Avec l’article 5, nous en arrivons à ce qui est affiché comme la contrepartie de ce texte régressif, ce que M. le rapporteur a présenté en commission comme la « véritable avancée de ce texte ». Le mérite des dispositions relatives à la pénibilité est de placer enfin ce sujet au coeur du débat public, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.
Je ne m’attarderai pas trop longuement sur cet article, qui précise les modalités de prise en compte de la pénibilité en s’appuyant sur les fiches de prévention des expositions, et me bornerai à rappeler la portée de l’enjeu et l’ampleur des dégâts engendrés par les travaux pénibles en France. Les écarts d’espérance de vie dus à la pénibilité dans notre pays sont de quatre à sept ans, selon le sexe et la catégorie socio-professionnelle. Un critère plus pertinent, et très révélateur, est celui de l’espérance de vie « sans incapacité » – manière polie de dire « en bonne santé ».
En Europe, la France n’occupe que le onzième rang pour les hommes, avec une espérance de vie en bonne santé qui n’a malheureusement cessé de baisser depuis 2008 pour s’établir aujourd’hui à 61,9 ans. En supposant qu’un salarié ait réuni toutes les conditions pour bénéficier de la remise de deux ans prévue par ce texte – ce qui restera exceptionnel compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie –, cela laissera aux hommes moins de deux ans d’espérance de vie en bonne santé. Est-ce là un bon modèle de société ? Pour les femmes, la situation est comparable. Les Françaises ont l’espérance de vie la plus longue en Europe, mais seulement la dixième espérance de vie en bonne santé.