Intervention de Philippe Bies

Séance en hémicycle du 10 septembre 2013 à 15h00
Accès au logement et urbanisme rénové — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Bies, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, voulu par le Président de la République, porté par le Gouvernement, est assurément un texte ambitieux. Il démontre, si besoin était, que le logement est toujours une priorité pour le Gouvernement et sa majorité. En un an, nombreuses ont été les mesures engagées pour répondre à l’urgence. Je n’en referai pas ici l’inventaire, mais force est de constater que la volonté nationale est désormais au diapason des politiques souvent ambitieuses mises en oeuvre dans les territoires.

Après avoir répondu à l’urgence, nous voilà sur le point d’examiner un texte qui doit permettre de réformer en profondeur notre politique du logement en proposant une stratégie globale, cohérente, durable, destinée non seulement à réguler les dysfonctionnements du marché, à protéger les propriétaires et les locataires, mais aussi à accroître l’effort de construction de logements.

Ce projet de loi tire, par ailleurs, les leçons de la crise d’un modèle de développement probablement à bout de souffle. Il propose de rénover un urbanisme qui est, aujourd’hui encore, le reflet de ce vieux modèle qui consomme toujours plus d’espace, repousse l’agriculture loin des lieux de consommation, génère des dépenses inutiles, provoque aussi parfois le repli sur soi, le rejet de l’autre, et vient ajouter à l’injustice sociale et à l’injustice environnementale.

Alors que la commission des affaires économiques a examiné le texte au fond, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a décidé de se saisir pour avis du seul titre IV du projet de loi, qui entre le plus directement dans le champ de ses attributions. Les discussions entre les membres de la commission, ainsi que les amendements qu’elle a adoptés, sur lesquels je reviendrai, ont été inspirés par le souci de vérifier le caractère applicable des dispositifs proposés et d’en enrichir éventuellement l’économie, notamment au regard d’une meilleure prise en compte des objectifs environnementaux et écologiques dans les documents d’urbanisme.

À ce sujet, je rappelle que le titre IV du projet de loi se donne pour objectif principal de lutter contre l’étalement urbain et l’artificialisation des sols. L’alternative à l’étalement urbain, c’est la densité, ou plutôt l’intensité urbaine, consistant en un mélange des fonctions – habitat, activités, loisirs – en un lieu. Je ferai mienne ici une réflexion de Roland Castro, dans la préface de l’ouvrage d’Éric Hamelin et Olivier Razemon, La tentation du bitume : « L’indispensable densification de nos villes invite à concevoir des formes d’habitat qui répondent aux modes de vie contemporains en conciliant les avantages de l’habitat collectif et de la maison individuelle, l’un et le commun, la proximité des services, des réseaux de transports, et la qualité des espaces extérieurs »

Ainsi, il n’y a pas qu’une densité, et le choix ne doit pas se faire qu’entre le pavillon individuel ou la tour. Il y a différentes manières de la décliner en fonction du contexte urbain et environnemental, c’est-à-dire en prenant impérativement en compte les enjeux liés à la biodiversité. C’est ce point de vue que j’ai souhaité, en tant que rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, faire prévaloir lors des débats en commission des affaires économiques. Ainsi, j’ai proposé des dispositions pour reconnaître les espaces de continuité écologique et le coefficient de biotope par surface qui concerne, lui, les espaces à construire ou déjà construits.

Ces deux dispositions, déjà expérimentées au niveau local, n’ont pu être intégrées à ce projet de loi. Sans doute faut-il encore en préciser certaines notions afin de les rendre totalement opérationnelles et de les introduire, je l’espère, dans la future loi sur la biodiversité. Je souhaite que nos débats publics permettent au Gouvernement de prendre des engagements sur ce point.

Mais si nous voulons accélérer les projets de construction maintenant – et nous le devons – nous ne pouvons plus attendre pour proposer, à côté de la densité ou de l’intensité urbaine, la biodiversité, une ville en nature ! Cette notion constitue aussi un élément d’acceptation par nos concitoyens. Il est vrai qu’aujourd’hui, même sans la loi, des territoires utilisent déjà des outils. Les inscrire dans la loi, c’est faire oeuvre de pédagogie pour en convaincre d’autres et c’est reconnaître les bonnes pratiques existantes, comme nous nous apprêtons à le faire pour l’habitat participatif.

Œuvrer à limiter l’étalement urbain, d’une part, et faire revenir la nature en ville, d’autre part, ont donc constitué des préoccupations des groupes de la majorité et de plusieurs parlementaires de toutes tendances, et je me félicite qu’une partie de nos idées et contributions se retrouve dans le texte aujourd’hui mis en débat.

Nous avons ainsi pu faire adopter plusieurs amendements affirmant la prise en compte de la biodiversité dans le code de l’urbanisme. Je pense à l’inscription des enjeux de biodiversité dans les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d’urbanisme ; à la possibilité d’utiliser l’outil « emplacement réservé », que connaissant bien les élus locaux, dans les documents d’urbanisme pour les espaces nécessaires aux continuités écologiques ; à l’extension du régime juridique appliqué aux terrains cultivés, aux espaces non bâtis nécessaires au maintien de ces mêmes continuités écologiques ; ou encore à l’amélioration de la concertation, en élargissant aux représentants des associations de protection de l’environnement la liste des acteurs à consulter pour l’élaboration des plans de déplacements urbains.

Plusieurs autres orientations du projet de loi ont fait, devant les deux commissions, l’objet de débats intéressants et constructifs, que nous reprendrons certainement ici. Je pense notamment au « SCOT intégrateur », seul document auquel le PLU sera désormais opposable. Il s’agit aussi de la généralisation des PLU intercommunaux qui, si elle peut susciter certaines réserves, est dans la logique de l’évolution de nos territoires.

Cette réflexion à l’échelon intercommunal et, plus largement, de « bassin de vie », appelle en toute logique la mise en place d’une véritable vision stratégique de l’aménagement à l’échelle régionale. Sur ce dispositif à trois étages – PLUI, SCOT, schéma régional –, il me semble que nous pouvons aller plus vite et plus loin et que ce texte pourrait nous en fournir l’occasion.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion