Madame la présidente, madame la ministre, il m'aurait plu, ô combien ! de venir à cette tribune pour adresser de vives félicitations au Gouvernement à propos de l'action qu'il se propose de mener. Ne serait-ce pas, en effet, un moment de bonheur parlementaire, une sorte de grâce républicaine, que de nous accorder, comme cela nous arrive parfois, au-delà de nos différences, sur la poursuite d'un bien commun ?
Hélas, pour être d'accord avec une action, encore faut-il qu'il y ait amorce, embryon, lueur d'action. Or, précisément, sur le dossier du logement, comme sur d'autres, et notamment les emplois d'avenir, en fait d'action, il n'y en a qu'une : celle qui consiste à tenter de faire croire à l'opinion publique qu'on travaille à régler un problème, alors même qu'on ne fait guère plus qu'avant, guère différemment qu'avant, et que rien, ou si peu, ne changera, comme avant.
Prenons un exemple : le Gouvernement a annoncé, dans sa présentation du projet de loi, un objectif de 150 000 logements sociaux par an. Or le gouvernement précédent en construisait 120 000 : le progrès ne porte donc que sur 30 000 logements. Cela justifie-t-il tant de trompettes médiatiques ? Et surtout, qu'en est-il de la nécessaire réhabilitation des logements sociaux existants ? Pour beaucoup d'entre eux, c'est une dramatique nécessité !
S'agissant maintenant de la mobilisation du foncier public en faveur du logement, vous laissez entendre que le Gouvernement va mettre en place un dispositif original et de grande ampleur. Or, il n'en est rien : cette mobilisation existait déjà sous la précédente majorité, et son impact éventuel n'atteindra, au mieux, que 4,5 % de l'objectif annuel de construction de logements. En d'autres termes, 95,5 % de cette construction ne devront rien au foncier public : là encore, beaucoup de bruit, mais très peu d'action.
De l'action, ce gouvernement sait pourtant en demander aux autres, notamment aux collectivités : la seule vraie nouveauté de ce projet de loi consiste d'ailleurs dans l'extension du domaine de coercition, puisque les communes seront désormais dans l'obligation de compter 25 % de logements sociaux, contre 20 % actuellement. Celles qui ne se plieront pas à la loi subiront une amende cinq fois plus élevée qu'aujourd'hui, représentant jusqu'à 10 % de leurs dépenses de fonctionnement. Ce montant est colossal, puisqu'il représente deux fois la marge de manoeuvre habituelle des communes.
Si les Français attendent toujours le changement en matière d'emploi et de pouvoir d'achat, en revanche, pour eux comme pour les communes, la trique fiscale, quant à elle, est bien arrivée. Pourquoi tout cela ? Et pour qui ? Parce que la France manque de logements, et notamment de logements sociaux ? C'est ce que l'on nous dit, mais est-ce l'exacte réalité ?
Le Gouvernement cultive jusqu'à l'obsession, dans le texte qu'il nous propose, l'argument selon lequel le vivre ensemble est un besoin, et pas une fois n'apparaît dans ce texte le mot « immigration ». Pourtant, dans un reportage du 5 septembre, France 2 constatait que la majorité des logements sociaux sont aujourd'hui attribués aux ménages gagnant moins de 1 000 euros par mois, et que les familles monoparentales et immigrées y sont surreprésentées. À mots couverts, le texte du Gouvernement confirme ce constat, puisqu'il explique la nécessité de nouveaux logements sociaux par une hausse démographique, laquelle ne provient que de l'immigration familiale.