Intervention de Guénhaël Huet

Séance en hémicycle du 10 septembre 2013 à 21h45
Accès au logement et urbanisme rénové — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuénhaël Huet :

…ne suffisent pas à faire un bon texte de loi. Il est certes nécessaire d’avoir de l’ambition, de dessiner un projet et de se donner les moyens de le mettre en oeuvre, mais il est également nécessaire, dans un double souci d’équilibre intellectuel et d’efficacité pratique, d’avoir le sens des réalités pour faire une oeuvre législative utile.

Votre projet de loi repose sur quatre grandes idées : favoriser l’accès de tous à un logement digne ; lutter contre l’habitat insalubre ; améliorer la lisibilité et l’efficacité des politiques publiques du logement ; moderniser les documents de planification et d’urbanisme. Les apparences sont donc séduisantes, mais les aspects positifs se limitent malheureusement à cela, ainsi, il est vrai, qu’aux dispositions relatives à l’habitat insalubre, qui méritent d’être soutenues.

Pour le reste, le texte que nous examinons aujourd’hui est beaucoup moins ambitieux que la loi sur le logement adoptée en 2009. Le projet de loi, madame la ministre, aurait pu être très utile, si le Gouvernement s’en était donné les moyens, mais ce n’est pas le cas, malgré ses 84 articles et ses 216 pages. Ce texte risque de modifier profondément les règles en matière de logement et d’urbanisme, au point de décourager les particuliers qui souhaiteraient se lancer dans l’investissement immobilier, et bouleverser l’exercice des professions immobilières.

En dépit de ces modifications, la crise du logement subie par de nombreux Français ne sera pas résolue. Répondre à la problématique de la crise du logement vécue par une grande partie de nos concitoyens : c’est bien cela dont il devrait être question. Mais le projet de loi n’y répond en aucune façon. Il n’améliorera pas l’accès au logement des Français, notamment des jeunes qui rencontrent d’importantes difficultés pour trouver un logement.

Ainsi, il met en place la garantie universelle des loyers, une mesure qui provoque la colère des professionnels de l’immobilier. Selon les projections, cette disposition, une fois mise en place, pourrait coûter plus d’un milliard d’euros par an à l’État. En ces temps de crise économique et de réduction des déficits publics, avouez que ce coût est exorbitant ! De surcroît, cette mesure induira inéluctablement une déresponsabilisation des mauvais payeurs et, probablement, en augmentera le nombre. Enfin, ce texte, même s’il semble instaurer certaines améliorations, ne permet pas aux locataires de se prémunir contre des propriétaires peu scrupuleux.

Sous le précédent quinquennat, le gouvernement avait lancé un plan de cession de foncier de l’État pour mettre en chantier 70 000 logements. Sous le précédent quinquennat, le gouvernement avait mis en place des crédits d’impôts, des prêts à taux zéro, un allégement de TVA et un pass foncier pour qu’un maximum de Français puissent devenir propriétaires. Sous le précédent quinquennat, le droit au logement opposable a été mis en oeuvre, garantissant un logement à toute personne qui n’est pas en mesure d’accéder par ses propres moyens à un logement décent et indépendant ou de s’y maintenir. Sous le précédent quinquennat, en l’espace de deux ans, 100 000 places en centres d’hébergement d’urgence ont été créées. Sous le précédent quinquennat, environ 600 000 logements sociaux ont été construits.

Lors de la campagne présidentielle, beaucoup l’ont rappelé, le candidat socialiste avait affirmé que 500 000 logements seraient construits chaque année, dont 150 000 logements sociaux. Selon les projections, un peu moins de 100 000 logements sociaux seront construits en 2013. Nous sommes bien loin des objectifs annoncés par le Président de la République lorsqu’il était en campagne !

À force d’augmenter les impôts et de supprimer les niches fiscales concernant le logement, les coûts de production des logements, notamment sociaux, ont explosé, bloquant ainsi la construction de nouveaux logements.

Une autre stratégie était possible. Pourquoi, madame la ministre, restez-vous sourde aux appels répétés des professionnels du bâtiment, qui réclament une baisse des prélèvements obligatoires pour leurs entreprises et une politique d’incitation fiscale pour les travaux de rénovation et d’économie d’énergie ? Depuis juillet 2012, vous faites exactement l’inverse en multipliant les taxes nouvelles et en augmentant les taxes existantes. Certes, vous êtes en cela fidèle à la vieille doctrine socialiste qui revient à créer une taxe dès qu’un problème apparaît, mais vous êtes à contre-courant des réalités économiques.

La logique inéluctable de ce texte, c’est l’échec. Nous aurons malheureusement l’occasion de le constater, à travers la réalité et les chiffres, qui finiront une nouvelle fois par vous rattraper. Nous avons constaté cet échec en matière d’emploi, malgré toutes les promesses du Gouvernement. Les mêmes causes – l’idéologie et le déni de réalité – produiront les mêmes effets, et votre projet de loi, madame la ministre, ne réglera en rien la crise du logement.

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