Intervention de Marion Maréchal-Le Pen

Séance en hémicycle du 10 septembre 2013 à 21h45
Accès au logement et urbanisme rénové — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarion Maréchal-Le Pen :

Monsieur le président, madame le ministre, chers collègues, après le mariage pour tous, la nationalité pour tous et la prison pour personne, voici le logement pour tous ! Avec vous, c’est plus facile : l’État providence, il est vrai multimilliardaire en dettes, peut promettre monts et merveilles. Une copropriété laissée à l’abandon par ses occupants ? Il viendra repeindre et remettre aux normes gratuitement. Des migrants venus sans moyens ? Il pourvoira gratuitement à leur logement et à celui de leur descendance. Des loyers trop élevés ? Il interdira aux propriétaires de dépasser un seuil fixé par l’administration.

Féerie que ce monde socialiste où tout est gratuit et rien n’est trop cher, puisqu’il suffit d’emprunter sur les marchés pour financer ou de dire stop pour que les prix s’arrêtent de monter !

Face aux échecs récurrents des politiques du logement, on aurait pu s’attendre à un renouvellement du diagnostic. Mais non, on ne change pas un raisonnement qui perd ! Pour vous, la crise du logement est uniquement une crise de l’offre ; on ne fait pas sortir assez de logements du sol. Il faut bétonner de plus belle, même si, au rythme actuel, l’équivalent d’un département français de terres agricoles est urbanisé tous les sept ans.

Les conséquences des politiques donnant la primauté à l’urbain contre le rural et celles des flux migratoires à bas niveau socio-professionnel sont encore une fois superbement ignorées. Permettez-moi de le rappeler, puisque personne ne le fait : selon vous, faire venir chaque année 200 000 individus, sans compter des dizaines de milliers de clandestins, arrivés pour la plupart sans rien, et leur garantir le droit au logement pour eux et leur famille, cela ne déséquilibre pas du tout le marché du logement. Aucun effet d’éviction de la demande domestique ; rien.

Je sais que la structure de la demande de logements, notamment sociaux, a connu de profondes mutations. L’accroissement global de la population, les facteurs sociologiques comme l’allongement de la durée de la vie, l’émergence des familles monoparentales, l’entrée plus tardive dans la vie active ou le vieillissement du parc social ont évidemment des conséquences lourdes. Mais ce sont des facteurs subis. L’immigration, quant à elle, a été sciemment décidée par les gouvernants depuis trente-cinq ans et vous refusez toujours d’en voir les conséquences pourtant évidentes.

Je regrette que, même en période de crise, nous soyons toujours les seuls à défendre l’idée selon laquelle la solidarité nationale doit bénéficier en priorité – je dis bien en priorité et non en exclusivité – aux Français.

Sans compter que votre politique d’aménagement du territoire, conduite main dans la main avec l’UMP, a amené à la désertification des zones rurales et à l’hypertrophie des zones urbaines. Désindustrialisation, mort organisée de l’agriculture, départ des services publics en milieu rural, carence de la couverture médicale : tout concourt à déséquilibrer le marché du logement en créant, d’un côté, les zones sous tension que sont les centres urbains et, de l’autre, des déserts ruraux au mieux reconvertis en banlieues dortoir.

Si je suis résignée face à votre politique, c’est qu’elle va toujours dans le même sens, malgré ses échecs : plus de réglementation, plus de textes souvent peu compréhensibles, plus de pouvoir à l’État et aux élus locaux et une action qui traite toujours les conséquences et non les causes – c’est vrai de l’encadrement des loyers comme de la garantie universelle.

Vous n’aimez rien tant que la chose publique. Un peuple dépendant de l’État pour son travail, pour sa santé, pour ses revenus, pour son logement : autant de garanties d’avoir des citoyens dociles et redevables au pouvoir. Décourager le logement privé et les bailleurs pour mieux imposer comme remède miracle le logement social, auquel les deux tiers des ménages sont éligibles, quel beau levier d’influence !

Entre l’impôt sur le revenu, les charges, les taxes foncières et les contraintes normatives, la rentabilité d’un logement mis en location dépasse rarement l’inflation. Ce n’est pas votre texte qui va améliorer les choses.

Je ne suis certes pas pour la confiance aveugle envers le marché et le privé, tant s’en faut, et je dénonce tout autant que vous la difficulté à se loger, la cherté des logements et le caractère scandaleux de certaines offres sur le marché. Mais l’État, s’il doit réguler, doit-il et peut-il pour autant tout prendre en charge et tout financer ? Les conséquences de la garantie universelle, par exemple, seront très probablement une déresponsabilisation et une hausse des impayés.

Quant au coût, vous le savez, il est très certainement sous-estimé dans votre projet : vous parlez de 700 millions aujourd’hui, quand de nombreuses personnes évoquent le double. Est-ce la méthode à retenir alors que vous cherchez péniblement quelques dizaines de millions d’économies dans les comptes pour retarder la faillite de nos finances publiques ?

Impossible pour la conscience d’extrême gauche qui habite toujours certains d’entre vous de mettre en place une mesure préventive et dissuasive.

La réalité est que, comme pour tout, il y a les bons locataires et les mauvais, les bons propriétaires et les mauvais. Les procédures de recouvrement sont à la fois longues, chères et incertaines, ce qui incite de nombreux bailleurs à ne plus louer leur bien. Dans le cas de particuliers, les impayés créent souvent des situations difficiles, voire de la précarité, notamment lorsque le bien loué a été acquis par emprunt ou constitue un complément de retraite.

Il serait souhaitable d’ajouter une meilleure information en amont des propriétaires, en créant par exemple un registre officiel des impayés locatifs, ouvert à l’ensemble des bailleurs. Il n’existe aujourd’hui que des initiatives privées, dont la consultation est souvent réservée aux professionnels de l’immobilier. Un registre national serait un outil mieux encadré, permettant de distinguer les personnes de mauvaise foi, coutumières de l’impayé, de celles qui connaissent des difficultés financières passagères.

Le Conseil d’État avait rappelé en 2004, à l’occasion d’un contentieux, les conditions imposées par la CNIL pour la validité d’un tel fichier. Il serait aisé de les reprendre.

Sur les logements sociaux, enfin, il aurait fallu profiter de l’occasion pour instaurer une véritable transparence. Mais chacun sait que le logement social, comme le montrent les affaires qui ont entaché la gestion de nombre d’offices HLM, est une boîte noire que certains élus aiment se garder pour monnayer leurs décisions et que certains partis ont utilisée pour leurs financements occultes.

Vous n’avez donc donné accès à personne au fonctionnement et au contenu de cette boîte noire, puisqu’il n’est prévu dans ce texte aucune publicité ni aucun accès à des informations permettant de comparer les dossiers des demandeurs et les attributions de logements. Le numéro unique est sans doute une idée intéressante, mais elle est malheureusement incomplète.

Alors que, au printemps, nous avons confié au Gouvernement le pouvoir de légiférer par ordonnances sur l’urbanisme, voici un texte supplémentaire qui ratisse large, de la reconnaissance de l’habitat participatif aux yourtes. Je m’interroge une nouvelle fois sur la force de la loi et son intelligibilité lorsque certains articles, notamment en matière de documents d’urbanisme, sont d’une telle complexité qu’ils en deviennent difficilement applicables pour beaucoup d’élus. Cela fera certainement le bonheur des bureaux d’étude, sans parler de l’opacité financière qui va avec. Mais, finalement, c’est presque à se demander si ce n’est pas ce que vous cherchez.

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