Deux écueils sont à éviter : défendre le tout nucléaire ou le zéro nucléaire. Il nous faut dégager des consensus, en particulier sur la sobriété énergétique car des gains considérables sont possibles en termes de consommation d'énergie et je pense que notre pays a du retard dans ce domaine, retard qu'il faudra compenser par de très lourds investissements.
La question de la diversification des sources d'énergie est aussi posée. La part du photovoltaïque est résiduelle et heureusement que nous avons de grands barrages, pour lesquels il a fallu dompter un certain nombre de fleuves ; ce qui n'est pas sans poser d'autres questions sur le plan environnemental. La priorité est de lutter contre les gaz à effet de serre et la sortie de l'Allemagne du nucléaire va se traduire par une production supplémentaire de gaz à effet de serre.
Un rééquilibrage est nécessaire sur les sources de production d'électricité : 75 % de l'électricité est d'origine nucléaire alors que l'électricité ne représente que 25 % de l'énergie consommée.
Il faudrait donc utiliser les sources d'énergie avec parcimonie et réserver le recours au pétrole pour les bons usages, comme la chimie et ne pas le brûler pour produire de la chaleur. Il faut aussi trouver des modes de transport plus performants, comme les réalisations de lignes en courant continu : une ligne est en construction entre la France et l'Espagne, un projet est en cours entre la France et l'Italie. Ce sont des investissements lourds, de l'ordre de 600 millions d'euros.
Je suis convaincu qu'il faut rééquilibrer le mix énergétique – 75 % de production d'énergie d'origine nucléaire est excessif – et d'abord pour des considérations techniques. Si des centrales sont devenues obsolètes et ne peuvent pas être prorogées, il faut les fermer. Je n'ai pas les qualifications pour dire si Fessenheim doit être fermée ou pas mais l'aspect technique doit être le critère absolu. Il faut également prendre en compte le ratio des investissements à réaliser pour maintenir en production un certain nombre de centrales.
La difficulté de réaliser la transition énergétique vers les énergies renouvelables, réside dans le fait que celles-ci sont intermittentes et qu'elles ne représentent dans le mix énergétique que 1 % de la production d'électricité. Pourtant le photovoltaïque reste une solution d'avenir.
Il faut étudier davantage les solutions consistant à transformer l'électricité en hydrogène pour le recombiner avec du CO2 et en faire du méthane. Il existe également des systèmes de stockage sur lesquels il faut faire progresser la recherche et investir. Enfin, concernant la biomasse, il faut bien garder présent à l'esprit que le bois devient un produit de spéculation.
Il n'est pas possible d'abandonner complètement le nucléaire ; la sortie totale serait catastrophique. Notre pays est attractif pour des entreprises étrangères, notamment allemandes, qui envisagent de s'installer en France parce que l'électricité y est moins chère. C'est un avantage compétitif pour notre pays qu'il ne faut cependant pas conserver à n'importe quel prix. Le niveau de sécurité est satisfaisant mais il faut encore l'améliorer. L'EPR de Flamanville va à ce sujet constituer un progrès.
Je voudrais enfin souligner le fait qu'il existe d'importantes disparités de production entre les territoires. Ma région par exemple est en surproduction (nucléaire, barrages sur le Rhône, CNR, éoliennes, photovoltaïque) tandis que d'autres régions font le choix d'être en sous-production. Il faudrait donc veiller au bon équilibre de la production de l'énergie sur l'ensemble du territoire.