Intervention de Philippe Étienne

Réunion du 10 octobre 2012 à 17h00
Commission des affaires européennes

Philippe Étienne :

Pour ce qui est du rapport du FMI, je rappelle que la directrice générale de cette institution, Mme Lagarde, qui assistait lundi à la réunion de l'Eurogroupe, a aussi salué les progrès réalisés par la zone euro, même si nous ne sommes pas encore sortis de la crise. Ce rapport n'exprime pas de critiques à ce sujet, et cela d'autant moins que les États non européens demandaient que la zone euro développe ce type de mécanisme. Le FMI met l'accent notamment sur les perspectives de croissance. La Commission européenne présentera ses propres perspectives le 7 novembre.

La recapitalisation directe donnera au MES – déjà en place – un outil supplémentaire propre à casser le lien entre les deux risques liés aux banques et à la dette souveraine. Aujourd'hui, l'aide du MES est, par exemple, attribuée à un organisme d'État espagnol, le Fondo de Reestructuración Ordenada Bancaria (FROB), qui va recapitaliser les banques espagnoles. La recapitalisation directe, qui n'augmentera pas la dette espagnole, permettra de sortir du cercle vicieux dans lequel les difficultés des établissements financiers alimentent la dette des États qui doivent les aider, alimentant ainsi à leur tour la dette de ces établissements financiers, qui portent dans leurs comptes des créances émises par les États.

Pour ce qui est de la perception de la colère des peuples, nombreux sont ceux, à Bruxelles, qui ont conscience que les programmes d'assistance ne suffisent pas et qu'une réponse de croissance s'impose. Il faut répondre aux populations : c'est la raison pour laquelle la France insiste pour sa part pour mettre l'accent non seulement sur la croissance, mais aussi sur l'emploi, et pour donner une dimension sociale aux réflexions sur l'avenir de l'Union économique et monétaire.

Bien que le temps de la crise et celui de la décision politique ne soient pas nécessairement synchrones, la mise en oeuvre du mécanisme européen de stabilité – impensable voilà deux ans – n'a pas été très longue, compte tenu des contraintes de sa négociation. En fait, elle a même été mise en oeuvre avec une année d'avance.

Quant à savoir s'il faut davantage de moyens pour couvrir les besoins de refinancement, je rappelle que l'Espagne elle-même a pu jusqu'ici se refinancer sur les marchés, et l'Italie encore plus facilement. La question est de savoir si les taux sont soutenables, d'où en effet le débat sur l'accès de l'Espagne à un programme complémentaire de celui pour ses banques.

En matière de gouvernance, la Commission européenne doit gérer les conséquences de la décision de conserver un commissaire par État membre. C'est une machine très lourde, qui pose sans doute des problèmes de gouvernance interne. On peut certes réfléchir, au moment où elle reçoit de plus en plus de pouvoirs, sur sa légitimité et sur son organisation. La Commission a ainsi réorganisé ses circuits internes autour du vice-président chargé des affaires économiques et financières et de la zone euro, le Finlandais Olli Rehn.

Dans le domaine de la politique industrielle, le vice-président Antonio Tajani a présenté aujourd'hui même une communication exposant des éléments que nous attendons de la Commission depuis des années, même si la cohérence avec d'autres politiques, telle que la politique de concurrence, est une question encore délicate.

La supervision unique aura certes des conséquences dans tous les pays qui l'acceptent. Au demeurant, la banque centrale européenne ne décidera pas seule : elle sera le centre d'un système qui lui associe des régulateurs nationaux – en France, la Banque de France – composant un conseil de gouvernance.

Madame Karamanli, si l'affectation d'une partie du produit de la taxe sur les transactions financières au budget de l'Union européenne était décidée, cette ressource propre ne pourrait pas être traitée comme celles auxquelles participent tous les États membres. Il faudrait donc en effet définir une procédure pour faire face à cette situation. La France plaide en tout cas fortement pour que l'Union européenne dispose de nouvelles ressources propres et il faudra continuer à travailler sur cette idée.

Les réductions budgétaires que vous avez citées ont été opérées par rapport à la proposition de la Commission dans le cadre de la négociation du budget pour 2013. Pour la fin de l'exercice 2012, si les crédits sont insuffisants, la Commission présentera un projet de budget rectificatif et supplémentaire qui sera examiné par les États membres et le Parlement européen afin de pouvoir honorer tous les paiements nécessaires.

Les dépenses de fonctionnement de l'Union européenne – la « rubrique 5 » – sont une petite partie du budget européen, qui est essentiellement un budget d'investissement. Presque tous les États membres, y compris ceux qui, au Sud de l'Europe, sont confrontés à une baisse ou un gel du salaire des fonctionnaires, sont cependant d'accord pour demander à la Commission européenne de faire les mêmes efforts que les administrations nationales. La maîtrise de ces crédits va de pair avec la réforme du statut des fonctionnaires européens – par exemple en matière de régime de pension. Il s'agit là de sujets délicats, qui supposent notamment un dialogue social avec les syndicats de fonctionnaires européens.

Galileo, ITER et GMES, qui est un autre grand projet spatial, font l'objet de négociations compliquées dans le cadre des budgets européens pour 2014-2020. Galileo est déjà l'un de ces grands programmes dont le succès permet d'identifier l'Europe à des images positives. Il faut pouvoir financer ces projets à l'intérieur du budget européen sans pour autant écraser les plus petits projets de recherche.

Quant aux négociations internationales sur le climat, c'est un sujet dont nous nous entretiendrons avec M. Deflesselles lorsqu'il se rendra à Bruxelles dans le cadre de la mission dont il est chargé sur ce thème.

Monsieur Herbillon, il serait un peu ambitieux pour moi de me projeter dans deux ans. Il s'agira cependant d'une année d'élections européennes et des réflexions sont en cours pour faire de ces élections l'occasion d'un véritable débat politique européen, plutôt qu'une juxtaposition de débats nationaux sur des problématiques nationales. Certains envisagent que les grandes familles politiques se dotent, à cette fin, de têtes de liste qui seraient leurs candidats à la présidence de la Commission européenne. Cette formule est plus réaliste que l'élection du président de la Commission européenne au suffrage universel – qui n'a du reste été émise que dans le débat politique pour le long terme et n'a pas été présentée comme un point à mettre à l'ordre du jour des actuels débats à 27.

Retrouver des idées concrètes positives qui s'identifient pour les citoyens à la construction européenne est en effet un grand défi. C'est le cas d'Erasmus, et des grands projets.

Monsieur Hammadi, nous vous fournirons, via le secrétariat de la Commission, une documentation sur les euro-obligations de projets. Le texte de juillet 2012 correspond à une phase pilote qui doit arriver à financer 4 à 5 milliards de projets à partir d'une ressource budgétaire de 250 milliards d'euros pour des projets consacrés aux transports, à l'énergie et aux télécommunications. Il ne sera pas possible de tirer de conclusions de l'expérimentation avant le terme de ces premiers projets, fin 2013 ou début 2014.

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