Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 18 octobre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Article 8

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Je vais nécessairement être bref puisque mes deux collègues et amis ont tout dit. Cependant, je voudrais rappeler à l’Assemblée nationale que cette matière est compliquée, que la situation est injuste – la Corse ne peut aucunement être mise en accusation parce que l’État a laissé perdurer pendant deux siècles une incurie sur les titres fonciers – et que nous voulons en sortir, mais de manière réaliste.

En ce qui concerne le principe d’égalité, je ne vous ferai pas l’injure, mes chers collègues, de vous rappeler qu’il consiste à appliquer les mêmes droits et devoirs à des situations semblables et qu’appliquer à deux situations totalement dissemblables une même règle cela s’appelle de la discrimination. Quant à dire que la situation des titres fonciers est la même en Corse que sur le continent, ce serait méconnaître non seulement la réalité mais aussi, désormais, grâce au ministre Bernard Cazeneuve et au travail qu’il a mis en place, les constatations faites par un groupe de travail comprenant des experts venus de l’administration et des experts venus de Corse, d’ailleurs nommés par Bercy. La réalité est simple : plus de la moitié des propriétés n’ont pas fait l’objet d’une publication, et les deux tiers des propriétés en Corse sont au nom de personnes décédées et se trouvent dans une indivision de fait, parfois sur plusieurs générations.

Par ailleurs, il est extraordinairement difficile de rattraper les choses en un jour ni en quatre ans, puisque le GIRTEC, créé par la loi de 2002, a commencé à travailler en 2009. En quatre ans, vous imaginez bien qu’il ne peut pas remonter toutes les successions depuis 1802.

Tout cela est tout de même extrêmement simple et, aujourd’hui, ce que nous souhaitons, c’est revenir à la normale. Entre le chétif avantage que le ministère ne chiffre pas, l’économie que feraient, en droits de succession, les Corses, qui est infime, même pas quantifiable ni quantifiée par le groupe de travail, et l’inconvénient majeur qui résulte tant pour les personnes privées – nous en avons tous l’expérience à titre personnel – que pour les personnes publiques – j’y insiste, car l’acquisition publique, par voie d’expropriation ou par voie amiable, s’en trouve considérablement compliquée –, il y a un monde : d’un côté, un avantage extrêmement chétif, qui n’est d’ailleurs pas chiffré ; de l’autre, un monde d’inconvénients. De toute façon, là n’est pas la question : nous souhaitons revenir à la normale.

Comment donc ? Tout d’abord, soyons réalistes. Aujourd’hui, de toute façon, le ministère l’a reconnu lui-même, par une instruction fiscale, on ne peut pas appliquer ce qui est inapplicable en pratique ni, Camille de Rocca Serra l’a dit à l’instant, ce qui est inapplicable en droit. Comment voulez-vous, légalement, constitutionnellement, qu’on vous fasse payer des droits sur quelque chose dont on ne sait pas si ça vous appartient ou non, d’autant que, du fait de la situation, vous ne bénéficiez pas des droits afférents à la propriété, qui sont l’abusus, le fructus et l’usus ? Vous n’avez en tout cas sûrement pas l’abusus parce que vous ne pouvez pas vendre une propriété indivise, surtout quand il y a deux cents indivisaires.

Aujourd’hui, les solutions présentées sont de deux natures, Camille de Rocca Serra l’a dit : d’une part, une solution réaliste, mais qui consiste à taxer dès le début, c’est-à-dire dès l’année 2013 ; d’autre part, un travail sur les donations qui serait de nature à accélérer le processus de titrage par l’incitation.

On peut raisonnablement espérer mettre fin, en s’appuyant sur ces deux piliers, à deux siècles d’incurie.

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