Intervention de Olivier Carré

Séance en hémicycle du 15 octobre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Carré :

Un autre point de repère révèle la contradiction interne sur laquelle est fondée le budget 2014 : alors même que la croissance 2013 est nulle ou presque, le solde conjoncturel prévu pour 2014, année de meilleure conjoncture, serait plus faible. Voilà quelques arguments qui viennent s’ajouter à ceux que mes prédécesseurs ont amplement et brillamment développés. En fait, l’explication tient un peu de la méthode Coué. La baisse du déficit structurel est prévue, elle aura lieu, mais vous faites fi d’un certain nombre de décisions relatives à de nombreuses prestations sociales, au maintien voire à la progression des effectifs de l’État et à la mise en place de nouveaux outils de progression sociale financés par l’État. Il en résulte, à échéance de trois ou quatre ans, un chiffrage estimé entre 17 et 20 milliards d’euros.

Un tel chiffre n’est pas une élucubration de l’UMP. Nous ne faisons que reprendre ce que chaque ministre a lui-même indiqué lors de l’annonce des mesures relevant de sa compétence et de leur chiffrage. J’en tiens la liste à votre disposition, monsieur le ministre, même si je ne doute pas que vous l’avez dressée vous-même. En d’autres temps, tant de nouveaux engagements auraient pu être consentis sans difficulté. Mais aujourd’hui, on peut vous reprocher de les prendre sans baisser d’autres dépenses et de les financer par la dette et l’impôt. Vous avez rappelé que nous avions financé un certain nombre de dépenses avec des chèques en bois, c’est-à-dire en gros en augmentant la dette. Vous faites de même, j’y vois une certaine continuité : on la cherchait tout à l’heure, la voici.

De telles mesures peuvent être absorbées quand la croissance du PIB marchand est au rendez-vous et qu’elle peut être redistribuée, pas quand des hausses d’impôts découragent à la fois la consommation et l’investissement. À ce propos, je suis personnellement plus inquiet pour les années à venir : faute de croissance, on ne résoudra pas les fameux déficits structurels de notre pays. Telle est la deuxième raison qui fonde la nécessité de réexaminer la première partie du PLF 2014. Il s’agit de faire en sorte que le budget qui nous est présenté réponde à l’urgence de la situation dans laquelle se trouvent nos entreprises et l’emploi marchand au lieu de prendre le risque de tuer la relance dans l’oeuf. Sur ce point aussi, le budget 2014 est déconcertant et je me dois d’exprimer ici la crainte qu’il m’inspire.

Souvenons-nous : il y a à peine un an, le rapport Gallois devenait la pierre angulaire de la politique économique du Gouvernement. C’était un retournement salutaire, car de nombreuses orientations initialement prévues dans le PLFR 2012 et le PLF 2013 et dont ledit rapport dénonçait un certain nombre, s’avéraient dangereuses pour notre économie. Un tel retournement fut aussi salutaire pour le ministre de l’économie et sans doute pour le ministre chargé alors des affaires européennes, auquel il a permis de défendre une réorientation de la politique économique de la France auprès d’interlocuteurs européens que les premiers mois et les premières décisions de la majorité avaient un peu inquiétés.

Le PLF 2014 prévoit la révision de nombreuses décisions que nous avons combattues il y a seulement un an. Je m’en réjouis et je passe sur les dégâts que causent aux décideurs économiques de tels revirements et une telle instabilité, car tout le monde les a évoqués et ils ne font débat sur aucun banc de cette assemblée. Mais je me dois aussi de rappeler un certain nombre de mauvais signaux que ce même PLF 2014 envoie aux décideurs économiques. Quelle mouche a piqué l’exécutif pour qu’il accepte une suggestion sans doute née dans les services de Bercy, celle de taxer l’EBE ?

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