Intervention de Dominique Raimbourg

Séance en hémicycle du 17 septembre 2013 à 15h00
Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière-procureur de la république financier — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg :

Madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelques mots au sujet de ce texte empreint de qualités.

C’est tout d’abord un texte démocratique, parce qu’il rend possible l’intervention des associations qui ont pour finalité la lutte contre la corruption et la fraude fiscale. C’est dire qu’il permet l’intervention des citoyens en dehors de toute opération publique, de toute intervention gouvernementale : il fait porter un regard citoyen sur des opérations fiscales qui sont un coup de couteau dans le pacte social qui nous lie tous.

C’est un texte démocratique également parce qu’il prévoit un compte rendu de la commission des infractions fiscales. Ce qui est reproché habituellement à l’administration fiscale – son opacité – est de ce fait atténué par le regard que les parlementaires pourront porter sur ces transactions. Ainsi ne pourront-ils se dire que l’on ramène dans les filets les petits poissons tandis que les gros poissons transigent.

C’est par ailleurs un texte efficace : il prévoit évidemment l’apport d’informations, car il n’y a pas de répression sans information. A cet égard, la protection des lanceurs d’alerte et des repentis est organisée.

C’est aussi un texte habile, puisqu’il étend des dispositions procédurales extrêmement efficaces et contraignantes en prévoyant la création d’un délit de fraude fiscale en bande organisée. Cela n’a l’air de rien mais permet d’ouvrir des enquêtes approfondies, de mettre en place des écoutes téléphoniques, de prévoir des gardes à vue…

C’est à cet égard un texte efficace parce qu’il tranche définitivement la question de la preuve en permettant que serve de preuve tout document fondé, quand bien même son origine serait frauduleuse.

C’est un texte fondateur, puisqu’il met en place un procureur financier qui devra trouver comment articuler son action avec celle du procureur de Paris, mettre en oeuvre cette compétence concurrente et faire en sorte que cette concurrence soit un gage d’efficacité et non de discorde.

C’est un texte enfin qui est réaliste : on a su éviter un débat théorique sur la question du verrou fiscal et sur le point de savoir si les poursuites devaient être réservées au procureur ou si au contraire l’administration fiscal devait y trouver sa place. Nous savons tous aujourd’hui que l’efficacité est plutôt du côté de l’administration fiscale ; nous savons aussi que, certes, la publicité et le caractère contradictoire sont du côté de la justice, mais que les moyens de la justice ne sont pas au niveau de ceux du fisc, ce que nous regrettons tous aujourd’hui. Néanmoins, il est réaliste d’apprécier la situation comme on l’a fait.

La métaphore halieutique ayant été employée très fréquemment, je dirai qu’à l’évidence il s’agit avec ce texte d’un filet, d’un chalut de grande qualité. Il reste maintenant à armer le chalutier pour ramener sur la terre ferme les poissons qui avaient cru pouvoir s’échapper. Notre collègue Éric Alauzet estimait qu’ensuite il faudrait s’attaquer à l’évasion fiscale pour prendre de plus gros poissons, en particulier ceux qui profitent de la fiscalité numérique. Peut-être que le bruit du chalutier qui s’approchera rendra les gros poissons citoyens : c’est ce que nous pouvons tous espérer.

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