Cette Banque publique d'investissement sera, monsieur Mariton, la banque des TPE, des PME, des PME industrielles, des entreprises de taille intermédiaire. Elle financera ce qu'elles ont du mal à financer aujourd'hui : leurs projets de développement, leur croissance à l'international, leurs investissements dans l'innovation.
Au-delà, d'autres chantiers nous attendent. La réforme de l'épargne réglementée est déjà entamée. Celle du secteur bancaire fera l'objet d'un projet de loi que je présenterai avant la fin de l'année. Nous oeuvrerons à une meilleure mobilisation de l'épargne des Français –qui est abondante mais dont l'allocation n'est pas la plus utile à l'économie – en faveur du financement de l'économie réelle. Le Premier ministre a confié une mission à deux députés, Dominique Lefebvre et Karine Berger, pour favoriser l'épargne longue et renforcer les fonds propres des entreprises. Cette mission s'inscrit pleinement dans le cadre de l'agenda de compétitivité. Parallèlement, le Gouvernement souhaite avancer vite sur la réforme du marché du travail, avec les négociations cruciales que mène Michel Sapin.
Le Gouvernement réfléchit aussi à d'autres pistes afin de soutenir la productivité et l'investissement, en particulier au service des PME et des ETI pour dynamiser leur compétitivité. Je pense au premier chef au soutien résolu à l'innovation, que nous engageons avec le projet de loi de finances pour 2013, à l'amélioration de l'environnement économique des entreprises, au financement des exportations. M. Louis Gallois remettra le 5 novembre un rapport sur la compétitivité des entreprises, qui nourrira la réflexion sur ces différentes facettes.
Parallèlement, nous avons lancé une concertation des partenaires sociaux et installé le Haut Conseil du financement de la protection sociale, qui restituera ses travaux en fin d'année. Bref, nous avons une approche à la fois ambitieuse et globale de la compétitivité, qui traite aussi des réformes sectorielles indispensables : logement, transports, énergie, professions réglementées.
Voilà, en quelques mots, les grands chantiers en faveur de la croissance que nous avons amorcés et qui mobiliseront l'ensemble du Gouvernement au cours des prochains mois.
Notre stratégie de finances publiques s'inscrit dans cet agenda de croissance. Elle est décrite dans le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques et exprime pleinement cette démarche. Elle se déploie, vous le savez, au sein d'un cadre de finances publiques profondément rénové, qui préfigure la mise en oeuvre de la loi organique en cours de discussion au Parlement et que votre assemblée a déjà votée.
Tout d'abord, et c'est un progrès qui me semble décisif, le projet de loi de programmation propose un pilotage intelligent des finances publiques : nos objectifs seront désormais exprimés en termes de solde structurel.
En d'autres termes, la croissance et les aléas de la conjoncture seront désormais pris en compte dans l'ajustement de nos finances publiques.
Il est prévu, en outre, un mécanisme de correction qui respecte la souveraineté de la représentation nationale : lorsqu'un écart important sera constaté, le Gouvernement sera tenu d'en expliquer les raisons et de lui proposer des mesures correctrices immédiates.
Dans ce cadre, notre action sera conduite en deux temps.
Le premier sera celui du redressement, de la remise en ordre des finances publiques. Le déséquilibre financier dont nous héritons est massif, ai-je dit, et nous devons le corriger. Nous avons choisi de faire porter l'essentiel de l'effort sur le début du mandat, avec le retour du déficit public nominal à 3 % du PIB puis, dès 2014, l'inversion de la dynamique de la dette. Des mesures de redressement significatives ont déjà été votées en juillet dernier ; elles assurent le retour du déficit à 4,5 % en 2012. La détermination du Gouvernement à tenir ces objectifs est totale et indiscutable.
Le second temps sera celui du retour à l'équilibre structurel des comptes publics. Le déficit structurel, c'est-à-dire corrigé des effets du cycle économique, sera ramené dès 2015 au-dessous de 0,5 % du PIB – le seuil prévu par le traité – puis à l'équilibre en 2016 et 2017.
C'est une trajectoire exigeante, mais son sérieux est reconnu. Il ne s'agit pas d'une opinion politique : c'est le fruit de l'observation du bas niveau des taux d'intérêt auxquels la France emprunte, conséquence notamment de règles de bonne gestion.
J'insiste sur un élément trop peu pris en compte : le sérieux budgétaire, ce n'est pas un boulet, ce n'est pas une contrainte, un obstacle qui empêcherait le progrès économique et social. Je le dis aux députés de la majorité : le sérieux budgétaire n'est pas incompatible avec une volonté forte de changement, avec un engagement de gauche, avec une démarche de justice, de redistribution. Il doit au contraire être compris comme une condition de la compétitivité de notre économie dans son ensemble. Je prends l'exemple de ce qui s'est passé en Espagne : lorsque les conditions de financement de l'État espagnol se sont dégradées, c'est l'ensemble des secteurs de l'économie, l'ensemble des entreprises qui ont été touchés. Si les entreprises françaises devaient, elles aussi, connaître une hausse des taux d'intérêt, l'endettement reprendrait de l'avant et l'économie se détruirait. Ce serait catastrophique. C'est parce que nous voulons éviter une telle épreuve à notre pays et que nous refusons sa dégradation ou sa relégation que je revendique pleinement ici le sérieux budgétaire.
C'est pour ces raisons que nous devons poursuivre la consolidation de nos finances publiques. Mais ce désendettement doit être intelligent – c'est ce que j'ai appelé le « désendettement compétitif ». Il faut juger les efforts menés sur la base des résultats obtenus et non pas des moyens mis en oeuvre, et s'inspirer des expériences réussies à l'étranger. Je m'arrête une seconde sur ce dernier point : si le désendettement est un défi exigeant, l'exemple du Canada montre que c'est par l'intelligence de l'expérience collective que nous le relèverons.