Intervention de Michèle Bonneton

Séance en hémicycle du 1er octobre 2013 à 15h00
Redonner des perspectives à l'économie réelle et à l'emploi industriel — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Bonneton :

La présente proposition de loi, que nous avons cosignée, a l’ambition d’ouvrir des perspectives nouvelles sur le rôle des entreprises dans notre société.

Le comportement d’un certain nombre de grands groupes a un impact direct sur la vie des salariés, mettant parfois en danger des régions entières et, plus globalement, l’économie de notre pays. Les aides de natures diverses se chiffrent par dizaines de milliards par an selon le récent rapport de Jean-Jack Queyranne : aides de l’État ou des collectivités locales – pour la construction de voies d’accès, la viabilisation de terrains, etc. – qui semblent trop souvent se perdre comme l’eau dans les sables.

En outre, la recherche de profits importants à court terme fait de certains de ces groupes de véritables machines à détruire de l’emploi.

Au cours des deux derniers quinquennats, notre pays n’a cessé de perdre des emplois industriels sans que cela suscite de réactions de la part des différents gouvernements. C’est le résultat d’une volonté revendiquée de désengagement de l’État, et nous payons aujourd’hui au prix fort cette politique du laissez-faire.

Les exemples récents de la sidérurgie ou de la filière aluminium sont là pour nous rappeler où nous a conduits le désintérêt pour l’emploi industriel. À cet égard, la commission d’enquête sur la sidérurgie, créée à l’initiative de notre collègue Alain Bocquet, présidée par Jean Grellier et dont j’étais vice-présidente, a démontré que le laissez-faire était un mauvais choix, constat partagé par l’ensemble des participants, toutes tendances confondues.

Dès mon élection à l’Assemblée nationale, j’ai été directement confrontée à cette situation, la direction du groupe Thales ayant décidé de se séparer de sa filière d’imagerie médicale située dans ma circonscription alors même qu’elle était tout à fait rentable et que 80 % de la production était exportée. La volonté de la nouvelle majorité a conduit à mettre fin à ce qui aurait représenté une triple catastrophe humaine, économique et industrielle. La participation de l’État au capital a permis d’agir. Et aujourd’hui, cette filière se porte très bien alors qu’il était question de la vendre voici moins d’un an.

Avec cette proposition de loi, nous allons mettre en place de nouveaux garde-fous. Elle s’inscrit dans le sens de l’intérêt général, tant économique que social, en établissant un équilibre entre des intérêts qui peuvent être contradictoires : celui des salariés, dont il faut reconnaître la place fondamentale dans la production et la valorisation de l’entreprise ; celui des investisseurs, auxquels est assuré un cadre sécurisé pour le capital des entreprises, et qui doivent comprendre que la rémunération du capital à court terme ne doit pas se faire au détriment de l’investissement et de l’emploi.

Deux grands axes structurent le dispositif.

Le premier consiste à obliger l’entreprise souhaitant vendre ou cesser son activité à rechercher sérieusement un repreneur et à permettre aux salariés d’être informés et de participer activement à cette recherche ou de reprendre l’entreprise sous forme de coopérative. C’est une avancée importante, dont il faudra rapidement faire le bilan pour mesurer son effectivité et apporter d’éventuelles corrections. Une sanction financière pourra être prononcée par le tribunal de commerce à l’encontre des entreprises qui refuseraient une offre de reprise sérieuse ne portant atteinte ni à l’activité, ni à l’emploi.

Le second axe vise, d’une part, à encourager l’actionnariat à long terme – pour stabiliser le capital, le vote double sera réservé aux actionnaires présents depuis plus de deux ans dans le capital de l’entreprise – , et d’autre part à mieux protéger les entreprises contre les OPA – le texte prévoit la consultation des salariés sur le bien-fondé de l’opération et propose un dispositif de protection contre les OPA hostiles.

Le dogme européen de la libre concurrence sans contrôle n’est pas adapté à la réalité de l’économie et représente un véritable frein à une politique industrielle. La présente proposition de loi refuse cette fatalité et constitue un premier pas vers une régulation à la française du fonctionnement des entreprises.

Notre objectif est bien de permettre au pouvoir politique de retrouver une crédibilité et une capacité d’action dans le domaine économique. Le groupe écologiste votera donc cette proposition de loi.

Pour finir, j’aimerais dire à Mme Grommerch que, sans aide publique, je doute fort que beaucoup de candidats se précipitent pour reprendre la centrale de Fessenheim

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