Intervention de Nicolas Sansu

Séance en hémicycle du 17 septembre 2013 à 15h00
Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière-procureur de la république financier — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Sansu :

Toutes les multinationales, toutes les banques ou presque ont recours aux centres offshore pour échapper à l’impôt ou proposer aux plus fortunés de le faire.

Si l’on ajoute à la fraude proprement dite les techniques d’optimisation agressive de certaines grandes entreprises, au moyen notamment de la manipulation des prix de transfert, ce seraient 60 à 80 milliards qui s’évaporeraient sous l’effet de la fraude ou de l’optimisation. Pour l’Europe, le Parlement européen estime à 1 000 milliards d’euros les sommes qui font défaut dans les caisses des pays de l’Union.

Faire cesser ce vol organisé à grande échelle, c’est faire oeuvre de salubrité publique. C’est la raison pour laquelle nous voterons le présent texte, même si la lutte contre ce fléau économique est loin d’être achevée. Car ce que traduit l’ampleur de l’évasion fiscale, c’est le gigantesque mécanisme de confiscation des richesses que suppose une économie fondée sur la rente et sur l’exigence de retours sur investissements de l’ordre de 15 %.

Libérer les entreprises, les salariés, la société, les collectivités publiques du joug de la rente et liquider celle-ci plutôt que de nous laisser asphyxier par elle, telle doit être aujourd’hui notre ambition collective. C’est la seule voie qui permette d’allier efficacité économique et justice sociale.

À l’heure où les libéraux dénoncent le coût du travail, il n’est pas inutile de rappeler en effet ce que coûte à notre économie les dividendes versés aux actionnaires, ce que représente le coût du capital. Thomas Piketty, que beaucoup connaissent bien sur ces bancs, a constaté que la rente du capital – intérêts, dividendes, loyers, plus-values – rapporte, en net, sur le long terme près de 5 % par an et dépasse durablement la croissance économique, qui plafonne autour de 1 % l’an. Diviser aujourd’hui par deux les dividendes libérerait 120 milliards d’euros pour les investissements productifs, créerait de l’emploi, permettrait de financer la protection sociale et de diminuer le déficit de l’État.

Nous savons tous qu’une grande part des intérêts et dividendes versés par les entreprises aux prêteurs et aux actionnaires ne renvoie à aucun service économique rendu. Une étude réalisée par les économistes du centre lillois de recherche sociologique et économique a montré que les exigences des actionnaires et des investisseurs institutionnels en termes de rentabilité imposent un surcoût systématique de 70 % aux projets d’investissement.

C’est à ce gigantesque gaspillage de richesses, source de dégâts sociaux et environnementaux, source d’une explosion des inégalités, que nous devons mettre un terme. Vous pouvez compter sur notre détermination à rester mobilisés dans les mois et les années qui viennent pour faire reculer les pratiques financières prédatrices, dont l’évasion et l’optimisation fiscales ne sont qu’un aspect. Dans cet esprit, les députés du Front de gauche et tous les membres du groupe GDR voteront ces projets de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion