Intervention de Pierre Léautey

Séance en hémicycle du 3 octobre 2013 à 9h30
Non-intégration de la livraison dans le prix unique du livre — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Léautey :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, nous discutons ce matin du livre. C’est un sujet important, car c’est celui d’un objet bien à part, qui n’est pas une marchandise comme les autres. Et c’est avec beaucoup de conviction et d’intérêt que je prends la parole devant vous. En effet, historiquement, le livre est le symbole par excellence du savoir, de la connaissance et de l’épanouissement personnel. C’est à travers le livre que l’accès à la culture est garanti et que l’esprit critique se construit. En ce sens, le livre est une promesse républicaine car il donne à chaque citoyen des clés pour comprendre et analyser le monde qui l’entoure, pour se forger des convictions. Mais c’est aussi la liberté et la création littéraire qui s’expriment ainsi. La lecture est également l’un des meilleurs remparts contre le populisme et les extrêmes. La France entretient depuis longtemps un rapport unique au livre, et nous avons la chance de bénéficier d’une grande loi, comme en témoignent sa reconnaissance unanime et sa pérennité, je veux bien sûr parler de la loi Lang.

La loi Lang répond à un objectif universel, duquel découle un objectif économique, en instaurant un prix unique du livre : tout livre neuf vendu en France se voit fixer un prix par l’éditeur, qui n’est susceptible que d’une remise limitée à 5 %. Ce régime dérogatoire a une explication : il est fondé sur le refus de considérer le livre comme un produit banalisé. De ce constat résulte une volonté d’infléchir les mécanismes du marché, afin d’assurer la prise en compte de sa nature de bien culturel à part qui, en tant que tel, ne peut être soumis aux seules exigences de la concurrence et au risque de dumping créant des situations de quasi-monopole et d’appauvrissement culturel. Grâce au prix unique du livre, c’est l’égalité des citoyens devant le livre qui est préservée, avec la garantie d’un livre vendu au même prix et le maintien d’un réseau de distribution sur l’ensemble du territoire national, mais c’est aussi le soutien au pluralisme dans la création et l’édition.

Aujourd’hui, il faut s’en féliciter, la vitalité d’Internet offre de nouvelles possibilités, utilisées aussi bien par les librairies indépendantes que par les nouvelles formes de distribution, notamment les plateformes dématérialisées. En revanche, il n’est pas acceptable que des dérives permettent de remettre en cause les réseaux de distribution historiques des librairies indépendantes, avec l’apparition de grands opérateurs marchands capables d’offrir et de livrer de très nombreuses références en un temps très court et à des conditions qui contournent le prix unique du livre en offrant la gratuité des frais de port.

Il faut rappeler que le secteur de la librairie indépendante est riche de rapports humains de qualité, grâce à un personnel très qualifié et compétent. De même, ce réseau est un lieu de vie et de culture dans nos territoires avec l’organisation de nombreuses animations autour du livre et de rencontres avec les auteurs – je le constate fréquemment à Rouen, où les actions de la librairie physique sont particulièrement dynamiques. Il est donc évident que nous devons protéger la filière du livre dans sa diversité et, sur ce point, je sais que tous les parlementaires sont unanimes sur le fond. Reste qu’il y a quelque ironie, je tiens à le souligner, à voir l’opposition présenter une proposition de loi relative au livre, alors qu’elle n’a pas fait grand-chose pour cette filière quand elle était aux responsabilités.

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