Intervention de Marietta Karamanli

Réunion du 18 septembre 2013 à 15h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli, co-rapporteure :

Notre commission a jugé utile de faire un rapport portant sur l'intégration des Roms, s'appuyant sur les débats conduits au niveau de l'Union européenne. Nous sommes restés dans ce cadre. Vous ne trouverez donc pas dans ce rapport de critiques - qu'elles soient positives ou négatives - relatives aux stratégies nationales.

Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles. La prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est donc la voie la plus prometteuse vers l'intégration.

Le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe l'a rappelé : « les Roms - qu'ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d'une discrimination et d'un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l'exclusion, la ségrégation et la marginalisation ».

Les États doivent ainsi par exemple « prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la ségrégation scolaire des Roms. Pour faire évoluer la situation de cette population, il est indispensable de veiller à ce que les enfants roms aient accès au système éducatif ordinaire et y mènent leur scolarité à terme ». La ségrégation coûte cher aux États membres et c'est l'une des pires formes de discrimination à l'encontre des Roms, qui perpétue leur marginalisation.

Il incombe donc aux États - mais aussi à l'Union européenne qui doit donner l'impulsion nécessaire - de se préoccuper de combattre le racisme et la discrimination à l'encontre des Roms, et de mettre en oeuvre des stratégies d'intégration qui répondent aux besoins de cette population notamment en matière de logement.

Si les axes pour l'intégration des Roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en oeuvre. Les objectifs de l'Union européenne pour l'intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, quatre domaines essentiels : l'accès à l'éducation, l'emploi, les soins de santé, le logement.

A ces quatre axes, il faut en ajouter un cinquième - et non des moindres - : la lutte contre les discriminations.

L'Union européenne considère que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d'amélioration de l'intégration et de l'inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont tenus de faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence. Il est important également que l'Union européenne aide les États à réaliser ces objectifs, afin d'atteindre les objectifs généraux de la stratégie Europe 2020.

Comme l'a indiqué notre collègue Didier Quentin, la Commission européenne a en effet fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020. Elle y souligne la nécessité d'une approche ciblée.

Selon elle, les stratégies nationales d'intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres. À cet égard, le rapport de suivi de la Commission européenne publié le 26 juin 2013 souligne que les États membres doivent mieux mettre en oeuvre les stratégies nationales d'intégration des Roms qu'ils ont présentées au titre du cadre de l'Union européenne pour les stratégies nationales d'intégration des Roms.

Une difficulté non négligeable rend cependant difficile la réalisation de ces objectifs : les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces.

Or, la mise en oeuvre et la réussite des stratégies nationales d'intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante des ressources.

Il existe toutefois à l'heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d'euros de concours financier de l'Union européenne pour soutenir les efforts d'ensemble des États membres dans le domaine de l'intégration sociale. Ces fonds comprennent ceux mobilisables y compris pour l'aide à la population rom ; mais cette dernière en direction de cette partie de la population est loin d'être intégralement mobilisée.

En matière de financement, de nouveaux outils sont aussi à développer. Les partenariats sont nécessaires et doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales, les représentants d'entreprises, de la société civile et des communautés roms. C'est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves, par exemple en développant les « bonnes pratiques ».

Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l'intégration des Roms dans leur pays d'origine comme dans leur pays d'accueil, aucune incitation ou contrainte n'est imposée aux États membres. Or, un réel changement ne peut découler que d'une application efficace des politiques.

Le 27 juin 2013, la Commission européenne a présenté une proposition de recommandation du Conseil, relative à des mesures efficaces d'intégration des Roms dans les États membres, lors de la réunion de la plateforme européenne pour l'inclusion des Roms, portant cette année essentiellement sur l'urgence d'améliorer la situation des enfants et des jeunes d'origine rom.

La proposition de recommandation du Conseil, présentée par la Commission, est le premier instrument juridique de l'Union européenne relatif à l'inclusion des Roms. Elle recommande aux États membres de prendre des mesures d'action positive pour combler les écarts entre les Roms et le reste de la population.

Cet acte renforce le cadre de l'Union européenne pour les stratégies nationales d'intégration des Roms, approuvé en 2011 par l'ensemble des États membres, en définissant les conditions d'une inclusion effective et efficace des populations roms dans les États membres.

S'appuyant sur des communications antérieures, la proposition de recommandation porte plus particulièrement sur les quatre domaines dans lesquels les dirigeants des États membres ont souscrit, au titre du cadre de l'Union européenne, à des objectifs communs en matière d'intégration des Roms : l'accès à l'éducation, à l'emploi, aux soins de santé et au logement.

La recommandation prévoit en particulier :

- une action ciblée spécifique, reposant sur de bonnes pratiques, pour accroître l'intégration des Roms, dans le strict respect du principe de subsidiarité et sans reproduire la législation de l'Union déjà en vigueur. Elle concerne l'éducation, l'emploi, la santé et le logement ;

- des thèmes horizontaux qui sont essentiels pour mettre en pratique les politiques d'intégration des Roms et pour en assurer la pérennité. Il s'agit notamment de lutter contre les discriminations et les stéréotypes, de protéger les femmes et les enfants, d'adopter une stratégie d'investissements sociaux, de recueillir des informations sur la situation des Roms pour contrôler les effets des mesures, de traduire les engagements nationaux en action locale, de soutenir l'action des organismes qui oeuvrent en faveur de l'égalité de traitement pour les Roms, d'accroître les ressources et les capacités des points de contact nationaux pour les Roms, et de développer la coopération transnationale ;

- des principes généraux exigeant que l'allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l'inclusion des Roms soit transparente et appropriée.

Pour entrer en vigueur, la proposition de recommandation du Conseil devra être, en premier lieu, adoptée à l'unanimité des États membres au sein du Conseil, puis approuvée par le Parlement européen. Ce texte affermira les engagements politiques déjà pris par les États membres. Ces derniers auront deux ans pour mettre en pratique les mesures nécessaires en vue de se conformer à la recommandation. Chaque année, ils devront informer la Commission des modalités d'application de cet acte. La proposition de recommandation constituant un instrument juridique non contraignant, son efficacité dépendra, en tout état de cause, de la volonté politique des États et de l'Union européenne à sa mise en oeuvre.

Il est donc indispensable que cette proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d'intégration des Roms dans les États membres soit adoptée. Celle-ci ne constitue en effet qu'une étape clef qui s'inscrit dans un long processus, dont l'aboutissement dépendra de la volonté politique de l'Union européenne et de ses États membres.

À la suite du rapport, prenant en compte les constats et les suggestions des nombreux acteurs publics, y compris les élus locaux et associatifs que nous avons rencontré au long de l'élaboration du rapport, plusieurs propositions sont faites. Elles visent à simplifier et contrôler efficacement les mesures à mettre en oeuvre, à responsabiliser l'Union européenne et les États, y compris ceux où vivent en nombre les populations concernées et leurs communautés, à faire émerger des priorités et à capitaliser pratiques les plus efficaces et les plus « efficientes ».

Compte tenu de tous les éléments que nous venons de développer brièvement, et que vous trouverez de manière détaillée dans notre rapport, nous vous proposons d'adopter sept propositions de conclusions.

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