Je comprends les inquiétudes que suscite l'allongement de la durée de cotisation à 43 ans. On vous avait en effet promis lors de la campagne présidentielle, et même avant, de revenir sur l'allongement de la durée de cotisation décidé dans le cadre de la réforme Fillon et de rétablir la retraite à 60 ans pour tous les Français. Votre déception est donc compréhensible.
Ce projet de loi, car je me refuse à parler de réforme, est l'une des plus grandes supercheries du quinquennat de François Hollande. Il ne répond en aucun cas aux véritables enjeux. Alors que le COR et le rapport Moreau ont fait état d'un besoin de financement de 20 milliards d'euros en 2020, tous régimes confondus, le projet se concentre sur les 7,5 milliards dont a besoin le régime général. Il ne vise qu'à ouvrir de nouveaux droits, dont certains sont d'ailleurs justifiés : je pense aux femmes, aux polypensionnés, à la prévention et à la prise en compte de la pénibilité – même si pour ma part, je préfère parler de métiers physiques. Cela conduit à poser la question du financement. Sur ce point, j'estime comme vous que l'allongement de la durée de cotisation est une mesure hypocrite si elle ne s'accompagne pas d'un recul de l'âge du départ à la retraite : elle désavantage les jeunes générations, dont je fais partie, et entraînera inévitablement une baisse des pensions, puisque beaucoup partiront à la retraite sans pouvoir bénéficier d'une pension à taux plein.
Ce projet est aussi un choc fiscal déguisé. Les retraités, qui ont déjà été ponctionnés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013, verront leur pouvoir d'achat diminuer ; les salariés et les entreprises, qui l'ont été pour financer le décret de 2012 sur le retour de la retraite à soixante ans – qui a un impact majeur sur les finances de la CNAV, puisque la réforme de 2010 permettait d'assurer, comme nous l'a précisé M. Rivière, un retour à l'équilibre des régimes de base – sont mis à contribution.
Nous ne vous avons pas entendus sur l'enjeu majeur que sont les pistes de financement, ni sur la réforme structurelle – qui ne permettra certes pas de régler le problème financier, mais au moins d'assurer plus d'équité entre les Français. Nous souhaitons voir s'accélérer la convergence entre régimes engagée en 2003 et la réforme des régimes spéciaux.
J'en viens à la réforme systémique. Vous dénoncez le régime par points en vous référant à l'expérience suédoise, monsieur Aubin. Il semble cependant possible de mettre en place une réforme systémique et un régime par points à la française. Vous vous accommodez du reste très bien des régimes de retraite complémentaire par points de l'AGIRC et de l'ARRCO. Le projet ne traite pas de ces régimes, dont les besoins de financement pour les années à venir sont considérables.