Je répondrai en premier lieu à Mme Guigou sur l'implication du Parlement national. Comme vous l'avez demandé, le Gouvernement est naturellement à la disposition du Parlement pour planifier les débats qu'il souhaite sur les programmes de stabilité et de réforme, les propositions de recommandations, ou encore le rapport annuel sur la croissance. Ainsi qu'il ressort de nos échanges d'aujourd'hui, ce sera utile pour réconcilier le débat européen et le débat national, comme le seront les réunions de la conférence parlementaire entre le Parlement européen et le Parlement national, prévues par l'article 13 du traité.
Le président Carrez a posé plusieurs questions, concernant d'abord l'harmonisation des calendriers budgétaires nationaux. Le Two-pack prévoit une présentation des budgets nationaux de la zone euro avant le 15 octobre, chaque année : ce n'est pas gênant, puisque cela est conforme à la pratique française. Nous serons donc dans les clous, et dans la norme.
Concernant les 120 milliards d'euros débloqués dans le cadre du pacte de croissance, Bernard Cazeneuve, qui suit le dossier, pourra répondre de manière plus précise, mais je peux d'ores et déjà indiquer qu'ils comportent : 10 milliards de crédits BEI nouveaux pour la France, dont 1,6 milliard soumis à autorisation dans le cadre du PLF pour 2013 ; 55 milliards de fonds structurels utilisés au niveau de l'Union européenne et dont la réallocation est en cours, avec notamment les collectivités locales. Quant aux project bonds, il s'agit aussi de réutiliser l'initiative RTE européenne sur les réseaux de transport et d'énergie pour des projets qui sont en cours de sélection – j'en ai mentionné certains tout à l'heure.
Nous travaillons sur tous ces sujets en lien étroit avec la Banque européenne d'investissement, et l'on peut espérer un effet multiplicateur important – un facteur deux, au moins – des retours de la BEI vers la France, ce qui témoigne de l'effectivité du paquet croissance.
Concernant les recommandations par pays, celles adressées à la France en juillet 2012 évoquent une réorientation de la fiscalité afin qu'elle pèse moins sur le travail et soit davantage axée sur les taxes à la consommation ou les taxes vertes.
Lors des fréquents échanges que nous avons avec la Commission européenne et le commissaire Rehn, j'insiste toujours sur le fait que notre pays a une obligation de résultat. Autrement dit, lorsque nous assurons que nous allons réduire les déficits l'an prochain à 3 % du PIB, il s'agit d'un impératif. Et il est clair que nous sommes très attendus sur ce point.
De retour des assemblées générales du FMI et de la Banque mondiale, je constate que notre crédibilité en la matière est certaine. Même si les choix que nous avons faits sont plus ou moins validés par tel ou tel, notre volonté est reconnue et saluée – par les marchés, par la Commission ou par le FMI, comme en ont témoigné mes différents interlocuteurs.
Mais le Gouvernement considère – et cela aussi est reconnu – que cette obligation de résultat sur laquelle insistent les recommandations n'emporte pas d'obligation de moyens. Nous mènerons donc des réformes structurelles, mais « à la française », selon nos propres choix politiques. Adopter une position congruente, ne signifie pas pour autant se rallier à un mainstream, à une voie unique, à une politique unique. Les peuples peuvent encore, fort heureusement, choisir démocratiquement les orientations leur permettant de parvenir au résultat attendu.
De ce point de vue, nous n'esquiverons pas la question de la compétitivité ; elle sera traitée, après la loi de finances. Nous y travaillons, et M. Gallois remettra son rapport le 5 novembre. La Conférence sociale a ouvert toute une série de chantiers. Nous commençons maintenant à en voir les résultats, les questionnaires nous parviennent et nous allons en tirer les conclusions. Le Haut conseil du financement de la protection sociale a été installé par le Premier ministre. Tout cela va déboucher in fine sur un paquet compétitivité qui traitera la compétitivité comme un tout, c'est-à-dire à la fois la compétitivité dite prix, ou coût, et la compétitivité hors prix, ou hors coût. Les deux choses ne sont d'ailleurs pas à opposer, car elles peuvent se compléter. Ensuite, il faudra combiner l'importance de chacun des éléments et choisir les outils fiscaux appropriés. Ce sera le sens de notre démarche. Donc, j'écoute les recommandations de la Commission, mais en même temps, nous ne nous interdisons pas d'avoir telle ou telle interprétation.
Quelle méthode de calcul du déficit structurel sera-t-elle retenue et quand sera-t-elle harmonisée ? Gilles Carrez a également posé cette question.
Les méthodes de calcul du déficit structurel sont, en vérité, relativement semblables. Les estimations peuvent néanmoins différer en raison d'écarts d'appréciation de la position de l'économie dans le cycle entre les différentes organisations. Le sujet le plus difficile, dont il a été question lors de la commission spéciale, concerne l'appréciation du PIB potentiel.
La Commission a une méthode, qui est sans doute la base sur laquelle nous devons travailler, mais qui pose certaines difficultés techniques. Les services de l'État discutent activement de cette question au sein du Comité de politique économique et du Conseil ECOFIN. L'objectif du Gouvernement est de parvenir à une méthode transparente et robuste, qui puisse être entièrement partagée. Car tout ce qui serait à l'écart, tout ce qui ne serait pas conforme à un certain nombre de standards partagés ôterait de la crédibilité à la démarche.
En tout état de cause, la loi organique prévoit que le Gouvernement saisisse le Haut Conseil sur l'ensemble du scénario macro-économique, ce qui inclut bien évidemment l'hypothèse de croissance potentielle, laquelle sera explicitée en toute transparence dans la nouvelle programmation pluriannuelle des finances publiques. Là aussi, les travaux du Parlement ont été très explicites à ce sujet. Il y a des débats techniques et pas de volonté de faire « bande à part ». Le Haut conseil rendra un avis public sur une programmation pluriannuelle des finances publiques, puis le Parlement sera amené, à travers la loi de programmation des finances publiques, à se prononcer également sur ces hypothèses, se fondant sur l'avis du Haut conseil.
Je ne recommencerai pas un débat qui a été tranché par le Parlement. Je veux simplement dire que nous travaillons dans le sens de la transparence, de la robustesse et de la convergence avec, de surcroît, une notion très importante, l'indépendance du Haut Conseil, dont cette assemblée s'est assurée. Elle a complété la composition du Haut Conseil sans revenir en quoi que ce soit sur ce qui, pour nous, était un impératif. En l'occurrence, nous avons voulu jouer de manière totalement collective.
Pour ce qui est de la question de Christian Eckert sur les négociations concernant le two-pack, le Conseil a adopté cette position le 20 février dans le cadre de l'ECOFIN. Le Parlement européen, la Commission, la Présidence – on pourra me corriger si je me trompe – sont en train d'en discuter dans le cadre de ce que l'on appelle le trilogue. Nous convergeons et nous espérons un aboutissement rapide des négociations, avant la fin 2012. Nous sommes encore dans les temps.
Sur le fond, les points essentiels de ces textes ne sont plus contentieux. La présentation des projets de budget aura lieu chaque automne pour faire le lien avec le programme de stabilité et les recommandations par pays et pour boucler l'exercice, après quoi il sera procédé à la codification des conditions de surveillance menée par la Commission pour les pays vulnérables ou les pays sous programme. On sait qu'il y en a maintenant un certain nombre dans l'Union européenne.
Dès lors que les questions les plus douloureuses ne sont pas contentieuses, on peut raisonnablement espérer un accord d'ici à la fin 2012, après quoi le two-pack pourra être mis en oeuvre.
S'agissant de la question de Mme Auroi, je pense qu'elle concerne davantage Bernard Cazeneuve.