Madame la présidente, madame la ministre, madame et messieurs les rapporteurs, chers collègues, après presque dix-huit mois de gouvernement, vous ne pouvez plus parler d’héritage. Et encore moins dans le domaine du logement !
En effet, vous avez multiplié les alarmes sur la situation du logement, vous avez décrété l’urgence et vous avez, par trois fois, fait adopter des mesures législatives, allant jusqu’à l’usage des ordonnances, modifiant ainsi le cadre dans lequel évoluent la production et la mise à disposition de logements. Pourtant, les résultats ne sont pas là et, malheureusement, ils ne le seront pas davantage demain. L’objectif, fixé par le Président de la République, est de 500 000 logements par an : une promesse de campagne, une déception de plus.
Après mes collègues Benoist Apparu et Martial Saddier, je rappellerai qu’entre avril 2012 et mars 2013, seuls 336 000 logements ont été mis en chantier, soit 18 % de moins qu’au cours des douze mois précédents, et tous les analystes s’accordent à dire que la production de logements en 2013 ne devrait pas excéder le nombre de 330 000.
Mais le plus inquiétant est la forte baisse des autorisations – les constructions de demain –, dans toutes les catégories de logements. Le recul observé au deuxième trimestre 2013 par rapport à la même période de 2012 est de près de 23 % pour la construction neuve, et de 12 % pour la construction sur bâtiments existants. Cela n’augure rien de bon pour 2014 ! Tout aussi alarmants sont les chiffres de la commercialisation, qui affichent sur les mêmes périodes de référence un recul de près de 22 %. Bref, tous les indicateurs sont préoccupants : 500 000 logements par an, ce n’est pas pour demain !
Nous l’avons dit et répété lors des débats précédents, cet échec a entraîné un ralentissement de l’offre, qui a provoqué une tension. Cette dégradation rapide de la production de logements depuis votre arrivée n’est pas seulement due à la crise – elle sévissait déjà sous le gouvernement précédent – mais aussi aux mauvais signaux que vous avez adressés aux investisseurs institutionnels et privés : réquisition des logements vacants, relèvement à 25 % du pourcentage de logements sociaux, annonce du blocage ou de l’encadrement des loyers – qui a très vite rendu attentistes les investisseurs – yo-yo fiscal de la TVA, sans compter, pour les entreprises du bâtiment, la refiscalisation des heures supplémentaires, et le manque de flexibilité dans la gestion des emplois…
Il faut ajouter à cela le renforcement des contraintes SRU, qui ont conduit dans l’impasse un certain nombre de villes, lesquelles ne devraient dès lors construire que du logement social, en quantités inompatibles avec l’état du foncier comme avec les documents d’urbanisme en vigueur. Et que dire des communes des parcs naturels régionaux, qui s’étaient attachées à un développement modéré, et qui se voient contraintes de se développer de façon massive et accélérée, en contradiction bien souvent avec les chartes qu’elles ont adoptées ? Face à une telle impasse sur la production de logements neufs, il faut agir – j’en conviens – sur la mise à disposition du parc privé existant, particulièrement en zone tendue.
Il faut éviter que l’inadaptation de la gouvernance des copropriétés n’entraîne une dégradation du parc existant ou un retard dans sa modernisation. Il faut prendre à bras-le-corps la situation des copropriétés dégradées et la lutte contre l’habitat indigne. Nous devons convenir qu’en son titre II, ce texte apporte des avancées crédibles sur le traitement de l’habitat indigne et des copropriétés dégradées.
Elles découlent en grande partie des propositions issues du rapport des sénateurs Dominique Braye, aujourd’hui président de l’ANAH, l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, et Claude Dilain. Nous sommes aussi satisfaits des acquis des travaux de la commission dans ce domaine, comme la création d’un fonds de prévoyance obligatoire par copropriété ou les mesures qui contraignent l’action des marchands de sommeil dans les copropriétés dégradées ou dans l’habitat indigne. Par contre, nous restons réservés sur la complexification que ne manquera pas d’apporter le fichier du registre d’immatriculation des copropriétés.
Nous ne sommes pas davantage opposés aux dispositions du titre III. Vous constatez, chers collègues, que nous savons discerner et appuyer les mesures qui vont dans le bon sens. Mais l’accord avec l’essentiel des dispositions de ces deux titres ne peut cependant nous conduire à soutenir ce projet de loi.