Intervention de Jean Launay

Séance en hémicycle du 16 octobre 2013 à 21h45
Loi de finances pour 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Launay :

Pourtant, alors qu’en 2007 le candidat Nicolas Sarkozy prétendait baisser les impôts à hauteur de 4 points de la richesse nationale, il les a finalement fortement augmentés puisque les prélèvements obligatoires ont subi une hausse de 1,3 point de PIB, soit près de 30 milliards d’euros, entre 2007 et 2012.

Faut-il aussi rappeler qu’à la fin du quinquennat précédent, les ministres François Baroin et Valérie Pécresse avaient prévu dans le programme de stabilité envoyé à la Commission européenne d’augmenter les impôts de plus de 20 milliards d’euros de 2012 à 2016 pour atteindre un taux de prélèvements obligatoires de 45,8 % du PIB dès 2016 ? Il est donc quelque peu paradoxal d’entendre aujourd’hui ceux qui ont creusé les déficits et accentué les inégalités manier la peur voire le refus de l’impôt.

Pourtant, la vérité de ce projet de budget 2014 est bien différente. S’agissant de la fiscalité, la hausse des prélèvements obligatoires ne sera que de 3 milliards d’euros en 2014, soit, pour l’essentiel, le montant attendu de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales. Par ailleurs, le projet de loi de finances introduit trois éléments correcteurs des injustices qui affectent l’impôt sur le revenu : la réindexation du barème de l’impôt sur le revenu, l’introduction d’une décote sur cet impôt dont vont bénéficier les salariés et les retraités les plus modestes, et l’augmentation du plafond du revenu fiscal de référence.

Je souhaite évoquer en second lieu l’article 32 du projet de loi de finances. Cet article vise à prélever 210 millions d’euros sur les recettes des agences de l’eau afin d’abonder le budget général de l’État et ainsi contribuer à rééquilibrer les comptes publics. Mais puis-je me permettre de rappeler, monsieur le ministre, que les dépenses des agences de l’eau sont programmées selon des prévisions de recettes pluriannuelles – il s’agit de redevances –, dont le plafond global fait d’ailleurs l’objet d’un vote à l’Assemblée nationale ? Ce fut le cas l’an dernier pour le dixième programme des agences, qui couvre la période actuelle 2013-2018.

Cet article ouvre donc deux débats. Le premier concerne le prélèvement lui-même. Monsieur le ministre, autant je comprends, comme député de la majorité, le nécessaire redressement de nos finances publiques, autant je regrette la modalité qui a été choisie : elle a déjà été employée par le passé, et je l’avais critiquée. Ce n’est pas une bonne méthode car le principe du pollueur-payeur et celui de « l’eau paie l’eau » en sortent affaiblis. Le fait que les conseils d’administration des agences de l’eau, établissements publics de l’État, votent négativement leur budget sera la première conséquence de cet article. Cela ne vous émouvra probablement pas, mais il faut que vous mesuriez le risque récessif que comporte ce prélèvement, car c’est l’investissement public et, en conséquence, l’activité économique qui en sortiront affectés, avec des risques de pertes d’emplois dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics.

Le second débat ouvert par cet article est celui est recettes affectées et de l’universalité budgétaire. À cet égard, je trouve l’exposé des motifs inquiétant, mais il a été rédigé avant la conférence environnementale et la table ronde sur l’eau des 20 et 21 septembre derniers. Cette dernière a globalement confirmé le modèle français de l’eau, caractérisé par une gestion décentralisée et par bassin versant, rejetant de fait la vision jacobine des quelques-uns qui, à tous les niveaux de l’État et quelle que soit leur appartenance politique, veulent tout recentraliser et tout rebudgétiser.

Monsieur le ministre, vous connaissez les territoires et leurs acteurs : je sais que vous continuerez de leur faire confiance dans le domaine important de la gestion de l’eau dans toute sa diversité.

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