Intervention de Eric Aubin

Réunion du 11 septembre 2013 à 9h00
Commission des affaires sociales

Eric Aubin, secrétaire confédéral en charge des retraites, CGT :

Les questions que vous soulevez mériteraient un grand débat public, car la protection sociale intéresse l'ensemble des Français.

En ce qui concerne la méthode, nous aurions préféré la tenue de réunions plénières, qui nous aurait permis de négocier sur certains points. Ce n'est pas le choix qui a été fait : nous en prenons acte.

Nous sommes en effet en désaccord avec l'idée que seule la baisse du coût du travail permettrait de renforcer la compétitivité des entreprises. Celle-ci peut être améliorée en jouant sur la compétitivité hors coût, et notamment la qualification et la formation des salariés. Selon un rapport de la Cour des comptes, les entreprises allemandes restent compétitives dans un certain nombre de secteurs alors même que le coût du travail y est supérieur de 20 % à 30 %. C'est par exemple le cas de l'automobile. Il s'agit donc d'un faux problème.

Il convient en revanche de s'intéresser au coût du capital – dont on ne parle jamais. Or quand les salaires sont multipliés par deux, les dividendes sont multipliés par treize ! Il faut donc rééquilibrer ce rapport pour faire payer le capital. Nous souhaitons un débat sur ce point.

Nous avons beaucoup travaillé sur la question de la pénibilité. Il faut certes se féliciter qu'elle ne soit plus abordée sous le seul angle de la réparation médicale, mais bien des progrès restent à faire. Nous ne saurions en effet nous satisfaire du fait que seuls les employeurs définissent les salariés concernés : ces derniers ont leur mot à dire. Pourquoi ne pas donner un rôle aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ? Par ailleurs, le délai de deux ans prévu pour contester la décision de l'employeur est trop court.

Vous vous interrogez sur l'âge à partir duquel les salariés pourraient bénéficier du dispositif. Selon nos études, c'est dès 55 ans qu'un décrochage s'observe dans le BTP. Il faut donc faire en sorte qu'à partir de cet âge, les salariés puissent finir leur carrière dans de bonnes conditions, voire partir de façon anticipée.

La question de la pénibilité doit en effet être traitée dès l'entrée dans le poste. Selon un rapport du Docteur Lasfargues, les usures apparaissent dès 40 ans dans le BTP. Pour que les salariés puissent continuer à exercer leur métier jusqu'à l'âge de la retraite, il faut y oeuvrer dès l'entrée dans la vie active. La prévention est donc une question essentielle. Le dispositif prévu pour le compte pénibilité, qui prévoit que les 20 premiers points seront obligatoirement utilisés pour la formation, nous semble à cet égard très insuffisant.

En ce qui concerne la définition de la pénibilité, nous sommes tous d'accord sur celle qui avait été élaborée dans le cadre des négociations de 2005-2008 : il s'agit des conditions de travail ayant des effets irréversibles sur la santé au travail et des conséquences sur l'espérance de vie. Je rappelle qu'il existe des mesures de prise en compte de la pénibilité dans la fonction publique. Elles ont été supprimées dans la fonction publique hospitalière ; il serait souhaitable d'en rediscuter pour ce secteur, mais aussi pour l'ensemble des contractuels de la fonction publique.

S'agissant de la non-rétroactivité du compte, je réitère ce que j'ai dit lors de mon intervention liminaire : il faut absolument que le stock puisse être pris en compte.

Je terminerai par le financement. La CGT a fait des propositions concernant les 7 milliards d'euros à trouver d'ici à 2020, c'est-à-dire à court terme. Plusieurs dizaines des 200 milliards d'aides octroyés chaque année aux entreprises n'ont aucun effet sur l'emploi. M. Gattaz l'a lui-même reconnu dans un entretien avec M. Lepaon. De même, quelques milliards d'euros pourraient être trouvés en intensifiant la lutte contre la fraude fiscale. Enfin, le respect de l'égalité salariale entre les femmes et les hommes suffirait à lui seul à faire rentrer quelque 10 milliards dans les caisses à l'horizon 2020.

Dans la mesure où nous défendons un financement assis sur les richesses créées dans l'entreprise, nous estimons que leurs revenus financiers – qui représentent 250 milliards – doivent être mis à contribution. Je vous renvoie à notre site internet pour plus de détails : les mesures que nous proposons permettraient à la fois d'assurer l'équilibre des régimes de retraite sur le long terme et de revenir sur les mesures injustes des précédentes réformes.

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