Intervention de Philippe Vigier

Réunion du 18 septembre 2013 à 13h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vigier :

Non. Sauf pour les 40 000 personnes ayant commencé à travailler tôt, vous ne remettez pas en question l'âge légal de départ fixé en 2010. Bien vous en prend d'ailleurs car le rapport du Conseil d'orientation des retraites établit que, sans cette réforme, le déficit se monterait non pas à vingt milliards d'euros, mais à quarante milliards.

Votre réforme est juste, dites-vous. Est-il juste de ponctionner le pouvoir d'achat des salariés en augmentant leurs cotisations sociales de 0,15 % ? Est-il juste d'aller chercher 0,15 % de plus du côté des entreprises ? Cette augmentation de charges sera-t-elle ou non compensée ? Le MEDEF s'interroge : en effet, la promesse faite sur le perron de Matignon ne semble pas suivie d'effet. Avec le niveau des cotisations, il en va pourtant de la compétitivité des entreprises, et donc de l'emploi. La somme en jeu est considérable : 2,2 milliards d'euros en année pleine, tant pour les salariés que pour les entreprises.

Alors que le besoin de financement doit atteindre 20 milliards d'euros à l'horizon 2020 et que le déficit du régime général est déjà de 7,6 milliards, cette réforme ne procurera que 7,3 milliards, pas davantage !

Vous avez préservé le niveau des retraites, dites-vous. Mais reporter du 1er avril au 1er octobre la revalorisation des pensions, ce qui fait économiser près d'un milliard d'euros, cela ne revient-il pas à les baisser ?

Pourquoi avoir d'emblée écarté l'hypothèse d'accélérer l'entrée en vigueur de la réforme de 2010 ? Le COR explique que si, en novembre 2011, on avait eu le courage d'augmenter d'un an et neuf mois la durée de cotisation, l'équilibre aurait pu être atteint.

Pourquoi passer sous silence le problème de la convergence entre public et privé ? D'importantes disparités demeurent, tant pour ce qui est du niveau des pensions que de l'âge d'ouverture des droits. En moyenne, les salariés du public partent en retraite quatre ans plus tôt que ceux du privé.

Pourquoi ne pas dire un seul mot, non plus, des régimes spéciaux ? En 2014, sept milliards d'euros devront pourtant être prélevés sur le budget général pour équilibrer leurs comptes, qui dérivent.

La pénibilité, sur les critères de laquelle les partenaires sociaux se sont accordés en 2008, sera prise en compte. Mais pourquoi, là encore, mettre en place un régime pour le privé différent de celui du public ? Enfin, pourquoi exiger que le salarié ait été exposé durant cinq ans au moins à des facteurs de pénibilité pour que cela lui ouvre droit à une formation ou à l'aménagement de son temps de travail ou de son départ en retraite ? Pour nous, la pénibilité s'apprécie et doit être prévenue pendant la vie de travail. Sa prise en compte ne doit pas avoir seulement une visée réparatrice.

Si votre texte comporte des avancées au profit des femmes, comme la prise en compte des trimestres de congé maternité, pourquoi pénaliser de suite les parents de trois enfants et plus en fiscalisant les majorations de retraite pour enfants et attendre 2020 pour engager la refonte du dispositif, en sorte que la future majoration forfaitaire par enfant bénéficie principalement aux femmes ? On aurait pu s'engager dans cette voie dès 2014 si vous aviez accéléré la mise en oeuvre de la réforme de 2010 et suivi les préconisations du COR. Mais il eût fallu du courage !

Une dernière remarque sur la méthode. En 2010, le ministre, Éric Woerth, avait reçu tous les groupes parlementaires. Pourquoi cela n'a-t-il pas été le cas cette fois-ci, alors que le groupe UDI, par exemple, a auditionné l'ensemble des partenaires sociaux ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion