Intervention de Pierre Moscovici

Séance en hémicycle du 16 juillet 2012 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Présentation

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

Par ailleurs, dès lors que cette mesure se traduisait par une perte de recettes publiques, cela supposait, car il faut bien que quelqu'un paye, d'en faire porter le coût au reste de la collectivité. Quant à ce qui concerne ceux que cette mesure a privés d'emploi, les conclusions s'imposent d'elles-mêmes.

Ces facteurs expliquent sans doute pourquoi, au final, les exonérations n'ont pas eu l'effet escompté sur le pouvoir d'achat par unité de consommation. Faut-il rappeler que le pouvoir d'achat n'a augmenté que de 0,1 % par an en moyenne entre 2007 et 2010, ce qui n'est tout de même pas un bilan ébouriffant ? Il a même reculé en 2011 et au premier trimestre 2012. Qu'on ne vienne donc pas nous dire, comme certains s'apprêtent à le faire, que nous allons tout gâcher !

Dernier point à noter, et non le moindre : le collectif ne remet pas en cause la majoration des heures supplémentaires ; les salariés qui y ont recours continueront donc bien à bénéficier de cet avantage.

Voilà pourquoi nous assumons complètement, au Gouvernement et dans la majorité, cette suppression économiquement efficace et socialement juste. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Voilà en quelques mots l'esprit de ce projet de loi de finances rectificative et quelques-unes des mesures phares qu'il propose. Je voudrais enfin rappeler le cadre dans lequel il s'inscrit. Il constitue à plusieurs titres, comme je l'ai dit en introduction, une première étape. Première étape d'une réforme fiscale. Première étape aussi dans la juste recomposition de notre budget, qui s'échelonnera tout au long du quinquennat.

Le projet de loi de finances rectificative préfigure la profonde réforme fiscale que nous présenterons à l'automne, dans le projet de loi de finances pour 2013. La LFR amorce ce mouvement, en revenant notamment sur les arbitrages difficilement justifiables de la précédente majorité qui pèsent sur nos recettes, comme l'allégement de l'impôt des redevables de l'ISF, la sous-taxation des secteurs financier et pétrolier ou les optimisations trop aisées en matière d'impôt sur les sociétés. Nous avons choisi de nous concentrer essentiellement, dans ce projet, sur les mesures dont l'entrée en vigueur immédiate était nécessaire pour préserver le pouvoir d'achat, l'emploi et l'activité, et pour respecter nos engagements budgétaires. Mais le collectif organise aussi la transition vers les réformes plus pérennes que nous mènerons à bien cet automne avec le projet de loi de finances pour 2013, dans des conditions d'examen parlementaire optimales.

Je terminerai en disant que ce projet de loi s'inscrit dans un mouvement d'assainissement des comptes et de juste recomposition du budget qui se déploiera sur l'ensemble de notre mandat. J'ai rappelé, à plusieurs reprises, la trajectoire des finances publiques que nous visons. L'effort du présent collectif porte essentiellement, je ne le nie pas, sur les recettes. C'est un effort équitable, qui nous permettra de respecter nos engagements, et que nous devons faire aussi compte tenu de certaines approximations dont nous héritons. Chacun sait qu'en raison de la rigidité de la dépense publique, des économies substantielles ne pouvaient être engagées en milieu d'année. Mais il s'agit de la première étape seulement de notre programme budgétaire. Je l'ai dit également à de nombreuses reprises, nous sommes là pour cinq ans, non pour deux, et nous concevons nos initiatives sur l'ensemble du quinquennat, avec un objectif central : le redressement du pays, le retour de la croissance et, par-dessus tout, la création d'emplois.

J'ai présenté la stratégie d'ensemble du quinquennat devant cette assemblée la semaine dernière, et j'ai explicitement précisé que, si nous faisions porter davantage l'effort immédiat sur les recettes, le taux de prélèvements obligatoires serait globalement stable à partir de 2014. Je vous confirme que le retour à l'équilibre ne passera pas par le seul levier de la fiscalité ; Jérôme Cahuzac l'a dit à cette tribune avec des mots forts la semaine dernière, et je le rejoins totalement. La répartition de l'effort entre recettes et dépenses sera parfaitement équilibrée sur la période 2012-2017, car nous ne voulons pas de l'austérité ; nous n'entendons pas dessécher ce qui fait le corps de l'État, nous ne voulons pas affaiblir l'administration ni faire porter le poids du redressement sur la seule imposition des ménages et des entreprises. Les acteurs économiques, par cet équilibre recettes-dépenses que j'ai évoqué, disposeront ainsi de la visibilité nécessaire pour investir, consommer et exporter.

Oui, nous proposons, dans ce collectif, une augmentation immédiate des recettes. J'ai dit pourquoi, j'ai dit comment, j'ai dit sur quelle période. Mais, en parallèle, nous maîtriserons nos dépenses, selon un calendrier qui couvrira la totalité du quinquennat. Ces arbitrages, qui n'étaient pas faciles car, encore une fois, la situation est compliquée, permettront de préserver la demande publique, dans un contexte de croissance vacillante, tout en revenant à des niveaux de dépenses soutenables dans la durée.

J'invite chacun, et surtout ceux qui se situent à ma droite, à éviter la caricature et les excès de langage, toujours tentants.

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