette formalité nous paraît excessive. L'opposition ne sera pas exclue de la procédure de nomination, puisqu'elle exerce la présidence des deux commissions des finances – pour notre assemblée, c'est même gravé dans le règlement. En plus, notre collègue Christophe Caresche viendra apporter un gage de compétence et d'impartialité supplémentaire à travers son amendement no 43 . (Sourires.)
Cet amendement nous permet de réfléchir à la notion d'indépendance. Cela dit, je ne suis pas tout à fait d'accord avec ma collègue du Vaucluse, pour la simple et bonne raison que le Conseil constitutionnel, à qui nous confions le soin éminent de vérifier en toute indépendance la constitutionnalité de nos lois, est lui-même composé de membres nommés, sans que cela soit aux trois cinquièmes. Pour autant, personne ne conteste le fait que le Conseil constitutionnel soit indépendant.
Je ne crois donc pas que telle ou telle procédure garantisse particulièrement l'indépendance, laquelle réside dans les modes de fonctionnement et dans la déontologie des hommes ou des femmes que nous choisirons. Certains pouvoirs publics sont extrêmement indépendants, alors qu'ils ont été nommés exactement de la manière que celle qui est proposée dans ce projet de loi organique. Je suis donc, pour ma part, défavorable à cet amendement.
Monsieur le président, emporté par la force de conviction des propos du rapporteur, j'ai indiqué que j'étais du même avis que lui. En tant que membre du Gouvernement, il sied davantage que je m'en remette à la sagesse de l'Assemblée, au nom de la séparation des pouvoirs. (Sourires.)
La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l'amendement n° 43 .
Cet amendement, qui a été très opportunément mentionné par le rapporteur, vise à prévoir une audition publique, par la commission des finances, des quatre personnalités qui seront nommées par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat et les présidents des deux commissions des finances. Cela nous permettra de vérifier la qualité et le sérieux avec lesquels nos éminents collègues procèdent à leurs nominations.
On n'auditionne que quatre des membres. Pourquoi pas les autres ? Et que va-t-on leur dire ? « Bonjour, heureux de faire votre connaissance » ? (Sourires sur les bancs du groupe UMP.) C'est un amendement rigolo-rigolo, qui ne mange pas de pain…
… et qui fera seulement perdre une heure supplémentaire à la commission des finances. Il fallait adopter l'amendement initial de M. Caresche, repris par Mme Maréchal-Le Pen, qui avait une cohérence. Je comprends que le ministre, dans sa grande sagesse, se soit débiné. Cet amendement est inutile.
Au contraire de M. de Courson, je voudrais remercier M. Caresche, qui n'est pas membre de la commission des finances, de lui témoigner une telle confiance.
Cela a échappé au président de la commission des finances, mais je suis membre de la commission ! (Rires) Vous aurez au moins appris quelque chose ce soir, monsieur le président !
Il est vrai que mon amendement n'allait pas dans votre sens. J'ai bien compris que la nomination aux trois cinquièmes vous posait problème. Je vais vous dire une chose : ce combat, je continuerai de le mener, car le Président de la République et le parti socialiste se sont engagés sur cette question. C'est la seule façon de mettre fin à cette forme d'arbitraire. Parmi les quatre personnalités nommées par le Parlement, il y aura celles qui seront désignées par la majorité et celles qui le seront par l'opposition. Je ne crois pas que ce soit un gage d'indépendance.
Je veux dire à M. de Courson, qui ironise sur cet amendement, que les choses ont changé depuis que les commissions auditionnent les personnalités désignées, notamment par le Président de la République. Celles-ci ne viennent pas l'esprit tranquille et la fleur au fusil.
Il est très utile de les auditionner. En tant que députés, nous n'avons pas à donner une caricature de nous-mêmes. Essayons de prendre au sérieux les procédures que nous instituons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(L'amendement n° 43 est adopté.)
J'ai évoqué cet amendement tout à l'heure. Il s'agit d'exclure le fait que tout membre du Haut Conseil soit titulaire d'un mandat électif.
(L'amendement n° 32 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je l'ai évoqué également. Il s'agit de prévoir le renouvellement par moitié tous les trente mois des membres du Haut Conseil mentionnés aux 1°, 2° et 3°. Cela sera précisé par le décret prévu à l'article 15.
(L'amendement n° 34 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 8, amendé, est adopté.)
Cet amendement vise à préciser la formulation quelque peu incertaine de l'alinéa 1, en indiquant qu'il s'agit bien de l'ensemble des engagements européens de la France. Cette proposition est en cohérence avec l'amendement 5 , adopté précédemment, qui prévoit de constater l'avancement de la France au regard de ses objectifs européens, en termes de diminution du chômage et de lutte contre le changement climatique, notamment.
La Commission n'a pas retenu cet amendement qui serait sans conséquence juridique. Si le Haut Conseil devait examiner la cohérence des projets de loi de programmation au regard de l'ensemble des engagements européens de la France, il serait amené à donner son avis en matière de développement durable et de toutes les politiques en général. Cet amendement est donc inutile au regard des missions du Haut Conseil.
Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Tout à fait défavorable. Le Haut Conseil n'a pas vocation à être un quelconque superviseur des politiques publiques menées par le Gouvernement sous le contrôle du Parlement. Le contrôle des politiques publiques, que d'aucuns trouvent déjà excessif, est exercé par la Commission ou par la Cour de Justice européenne. Nous savons dans quelles conditions cela se passe. N'y ajoutons pas une instance nationale. Il serait opportun de retirer cet amendement.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 31 .
Cet amendement tout simple consiste à homogénéiser la procédure pour les lois de finances rectificatives et les lois rectificatives de financement de la sécurité sociale. Il est dommage que l'article 11 rende facultatif l'avis du Haut Conseil pour cette catégorie de lois de finances, qu'il n'y a pas lieu de distinguer des lois de finances initiales.
Madame Berger, pour revenir sur l'INSEE, lisez sa dernière note et vous verrez qu'elle remet complètement en cause l'hypothèse d'une croissance de 0,3 % en 2013. C'est clair, nous n'y parviendrons pas. Le directeur de l'INSEE dit donc l'inverse de ce qu'affirme, pour l'instant, le Gouvernement. Ce qui n'est pas sans déplaire.
La commission vous a donné partiellement satisfaction dans la mesure où elle a étendu la possibilité pour le Haut Conseil, lors des lois de finances rectificatives, de donner un avis non seulement sur les prévisions macro-économiques, mais aussi sur le contenu des lois. Si l'avis du Haut Conseil devait être nécessaire, cela alourdirait considérablement la procédure. Il arrive parfois, nous le savons, que des lois de finances rectificatives prennent un caractère de grande urgence, pour des questions bancaires par exemple. Avis défavorable.
L'article 11 indique clairement la possibilité pour le Haut Conseil de donner son avis. Laissons-le travailler en toute indépendance.
Il est vrai que j'ai eu partiellement satisfaction sur ce point. Je retire l'amendement, avec regret.
(L'amendement n° 31 est retiré.)
Cet amendement vise à ce que le Haut Conseil rende un avis public sur tout projet de loi de finances rectificatives ou projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Il est important que le Parlement puisse connaître l'avis du Haut Conseil et qu'il soit informé avant la tenue des débats. Dans un contexte économique aussi incertain, qui donnera lieu à de nombreux textes financiers rectificatifs et à l'heure où d'importantes réformes, telles celle du financement de la protection sociale, semblent devoir être renvoyées à ce type de texte, il ne paraît pas acceptable que le Haut Conseil puisse demeurer silencieux.
On cherche, en vain, de la matière organique. Après quelques os, durs, un peu de muscle ferait du bien ! Ce Haut Conseil doit s'imposer dans le débat public. Beaucoup de possibilités sont ouvertes. Mais si elles sont agréables à l'oreille, elles ne sonnent pas aussi fortement que des obligations qui seraient inscrites dans la loi. Le Haut Conseil ne devrait pas avoir à se poser la question de l'opportunité d'émettre un tel avis.
La commission n'a pas retenu ce type d'amendements. Elle a renforcé l'intervention du Haut Conseil sur un certain nombre de dispositions, travaillant beaucoup sur le déroulé – que le président Carrez aime à qualifier de « vertueux » – de l'élaboration des lois de finances. Le Haut Conseil a la possibilité de donner son avis s'il estime que la loi de finances rectificative qui lui est transmise le justifie. Ces amendements ajoutent une étape supplémentaire et transforment la procédure en chemin de croix. Avis défavorable.
L'essentiel est acquis grâce à l'amendement présenté précédemment par le rapporteur. Il nous paraît essentiel, sur les lois de finances rectificatives, que le Haut Conseil soit saisi non seulement de l'analyse des prévisions macro-économiques mais également de la cohérence des comptes. Je me réjouis qu'on ait ainsi étendu les compétences du Haut Conseil.
Ces amendements visent à pousser la démarche jusqu'au bout en rendant l'avis obligatoire. Il est vrai que des lois de finances rectificatives peuvent ne pas avoir d'incidence réelle sur les comptes, je pense notamment aux lois de finances qui traitaient des garanties données aux établissements financiers. Mais il est vrai aussi que ces dernières années, face à la crise, des lois de finances rectificatives qui contenaient des dispositions extrêmement importantes ont dû être mises en oeuvre sans attendre la loi de finances pour l'année suivante, tellement les déficits se creusaient.
Nous sommes parvenus ici à un bon équilibre, et l'essentiel a été acquis. Mais il faut que nous attachions la plus grande importance à l'examen des lois de finances rectificatives, car c'est vraiment là que se jouera l'efficacité de la correction des écarts, dont je rappelle qu'elle est prévue de façon automatique par l'article 3 du traité.
(Les amendements identiques nos 38 et 49 ne sont pas adoptés.)
(L'article 11 est adopté.)
Sur l'article 13, je suis saisi d'un amendement de précision, n° 20, présenté par M. le rapporteur.
(L'amendement n° 20 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 13, amendé, est adopté.)
La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, première oratrice inscrite sur l'article 14.
Cet article complète ce que nous avons dit tout à l'heure de la composition du Haut Conseil et il convient de regarder les deux articles ensemble pour avoir une vue complète du dispositif.
Il a été souligné combien la présence du directeur de l'INSEE était utile, dans la mesure où il arrive avec sa « mallette » de données. Tout cela ne suffit cependant pas à assurer la pleine information du Haut Conseil. En effet, les auditions publiques ne remplacent pas l'accès qu'un organisme de cette nature doit avoir aux données, documents et informations, utiles à l'exercice de sa mission.
De la même manière, le dernier alinéa de l'article 14 n'est pas suffisant, puisqu'il se contente de disposer que « le Gouvernement répond aux demandes d'information que lui adresse le Haut Conseil dans le cadre de la préparation de ses avis ».
À cette rédaction, il faudrait en substituer une autre, plus traditionnelle d'ailleurs, précisant que les administrations mentionnées au premier alinéa donnent accès au Haut Conseil à toutes les informations utiles à l'exercice de sa mission.
Et, afin que le Haut Conseil ne déborde pas dans ses demandes et pour s'assurer qu'il s'agira bien de l'ensemble des données utiles à l'exercice de sa mission, le décret en Conseil d'État prévu à l'article 15 pourra préciser, par exemple, que la communication ne s'étend pas aux données personnelles qui ne seraient pas utiles à l'exercice de la mission du Haut Conseil.
Encore une fois, les auditions du Haut Conseil et le fait qu'y siège le directeur de l'INSEE ne lui donnent pas accès de plein droit à des informations dont il a besoin pour mener sa mission.
Je souhaite simplement demander une précision au Gouvernement. Il est indiqué au premier alinéa de l'article 14 que le Haut Conseil peut procéder à l'audition des représentants de l'ensemble des administrations compétentes. Pourriez-vous nous garantir, monsieur le ministre, que ces représentants ne se présenteront pas devant le Haut Conseil avec des instructions du ministre ? C'est hélas une tradition dans notre doux pays que les directeurs d'administration centrale qui sont auditionnés par les commissions reçoivent des consignes du cabinet. Pourrait-on obtenir l'assurance que ce ne sera pas le cas, lors des auditions à huis clos devant le Haut Conseil ?
Je voudrais soutenir la proposition de ma collègue, Mme Bechtel. Il s'agit en effet du seul point qui représente une plus-value dans cette loi organique.
L'intérêt de ce Haut Conseil est qu'il est adossé à la Cour des comptes, tout en lui étant extérieur. Or la Cour des comptes ne dispose pas actuellement d'un accès systématique aux données internes à l'administration, et d'autres ministres des finances, moins libéraux que l'actuel ministre du budget (Sourires), ont parfois refusé de lui fournir les données confidentielles relatives au projet de loi de finances.
Si l'on veut donc que ce Haut Conseil fonctionne et qu'il apporte une vraie plus-value par rapport à la Cour des comptes, il doit avoir accès à ces données. La formulation proposée, même si elle est moins précise que celle que j'avais suggérée en commission spéciale, représente donc déjà un petit pas pour l'Assemblée et un grand pas pour les finances publiques.
Si ce n'est pas le cas, pourquoi ne pas s'en remettre à la Cour des comptes, plutôt que de mettre en place un énième « bidule » ?
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement n° 40 .
En matière de finances publiques, la transparence maximale est souhaitable à l'égard des citoyens, des contribuables et des assurés sociaux. Il est donc proposé que les réponses du Gouvernement à cette instance soient publiées, à l'instar notamment de ce que pratique le Conseil constitutionnel dans les décisions qu'il rend, suite à des saisines sur les projets de loi.
La Commission n'a pas retenu cet amendement. Une telle précision paraît en effet largement excessive, et le Haut Conseil doit demeurer libre de publier, s'il le souhaite, des éléments d'information qui lui ont été fournis par le Gouvernement.
En outre votre analogie avec la pratique du Conseil constitutionnel est trompeuse. Il ne s'agit pas ici d'une procédure juridictionnelle, régie par le principe du contradictoire. Le Haut Conseil demande des informations au Gouvernement, qui a le devoir de les lui transmettre, et publie son avis. Ce n'est ni un tribunal ni une procédure hiérarchique. Organe indépendant, le Haut Conseil formatera son avis comme il l'entend.
Même si je comprends les propos du rapporteur sur le fond, il y a là une contradiction, puisque le Haut Conseil est adossé à la Cour des comptes, entité juridictionnelle qui dispose de procédures très précises, notamment de procédures contradictoires, véritables pierres angulaires du travail de la Cour.
Si le Haut Conseil doit fonctionner différemment de ce qui est pratiqué à la Cour des comptes, il faudrait le mentionner, sans quoi, spontanément, il adoptera les règles de procédure, assez lourdes, de la Cour et fonctionnera à son image. Il y a fort à parier en effet que le principe du contradictoire soit inscrit dans l'ADN de l'organisme que vous êtes en train de créer.
J'espérais pour ma part que le Gouvernement répondrait aux questions importantes qu'ont posées Mme Bechtel, M. de Courson et M. Aubert.
L'article 14 prévoit en effet que le Gouvernement répond aux demandes d'information que lui adresse le Haut Conseil, mais je souhaiterais que le Gouvernement nous dise un peu plus précisément comment il conçoit l'accès du Haut Conseil aux informations nécessaires. Car, comme vient de fort bien l'exprimer M. Aubert, la Cour des comptes use de procédures contradictoires, très formalisées, et il est important, pour que le Haut Conseil soit efficace, qu'il puisse avoir pleinement accès aux informations internes à l'administration.
La raison pour laquelle j'ai soutenu dès le début l'intégration dans ce Haut Conseil du directeur général de l'INSEE tient précisément à la nécessité qu'il dispose pleinement des informations nécessaires. Je souhaiterais donc entendre le ministre sur ce point.
Les désirs du président de la commission des finances sont des ordres dans cette enceinte ! Cher Gilles Carrez, les méthodes de travail du Haut Conseil ne peuvent être précisées par la loi organique. Elles devront être définies par son président, en concertation avec l'exécutif.
Deux remarques ensuite, qui satisferont vos demandes de réassurance. En premier lieu, il n'est pas dans l'intérêt du Gouvernement de cacher quoi que ce soit à ce Haut Conseil, a fortiori s'il souhaite le convaincre. Il est peu fréquent que ce soit en refusant des informations que l'on parvienne à convaincre ceux qui vous les réclament et, en règle générale, quand des documents ne lui sont pas fournis, il est assez rare que la Cour des comptes s'en satisfasse.
En second lieu, à supposer que le Gouvernement juge utile de cacher telle information au Conseil, celui-ci, à n'en pas douter, s'en apercevrait, et le Gouvernement s'exposerait ainsi à la dénonciation publique. Cette seule menace, me semble-t-il, devrait suffire à l'en dissuader.
Je pense qu'avec ces deux arguments, qui ne sont pas de droit mais de bon sens, vous devriez être rassuré quant à la façon dont les choses vont se passer… en tout cas avec ce gouvernement.
(L'amendement n° 40 n'est pas adopté.)
(L'article 14 est adopté.)
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement n° 41 .
La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, pour soutenir l'amendement n° 52 .
Nous proposons de substituer, à la fin de la seconde phrase de l'alinéa 2, au mot « constatés » les mots « ayant pour objectif de faciliter la reprise économique ».
Il s'agit d'apporter au texte une précision dont la portée ne doit pas être négligée, même si elle résulte déjà de nos engagements européens. Le traité a en effet prévu, dans son article 3, que les « circonstances exceptionnelles » résultent soit « de faits inhabituels indépendants de la volonté de la partie contractante et ayant des effets sensibles sur la situation financière des administrations publiques », soit de « périodes de grave récession économique telles que visées dans le pacte de stabilité et de croissance révisé ». Ce dernier texte, issu du Règlement n° 11752011 du Parlement européen et du Conseil, ne contient aucune autre précision supplémentaire, à l'exception de la suivante : l'écart temporaire par rapport à la trajectoire d'ajustement des finances publiques a pour fin, sans mettre en péril la viabilité budgétaire à moyen terme – comme le prévoit aussi l'art 3 b du traité –, « de faciliter la reprise économique ».
Même si le renvoi au traité, qui lui-même renvoie au pacte de stabilité, inclut en principe cette précision, elle mérite cependant d'apparaître clairement dans le texte de la loi organique, afin de donner un socle juridique aux propos du ministre de l'économie et des finances devant votre commission spéciale et devant cet hémicycle, selon lesquels le dispositif prévu par la présente loi organique permettrait le cas échéant des politiques adaptées à une « situation économique dégradée » allant jusqu'à des politiques contracycliques.
La commission a émis un avis défavorable. En effet, les circonstances exceptionnelles permettant de suspendre la mise en oeuvre de mesures de correction des écarts sont nombreuses ; elles sont définies par l'article 3 du TSCG, mais également par l'article 2 du règlement 1467-97 du 7 juillet 1997, modifié en 2005, relatif à la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.
Mon rapport, dans lequel je ne doute pas que vous vous soyez plongée, comprend près d'une page explicitant cette définition qui est, en réalité, plus large que le fait de faciliter la reprise économique.
Je crains qu'en adoptant votre amendement nous obtenions l'effet inverse de ce que vous souhaitez. On pourrait croire en effet que seules les circonstances facilitant la reprise économique constituent en soi des circonstances exceptionnelles.
Je vous propose donc de retirer votre amendement, à défaut de quoi il recevra un avis défavorable.
Madame la députée, je comprends ce qui inspire cet amendement, mais je voudrais vous convaincre qu'au mieux il est inutile, au pire il peut avoir des conséquences qui ne sont pas celles que vous souhaitez.
Les circonstances exceptionnelles sont définies dans le traité et la loi organique y fait référence. Le préciser davantage me paraît donc inutile.
Pis encore, dès lors que, dans l'amendement que vous proposez, vous ne reprenez à votre compte que de manière sélective les circonstances exceptionnelles énoncées par le traité, vous risquez d'ouvrir la porte aux contentieux, ce qui serait préjudiciable, peut-être à notre pays, mais certainement à la bonne application du traité et de la loi organique. En ce sens, l'amendement risque d'être préjudiciable aux intérêts mêmes, à la vision même que vous avez de l'avenir de ce traité et des procédures que vous avez brillamment défendues tout à l'heure du haut de cette tribune.
Aussi, comme le rapporteur, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir retirer cet amendement au bénéfice des explications que je viens de vous donner.
À défaut, je serais obligé de donner raison au rapporteur qui appellerait les parlementaires à voter contre.
Monsieur le ministre, compte tenu des explications que vous avez données, je vais retirer cet amendement.
Je ferai toutefois remarquer qu'il n'est pas aussi équivoque que vous le dites, parce qu'il s'agit bien des objectifs de la reprise économique. Ce n'est pas une définition des circonstances exceptionnelles, mais une définition de la mise en oeuvre de ce que permettraient des circonstances exceptionnelles.
(L'amendement n° 52 est retiré.)
Cet amendement vise à retenir une rédaction qui soit la plus proche possible de celle du traité.
En effet, le mécanisme de correction des écarts par rapport à la trajectoire de réduction des déficits est d'une extrême importance. Il est déclenché automatiquement, comme le prévoit l'article 3 du traité, qui prévoit « l'obligation pour la partie contractante – l'État – de mettre en oeuvre des mesures visant à corriger ces écarts sur une période déterminée. ».
Dans la rédaction proposée pour l'article 16, le texte ne crée pas d'obligation « de résultat » concernant la correction de l'écart. Le III de l'article 16 se borne à dire que « Le Gouvernement tient compte d'un écart important ». Nous estimons que l'expression « tenir compte » est trop faible. Aussi, nous alignant sur la rédaction du traité, nous proposons la phrase suivante : « La plus prochaine loi de finances de l'année ou loi de financement de la sécurité sociale de l'année comprend les mesures, qui relèvent de leur domaine, visant à corriger un écart important. ». Ce n'est pas une rédaction coercitive ; elle est simplement un peu plus impérative que celle que vous proposez.
Nous ne sommes pas tout à fait d'accord avec le rapporteur qui estime que cette rédaction va un peu loin. Toutefois, si nous voulons vraiment rester dans la ligne du traité – dont nous allons, demain, autoriser la ratification –, la rédaction de notre amendement est préférable.
La commission n'a pas retenu votre amendement, mon cher collègue, pour plusieurs raisons.
Dans sa rédaction issue de la commission spéciale, l'article 16 prévoit déjà que le Gouvernement présente des mesures de correction, pas seulement, comme dans la version du Gouvernement, lors de l'élaboration de la loi de finances, mais dans la prochaine loi de finances, ce qui n'est pas une simple modification sémantique. Vous voilà donc, monsieur Carrez, partiellement rassuré !
Cela étant, je vous rappelle qu'une loi organique ne peut contraindre le législateur. Pour cette raison, ce type d'amendement – que l'on peut comprendre intellectuellement – ne peut trouver sa place dans la loi organique, qui serait frappée d'inconstitutionnalité puisqu'elle aurait pour effet de contraindre le législateur dans les lois de finances. Votre amendement serait immanquablement censuré par le Conseil constitutionnel.
Voilà pourquoi je maintiens mon avis défavorable.
Défavorable.
Monsieur Carrez, au plan juridique, le rapporteur est parfaitement fondé à vous opposer l'argument qu'il vient d'exposer. Je m'y rallie bien volontiers.
Pour ce qui est de l'opportunité, je ne suis pas sûr que la chose soit forcément souhaitable. Depuis le début de nos débats, la Gouvernement indique constamment qu'en aucune manière, ce texte ne contraint la souveraineté pleine et entière du Parlement.
Or vous proposez, dans cet amendement, de la contraindre de fait. Vous estimez cette contrainte nécessaire. Le Gouvernement, quant à lui, ne la juge pas souhaitable. Il estime même que le Parlement doit rester parfaitement souverain dans les choix qu'il fera par ses votes.
Par conséquent, j'appelle l'Assemblée à rejeter cet amendement pour les raisons juridiques et les raisons d'opportunité que je viens d'invoquer.
(L'amendement n° 47 n'est pas adopté.)
(L'article 16, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement, n° 46 , portant article additionnel après l'article 17 C.
La parole est à M. Gilles Carrez.
Cet amendement exprime le rêve de tout ministre du budget ! C'est un vieux sujet qui consiste à rendre impérative l'inscription de toutes les dispositions fiscales dans les lois de finances et de financement.
C'est un amendement que nous présentons depuis des années. Peut-être, ce soir, le président de la commission des lois sera-t-il touché par la grâce puisqu'il est en même temps président de la commission spéciale – je profite de l'absence de mon collègue Jean-Luc Warsmann… Mais il est nécessaire, si l'on veut faire de bonnes finances publiques, de réserver aux lois de finances et de financement les dispositions fiscales importantes.
J'ai vécu comme un traumatisme l'inscription dans une loi estivale sur le tourisme d'une baisse de TVA de 3 milliards !
C'est d'autant plus traumatisant que vous l'avez votée…
Après bien des efforts, nous avons réussi à obtenir du précédent gouvernement, en 2010, une instruction du Premier ministre qui réserve aux lois de finances et de financement les dispositions fiscales.
J'ai cru entendre le nouveau Premier ministre, dès le premier Conseil des ministres, estimer à son tour que les mesures fiscales devaient être réservées aux lois de finances et de financement. Aussi, mes chers collègues, si vous ne votez pas cet amendement, j'en serai très triste, et je pense que le ministre du budget, lui aussi, sera très triste – même s'il n'a pas le droit de le dire ! Je souhaite qu'au moins, il nous confirme les bonnes intentions de l'actuel gouvernement.
M. Carrez sait bien que son amendement n'a aucune chance de prospérer puisqu'il est contraire à l'article 34 de la Constitution. Si toutefois j'avais eu quelque complaisance, le président de la commission spéciale, Jean-Jacques Urvoas, m'aurait rappelé à mon devoir, car en tant que président de la commission des lois, il est le gardien du respect de la Constitution.
Son prédécesseur, M. Warsmann, avait eu la même attitude puisque, lors du débat sur le projet de loi constitutionnelle que vous aviez conduit, mon cher collègue, les deux assemblées avaient rejeté ce type d'amendement.
Je comprends que vous ayez quelque regret concernant la baisse de la TVA dans la restauration. D'autant que vous l'avez votée vous-même ! Cela doit accentuer votre sentiment de culpabilité !
Je ne sais pas si nous arriverons à corriger cela. Le débat va se poursuivre sur ce sujet, puisque des parlementaires y travaillent. Mais permettez-moi, en fin de discussion, une petite parenthèse amicale : je ne peux pas trahir le secret des délibérations du Conseil des ministres, mais il me semble que le ministre l'a fait en commission. Il va peut-être réitérer dans cette enceinte…
Pour conclure, monsieur Carrez, la commission émet un avis défavorable à votre amendement.
Monsieur le président de la commission des finances, j'ai deux éléments d'appréciation à porter à votre connaissance.
Le premier ne vous sera pas agréable, car, comme le rapporteur, j'appelle l'Assemblée à rejeter votre amendement pour les raisons juridiques qu'il a invoquées et qui me paraissent parfaitement fondées.
Le deuxième vous sera plus doux, en tout cas je l'espère. Car sans trahir les délibérations du Conseil des ministres, je peux vous indiquer ses conclusions.
Lors du premier Conseil des ministres de ce gouvernement, Pierre Moscovici et moi-même avons souhaité que le Gouvernement accepte de reconduire l'instruction donnée par le précédent Premier ministre, François Fillon. Il a été clairement indiqué que toute disposition fiscale ou sociale relevait exclusivement du domaine des lois de finances ou de financement de la sécurité sociale.
Pour convaincre le Gouvernement, j'ai rappelé l'exemple que vous avez vous-même cité, en indiquant qu'à l'occasion d'une loi d'apparence anodine sur le tourisme – encore que très importante pour cette activité essentielle à l'économie de notre pays –, une disposition fiscale avait été votée, qui avait coûté près de 3 milliards d'euros à notre pays chaque année, et avait été financée intégralement par la dette.
Thomas Thévenoud a fait un rapport intéressant et je l'en remercie. Je forme le voeu qu'assez vite, la commission des finances se saisisse de cette question, soit spontanément soit parce que le Gouvernement pourrait l'y inciter fortement. Fort de cette expérience qui a pu voir des parlementaires convaincus que cette mesure n'était pas bonne contraints de la voter parce que la discipline majoritaire est ce que l'on sait dans le parlementarisme rationalisé de la Ve République, et pour éviter que les nouveaux députés de la majorité n'aient à subir les affres que d'aucuns parmi l'ancienne majorité ont pu vivre dans l'instant, voire plus tard, bref, pour leur éviter tout cela, je vous confirme cette exclusivité des lois de finances et de financement pour adopter des dispositions fiscales ou sociales.
Maintenant que vous êtes rassuré, monsieur Carrez, je suis certain que vous allez retirer votre amendement.
Gilles Carrez et moi-même appuyons cette idée depuis des années, mais on n'y arrive pas, on invoque que la commission des finances ne doit pas être au-dessus des autres commissions etc.
Une solution avait été envisagée, qui consistait à dire que les amendements ayant des conséquences dans le domaine fiscal ne devenaient définitifs que s'ils étaient repris dans des lois de finances ou de financement de la sécurité sociale – ce qui permettait de ménager le droit de nos collègues.
Mes chers collègues, pensez-vous que maintenir de telles pratiques est conforme à l'esprit du traité que nous allons ratifier demain ? En fait, par ce mécanisme, on échappe aux lois de finances et de financement rectificatives. C'est un moyen de contournement des lois de finances et des lois de financement, surtout, le moyen de ne jamais évoquer le fond de l'affaire. Autrement dit, est-ce compatible avec les grands équilibres de nos finances publiques ? Il faudra bien, mes chers collègues, avoir un jour un peu plus de courage et procéder à des modifications, quitte à instaurer ce système selon lequel une disposition ne devient définitive que quand elle est reprise dans les lois de finances ou les lois de financement de la sécurité sociale.
Je sens des regrets dans les rangs de la majorité. Le regret que cette longue séance n'ait pu permettre de définir plus clairement la relation entre les lois de programmation et les lois de financement, ce qui aurait été possible si nous avions procédé à une révision constitutionnelle… Le regret de se dire qu'on est passé à quelques centimètres d'une clarification du rôle des lois de finances par rapport à la compétence exclusive sur les taxes. Vous êtes d'accord sur le fond, mais vous ne pourrez montrer votre accord que sur la forme. Il fallait donc bien faire une révision constitutionnelle !
Je suis bien conscient que cet amendement aurait eu toute sa place dans un vecteur constitutionnel et qu'il ne l'a pas, hélas, dans un vecteur organique.
Je vais donc devoir me contenter une fois de plus des assurances du Gouvernement. Je retire l'amendement.
(L'amendement n° 46 est retiré.)
Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi organique.
Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet auraient lieu le mercredi 10 octobre, après l'éloge funèbre d'Olivier Ferrand.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Vote solennel sur le projet de loi autorisant la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire ;
Texte de la commission mixte paritaire sur la création des emplois d'avenir.
La séance est levée.
(La séance est levée, le mardi 9 octobre 2012, à minuit trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron