Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est soumise part d’un constat que nul ne peut contester. À défaut de générer un fort élan de sympathie, elle devrait déclencher à tout le moins une réelle dynamique de solidarité citoyenne.
Pour une personne à mobilité réduite, en effet, aménager son logement est un véritable casse-tête et relève le plus souvent d’une mission impossible, d’autant que le coût en est très élevé. Certes, il existe des financements, je dirais même un maquis de financements. Nous avons souvent une impression de trop-plein pour trop peu de résultats positifs.
La prestation de compensation du handicap s’élève à 100 % du coût des travaux jusqu’à 1 500 euros et à 50 % au-delà, mais le montant maximal est de 10 000 euros sur dix ans. L’Agence nationale de l’habitat peut accorder des subventions à hauteur de 70 %, mais dans la limite de 8 000 euros hors taxes par logement, ce qui est nettement insuffisant.
Les personnes à mobilité réduite peuvent également bénéficier d’un prêt auprès d’un collecteur du 1 % logement mais dans la limite de 9 600 euros par logement et de 50 % du montant des travaux. Il est proposé encore, pour l’accessibilité des logements, un crédit d’impôt de 25 % du montant des dépenses d’installation avec un plafond de 5 000 euros pour une personne seule et de 10 000 euros pour un couple marié, ce montant pouvant être majoré de 400 euros par enfant à charge.
Il existe donc des financements mais leur émiettement et leurs limites ne permettent pas de répondre aux besoins identifiés, bien qu’il soit possible de cumuler certains d’entre eux. Nos collègues de l’UMP nous proposent par conséquent une extension du prêt à taux zéro.
Celui-ci, qui a connu des évolutions depuis sa création en 1995, ne concerne aujourd’hui que la construction d’un logement neuf ou l’acquisition d’un logement neuf ou ancien. Il s’agit d’étendre le dispositif à l’aménagement des logements au bénéfice des personnes à mobilité réduite. Il nous est proposé que ce prêt soit financé par un crédit d’impôt accordé aux banques prêteuses.
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine appelle l’attention de chacun sur le fait que ce dispositif, aussi utile qu’il soit à un certain nombre de nos concitoyens, risque de se révéler d’autant plus limité dans son efficience que les financements existants sont nombreux, ainsi que je l’ai souligné au début de mon propos. Et pour cause : le prêt à taux zéro doit être complété par un prêt principal et ne peut représenter plus de la moitié du financement. À l’époque, le projet de loi de finances pour 2011 avait même instauré un prêt à taux zéro « plus », qui ne représente que 18 % à 33 % des besoins de financement selon les zones géographiques.
Le dispositif qui nous est proposé tend à fixer le plafond du prêt à 32 500 euros. Mais qui peut prétendre accéder au prêt principal et à ce prêt à taux zéro ? Celui-ci est soumis à conditions de ressources. Or, nul ne l’ignore, l’allocation pour adulte handicapé s’élève aujourd’hui à 790 euros par mois, et peut être cumulée à un complément de ressources d’environ 179 euros ou à une majoration pour la vie autonome de 104,77 euros. Cela limite le revenu mensuel à moins de 1 000 euros par mois. Dans ces conditions, il faudra nous expliquer comment une personne à mobilité réduite pourra prétendre à des prêts, sauf à s’endetter de manière insupportable pour éventuellement, à terme, sacrifier son bien, si tant est qu’elle parvienne à obtenir le prêt principal.
Avec cette proposition de loi, deux questions nous sont posées. La première concerne le niveau des revenus des personnes à mobilité réduite et des personnes handicapées de manière générale. La loi du 11 février 2005, intitulée solennellement « loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », devait en effet s’attaquer à ce sujet. Las ! nous constatons que les résultats ne sont pas du tout à la hauteur de nos attentes et que le niveau de vie de nos concitoyens à mobilité réduite n’a guère progressé.
Cette question demeure donc d’une cruelle actualité et l’existence même du texte qui nous est soumis en est la pure démonstration. Elle se réglera non pas en faisant des comptes d’apothicaires mais par une volonté politique d’accorder aux personnes concernées la place qui leur revient, ce qui commence par la garantie d’un revenu décent.
La deuxième question qui me vient à l’esprit est celle de la nécessaire remise à plat de tous ces financements émiettés en faveur de l’aménagement des logements. Sans doute conviendra-t-il de regrouper ces ressources financières afin de les rendre plus efficaces et plus substantielles. Le comité interministériel du handicap s’est réuni le 25 septembre dernier sous la présidence du Premier ministre. Cela mérite d’être salué puisque, comme vous l’avez rappelé, madame la ministre, il ne s’était réuni qu’une seule fois depuis sa création en 2009, ce qui en dit long sur l’importance qui a été accordée au handicap au cours de ces dernières années. Je ne souhaite cependant chatouiller personne en disant cela.
Plusieurs chantiers ont été ouverts : la jeunesse, l’emploi, l’accessibilité, l’accompagnement ; nous ne pouvons que nous en féliciter. Malheureusement, le niveau de vie de nos concitoyens à mobilité réduite n’était pas au menu, pas plus que l’aménagement des logements, l’accessibilité ayant été traitée seulement pour les lieux publics, un sujet sur lequel nous avons du retard puisque l’échéance pour l’achèvement des travaux a été fixée à 2015. À ce stade, je voudrais me tourner vers le Gouvernement : quand allons-nous ouvrir ces chantiers-là ?